C. DES GARANTIES PROPORTIONNÉES AUX TECHNIQUES UTILISÉES

Le projet de loi prévoit un cadre général comprenant des finalités et un mode d'autorisation et de contrôle uniques pour l'ensemble des techniques de renseignement (cf. l'article 1 er ). En revanche, la nécessité de préserver un bon équilibre entre efficacité et protection de la vie privée a conduit le Gouvernement, puis l'Assemblée nationale, à prévoir des modalités de mise en oeuvre plus strictes, d'une part, pour certaines techniques en particulier et, d'autre part, dès lors que les membres des « professions protégées » sont concernés par l'utilisation de ces techniques.

1. Des garanties supplémentaires prévues pour certaines techniques

Ainsi, en premier lieu, le dispositif de mise en oeuvre sur les réseaux d'un dispositif technique conçu pour détecter des menaces terroristes (article L. 851-4) a été placé par l'Assemblée nationale sous un contrôle étroit de la CNCTR qui donnera un avis sur le dispositif technique lui-même ainsi que sur les critères mis en oeuvre pour « filtrer » les données collectées. Elle sera également informée de toutes modifications apportées à ce dispositif ou à ces critères. En outre, il convient de souligner que, selon les explications fournies à votre rapporteur lors des auditions qu'il a menées, les services n'auront pas directement accès au résultat de la mise en oeuvre de l'algorithme (c'est-à-dire au produit du filtrage). Ce n'est que dans le cas où les données recueillies après autorisation du Premier ministre sembleront pertinentes (notamment qu'elles ne sont pas trop nombreuses, révélant ainsi l'inadéquation des critères retenus) et qu'elles révèleront une menace, qu'elles leur seront rendues accessibles. Une deuxième autorisation du Premier ministre, après avis de la CNCTR, sera alors requise pour que les services puissent exploiter ces données. De plus, l'Assemblée nationale a prévu que ce dispositif ne serait mis en oeuvre qu'à titre expérimental et pour une durée de trois ans à l'issue desquels un rapport d'évaluation devra être transmis au Parlement (article 15 bis ). En l'état, votre rapporteur estime ainsi que ce dispositif est équilibré.

En second lieu, l'Assemblée nationale a prévu que les données issues des interceptions effectuées par les IMSI catcher devront être centralisées auprès du GIC. Celui-ci pourra ainsi globalement constater le bon usage de cette technique et détruire les données qui ne seront pas en rapport avec les autorisations de mise en oeuvre (c'est-à-dire les données de tous les téléphones portables se trouvant dans le rayon d'action de l'appareil sans avoir aucun lien avec les personnes surveillées) dans un délai de 90 jours.

En troisième lieu, l'encadrement des mesures les plus intrusives, prévues à l'article 3 (sonorisation, captation, d'image et intrusions informatiques) sera plus strict que celui des autres techniques de recueil de renseignement puisqu'elles ne pourront être utilisées qu'à titre subsidiaire et que la durée d'autorisation sera plus brève (deux mois voire trente jours en cas d'intrusion dans un véhicule ou un lieu privé). En outre, alors que, en cas d'urgence opérationnelle, certaines techniques de renseignement faisant intervenir les communications électroniques peuvent, dans la version issue de la commission des lois de l'Assemblée nationale, être mises en oeuvre directement par les agents des services sous réserve de validation a posteriori par le Premier ministre, cela ne pourra pas être le cas pour les techniques particulièrement intrusives de l'article 3. La procédure d'urgence absolue, valable pour toutes les autres techniques et qui prévoit une autorisation du Premier ministre sans avis préalable de la CNCTR, ne pourra pas non plus s'appliquer, l'avis de la CNCTR devant être recueilli au préalable par tout moyen.

2. Des garanties supplémentaires prévues pour certaines professions

Le projet de loi prévoit également des conditions de mise en oeuvre plus strictes pour l'ensemble des techniques de recueil de renseignement dès lors qu'elles sont mises en oeuvre à l'encontre de membres des professions traditionnellement protégées par le code de procédure pénale (magistrats, avocats, parlementaires et journalistes), la préservation de leur indépendance étant considérée comme indispensable au bon fonctionnement de la démocratie. D'une part en effet, ni la procédure d'urgence absolue prévue par le Gouvernement, et qui prévoit que l'autorisation est donnée sans avis préalable de la CNCTR, ni la procédure d'urgence opérationnelle (sans autorisation préalable du Premier ministre), introduite par l'Assemblée nationale pour l'IMSI Catcher et pour l'installation d'une balise, ne seront applicables à ces professions (article L. 821-5 et article L. 851-9-1). En outre (article L. 821-7 nouveau introduit par les députés), toute autorisation de mise en oeuvre d'une technique de renseignement à l'encontre de ces personnes, ou qui concerne leurs véhicules, bureaux ou domiciles, devra résulter d'une autorisation motivée du Premier ministre prise après avis de la commission réunie. Les retranscriptions des données collectées seront en outre transmises automatiquement à la CNCTR qui veille à la proportionnalité de l'atteinte au secret professionnel des personnes concernées.

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