Avis n° 166 (2015-2016) de MM. André TRILLARD et Jeanny LORGEOUX , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 19 novembre 2015

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N° 166

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME V

DÉFENSE :
ENVIRONNEMENT ET PROSPECTIVE
DE LA POLITIQUE DE DÉFENSE

Par MM. André TRILLARD et Jeanny LORGEOUX,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Emorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Jean-Vincent Placé, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 164 à 170 (2015-2016)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS POUR AVIS

1.- La demande de crédits inscrite dans le PLF 2016 pour le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » est de 1,28 milliard d'euros , soit 3,2 % des CP prévus pour l'ensemble de la mission « Défense » l'année prochaine.

Par rapport à la prévision inscrite en LFI 2015, la dotation du programme marque ainsi une diminution de 3,7 % en CP (- 49 millions d'euros ). Cette évolution est liée, pour l'essentiel, à la mobilisation , en faveur des opérations d'armement retracées par le programme 146, des économies engendrées par l'évolution favorable des indices économiques depuis décembre 2013, conformément à la LPM actualisée par la loi du 28 juillet 2015.

Ces crédits devront couvrir les dépenses obligatoires liées au report de charges du programme issu de l'exécution budgétaire 2015, estimé à 128 millions d'euros , niveau en baisse ( - 27 % ) par rapport au report de charges de l'exécution 2014 sur la gestion 2015. Il s'agit de 4,4 % du report de charges global prévu pour la mission « Défense ».

Conformément aux conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 et aux orientations de la LPM confirmées par la loi d'actualisation du 28 juillet 2015, les priorités soutenues par le programme sont la réaffirmation du rôle central du renseignement , la consolidation des efforts dans le domaine de la recherche de défense , et le maintien de la capacité d'influence de la France.

2.- En ce qui concerne le renseignement (action 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France »), vos rapporteurs constatent une diminution de 12,7 % en CP par rapport à la LFI 2015 (hors dépenses de personnel). Cette diminution, plus marquée pour le renseignement extérieur que pour le renseignement de sécurité de défense, est liée principalement à l'effet cyclique des dépenses d'équipement et à une mesure de périmètre affectant les dépenses de fonctionnement. Cette évolution peut paraître paradoxale par rapport aux objectifs affichés. Toutefois, on ne saurait en tirer de trop hâtives conclusions sur l'effort consacré par le ministère de la défense au profit de la fonction « connaissance et anticipation », car les effectifs affectés aux services spécialisés de renseignement sont renforcés , comme les crédits afférents au titre 2 du programme 212, et certaines dotations du programme 146, notamment dans le domaine spatial, progressent .

C'est en tenant compte de cet ensemble , qui n'est pas simple à reconstituer à partir d'actions et sous-actions relevant de programmes différents au sein de la mission « Défense », mais aussi des moyens budgétaires affectés engagés et à venir, qu'il sera possible de porter une appréciation et de mesurer véritablement l'importance de cet effort - inscrit dans la durée de la LPM et qui devra sans doute être prolongé au-delà, compte-tenu de l'évolution des menaces, tant dans leur ampleur que dans leurs modes opératoires .

3.- En ce qui concerne la recherche de défense (action 7 « Prospective de défense »), vos rapporteurs pour avis relèvent en particulier que les CP alloués par le PLF 2016 aux études amont sont fixés à 706,5 millions d'euros en CP, soit 55 % de l'ensemble des CP prévus pour le programme 144. Ce niveau de crédits marque, par rapport à la LFI 2015, une diminution de 4,5 % (- 32 millions d'euros), mais ne remet pas en cause l'objectif fixé en matière d'études amont par la LPM - soit 730 millions d'euros en moyenne annuelle sur la période 2014-2019 ; vos rapporteurs resteront vigilants quant au respect de cet objectif.

La prévision pour l' analyse stratégique est de 6 millions d'euros en CP , montant quasi stable (- 1 %) par rapport à 2015, mais de 9,7 millions d'euros en AE , soit une augmentation de 59 % (+ 3,6 millions d'euros). Il s'agit d'une conséquence de la réforme du dispositif ministériel de soutien à la recherche stratégique actuellement mise en oeuvre - création de contrats-cadres, augmentation de la part des « observatoires », et développement de nouvelles relations avec le champ universitaire - qui tend à donner plus de prévisibilité et donc à améliorer le pilotage des études.

Le budget total consacré à la recherche et développement (R&D) de la défense sera porté à 3,78 milliards d'euros l'année prochaine, soit une augmentation de près de 10 % en deux ans et 25 % en trois ans , et un niveau d'effort, en la matière, qui n'avait pas été atteint depuis 2009. Vos rapporteurs pour avis s'en réjouissent : malgré les contraintes pesant sur ses finances publiques, la France est le pays d'Europe qui consacre le plus gros effort budgétaire à sa R&D de défense .

Dans ce contexte, vos rapporteurs expriment leur préoccupation pour les difficultés que traverse actuellement l'ONERA - problèmes de gouvernance, de ressources et d'infrastructures -, que ne suffisent pas à régler les efforts budgétaires consentis au bénéfice de l'établissement en 2015 et la subvention de 105 millions d'euros prévue pour 2016. La situation appelle des solutions structurelles, mais aussi des réponses d'urgence eu égard, notamment, aux travaux requis par la soufflerie SM1A de Modane et l'immeuble de Châtillon . En vue de traiter ces urgences, vos rapporteurs sont à l'initiative d'un amendement de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées visant à majorer de 15 millions d'euros la subvention prévue pour l'ONERA par le PLF 2016.

4.- En ce qui concerne la capacité d'influence internationale de la France (action 8 « Relations internationales et diplomatie de défense »), le programme 144 est marqué par la création, en janvier 2015, de la direction générale des relations internationales et de la stratégie ( DGRIS ). Celle-ci, née de la volonté d'une rationalisation de la fonction « relations internationales » du ministère de la défense, dispose de 213 agents ; sa création permet l' économie de 57 ETPT sur le périmètre des relations internationales de défense. Vos rapporteurs pour avis sont heureux que sa mise en place se soit bien déroulée, malgré un calendrier contraint, dans le contexte de réformes multiples au sein du ministère de la défense et de l'emménagement sur le site de Balard.

Le PLF 2016 prévoit pour les actions de coopération et de diplomatie de défense pilotées par le DGRIS un budget de près de 40,8 millions d'euros , dont 27,3 millions d'euros ( 67 % ) consacrés à l' aide versée au gouvernement de la République de Djibouti, au titre de l'implantation de forces permanentes françaises sur le territoire de celle-ci.

5.- Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption de l'amendement précité visant à majorer la subvention de l'ONERA, vos rapporteurs pour avis émettent une appréciation positive sur les crédits inscrits dans le PLF 2016 pour le programme 144.

À l'issue de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », au sein de la mission « Défense », retrace les crédits, hors dépenses de personnel depuis 2015 1 ( * ) , qui sont destinés à financer des actions essentielles pour la fonction « connaissance et anticipation » de notre outil de défense :

1°- la prospective de défense , recherche technologique et analyse stratégique ;

2°- les deux services de renseignement du ministère de la défense à vocation générale : la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), pour le renseignement extérieur, et la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD), pour le renseignement de sécurité de défense ;

3°- l'action internationale du ministère , coopération et diplomatie de défense, qui se trouvent désormais menées par la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) - structure créée, en janvier 2015 2 ( * ) , à partir de la fusion de la délégation aux affaires stratégiques (DAS) et d'éléments transférés de l'état-major des armées (EMA) et de la direction générale de l'armement (DGA).

La nomenclature des trois actions dont se compose le programme recoupe ces thèmes. Elle se présente comme suit, sans changement prévu par le projet de loi de finances (PLF) pour 2016 par rapport à 2015 - et suivant une numérotation héritée de simplifications antérieurement apportées à l'architecture budgétaire :

- action 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » . Cette action est divisée en deux sous-actions retraçant, l'une, les crédits de la DGSE (renseignement extérieur) et, l'autre, les crédits de la DPSD (renseignement de sécurité de défense) ;

- action 7 « Prospective de défense » . Cette action est décomposée en quatre sous-actions visant, respectivement, l'analyse stratégique, la prospective des systèmes de forces (études opérationnelles et technico-opérationnelles), les études amont, enfin les dépenses de soutien et subventions ;

- action 8 « Relations internationales et diplomatie de défense » . Cette action constitue le support budgétaire de la DGRIS précitée. Elle est dépourvue de sous-action 3 ( * ) .

Ce programme est placé sous la responsabilité du directeur général des relations internationales et de la stratégie du ministère de la défense, actuellement M. Philippe Errera 4 ( * ) . Cependant, la gestion opérationnelle des actions est confiée à la DGSE et à la DSPD, chacune en ce qui la concerne, s'agissant du renseignement ; à la DGRIS pour l'action internationale et l'analyse stratégique ; à l'EMA dans le domaine des études opérationnelles et technico-opérationnelles ; enfin, à la DGA pour les études amont, ainsi que pour les dépenses de soutien et les subventions en cause.

L'organisation opérationnelle du programme 144

Cinq budgets opérationnels (BOP) sont associés au programme 144 :

- un BOP pour la DGSE (correspondant à la sous-action 3-1 « Renseignement extérieur ») et un pour la DPSD (sous-action 3-2 « Renseignement de sécurité de défense ») ;

- un BOP pour l' EMA , visant les études à caractère opérationnel et technico-opérationnel (sous-action 7-2 « Prospective des systèmes de forces ») ;

- un BOP pour la DGA , destiné à financer les études amont (sous-action 7-3) et les dépenses de soutien et subventions (sous-action 7-4) ;

- enfin, un BOP pour la DGRIS regroupant, outre les crédits de relations internationales et diplomatie de défense (action 8), ceux de l'analyse stratégique (sous-action 7-1).

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Conformément aux conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 et aux orientations de la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2014 à 2019 confirmées par la loi d'actualisation du 28 juillet 2015, les priorités soutenues par le canal du programme 144 sont la réaffirmation du rôle central du renseignement, la consolidation des efforts dans le domaine de la recherche de défense, et le maintien de la capacité d'influence de la France.

I. ANALYSE GÉNÉRALE DES CRÉDITS (1,28 MILLIARD D'EUROS)

Les crédits inscrits dans le PLF 2016 au titre du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » atteignent près de 1,283 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,285 milliard d'euros en crédits de paiement (CP) - soit, respectivement, 2,8 % des AE et 3,2 % des CP prévus pour l'ensemble de la mission « Défense » l'année prochaine (45,383 milliards d'euros en AE et 39,585 milliards d'euros en CP).

A. LA SITUATION BUDGÉTAIRE

1. Des crédits globalement en baisse (- 3,7 % en CP)

Les crédits prévus par le PLF pour le programme 144 s'avèrent en diminution par rapport aux prévisions de la LFI 2015 , à hauteur de 5 % pour ce qui concerne les AE (- 67,5 millions d'euros) et de 3,7 % pour ce qui concerne les CP ( - 49,1 millions d'euros ) Ils ne seront que modestement abondés par voie de fonds de concours (FDC) et d'attribution de produits (ADP) - à hauteur de 87 600 euros en AE et CP.

Évolution des crédits (hors FDC et AP) du programme 144

(en millions d'euros)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution 2015-2016

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1 350,14

1 333,92

1 282,69

1 284,77

- 5,00 %

- 3,68 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Cette baisse des crédits est liée, pour l'essentiel, à la mobilisation, en faveur des opérations d'armement retracées par le programme 146 de la mission « Défense », des économies engendrées par l'évolution favorable des indices économiques depuis décembre 2013 (« coût des facteurs »), conformément à la LPM actualisée par la loi du 28 juillet 2015 5 ( * ) .

2. Un report de charges prévu à hauteur de 128 millions d'euros (soit - 27 %)

Les crédits du programme pour 2016 devront couvrir les dépenses obligatoires liées au report de charges issu de l'exécution budgétaire 2015. Ce report, sous réserve que l'ensemble des crédits prévus au bénéfice du programme en 2015 lui soient bien conservés lors des arbitrages de fin de gestion, est attendu à hauteur de 128 millions d'euros 6 ( * ) , soit 4,4 % du report de charges prévisionnel de la mission « Défense » (2,9 milliards d'euros). Il s'agit d'une diminution de 27 % par rapport au niveau du report de la gestion 2014 sur l'exercice 2015 (175,9 millions d'euros), qui permet de retrouver un niveau proche de celui qui était constaté fin 2013 (137,4 millions d'euros).

Évolution du report de charges du programme 144

(en millions d'euros)

Composantes du report de charges

Fin 2011

Fin 2012

Fin 2013

Fin 2014

Fin 2015

(prévision)

Dettes fournisseurs

79,1

66,3

51,0

55,9

-*

Charges à payer

110,8

99 ,3

85,7

115,3

-*

Avances dues

-

0,2

0,7

4,7

-*

Total

(Évolution, en %)

189,9

165,8

(- 13 %)

137,4

(- 17 %)

175,9

(+ 28 %)

128,0

(- 27 %)

Report de charge de la mission « Défense »

(Part du programme 144)

2 734,0

(6,9 %)

3 159,0

(5,2 %)

3 452,0

(3,9 %)

3 498,0

(5,0 %)

2 911,0

(4,4 %)

* : Il n'est pas possible de prévoir par anticipation la structure du report de charges, laquelle dépend, au jour près, des dates comptables d'enregistrement des actes de paiement.

Source : réponses au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF et DGA

Le Gouvernement précise 7 ( * ) que le report de charges du programme, de l'exercice 2016 sur l'exercice 2017, devrait rester au même niveau.

B. PRÉSENTATION PAR NATURE DE DÉPENSES

Évolution des crédits (hors FDC et AP) du programme 144

(en millions d'euros)

AE

CP

Évolution 2015-2016

LFI 2015

PLF 2016

LFI 2015

PLF 2016

AE

CP

Titre 3 Dépenses de fonctionnement

1 185,88

1 111,85

1 165,75

1 125,19

- 6,24 %

- 3,48 %

Titre 5 Dépenses d'investissement

114,68

105,45

118,59

99,74

- 8,04 %

- 15,89 %

Titre 6 Dépenses d'intervention

49,58

56,63

49,58

56,63

+ 14,24 %

+ 14,24 %

Titre 7 Dépenses d'opération financière

-

8,75

-

3,20

s.o.

s.o.

Total

1 350,14

1 282,69

1 333,92

1 284,77

- 5,00 %

- 3,68 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

1. Les dépenses de fonctionnement (1,12 milliard d'euros en CP)

La prévision pour 2016 des dépenses de fonctionnement financées par le programme 144 (crédits de titre 3), par rapport à la LFI pour 2015, constitue une diminution de 3,5 % des CP (- 40 millions d'euros) .

Cette évolution reflète, pour l'essentiel, la réduction des besoins au titre des études amont , l'année prochaine (- 32 millions d'euros). Pour le reste, elle traduit une baisse des crédits de titre 3 prévus au titre du renseignement (- 14 millions d'euros), que compense partiellement, au plan comptable, la hausse, par rapport à la LFI 2015, de la subvention prévue pour l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA ; + 7 millions d'euros). Pour le reste, cette évolution montre une diminution du montant des crédits consacrés au renseignement de sécurité (action 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France »), plus particulièrement le soutien des structures, et l'effet de mesures de périmètre notamment le transfert au programme 178 des crédits de l'indemnité compensatrice SNCF au profit des effectifs militaires gérés par la DGSE et la DPSD. En revanche, les dépenses de déplacement, de frais de missions et de télécommunication progressent en raison de l'augmentation des effectifs

2. Les dépenses d'investissement (99 millions d'euros en CP)

Les dépenses d'investissement (crédits de titre 5) du programme sont prévues pour 2016, en CP , en diminution de 15,9 % par rapport à 2015 (- 19 millions d'euros).

Cette orientation résulte du cycle des investissements techniques engagés par la DGSE , dont l'impact en paiements sera moindre l'année prochaine que cette année. Les dépenses d'investissement de la DGSE ont en effet requis des niveaux exceptionnels d'AE et de CP en 2014 et 2015, dans le cadre de la réalisation d'infrastructures et de l'acquisition de moyens techniques et opérationnels . Cette évolution tient compte du cycle des investissements techniques engagés par la DGSE, dont l'impact sur les paiements, en 2016, 96,953 millions d'euros), sera en effet moindre qu'en 2015 (116,509 millions d'euros). A l'inverse, mais pour des montants bien moindre les crédits d'équipements de la DSPD progressent (2,08 millions d'euros en 2015 et 2, 787 millions d'euros en 2016). La DGSE maintient ses objectifs pour améliorer ses capacités de prévision des menaces et pour fournir aux autorités le meilleur niveau possible d'aide à la décision, mais à un rythme cohérent avec les exercices précédents, 2015 ayant constitué un pic 8 ( * ) en matière d'autorisations d'engagement : 101,749 millions d'euros sont inscrits contre 112 6000 en 2016 (- 9,6%). Inversement, les dépenses d'investissement de la DPSD progressent de façon significative en AE de 2,080 millions d'euros en 2015 à 3,705 en 2016 (+78%).

Le budget 2016 marque donc une consolidation des investissements en matière d'acquisition des capacités techniques d'analyse et d'exploitation du renseignement dans un contexte marqué par l'accélération des cycles technologiques et de l'accessibilité à ces technologies qui exposent les services à la pression croissante du développement technologique de moyens, toujours plus rapides, plus diversifiés et plus sophistiqués, utilisés par les cibles.

3. Les dépenses d'intervention (56 millions d'euros en CP)

Les dépenses d'intervention (crédits de titre 6) du programme sont marquées dans la prévision pour 2016 par une hausse de 14,2 % par rapport à 2015 (+ 7 millions d'euros).

Cette hausse est liée, pour le principal, à l'évolution de la contribution annuelle versée au gouvernement de la République de Djibouti , en compensation de l'implantation des forces françaises sur son territoire. Cette évolution requiert en effet une mesure de périmètre (augmentation pérenne) du programme 144, à compter de l'année prochaine, à hauteur de + 4,8 millions d'euros.

4. Les dépenses d'opération financière (3 millions d'euros en CP)

Le programme couvrira en 2016 des dépenses d'opération financière (crédits de titre 7), à hauteur de 3 millions en CP. Elles correspondent aux dotations en fonds propres d'écoles qui relèvent de la tutelle de la DGA, visant à assurer le financement de travaux et l'engagement financier du ministère de la défense dans le cadre du contrat de plan État-région (CPER) Midi-Pyrénées 2015-2020 .

C. PRÉSENTATION PAR ACTION

Évolution des crédits (hors FDC et AP) du programme 144

(en millions d'euros)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

2015-2016

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 3 : Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France

280,70

268,48

249,51

234,31

- 11,11 %

- 12,73 %

Sous-action 3-1 : Renseignement extérieur

270,00

257,78

237,26

224,26

- 12,13 %

- 13,00 %

Sous-action 3-2 : Renseignement de sécurité de défense

10,69

10,69

12,25

10,05

+ 14,56 %

- 6,01 %

Action 7 : Prospective de défense

1 034,03

1 030,03

992,42

1 009,70

- 4,02 %

- 1,97 %

Sous-action 7-1 : Analyse stratégique

6,13

6,13

9,76

6,06

+ 59,31 %

- 1,08 %

Sous-action 7-2 : Prospective des systèmes de forces

20,81

20,81

20,96

20,96

+ 0,72 %

+ 0,72 %

Sous-action 7-3 : Études amont

742,91

738,91

680,00

706,53

- 8,47 %

- 4,38 %

Sous-action 7-4 : Soutien et subventions

264,19

264,19

281,70

276,15

+ 6,63 %

+ 4,53 %

Action 8 : Relations internationales

35,41

35,41

40,76

40,76

+ 15,12 %

+ 15,12 %

Total

1 350,14

1 333,92

1 282,69

1 284,77

- 5,00 %

- 3,68 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

1. Le renseignement (234 millions d'euros en CP)

En ce qui concerne le renseignement ( action 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France »), les CP du programme 144, prévus à hauteur de 234,3 millions d'euros pour 2016, marquent une diminution de 12,7 % ( - 34 millions d'euros ) par rapport à la LFI 2015. Cette diminution résulte des économies réalisées sur le fonctionnement des services concernée - la DGSE et la DPSD - et d'un ralentissement des investissements, après le pic de l'année 2015.

On notera qu'en revanche, conformément à la LPM actualisée par la loi du 28 juillet 2015, les crédits de masse salariale (titre 2) prévus pour le renseignement en 2016, inscrits dans le programme 212 de la mission « Défense », progressent de 8 % par rapport à 2015 : ils atteindront 497,6 millions d'euros, le plafond d'emplois en la matière étant porté à 6 609 équivalents temps plein travaillé (ETPT), contre 6 403 pour 2015.

2. La prospective de défense (1 milliard d'euros en CP)

En ce qui concerne l'effort de prospective de défense (action 7), qui concentre plus des trois quarts des crédits du programme avec une dotation d' un milliard d'euros , l'évolution prévue pour 2016, soit une baisse de l'ordre de 2 % en CP ( - 20 millions d'euros ) par rapport à 2015, s'explique par la réduction des besoins des études amont (- 32 millions d'euros ; la dotation de la sous-action 7-3 correspondante diminue, en CP, de près de 4,5 % par rapport à la LFI 2015). Il convient toutefois de signaler que cette prévision pour l'année prochaine ne remet pas en cause l'objectif fixé en la matière par la LPM 9 ( * ) - qui prévoit, en faveur des études amont, une dotation de 730 millions d'euros en moyenne annuelle sur la période 2014-2019.

Cette réduction est compensée partiellement, au plan comptable, par l' accroissement des crédits de soutien et de subventions (action 7-4), qui enregistre dans le PLF 2016 une hausse de 6,6 % ( + 12 millions d'euros ) par rapport à la LFI 2015. Cette évolution tient à la hausse de la subvention prévue pour l' ONERA (+ 7 millions d'euros), à une mesure de complément du montant des charges patronales (+ 1,8 million d'euros) de la subvention versée au titre de la masse salariale des élèves de l' École Polytechnique (hors compte d'affectation spéciale « Pensions »), et aux dotations en fonds propres d'écoles placées sous la tutelle de la DGA (3,2 millions d'euros), dans le cadre du CPER Midi-Pyrénées 2015-2020 .

3. L'influence internationale de la France (40 millions d'euros en CP)

En ce qui concerne l' influence internationale de la France (action 8 « Relations internationales »), les crédits du programme, soit 40,7 millions d'euros dans le PLF 2016, connaissent une hausse significative par rapport à 2015 ( + 5 millions d'euros, soit + 15 % ), essentiellement liée à la contribution versée au gouvernement de la République de Djibouti .

II. PRÉSENTATION DÉTAILLÉE DES ACTIONS

A. UNE CONSOLIDATION DES EFFORTS EN FAVEUR DU RENSEIGNEMENT DE SECURITÉ

Si une pause peut-être observée en 2016 dans la progression des moyens affectés aux services spécialisés de renseignement dépendant du ministère de la défense au titre du programme 144, en raison de mesures de périmètres (voir supra p.13), d'économies de gestion et des cycles d'investissements techniques de la DGSE, elle doit être mise en regard des efforts exceptionnels réalisés en 2014 et 2015 notamment en matière d' investissements, de l'effort confirmé et renouvelé depuis la loi de programmation militaire (2014-2019) s'agissant des renforcements en personnel, désormais inscrits au programme 212 de la mission « défense » et du travail réalisé au cours de l'année 2015 sur le plan législatif pour doter les services d'un cadre juridique clair pour la surveillance des communications électroniques tant sur le territoire national qu'à l'étranger et l'utilisation de certaines techniques de renseignement 10 ( * ) .

1. Des moyens consolidés après une augmentation importante au cours des exercices précédents
a) Une diminution des moyens de fonctionnement et d'investissement dans le projet de loi de finances pour 2016

L'action n° 3 « Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France » regroupe les activités de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) , comptabilisées dans la sous-action « Renseignement extérieur » et de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) , figurant pour leur part dans la sous-action « Renseignement de sécurité de défense ». Ces crédits peuvent être abondés en gestion par des crédits inscrits au programme 129 « direction de l'action du gouvernement » au titre des projets interministériels concourant à la défense et à la sécurité nationale d'une part, et des crédits destinés aux fonds spéciaux.

Par ailleurs, les crédits de la direction du renseignement militaire (DRM ), 36,86 millions d'euros en 2016 et 36,31 millions d'euros en CP (respectivement 37,67 et 36,75 millions d'euros en 2015) relèvent en revanche du programme 178 « Préparation et emploi des forces » (action 01-11 « Renseignement d'intérêt militaire »), du fait de la vocation opérationnelle du renseignement d'intérêt militaire, notamment sur les théâtres d'opérations extérieurs. Les rémunérations de ses personnels du programme 212 « soutien de la politique de la défense » (action 54-06) pour un montant de 136,93 millions d'euros en 2016 (127,53 millions d'euros en 2015).

Pour disposer d'une vision globale de l'effort consenti par le ministère de la défense au profit de la fonction « connaissance et anticipation », il faudrait ajouter les crédits inscrits dans les actions et sous-actions des programmes 178 et 212 au profit des unités militaires constituant le service « action » de la DGSE, ainsi que tout ou partie des crédits inscrits au programme 146 au titre des sous-actions « renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître » concernant les équipements du programme spatial optique MUSIS (sous-action 07.40 dotée de 133 millions d'euros en CP, 113,6 millions en 2015), ceux du programme spatial de renseignement électromagnétique CERES (sous-action 07.42 dotée de 200,5 millions d'euros en AE et 93 millions d'euros en CP, 175 en AE en 2015) et dans une acception élargie à la fonction « connaissance et anticipation » tout ou partie de ceux de la sous-action 07.39 « autres opérations » dotée de 572 millions d'euros en AE et 489,5 en CP (respectivement 1 073,42 et 241,14 millions d'euros en 2015) et de la sous-action 07.41 « déploiement des services de communication et architecture des réseaux de télécommunications sécurisées DESCARTES dotée de 150 millions d'euros en AE, 30,67 en CP (121,2 en AE en 2015).

L'action 3 représente 19,5 % en autorisations d'engagement et 18,2 % en crédits de paiement des crédits du programme 144 (hors titre 2).

Crédits du renseignement (action 3) hors titre 2

(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Renseignement extérieur

237 260 075

224 260 075

Renseignement de sécurité de défense

12 250 696

10 050 695

Total

249 510 771

234 310 770

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

b) Un renforcement des effectifs qui se traduit par une augmentation significative des crédits de Titre 2

Le plafond d'emploi des services de renseignements s'agissant du personnel travaillant pour le programme 144 est établi à 6609 ETPT en 2016 (5491 pour la DGSE et 1148 pour la DPSD).

Le montant des crédits de titre 2 inscrits au programme 212 est de 497,584  millions d'euros, dont 412,890 pour la DGSE et 84,694 pour la DPSD contre 472,224 en 2015, 402,968  pour la DGSE et 69,256 pour la DPSD.

c) Le contexte d'une menace accrue qui justifie pleinement les choix budgétaires effectués

Les attentats survenus sur le territoire national depuis le 11 janvier 2015 ont démontré le continuum entre l'action d'individus, souvent de nationalité française, opérant tantôt à l'extérieur au sein de groupes terroristes où ils reçoivent formation et instructions, tantôt sur le territoire national pour l'organisation d'actions meurtrières ou de soutien à la réalisation desdites actions, qu'il s'agisse de recruter, de préparer ou d'apporter une logistique. Ceci est particulièrement démontré s'agissant des groupes affiliés à Daech.

Outre la mise en place de l'opération Sentinelle de déploiement des forces armées en dispositif de protection, et la « bataille de l'avant » engagée contre ces groupes en Irak, en Syrie et dans la Bande sahélo-saharienne, la menace d'attentats terroristes et son évolution ont conduit à un effort significatif de mutualisation et de coordination au sein des services spécialisés de renseignement, mais aussi à un renforcement des moyens humains qui leurs sont affectés. C'est ainsi que le Premier ministre a annoncé dès le 21 janvier 2015 un renforcement des effectifs des services de 250 agents, dont 185 pour la DGSE et 65 pour la DPSD et que l'actualisation de la loi de programmation militaire en juillet 2015 a conduit à un nouveau renforcement de 650 agents. Ces 900 créations de postes s'ajoutent aux 300 prévues par la loi de programmation militaire initiale.

S'ajoutent à cette menace terroriste, qui requiert une vigilance accrue en raison de la sensibilité de l'opinion publique, un surcroît des activités d'espionnage à l'encontre de nos intérêts politiques ou économiques, plus ou moins en lien avec la dégradation de nos relations avec la Russie à la suite de la crise ukrainienne, un haut niveau des actions d'ingérence économique dans un monde où la compétition économique est intense et une multiplication du nombre et de l'intensité des attaques dans le cyberespace, comme celle qui a frappé en avril la chaîne francophone internationale TV5 Monde.

Face à une menace qui s'est amplifiée, l'appréciation du contexte stratégique par les autorités françaises doit s'appuyer sur une collecte et une analyse pertinentes du renseignement. La priorité à la fonction stratégique « connaissance et anticipation » , réaffirmée dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, vise précisément le maintien d'une capacité d'appréciation autonome des situations, indispensable à une prise de décision libre et souveraine.

Dans un tel contexte il est logique et nécessaire que le renseignement voie son rôle central réaffirmé et que le service en charge du renseignement extérieur, la DGSE, voie logiquement, comme l'an passé, ses ressources humaines augmenter et ses moyens consolidés à un niveau cohérent avec ses activités opérationnelles et ses objectifs.

Votre commission est convaincue que ce service est un précieux outil de réduction des incertitudes qui doit mettre les responsables politiques en situation d'éviter d'être exposés à des surprises stratégiques, mais aussi en raison de l'extrême fongibilité des théâtres d'opération des groupes terroristes, un outil de détection des menaces et de suivi des individus susceptibles de les réaliser en étroite coordination avec les services responsables de la sécurité intérieure.

De même est-il appréciable qu'après une période de déflation d'effectifs, la DPSD fasse l'objet d'un renforcement en personnels et d'un effort en termes d'équipement. Ce service de renseignement exerce une mission de contre-ingérence au profit du ministère de la défense et des entreprises de défense. Il intervient sur le territoire national et sur les théâtres extérieurs où les armées sont engagées en protégeant les sites sensibles, mais aussi dans le domaine de la sécurité économique par des actions de sensibilisation et d'audit.

2. Les crédits de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)

La DGSE est un service de l'État, placé sous l'autorité directe du ministre de la Défense. Ses activités, définies par l'autorité politique, ont pour objectif exclusif la protection des intérêts français. Leur réalisation concourt, notamment, à la protection des citoyens français partout dans le monde. Pour cette mission spécifique, elle oeuvre en partenariat étroit avec l'ensemble des services de sécurité nationaux. Son champ d'action se situe principalement hors des frontières.

La DGSE présente plusieurs particularités. Elle est tout à la fois :

- un service de renseignement extérieur, qui recherche à l'étranger des informations confidentielles, intéressant la sécurité nationale. En communiquant aux autorités les éléments ainsi recueillis, elle participe à leur prise de décision. La DGSE est naturellement présente dans les zones de crise et celles où les intérêts français sont en jeu ;

- un service spécial, qui permet le maintien d'une présence, là où les canaux diplomatiques ne peuvent plus être utilisés. Le secret des moyens employés et des objectifs poursuivis garantit également la propre sécurité des agents ;

- un service intégré qui, à la différence de la plupart des services de renseignement occidentaux, maîtrise la totalité des modes de recueil du renseignement : sources humaines, capteurs techniques (interceptions électromagnétiques et imagerie satellitaire), moyens opérationnels, exploitation des sources ouvertes. Le renseignement obtenu par le biais de coopérations avec d'autres services, français ou étrangers, y occupe une place croissante. La proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales vise précisément à fournir un cadre juridique plus solide à certaines de ces activités.

a) Les missions de la DGSE

Les missions générales de la DGSE sont formalisées aux articles D. 3126-1 à D. 3126-4 du code de la défense, qui disposent notamment que le service « a pour mission, au profit du gouvernement et en collaboration étroite avec les autres organismes concernés, de rechercher et d'exploiter les renseignements intéressant la sécurité de la France, ainsi que de détecter et d'entraver, hors du territoire national, les activités d'espionnage dirigées contre les intérêts français afin d'en prévenir les conséquences.

« Pour l'exercice de ses missions, la DGSE est notamment chargée d'assurer les liaisons nécessaires avec les autres services ou organismes concernés, et d'effectuer, dans le cadre de ses attributions, toute action qui lui serait confiée par le gouvernement, de fournir les synthèses des renseignements dont elle dispose. »

Pour répondre aux priorités arrêtées au titre de son plan stratégique, elle a engagé un certain nombre de chantiers de modernisation de ses capacités et de ses fonctions supports.

b) Le budget de la DGSE

Compte tenu de la priorité accordée par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 à la fonction « connaissance et anticipation » , la loi de programmation militaire précédente avait déjà prévu un renforcement important des moyens de la DGSE, avec notamment un recrutement de 616 emplois supplémentaires sur la période 2009-2014.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 a maintenu ce haut degré de priorité.

La loi de programmation militaire 2014-2019 du 18 décembre 2013 a traduit la poursuite de cet effort, dans un contexte global de fortes déflations d'effectifs pour le ministère de la défense puisqu'elle a prévu 284 créations de postes auxquelles ils convient d'ajouter celles résultant d'une décision du Premier ministre à la suite des attentats de janvier 2015 (185) et celles obtenues dans le cadre de l'actualisation de la LPM en juillet 2015 (140).

Vos rapporteurs sont naturellement particulièrement vigilants quant à la mise en oeuvre de cette programmation.

Le budget de la DGSE -budget alloué dans le projet de loi de finances, hors reports ou abondements ministériels- s'élèvera en 2016, hors titre 2, à 237,26 millions d'euros d'autorisations d'engagement (contre 270 en 2015) et 224,26 millions d'euros de crédits de paiement (contre 257,78 millions d'euros en 2015). Il se répartit entre 186,44 millions d'euros de crédits de paiement pour les dépenses d'équipement (contre 219,16 en 2015), 37,82 millions d'euros (crédits de paiement) de dépenses de fonctionnement (contre 37,75 en 2015).

2013

2014

2015

2016

Agrégat fonctionnement (*)

39 536 964

37 920 775

37 759 560

37 821 058

Agrégat équipement :

Autorisation d'engagement

217 822 196

150 659 832

231 378 367

199 439 017

Crédits de paiement

173 334 388

212 777 085

219 159 738

186 439 017

(*) Hors indemnité compensatrice SNCF

Cette évolution succède à deux années de croissance budgétaire exceptionnelle correspondant à des acquisitions ponctuelles d'équipements opérationnels, notamment pour la cyberdéfense, au développement de moyens techniques spécifiques, ainsi qu'à la réalisation d'infrastructure pour l'accueil des effectifs supplémentaires.

Ce budget est abondé par des attributions de produits liées à la cession de biens (essentiellement des véhicules). Ils sont programmés chaque année à hauteur de 70 000 euros, sachant qu'il s'agit d'une estimation (à titre de comparaison, en 2015 les attributions de produit se sont élevées à 115 019 euros).

À ces moyens s'ajoutent des crédits provenant de la mission « direction de l'action du gouvernement » destinés à financer les programmes interministériels liés à la défense et à la sécurité nationale ainsi que les activités liées aux fonds spéciaux.

c) Les effectifs de la DGSE

Les dépenses de personnel de la DGSE (titre 2) figurent à compter du 1 er janvier 2015, comme c'est le cas pour l'ensemble des programmes de la mission « Défense », au sein du programme 212. On en donnera toutefois le détail ici.

(1) Le renforcement des effectifs

616 créations nettes d'emplois ont été réalisées au cours de la loi de programmation militaire 2008-2013.

Les effectifs continuent d'augmenter. La DGSE bénéficie sur la période 2014-2019 de 609 créations qui intègrent celles obtenues lors de la loi de programmation initiale (284), celles qui résultent d'une décision du Premier ministre à la suite des attentats de janvier 2015 (185) et celles obtenues dans le cadre de l'actualisation de la LPM en juillet 2015 (140). Toutefois, suite au transfert de la mission de formation des analystes du renseignement d'origine électromagnétique (ROEM) à la DRM (Centre de formation interarmées au renseignement ou CFIAR) en 2015, la DGSE a transféré 4 ETP, ramenant ainsi ses créations à 605 sur la période de référence.

169 créations ont été réalisées en 2014 et 2015, le solde devrait s'échelonner jusqu'en 2019 à raison de 122 créations en 2016, 139 en 2017, 110 en 2018 et 69 en 2019. La répartition catégorielle montre qu'il s'agit essentiellement de catégorie A et d'officiers : ingénieurs, techniciens, linguistes, analystes... Depuis 2010, les arrêtés d'ouverture de concours à la DGSE sont publiés au Journal Officiel , ce qui favorise la diversification des profils de recrutement.

Le plafond d'emploi au 1 er janvier 2016 est fixé à 5 461 ETPT.

2013

2014

2015

2016

Plafond d'emploi (ETPT) (*)

4 990

5 068

5 302

5 491

Crédits inscrits au Titre 2 (**)

386 342 903

399 191 662

402 967 947

412 889 922

(*) au 1 er janvier de l'année

(**) action 50-01 du P 212 depuis 2015 ; au P144 action 03-31 auparavant

La répartition des emplois du ministère de la défense par gestionnaire fait apparaître, au sein du programme 212, un plafond d'emplois de 5 302 équivalents temps plein travaillés pour la DGSE au 1 er janvier 2015, qui se traduisent, de fait, pour le service, en termes d'effectifs réels, à 5 072 équivalents temps plein emplois au 30 juin 2015 et un effectif attendu au 31 décembre de 5 208. Le service n'atteint donc pas totalement son plafond d'emplois autorisé par la loi de finances.

Les crédits de masse salariale sont en légère augmentation afin de financer les recrutements prévus et plusieurs mesures catégorielles.

Ces effectifs ne comprennent pas ceux des unités militaires qui constituent le service action de la DGSE, dont les emplois et les crédits de rémunération sont inscrits aux différentes actions travaillant pour le programme « préparation et emploi des forces » du programme 212 « soutien de la politique de la défense ». En revanche, ils comprennent les personnels mis à disposition du Groupement interministériel de contrôle, placé auprès des services du Premier ministre. Cette situation devrait trouver un terme prochainement, dans le cadre de la mise en oeuvre des dispositions de la loi relative au renseignement de juillet 2015.

Vos rapporteurs pour avis considèrent toujours qu'un indicateur spécifique devrait être réintroduit au sein du programme annuel de performance de la mission « Défense » permettant de mieux suivre, dans le détail, année après année, la réalisation exacte de ce cadencement.

(2) La politique de ressources humaines

La DGSE compte 25,9 % de militaires, 74,1 % de personnels civils, (49 % de fonctionnaires et 25 % de contractuels), sous des statuts divers. Le besoin de diversification des recrutements est réel puisqu'on y trouve des profils très divers. Les catégories A et officiers représentent 42% des effectifs globaux.

(a) La réforme de l'encadrement supérieur civil

La réforme de l'encadrement supérieur civil a abouti en 2011 à la création du corps des « administrateurs de la DGSE » (87 administrateurs dont 13 placés en position de détachement ou de mise à disposition à ce jour) doté d'une structure et d'un échelonnement indiciaire calqués sur celui des administrateurs civils. Cet alignement permet au corps d'encadrement supérieur de la DGSE de disposer du même développement de carrière que les autres corps d'encadrement supérieur de l'État, ouvre des perspectives de mobilité et donne lieu à une refonte du mode de recrutement qui d'un recrutement par promotion interne, se décline désormais sous deux formes : un accès direct à l'issue de la scolarité à l'École Nationale d'Administration, et une sélection interne, inspirée du recrutement au « tour extérieur » des administrateurs civils, via un comité de sélection présidé par un membre du Conseil d'État.

(b) L'érosion régulière de la part du personnel militaire

Hors service « action », la DGSE emploie 25,9 % de personnel militaire et 74,1 % de personnel civil. Cette proportion était en 2008 de 29,3 % pour le personnel militaire et 70,7 % pour le personnel civil. Si l'on s'en tient aux projections établies conformément à la trajectoire de la LPM, la proportion de personnel militaire devrait atteindre 24,3 % en 2019. Mais, l'expérience de ces dernières années a montré que les armées rencontraient davantage de difficultés à honorer leurs contrats d'objectifs. Il n'est pas impossible que cette proportion se restreigne à 20 %. Cette érosion de la place de militaires au sein d'un service relevant du ministère de la défense pourrait être de nature à affecter son identité si des mesures ne sont pas prises pour l'enrayer.

(c) Une part croissante de contractuels parmi les personnels civils

Au sein des personnels employés par la DGSE, la part des contractuels a augmenté passant de 17,5 % en 2008 à 25 % en 2015. Cette évolution est pour une large partie le corollaire de la diversification des profils recherchés qui ne s'intègrent pas dans les différents cadres de la fonction publique, mais également la souplesse nécessaire pour rémunérer certains spécialistes pour lesquels les niveaux de rémunération servis dans le secteur privé sont sans commune mesure à ceux susceptibles d'être appliqués au titre des grilles indiciaires de la fonction publique. Ce recours à des agents non titulaires est circonscrit aux emplois et missions que les modes de recrutements (fonctionnaires et militaires) ne permettent pas de pourvoir. Il concerne essentiellement des linguistes spécialisés dans les langues rares et des spécialistes scientifiques et techniques.

En outre, la contractualisation offre davantage de souplesse pour intégrer à l'échéance de contrats à durée déterminée, et donc à un terme permettant d'évaluer les capacités des agents à évoluer dans des fonctions d'encadrement, les personnels dont la DGSE souhaite s'attacher durablement les services, ce qui n'est pas négligeable.

(d) Vers une réforme du statut autonome du personnel civil de la DGSE

Le service s'est engagé dans un processus d'actualisation du statut autonome de ses personnels qui a abouti à la publication du décret n°2015-386 du 3 avril 2015 fixant le statut des fonctionnaires de la direction générale de la sécurité extérieure. L'option retenue a été celle d'une reconfiguration de l'ensemble du statut autonome des fonctionnaires de la DGSE, dont certaines dispositions ont été étendues aux agents contractuels. Elle réaffirme les spécificités justifiant l'autonomie statutaire, renforce les dispositions relatives à la sécurité du service et de ses agents, actualise celles relatives aux droits et obligations des personnels au regard du statut général des fonctionnaires, introduit des dispositions organisant la participation du personnel à travers des instances de concertations nouvelles ou rénovées.

(e) Davantage de mutualisation au sein de la communauté du renseignement

La mobilité au sein de la communauté du renseignement devient petit à petit une réalité, des parcours de carrière alternant les différents services se constituent peu à peu. Des fiches de postes sont échangées entre les services, par exemple, avec l'objectif de permettre aux agents d'enrichir leurs parcours professionnels Des administrateurs de la DGSE sont ainsi placés en mobilité statutaire au sein de la DGSI ou auprès du Coordonnateur national du renseignement.

En outre la DGSE développe ses relations avec les autres services spécialisés en matière de politique RH par des échanges sur les modes de recrutement et les profils difficiles à recruter. L'objectif consiste à développer des mobilités croisées et à limiter la concurrence entre les services. En effet, certains profils recherchés nécessitent de développer de nouvelles filières de recrutement ainsi que de partenariats entre services afin de partager les viviers et de participer conjointement à des forums spécialisés.

Avec la création de l'Académie du renseignement, des formations communes ont été développées. Des actions de mutualisation sont également conduites dans le domaine de la formation comme par exemple dans le domaine linguistique avec la DRM dans le cadre du CFIAR de Strasbourg. Outre ces modules communs à l'ensemble des services, des coopérations bilatérales peuvent se révéler efficaces, la DGSE reçoit et honore régulièrement des demandes de formation adressées par les autres services spécialisées.

On observe également une augmentation sensible de « prêts » de vacataires linguistes au profit des autres services et réciproquement dans d'autres langues de la DRM vers la DGSE.

d) Un effort soutenu pour réaliser des économies de fonctionnement

Comme l'ensemble des services du ministère de la défense, la DGSE est soumise à des économies de fonctionnement qui portent notamment sur le fonctionnement courant. Cette dynamique est poursuivie au travers de certains achats désormais effectués dans le cadre de marchés parfois mutualisés avec d'autres entités, et notamment dans le domaine du soutien courant des structures. Pour faire face à l'accroissement mécanique des dépenses induit par l'augmentation de ses effectifs et de son activité (coûts de recrutement, de formation, des déplacements et des transports, etc.), la DGSE bénéficie de dotations supplémentaires mais moins que proportionnelles à la hausse des charges induites par la poursuite du renfort de ses ressources humaines.

Dépenses de fonctionnement de la DGSE

(en euros)

AE/CP

2015

2016

Alimentation

178 712

179 709

Déplacements et transport

7 475 276

7 834 163

Compensatrice SNCF

827 064

0

Mobilité des personnels

3 023 717

3 453 746

Fonctionnement courant

7 756 637

7 514 661

Soutien courant des structures

17 749 098

17 144 087

Soutien des ressources humaines

1 576 120

1 694 692

Total

38 586 624

37 821 058

Total (hors compensatrice SNCF

37 759 560

37 821 058

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015 et au PLF 2016

À périmètre constant, les crédits de l'agrégat fonctionnement restent stables par rapport à 2015. Les dépenses de fonctionnement directement liées à l'activité opérationnelles (frais de déplacements et transport) augmentent de 5% par rapport à 2015, afin de tenir compte notamment de l'accroissement de l'activité, qui se traduit par une augmentation du nombre de missionnaires sur les zones de crise, constatée depuis 2013. Cette intensification devrait se poursuivre avec le renforcement des effectifs, la multiplication des crises et des opérations, l'accroissement de la politique d'influence et la diversification des cibles à suivre conséquence de la dissémination de la menace portant sur les intérêts français.

La DGSE n'en poursuit pas moins la mise en oeuvre de mesures, engagées les années précédentes, pour encadrer le coût unitaire des missions (durcissement des conditions de sur-classement en matière de transports aérien et ferroviaire, anticipation des réservations de billets, réflexion sur le format des missions), afin de limiter la progression de ces dépenses.

À périmètre constant, les dépenses de fonctionnement courant liées au soutien du personnel (frais de formation, d'habillement, de documentation, d'équipement informatique...) et au soutien courant des structures (dépenses nécessaires au fonctionnement des bâtiments tertiaires et des installations techniques, frais d'entretien et de conservation du domaine, de télécommunications non opérationnelles, etc.), baissent de 1,3 % par rapport à 2015.

Cette diminution est obtenue par des mesures d'économies sur le soutien des structures et le fonctionnement courant (- 3%). Vos rapporteurs soulignent l'effort de gestion important réalisé sur les coûts d'entretien du domaine immobilier . En effet alors que les surfaces immobilières ont augmenté de 9 % en 2015 (10 % en 2014), le coût d'entretien au m² est passé de 104 euros en 2014, à 96 euros en 2015 et 90 euros en 2016. Ils notent également qu'en dépit de l'augmentation des effectifs, les dépenses de fonctionnement courant diminuent de 3 %, le coût par agent passant de 1 689 euros en 2014 à 1 513 euros en 2015, et à 1 369 euros en 2016.

En revanche, la poursuite du renforcement des effectifs du service à l'étranger (dépenses de recrutement et de formation notamment) conduit à une augmentation de 14 % des dépenses liées à la mobilité du personnel 11 ( * ) , et le soutien aux ressources humaines progresse de 8 % en raison de l'augmentation du nombre de jours de formation indispensable pour conserver un niveau constant de compétences spécifiques

Pour disposer d'une vision complète des capacités de la DGSE, il faudrait y ajouter les moyens de fonctionnement alloués aux unités militaires qui constituent son service « action » dont les crédits sont inclus au sein des différentes actions relatives à la « Préparation et emploi des forces » dans le programme 178.

Des crédits d'intervention sont programmés au titre 6 à hauteur de 100 000 euros. Ils correspondent aux dépenses liées à l'organisation d'un concours de mathématiques (qui s'est déroulé pour la première fois en 2015).

e) Des dépenses d'équipement dont le montant est variable à raison des cycles d'investissement

Les dépenses d'équipement couvrent les besoins relatifs aux différents modes de recueil du renseignement : origines humaine et opérationnelle, origines électromagnétique, informatique et image. Ces crédits servent ainsi à financer l'acquisition de matériels opérationnels dédiés au traitement et à l'exploitation du renseignement obtenu, ainsi qu'au soutien, au support et à la logistique des opérations. Ils couvrent enfin aussi la construction, la modernisation et l'adaptation des locaux et des matériels techniques de recueil et de traitement de l'information.

Dépenses d'équipement de la DGSE

(en euros)

AE

CP

2015

2016

2015

2016

Appui au renseignement

80 328 367

92 209 500

96 109 738

83 195 073

Renseignement

151 050 000

107 229 517

123 050 000

103 243 944

Total

231 378 367

199 439 017

219 159 738

186 439 017

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015et PLF 2016

Après une hausse très importante en 2015 (54 % en autorisations d'engagement et de 3 % en crédits de paiement) qui reflétait une logique cyclique ainsi que la réalisation en 2015 de nouveaux moyens techniques, les montants inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016 diminuent de façon significative (- 14 % en AE et - 15 % en CP) tout en restant à un niveau cohérent avec les exercices antérieurs (voir tableau supra).

La dotation pour 2016 se situe donc dans la partie basse de la courbe du cycle des investissements techniques de la DGSE. Ainsi, la capacité d'engagement sur l'opération budgétaire « renseignement », qui couvre les besoins liés aux différents modes de recueil du renseignement, a été réduite de près de 30 % par rapport à 2015. Cette tendance ne devrait pas se prolonger compte tenu de la nécessité de conforter les capacités techniques d'analyse et d'exploitation du renseignement dans un contexte caractérisé par l'accélération des cycles technologiques et par la pression croissante du développement des moyens utilisés par les cibles, toujours plus rapides, plus diversifiés, plus sophistiqués et paradoxalement moins coûteux compte tenu de l'accélération de la diffusion des technologies et des usages.

Les dotations (opération budgétaire « appui au renseignement ») qui supportent les dépenses d'infrastructure (construction, modernisation et adaptation des locaux abritant les personnels de la DGSE), mais aussi les dépenses de soutien (télécommunications du service entre autres) et de projection opérationnels devraient aussi progresser en raison du renforcement des effectifs.

À titre indicatif, cette opération budgétaire reçoit 70 000 euros au titre de la répartition des attributions de produits attendus (voir supra p. 22).

Pour disposer d'une vision complète des capacités de la DGSE, il faudrait y ajouter les crédits d'investissement alloués aux unités militaires qui constituent son service « action » dont les crédits sont inclus au sein des différentes actions relatives à la « Préparation et emploi des forces » dans le programme 178.

Par ailleurs, la DGSE s'inscrit dans la logique de mutualisation des moyens entre services depuis plusieurs années. Elle reçoit à ce titre, par transfert en cours de gestion, des crédits interministériels inscrits au programme 129 « direction de l'action gouvernementale » pour des dépenses qui bénéficient à d'autres services de la communauté du renseignement. Réciproquement, la DGSE bénéficie de moyens qui ne relèvent pas de son budget, comme les satellites de renseignement, qui sont financés par des crédits inscrits au programme 146 de la mission défense.

Au total, vos rapporteurs seront particulièrement vigilants afin que les engagements pris dans le Livre blanc 2013 et lors de son actualisation pour renforcer les moyens de la DGSE, tant humains que techniques, soient honorés en temps et en heure. Le suivi des évolutions technologiques (à l'image de l'importance croissante des enjeux cyber) et la prise en compte des menaces qui pèsent sur notre pays et nos ressortissants exigent sans aucun doute le maintien d'un effort dans la durée.

Rappelons que les crédits de la DGSE ne représentent que 1,6 % des crédits de la mission « défense », ses effectifs 2 % du plafond d'emplois du ministère de la défense et que ses moyens humains et financiers restent inférieurs à ceux dont disposent nos principaux partenaires européens, comme le Royaume-Uni.

3. La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD)

La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) est le service de renseignement dont dispose le ministre de la défense pour assumer ses responsabilités en matière de sécurité du personnel, des informations, des matériels et des installations sensibles 12 ( * ) .

La DPSD est donc un service de renseignement , directement rattaché au ministre de la défense, dont la principale mission est la contre-ingérence de défense , comme l'illustre sa devise « renseigner pour protéger », et qui fait pleinement partie de la communauté du renseignement .

a) Les missions de la DPSD

Le domaine de compétence de la DPSD couvre les forces armées, la direction générale de l'armement, les services de la défense et les sociétés industrielles liées à la défense au titre d'un contrat, soit environ 450 000 personnes dont 80 000 civils de la défense.

Au sein de ce périmètre, sa mission consiste à mettre en oeuvre des mesures de contre-ingérence et des mesures de protection.

Son activité de contre-ingérence consiste à déceler et neutraliser toute menace contre la sécurité résultant des activités des services de renseignement, d'organisations ou d'agents se livrant à l'espionnage, au sabotage, à la subversion, au terrorisme, au crime organisé ou au trafic d'armes. Elle a pour but d'assurer et de maintenir au meilleur niveau la sécurité des forces, notamment lorsqu'elles sont en opérations, préposition ou déployées outre-mer. Elle doit également assurer la défense de nos intérêts économiques afin de protéger le patrimoine économique et le potentiel scientifiques et technique en luttant contre toute tentative d'ingérence émanant d'acteurs multiples. Enfin, elle assure la protection du secret de la défense nationale et de nos intérêts nationaux de souveraineté dans le cyberespace.

Elle agit avec ses capacités et moyens propres, en étroite collaboration avec les autres services de renseignement, ainsi qu'avec l'agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI) en matière de cyberdéfense et avec la délégation interministérielle à l'intelligence économique.

Elle apporte ainsi son concours au traitement des demandes de création des zones à régime restrictif (ZRR), au traitement des demandes d'accès auxdites zones et au contrôle de la réglementation en vigueur par des actions d'évaluation du niveau de risque, de sensibilisation et de conseil aux entreprises et établissements de recherche.

Vos rapporteurs, conscients de l'insuffisance de la culture de protection du secret de la défense nationale en France, à confronter avec les mesures de protection dans d'autres pays comparables, notamment les États-Unis, soutiennent sans réserve toute initiative en ce sens, et souhaiteraient que des modules d'initiation à la protection du secret soit introduits dans les écoles d'ingénieurs, à commencer par les établissements supérieurs relevant de la Défense.

La DSPD assure les missions d'enquête préalable à l'habilitation de l'ensemble des personnels du ministère de la défense et d'inspection des sites militaires sensibles et industriels liés à la défense par des inspections sur les sites et par la cyberdéfense.

Ces missions sont assorties d'indicateurs de performances, elles feront l'objet de développement dans la partie du rapport consacrée aux objectifs et indicateurs de performance (voir infra p.61).

La DPSD s'est engagée en qualité de service de contre-ingérence de défense dans un processus visant à se doter des capacités indispensables pour anticiper, prévenir et gérer les attaques cybernétiques qui impactent, ou sont susceptibles d'impacter les entités militaires et industrielles de défense.

Vos rapporteurs comprennent que, par sa relation de confiance avec les acteurs militaires et industriels de la défense et sa connaissance des réseaux et systèmes déployés, la DPSD soit à même de contribuer pleinement, au titre de ses attributions et avec ses moyens, à la lutte contre les menaces cybernétiques sur l'ensemble du spectre de son action de renseignement. Ils se félicitent que la collaboration avec l'ANSSI fasse l'objet d'un protocole commun, confirmant leur complémentarité et leurs modes de coopération.

Qu'il s'agisse de la lutte anti-terroriste ou de la contre-ingérence économique, l'action de la DPSD s'inscrit dans un cadre où la dimension interministérielle est présente.

Dans le double contexte de la mise en oeuvre du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et de la réforme du ministère de la défense, la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) a achevé en 2013 13 ( * ) la réorganisation de son échelon central et de son dispositif territorial afin d'améliorer la qualité du service rendu en l'adaptant à ses missions prioritaires.

Actuellement, la DPSD dispose de cinq directions zonales dont le périmètre correspond au découpage des zones de défense et de sécurité métropolitaines. Le cas échéant, cette organisation pourra être ajustée pour rester en cohérence avec le redécoupage des régions, des zones de défense et de sécurité ou de l'évolution des emprises militaires et industrielles de défense. En 2015, la DPSD a redéfini le fonctionnement interne de son dispositif territorial afin qu'il soit harmonisé et adapté aux menaces actuelles. De façon plus générale, le réseau territorial a vocation à être densifié au fur et à mesure de la montée en puissance de la DPSD sur la durée de la LPM. La DPSD dispose en outre de personnels en postes dans les collectivités d'outre-mer, ainsi qu'au plus près des forces là où elles sont positionnées ou déployées en opérations extérieures 14 ( * ) , ainsi qu'auprès de l'OTAN.

b) Le budget de la DPSD

La dotation 2016 de la DPSD s'élève à 12,25 millions d'euros en autorisations d'engagement et 10,05 millions d'euros en crédits de paiement .

2013

2014

2015

2016

Agrégat fonctionnement (*)

3 767 295

3 546 950

2 211 581

2 113 861

Agrégat équipement :

Autorisation d'engagement

7 559 020

7 288 415

7 938 150

10 136 835

Crédits de paiement

7 526 519

7 288 415

7 938 150

7 936 834

(*) Hors indemnité compensatrice SNCF

La baisse (- 6%) en CP par rapport à 2015 (10,69 millions d'euros) résulte pour l'essentiel de mesures de périmètre (voir supra p.13). En revanche, les crédits progressent de manière significative (+ 14,6%) en autorisations d'engagement.

Cette évolution s'inscrit dans un contexte marqué, d'une part par un renforcement capacitaire de la DPSD, notamment en effectifs, et d'autre part par la promulgation de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement qui renforce les missions des services de renseignement et les autorise à utiliser de nouvelles techniques de renseignement. L'écart entre AE et CP transcrit l'effort d'investissement dont la pérennisation se traduira par une progression des dotations en crédits de paiement des prochains exercices budgétaires.

c) Le renforcement des effectifs de la DPSD

Depuis la loi de programmation militaire (2014-2019), la DPSD qui comptait 1 500 personnes en 2008 connaît un renforcement significatif de ses effectifs qui étaient tombés à 1 053 à la fin de 2013 . Cette remontée en puissance amorcée en 2014 connaît une accélération dans le cadre de la lutte anti-terroriste et de l'actualisation de la LPM en juillet 2015.

La DPSD bénéficie en 2016 d'un renforcement conséquent de ses effectifs - le plafond d'emploi au 1 er janvier passe de 1 100 à 1 148 et devrait atteindre 1200 au 31 décembre et de l'inscription corrélative en titre 2 au titre du programme 212 « soutien de la politique de la défense » de crédits à hauteur de 84,69 millions d'euros contre 69,26 en 2015 15 ( * ) .

La DPSD s'est engagée dès 2013 dans une politique de rééquilibrage entre personnels militaires et civils. La part de ces derniers devrait ainsi passer de 21 à 25 % sur la durée de la LPM. Dans le même temps, la part des personnels de catégorie A passera de 40 en 2013 à 92 en 2019 (+ 130%).

De fait, la problématique du recrutement a évolué de façon encourageante, mais devra être consolidée à l'avenir compte tenu de la montée en puissance capacitaire et d'un turn over annuel structurel de ses effectifs supérieur à 10 %. C'est environs 170 à 180 collaborateurs que la DPSD devra recruter chaque année jusqu'en 2018.

Vos rapporteurs estiment que, dans ce contexte de montée en puissance, la fonction RH au sein du service devrait être confortée et des solutions devraient être apportées aux problèmes résiduels mais récurrents que rencontre le service pour le recrutement de son personnel.

d) Une optimisation des dépenses de fonctionnement

Dépenses de fonctionnement de la DPSD

(en euros)

AE/CP

2015

2016

Déplacements et transport

246 171

260 327

Communication et relations publiques

300 000

288 178

Compensatrice SNCF

544 181

Fonctionnement courant

363 116

537 000

Soutien courant des structures

499 645

450 000

Soutien des matériels communs

412 649

188 356

Soutien des ressources humaines

390 000

390 000

Total

2 755 762

2 113 861

Total (hors compensatrice SNCF

2 211 581

2 113 861

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015 et PLF 2016

Globalement les crédits inscrits à l'agrégat « fonctionnement » diminuent de 4,4 %

L'augmentation de 6 % des dépenses de déplacements (qui couvrent principalement les déplacements par voie aérienne) est corrélée au renforcement des effectifs de la DPSD.

Si les autres postes sont stables (soutien des ressources humaines) ou en légère baisse (- 4% pour les communications et relations publiques, - 10 % soutien courant des structures), les évolutions des opérations budgétaires, « fonctionnement courant » et « soutien des matériels communs » n'ont pas de signification dans la mesure où elle recouvre une évolution de la nomenclature.

e) Une progression sensible des dépenses de l'agrégat équipement

L'agrégat équipement finance les investissements et les dépenses opérationnelles de la DPSD.

Dépenses d'équipement de la DPSD

(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

2015

2016

2015

2016

Enquêtes, Contrôles, Sécurisation

2 440 000

3 011 180

2 440 000

2 593 680

Matériels de transport

660 000

779 850

660 000

779 8750

Matériels divers

460 000

257 300

460 000

257 300

Matériels techniques

1 470 000

2 686 345

1 470 000

1 806 004

Systèmes d'information

et de communication (SIC)

2 908 150

3 402 160

2 908 150

2 500 000

Total

7 938 150

10 136 835

7 938 150

7 936 834

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015 et PLF 2016

La DPSD poursuit le développement de ses capacités d'investigation technique et de son intranet métier afin de les adapter aux menaces émergentes et aux nouveaux défis de la contre-ingérence, de ses moyens de contre-ingérence en matière de cyberdéfense et de ses moyens de recherche sur les sources ouvertes.

La dotation de l'opération budgétaire « enquêtes - contrôle- sécurisation » couvre les frais de mission, de déplacement et de télécommunication. Elle progresse de façon significative de 23,4 % en autorisations d'engagement et de 6,3 % en crédits de paiement en raison de l'accroissement des effectifs du service, de la consolidation des besoins liés à la recherche humaine du renseignement et du surcoût des dépenses de télécommunications.

L'opération budgétaire « matériels de transport » qui recouvre l'acquisition et l'entretien des véhicules augmentent de 18 %.

L'opération budgétaire « matériels techniques » qui progresse de 82,5 % en autorisations d'engagement et de 22,9 % en crédits de paiements permettra le développement des capacités d'investigation technique et de l'intranet métier, ainsi que le développement des moyens de contre-ingérence en matière de cyberdéfense.

Enfin, l'opération budgétaire « système d'information et de communication » progresse de 17 % en autorisations d'engagement alors qu'elle diminue de 14 % en crédits de paiement traduit un nouveau cycle d'investissement significatif. La modernisation des systèmes d'information et de communication, qui est devenue une exigence dans l'exercice des métiers du renseignement porte sur quatre domaines : l'évolution et le maintien d'une politique de sécurité informatique (achats de matériels et de logiciels spécifiques auxdits réseaux et à la récupération des données), la mise en oeuvre de moyens automatisés pour le recueil et l'exploitation du renseignement, le maintien en condition du parc informatique et des outils d'administration des réseaux, la mise en oeuvre de moyens de recherche sur les sources ouvertes.

B. LA PROSPECTIVE DE DÉFENSE

L'action 7 « Prospective de défense », dotée d' un milliard d'euros de crédits par le PLF 2016, soit 77 % des crédits du programme 144, se compose de quatre sous-actions qui correspondent à autant d'étapes de l'analyse stratégique lato sensu , comprise comme incluant la recherche technologique.

Évolution des crédits de l'action 7 « Prospective de défense » du programme 144

(en millions d'euros)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

2015-2016

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 7 : Prospective de défense

1 034,03

1 030,03

992,42

1 009,70

- 4,02 %

- 1,97 %

Sous-action 7-1 : Analyse stratégique

6,13

6,13

9,76

6,06

+ 59,31 %

- 1,08 %

Sous-action 7-2 : Prospective des systèmes de forces

20,81

20,81

20,96

20,96

+ 0,72 %

+ 0,72 %

Sous-action 7-3 : Études amont

742,91

738,91

680,00

706,53

- 8,47 %

- 4,38 %

Sous-action 7-4 : Soutien et subventions

264,19

264,19

281,70

276,15

+ 6,63 %

+ 4,53 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

1. L'analyse stratégique (6 millions d'euros en CP)

L'analyse stratégique, objet de la sous-action 7-1 du programme 144, vise à éclairer le ministre de la défense sur l' évolution du contexte stratégique en général ; elle constitue une analyse prospective de l'évolution de l'environnement international, en particulier des risques et des menaces qui peuvent affecter la sécurité de la France et de l'Union européenne. L'objectif est d'anticiper les tendances à moyen et long terme, en cherchant à identifier quels types de ruptures et de surprises stratégiques pourraient potentiellement affecter cet environnement, ainsi que leurs conséquences prévisibles sur la politique de défense française.

Cette analyse, dont les évènements récents ont mis en évidence la nécessité, est désormais réalisée par le pôle « prospective et recherche stratégique » de la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) créée en janvier 2015. Ce pôle est chargé de coordonner et conduire la mise en oeuvre de la politique des études prospectives et stratégiques du ministère de la défense par le canal du comité de cohérence de la recherche stratégique et de la prospective de défense (CCRP).

Les crédits consacrés à la sous-action « Analyse stratégique » sont prévus à hauteur de 6,06 millions d'euros en CP par le PLF 2016, montant quasi stable (- 1 %) par rapport à 2015. En revanche, la prévision d' AE s'élève à 9,76 millions d'euros , soit une augmentation de 59 % (+ 3,63 millions d'euros) par rapport à l'année en cours. Ce niveau d'AE répond au besoin qu'entraîne à cet égard la réforme du dispositif ministériel de soutien à la recherche stratégique mise en oeuvre en 2015 et 2016 par la DGRIS, consistant dans une refonte du dispositif contractuel (création de contrats-cadres, augmentation de la part des « observatoires ») et le développement de nouvelles relations avec le champ universitaire : cette réforme, en effet, donne lieu à la notification d'engagements pluriannuels auprès des différents prestataires du ministère de la défense (instituts de recherche, universités, etc.). Elle tend à donner plus de prévisibilité et donc à améliorer le pilotage des études.

Répartition des crédits de la sous-action 7-1 « Analyse stratégique » pour 2016

(en milliers d'euros)

Opérations budgétaires

AE

CP

Études prospectives et stratégiques (EPS)

8,15

5,45

Programme « Personnalités d'avenir - défense »

1,25

0,25

Recherche stratégique

0,36

0,36

Total

9,76

6,06

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

a) Les études prospectives et stratégiques

Les études prospectives et stratégiques (EPS), qui doivent bénéficier de CP à hauteur de 5,4 millions d'euros en 2016, font l'objet d'une expression ministérielle des besoins, donnant lieu à une programmation annuelle. Le nombre des études programmées pour 2016 devant être arrêté à l'issue de la réunion du CCRP de novembre 2015, il ne figure pas dans la documentation budgétaire. Pour l'année en cours, 45 études ont été programmées. Pour la première fois, cette programmation a permis la mise en place de quatre contrats-cadres, marchés pluriannuels, au profit de domaines prioritaires pour le ministère de la défense : cyberdéfense, dissuasion, Russie et Afrique du Nord-Proche et Moyen-Orient.

Il convient de noter que cette analyse stratégique, parmi l'ensemble des études auxquelles elle donne lieu, permet l'élaboration du document - public - intitulé Horizons stratégiques (cf. encadré ci-après).

Le coût unitaire moyen d'une étude ne reflète pas la dispersion des montants des différentes études , qui vont des contrats pluriannuels susmentionnés, dont le montant peut atteindre 0,3 à 0,5 million d'euros par an, aux contrats de recours à des consultants, pour des montants de 4 000 à 50 000 euros, selon le thème et la complexité des sujets.

La démarche stratégique française

La politique de défense de la France s'inscrit dans un contexte caractérisé par la rapide évolution de l'environnement international et des équilibres régionaux. Les menaces directes contre nos intérêts ont diminué ; des crises régionales ou sous-régionales, en revanche, peuvent indirectement affecter la sécurité de notre pays ; des phénomènes globaux sont susceptibles d'atteindre plus directement nos intérêts (prolifération des armes de destruction massive, cyber-terrorisme..).

La volonté de répondre à ce changement de paradigme de sécurité est inscrite dans les éditions successives du Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale (LBSDN), dont l'objectif est de définir la stratégie globale de défense et de sécurité de la France et de l'adapter à l'environnement géostratégique. Le LBSDN fixe le niveau d'ambition politique et militaire du pays afin d'établir un cadre de référence de long terme et officiel, tant vis-à-vis de l'extérieur (dimension diplomatique) qu'auprès des acteurs politiques nationaux (représentation nationale, citoyens...). Il arrête, pour les années à venir, les choix stratégiques et structurants de notre appareil de défense et de sécurité nationale.

La démarche stratégique française est également enrichie d'études et analyses donnant lieu à des documents, soit publics, soit classifiés. Pour le ministère de la défense, la démarche stratégique se décline autour des documents suivants :

1.- Horizons stratégiques . Ce document public de prospective géostratégique à l'horizon des trente prochaines années, élaboré régulièrement avec le concours des principaux organismes ministériels chargés de la préparation de l'avenir, s'articule autour de sept domaines d'étude : relations internationales ; conflictualité et opérations militaires ; économie ; démographie et migrations internationales ; ressources et environnement ; santé ; évolutions sociétales. Il vise, notamment, à identifier les risques et menaces de nature à déstabiliser l'environnement politique international et à impacter, directement ou indirectement, les intérêts stratégiques français.

2.- Les documents de prospective opérationnelle de l'état-major des armées (EMA). Le chef d'état-major des armées (CEMA) est chargé de la préparation des opérations présentes et futures. Il exprime un besoin militaire dont les solutions capacitaires sont élaborées en collaboration avec la direction générale de l'armement (DGA). Des situations opérationnelles à 15 ans, issues d'une analyse confrontant menaces et intérêts, sont déterminées à cet effet. Les grandes orientations stratégiques ayant été fixées dans le LBDSN de 2013, l'EMA a travaillé ensuite sur leurs prolongements en termes d'hypothèses d'emploi et de réponses capacitaires au besoin militaire à un horizon de 10 à 15 ans.

3.- Le document de politique et d'objectifs scientifiques (POS). Ce document, édité par la Mission pour la recherche et l'innovation scientifique (MRIS) de la DGA, répartit les sujets de recherche par domaine scientifique (mathématiques, électromagnétisme, sciences du vivant, etc.) en identifiant les thématiques à traiter par leur intérêt général d'un point de vue de recherche. Cette approche permet d'identifier et d'exploiter des synergies entre les recherches civile et militaire. La dernière édition du document de POS date de 2012 ; la prochaine sera intégrée au sein du corpus documentaire prévu dans le cadre de la nouvelle gouvernance de la S&T (science, recherche, technologie et innovation).

4.- Le Plan stratégique de recherche et technologies (PSR&T). Ce document, élaboré par la DGA, établit les grands équilibres de la R&T, en amont du processus de planification des études amont du ministère de la défense. Deux volets sont pris en considération : l'un, capacitaire, permet, à partir des plans d'équipements, de déterminer les démonstrateurs, les levées de risques et les développements technologiques à effectuer avant le lancement effectif des programmes ; l'autre a vocation à identifier les pistes technologiques prometteuses devant être accompagnées (sans qu'une échéance d'application soit forcément précisée). Le PSR&T ne fera pas l'objet de mise à jour en 2015, la DGA se concentrant cette année sur la préparation des systèmes futurs dans le cadre de la nouvelle gouvernance des activités de S&T, conformément aux évolutions d'organisation du ministère de la défense. L'orientation de ces travaux a vocation à concourir à la satisfaction du besoin militaire prévisible défini avec l'EMA.

6.- Le rapport du Groupe de travail sur les orientations stratégiques de politique spatiale de défense (GOSPS). Ce rapport précise les enjeux capacitaires à l'horizon 2020 et propose des axes d'efforts prioritaires.

- Comparaisons internationales


Aux États-Unis , depuis 1997, la Quadriennal Defense Review (QDR) constitue un document que tout nouveau président, élu ou réélu, a l'obligation de remettre au Congrès. C'est un élément fondateur de la politique menée par le département de la défense (DoD) au cours du mandat présidentiel. Prenant naturellement en compte les orientations politiques présidentielle (National Security Strategy) et ministérielle (National Military Strategy ), cette QDR vise à formaliser la vision du DoD sur les menaces et est le fruit d'un consensus entre les différentes composantes du département (armées et services). D'autres documents, non obligatoires, peuvent également être publiés pour de nouvelles orientations sur un sujet particulier, comme la Nuclear Posture Review, la Missile Defense Review et la Space Posture Review.


Au Royaume Uni , le ministère de la défense (MoD) publie et met régulièrement à jour plusieurs documents, suivant une démarche séquentielle et à plusieurs niveaux, tout à fait comparables à l'approche française (LBDSN - politique de défense - prospectives géostratégique, opérationnelle et technico-capacitaire). On distingue ainsi :

- le Global Strategic Trends out to 2040 (publié en 2010), très proche du rapport français de prospective géostratégique Horizons stratégiques ;

- le High Level Operational Concept (HLOC) , qui vise à décrire le cadre conceptuel des opérations interarmées britanniques et le développement des capacités ad hoc pour les vingt prochaines années ;

- la Strategic Defence and Security Review (SDSR) et le National Security Strategy (NSS), qui constituent les documents majeurs, comparable au LBDSN français, bénéficiant d'une vocation quasi-programmatique. Le processus de SDSR est en cours et vise une publication avant la fin 2015.


L'Allemagne publie de manière non régulière un Livre blanc sur la politique de sécurité et sur l'avenir de la Bundeswehr : la dernière édition date de 2006, soit douze ans après la précédente ; un nouveau processus d'élaboration est en cours, qui doit durer jusqu'à l'été 2016. Ce document vise notamment à définir les orientations stratégiques pour préparer les forces armées à affronter les nouveaux défis à la sécurité.

- Articulation avec les travaux de l'AED et de l'OTAN


Le Plan de développement des capacités (CDP) conçu au sein de l'Agence européenne de défense (AED) ne constitue pas une stratégie en soi mais un instrument de planification à l'horizon 2025, visant à garantir la capacité de l'Union européenne à répondre aux missions de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Combinant lacunes opérationnelles immédiates, besoins capacitaires de moyen et de long termes ( Long Term Vision, LTV), capacités militaires existantes et programmes d'armement en cours, le CDP vise à élaborer des priorités capacitaires au niveau européen et à orienter les planifications nationales. Mis à jour périodiquement, ce plan, auquel contribue l'analyse stratégique française, facilite l'identification des opportunités de coopération. Il a permis d'identifier en 2014 - date de sa dernière version - 16 priorités capacitaires servant de base aux différentes initiatives de l'AED.


Dans le cadre de l'OTAN, le Processus de planification de défense (NATO Defence Planning Process - NDPP) vise à inciter les États membres de l'Organisation à détenir, conserver ou développer, à l'horizon 2030, les capacités identifiées comme nécessaires pour mener les missions confiées à l'Alliance, en concordance avec son niveau d'ambition (Level of Ambition - LoA). Le NDPP recense les forces et structure le développement capacitaire dans un souci d'interopérabilité et d'une juste répartition de l'effort de défense entre les nations.

L'analyse stratégique française contribue à l'élaboration du Strategic Foresight Analysis (SFA) et du Framework for Future Alliance Operations (FFAO).

D'autres documents d'analyse stratégique de nature générale (analyse de la menace, planification capacitaire) sont régulièrement produits et diffusés sous classification OTAN. Le Commandement suprême allié Transformation (ACT) , qui assume la responsabilité du renforcement des capacités opérationnelles et se trouve dirigé par un officier général français depuis 2009, est responsable pour la réflexion stratégique militaire, le développement capacitaire et l'entraînement des forces, préparant ainsi l'avenir depuis le futur immédiat jusqu'au très long terme.

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

b) La recherche stratégique

Les crédits identifiés au titre de l'opération budgétaire « recherche stratégique » - 360 000 euros pour 2016 - correspondent principalement aux subventions pour publication octroyées chaque année par le ministère de la défense aux instituts de recherche qui en font la demande. La liste des bénéficiaires est arrêtée en cours de gestion. L'objectif est de promouvoir et valoriser les productions intellectuelles, aux plans national et international, et, ce faisant, de contribuer à la politique ministérielle d'influence.

Par ailleurs, un « Pacte Enseignement Supérieur » a été élaboré par le ministère de la défense afin de soutenir directement l'émergence de jeunes universitaires et leur spécialisation sur les questions de défense (soutien à la création d'une filière « Études stratégiques » visant à faire pendant aux « War studies » anglo-saxonnes, ainsi qu'à des domaines d'intérêt critiques comme la dissuasion, la cyberdéfense et les questions régionales). En lien avec l'Institut de recherche stratégique de l'École militaire, le dispositif tend à financer des chercheurs (allocations doctorales et postdoctorales) et des projets (création de chaires ou de groupements d'intérêt scientifique), mais également de contribuer au rayonnement de la pensée stratégique française (« projection » des chercheurs à l'international) sur la base d'une logique d'excellence (création de « labels d'excellence »).

c) Le programme « Personnalités d'avenir - défense »

Le programme « Personnalités d'avenir - défense » (PAD), mis en oeuvre depuis 2008, constitue un programme d'accueil visant à sensibiliser aux positions françaises en matière de sécurité et de défense de futures élites étrangères (hauts fonctionnaires, conseillers diplomatiques, officiers, journalistes, chercheurs et industriels étrangers entre 25 et 40 ans qui pourraient exercer des fonctions importantes liées aux enjeux de sécurité et de défense à moyen ou long terme), et à créer des contacts entre ces jeunes cadres et les correspondants français partageant les mêmes centres d'intérêt. La présélection des candidats potentiels est assurée par le canal des attachés de défense.

La prévision budgétaire en la matière est établie sur la base d'une programmation de plus d'une vingtaine d'invitations par an, chacune d'une semaine en moyenne. La dotation destinée au programme pour 2016 est ainsi, comme en 2015, de 250 000 euros en CP.

Il semble encore tôt pour tirer un bilan véritable d'un programme dont l'objectif est de contribuer à la constitution et l'entretien d'un réseau d'influence sur le long terme. Depuis 2009, 143 personnes étrangères ont été reçues, en France, à ce titre.

2. La prospective des systèmes de forces (21 millions d'euros en CP)

La prospective des systèmes de forces regroupe les activités destinées à identifier les besoins opérationnels et à orienter et exploiter les études de défense pour éclairer les choix ultérieurs en matière de capacités opérationnelles. Instrument essentiel de la préparation du futur, elle fait partie intégrante du processus conduisant à la programmation et à la planification. En vue de conjuguer les dimensions opérationnelles et techniques, ces activités sont conduites de façon collégiale par les officiers de cohérence opérationnelle (OCO) de l'état-major des armées (EMA) et les architectes de systèmes de forces (ASF) de la direction générale de l'armement (DGA). Elles se trouvent placées sous l'égide du comité d'architecture des systèmes de forces (CASF), co-présidé par l'EMA et la DGA.

Ces activités comprennent la réalisation d'études à caractère opérationnel et technico-opérationnel (EOTO), objet de la sous-action 7-2 du programme 144 . Elles s'appuient également sur les résultats des études amont qui font l'objet de la sous-action 7-3.

Les EOTO éclairent, dans les domaines opérationnels et techniques, les réflexions en matière d'équipement et d'emploi. Ces études portent sur la définition des besoins futurs à satisfaire ; sur la recherche du meilleur compromis entre les caractéristiques opérationnelles, les spécifications techniques et les coûts associés dans les systèmes en projet ou les évolutions des systèmes existants ; et sur l'emploi des systèmes d'armes. Elles font l'objet d'un programme annuel prévisionnel soumis à la validation du comité des études à caractère opérationnel et technico-opérationnel (CETO), présidé par un représentant du chef d'état-major des armées.

La sous-action « Prospective des systèmes de forces » est dotée par le PLF 2016 de 20,95 millions d'euros. Sur ce montant, stable par rapport à 2015, 3 millions d'euros (16,7 %) sont affectés, comme cette année, à la dissuasion, le reste étant consacré aux systèmes de forces conventionnels.

Répartition des crédits de la sous-action 7-2 « Prospective des systèmes de forces » pour 2016

(en millions d'euros)

Opérations budgétaires

AE

CP

Part du total (CP)

Dissuasion

3,00

3,00

16,7 %

Commandement et maitrise de l'information

5,75

5,21

29,0 %

Engagement - combat

6,80

7,50

41,8 %

Études transverses

0,50

0,94

5,2 %

Projection-mobilité-soutien

1,00

1,31

7,3 %

Protection et sauvegarde

3,9

2,99

16,7 %

Total

17,95

17,95

100,0 %

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

3. Les études amont (706 millions d'euros en CP)

Les études amont, objet de la sous-action 7-3 du programme 144, sont définies comme « des recherches et études appliquées rattachées à la satisfaction d'un besoin militaire prévisible et contribuant à constituer, maîtriser, entretenir ou à développer la base industrielle et technologique de défense (BITD), ainsi que l'expertise technique de l'État nécessaires à la réalisation des opérations d'armement » . Ces travaux poursuivent un triple objectif :

- disposer des technologies nécessaires au développement et à l'évolution des systèmes pour lesquels une autonomie nationale totale ou partielle est requise ;

- disposer des compétences industrielles et étatiques permettant de réaliser les programmes futurs, dans un cadre national ou en coopération ;

- susciter et accompagner l'innovation dans les domaines intéressant la défense, par le canal de dispositifs de recherche coordonnés avec l'Agence nationale de la recherche (ANR) ou en favorisant la compétitivité et l'accès au marché de la défense aux PME/PMI et entreprises de taille intermédiaire (ETI), en lien avec la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS).

Depuis 2014, la gouvernance des études amont est organisée selon une segmentation de la recherche scientifique et technologique, par agrégats sectoriels qui présentent une cohérence en termes d'objectifs capacitaires, industriels et technologiques.

Les priorités en matière d'études amont définies par la LPM 2014-2019

Suivant le rapport annexé à la LPM 2014-2019 dans sa rédaction actualisée par la loi du 28 juillet 2015, les priorités en matière d'études amont concernent :

- la préparation du renouvellement des deux composantes de la dissuasion ;

- la conception des futurs aéronefs de combat au travers d'une dépendance mutuelle organisée autour du couple franco-britannique, la préparation des évolutions du Rafale, l'autoprotection et les travaux spécifiquement militaires sur les hélicoptères, l'insertion des drones dans la circulation aérienne en coopération européenne ;

- la montée en puissance de la rationalisation de l'industrie franco-britannique pour le renouvellement et la rénovation des systèmes de missiles ;

- la lutte sous-marine, les systèmes de combat naval modulaires opérant en réseaux, les architectures innovantes pour les bâtiments de surface ;

- la montée en puissance de la cyberdéfense ;

- la poursuite des efforts sur la protection des véhicules, des équipages et des combattants, la surveillance des itinéraires ; les nouvelles technologies pour munitions ;

- la préparation de futurs programmes spatiaux d'écoute, d'observation et de communication ; la poursuite de l'effort sur le traitement des images, la guerre électronique, l'exploitation et le traitement des données de renseignement, la numérisation de l'environnement géophysique, les évolutions des systèmes de radionavigation ;

- la lutte anti-drones.

Source : Légifrance

a) Une prévision en ligne avec l'objectif de la LPM

Globalement, la sous-action « Études amont » est dotée, pour 2016, de 680 millions d'euros en AE et 706,5 millions d'euros en CP , soit 55 % de l'ensemble des crédits de paiement prévus pour le programme 144. Ce niveau de CP, comme on l'a signalé déjà, marque, par rapport à 2015, une diminution sensible (- 32 millions d'euros en CP, soit - 4,5 %), mais ne remet pas en cause l'objectif fixé en la matière par la LPM 16 ( * ) - qui prévoit, en faveur des études amont, une dotation de 730 millions d'euros en moyenne annuelle sur la période 2014-2019 , soit environ 100 millions de plus par an qu'avant 2013. Vos rapporteurs pour avis resteront vigilants quant au respect de cet objectif.

Sur la dotation prévue pour l'année prochaine, le tiers des CP (237 millions d'euros) se trouve affecté à la dissuasion, le reste étant consacré aux systèmes de forces conventionnels.

Répartition et évolution des crédits de la sous-action 7-3 « Études amont »

(en millions d'euros)

Opérations budgétaires

LFI 2015

PLF 2016

Évolution 2015-2016 (CP)

AE

CP

Part du total (CP)

AE

CP

Part du total (CP)

Dissuasion

199,00

232,00

31 %

158,00

237,00

34 %

+ 2 %

Aéronautique et missiles

212,91

168,55

23 %

199,00

164,27

23 %

- 3 %

Information et renseignement classique

97,00

114,74

15 %

84,00

92,27

13 %

- 20 %

Information et renseignement espace

20,00

12,39

2 %

12,00

13,28

2 %

+ 7 %

Naval

37,00

34,23

5 %

42,00

31,30

4 %

- 9 %

Terrestre, NRBC et santé

40,00

52,43

7 %

44,00

43,46

6 %

- 17 %

Innovation et technologies transverses

137,00

124,56

17 %

141,00

124,96

18 %

0 %

Total

742,91

738,91

100 %

680,00

706,53

100 %

- 4 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

On lira dans l'encadré ci-après quelles études amont sont prévues, au moyen de ces crédits, pour 2016. En outre, l'année prochaine devrait être marquée par le lancement effectif de la coopération convenue, en mai dernier, entre l'Allemagne, la France et l'Italie, récemment rejointes par l'Espagne, afin de conduire en commun une étude, d'une durée de deux ans, visant à préparer la phase de développement d'une nouvelle génération de drones MALE (moyenne altitude, longue endurance) à l'horizon 2025. Cette étude, dont le budget doit s'élever au total à 60 millions d'euros, a pour but d'instruire les nombreux compromis nécessaires sur l'expression du besoin et sur les choix de définition technique ; les points principaux sont le partage du concept d'emploi, l'architecture du système, la cybersécurité, la certification, la navigabilité, le choix des capteurs et les liaisons de données et l'insertion dans l'espace aérien. L'Allemagne a demandé à être leader de cette coopération, dans laquelle elle interviendra de fait à hauteur de 31 %, tandis que l'Espagne, la France et l'Italie, chacune, interviendront pour 23 %.

Les études amont prévues en 2016


Dissuasion (237 millions d'euros en CP). - Les crédits affectés pour 2016 aux études amont concernant la dissuasion le sont au profit, en ce qui concerne la composante océanique de la dissuasion, de la préparation du programme de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de troisième génération et des études visant à porter à maturité les technologies pour les évolutions du missile M51 et, pour ce qui touche à la composante aéroportée, des études et expérimentations préparant la prochaine génération de missile. Les études portant sur les transmissions nucléaires et stratégiques seront également poursuivies.


Aéronautique et missiles (164 millions d'euros en CP). - Dans le domaine de l'aviation de combat, l'année 2016 sera marquée par l'achèvement prévu de la phase de faisabilité du projet de démonstrateur de drone de combat en coopération franco-britannique. Les études contribuant à la préparation des évolutions du Rafale seront poursuivies en 2016, notamment dans le domaine de la guerre électronique et du radar pour lequel de nouveaux traitements feront l'objet de démonstrations. Dans le domaine des hélicoptères de combat et des aéronefs de transport, les études relatives à la préparation d'un futur standard du Tigre seront poursuivies ainsi que celles portant sur de nouveaux types de leurres et sur l'autoprotection des aéronefs. Dans le domaine des missiles, faisant suite aux orientations proposées en 2015, des travaux d'études de propulsions de nouvelle génération seront poursuivis (propulsion solide bi-pulse, propulsion modulée). Les études se poursuivront également au niveau des autodirecteurs, des matériaux énergétiques de défense (explosifs et propergols principalement) et des têtes militaires (pénétration et maîtrise des effets).


Information et renseignement classique (92 millions d'euros en CP). - Dans les domaines du renseignement militaire et de la surveillance, les engagements prévus pour 2016 portent principalement sur des études pour les futurs moyens de recueil et de traitement d'images et des émissions électromagnétiques et sur les technologies de surveillance, de détection et de pistage de cibles. Dans ces domaines, les principaux résultats attendus de l'année concernent l'imagerie radar à ouverture synthétique et l'imagerie hyperspectrale, ainsi que des avancées technologiques dans le domaine des radars. Dans les domaines des systèmes d'information et de communications et de la cybersécurité, les principaux attendus portent sur les formes d'ondes pour la radio haute fréquence du futur et sur les liaisons à haut débit pour plateformes aéronautiques. Les engagements de l'année concernent principalement les futurs systèmes de communication à haute fréquence, les technologies de sécurité des systèmes d'information et de cyberdéfense, ainsi que des travaux dans le domaine de l'environnement géophysique.


Information et renseignement espace (13 millions d'euros en CP). - Dans le domaine spatial, seront poursuivis en 2016 les travaux portant sur le segment utilisateur des futures capacités de télécommunications satellitaires ainsi que sur la préparation des moyens spatiaux futurs de renseignement d'origine électromagnétique.


Naval (31 millions d'euros en CP). - Les principaux attendus des études amont du domaine naval en 2016 concernent les points d'application des feuilles de route technologiques sur les bâtiments de surface, en particulier les frégates, notamment dans les domaines du radar, de la guerre électronique et de la lutte sous la mer. Les engagements portent essentiellement sur la poursuite des travaux et le lancement de nouvelles études sur les systèmes de combats des navires.


Terrestre, NRBC et santé (43 millions d'euros en CP). - En 2016, les attendus du domaine terrestre portent principalement sur des technologies permettant d'améliorer la modulation et la maîtrise de la fonction feu. Les engagements portent principalement sur le lancement de travaux en robotique et optronique notamment pour la reconnaissance et la surveillance. Il est également prévu de poursuivre des études dans le domaine de la protection des véhicules et dans celui des munitions. Dans le domaine de la défense NRBC, les études concernant les contre-mesures médicales, la détection et l'approfondissement de la connaissance des agents NRBC se poursuivront. Les travaux portant sur la santé du militaire en opération seront maintenus, notamment dans les domaines de la réparation tissulaire par thérapie cellulaire et de la lutte contre le choc hémorragique.


Innovation et technologies transverses (125 millions d'euros en CP). - Les études amont à caractère transverse concernent les technologies critiques, des technologies clés et le développement de l'expertise technique nécessaire à la conduite des opérations d'armement ; en 2016, les principaux attendus en la matière visent les composants et matériaux critiques pour les futurs systèmes d'arme, ainsi que de nouvelles méthodologies pour leur évaluation.

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

Notons que le soutien à l'innovation est effectué au moyen de différents dispositifs, dont ASTRID (accompagnement spécifique des travaux de recherche et d'innovation de défense, géré par l'Agence nationale de la recherche - ANR), lancé en 2011 pour financer des projets de laboratoires de recherche agissant seuls ou avec des entreprises, notamment des PME innovantes ; et RAPID (régime d'appui pour l'innovation duale, piloté par la DGA). Ce dernier dispositif, mis en place en 2009 pour soutenir l'innovation duale des PME, se trouve étendu depuis 2011 au soutien des entreprises intermédiaires de moins de 2 000 salariés ; ses crédits sont passés de 40 millions d'euros en 2013 à 45 millions en 2014 et 50 millions en 2015, soit une augmentation de 25 % en trois ans . Une première analyse, conduite cette année, permet de dresser un bilan positif :

- le dispositif RAPID représente pour le ministère de la défense un accès à de nouvelles PME, en majorité non référencées à la DGA ;

- il se traduit par des ruptures technologiques dans 60 % des cas et débouche sur des démonstrateurs pour 45 % des projets ;

- les retombées en termes de défense sont significatives : seuls 10 % des projets analysés ne débouchent sur aucune application de défense ;

- les bénéfices économiques et industriels sont indéniables : la moitié des projets évalués créent et pérennisent des emplois.

b) Une partie seulement de l'effort de recherche de défense

Les études amont ne constituent qu'une partie de l'effort de recherche en matière de défense . Celui-ci est usuellement mesuré à travers les agrégats « recherche et technologie » (R&T, composé du budget des études amont et des subventions aux écoles relevant de la tutelle de la DGA, que retrace la sous-action 7-4 du programme 144) et « recherche et développement » (R&D, composé de l'agrégat R&T précité, des autres études de défense - EPS, EOTO, crédits de recherche du CEA-DAM et crédits de recherche duale du CNES et du CEA - et des crédits de développement des programmes d'armement retracés, au plan budgétaire, par le programme 146 « Équipement des forces » de la mission « Défense »).

Évolution des crédits de recherche de défense

(CP, en millions d'euros)

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

PLF 2016

Études amont

660,1

653,2

645,2

633,2

747,9

745,0

738,9

706,5

R&T

821,0

814,7

800,5

780,5

896,7

866,7

863,7

834,5

Études de défense

1 571,3

1 620,1

1 647,9

1 644,0

1 728 ,4

1 728,0

1 587,4

1 529,5

- dont recherche CEA

527,4

585,5

626,6

647,7

615,0

640,8

505,3

488,5

- dont EPS

3,9

3,5

4,2

4,5

4,7

5,8

5,5

5,5

- dont EOTO

19,0

18,5

19,6

18,5

19,8

20,5

20,8

21,0

- dont recherche duale

200,0

200,0

196,9

192,9

192,2

192,9

192,1

180,1

Développements (prog. 146)

2 253,1

1 948,5

1 629,6

1 800

1 550,0

1 835,1

2 051,6

2 255,2

Total R&D

3 824,3

3 568,6

3 277,5

3 444,0

3 278,4

3 563,1

3 639,0

3 784,7

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Le budget de R&T est prévu pour 2016 à hauteur de 834,5 millions d'euros en CP, en baisse de 3,5 % par rapport à 2015 (- 29 millions d'euros). Les développements réalisés dans le cadre des programmes d'armement, en revanche, bénéficieront de 2,255 milliards d'euros (crédits inscrits sur le programme 146), soit une augmentation de près de 10 % par rapport à 2015. De la sorte, le montant total du budget de R&D de la défense sera porté à près de 3,785 milliards d'euros l'année prochaine, en augmentation par rapport aux années précédentes (+ 10 %, en cumul, en deux ans ; + 25 % en trois ans) . Vos rapporteurs pour avis s'en réjouissent : c'est un niveau d'effort, en la matière, qui n'avait pas été atteint depuis 2009.

Évolution des crédits de recherche de défense

(CP, en millions d'euros)

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

PLF 2016

Études amont

747,9

745,0

738,9

706,5

R&T

896,7

866,7

863,7

834,5

Développements (prog. 146)

1 550,0

1 835,0

2 051,6

2 255,2

Total R&D

3 278,4

3 563,1

3 639,0

3 784,7

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Malgré les contraintes pesant sur ses finances publiques, la France est le pays d'Europe qui consacre le plus gros effort budgétaire à sa R&D de défense , comme le montre, sous réserve des précisions méthodologiques, le tableau suivant.

Évolution des crédits de recherche de défense*

(crédits exécutés, en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

France

Budget défense

41,84

41,23

41,27

42,06

41,77

R&T

Montant

0,8

0,78

0,86

0,87

0,86

% budget

1,91 %

1,89 %

2,1 %

2,07 %

2,06%

R&D

Montant

3,28

3,44

3,29

3,56

3,64

% budget

7,84 %

8,34 %

7,97 %

8,46 %

8,71%

Royaume-Uni (a)

Budget défense

39,2

39,9

39,1

42,3

n.d.

R&T

Montant

0,61

0,45

>0,51

n.d.

n.d.

% budget

1,56 %

1,13 %

>1,3 %

n.d .

n.d.

R&D

Montant

2,9

2,67

2,83

n.d.

n.d.

% budget

7,40 %

6,69 %

7,23 %

n.d .

n.d.

Allemagne

Budget défense

31,98

31,87

33,28

32,84

32,97

R&T

Montant

0,391

0,359

0,392

0,389

0,350

% budget

1,22 %

1,13 %

1,18 %

1,18 %

1,06 %

R&D

Montant

0,922

0,918

0,927

0,815

0,715

% budget

2,88%

2,88 %

2,79 %

2,48 %

2,16 %

Italie (b)

Budget défense

23,87

22,8

23,13

22,8

21,88

R&T

Montant

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

% budget

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

R&D

Montant

0,06

0,06

0,06

0,06

0,06

% budget

0,25 %

0,26 %

0,26 %

0,26 %

0,27 %

* Le périmètre peut être légèrement différent d'un pays à l'autre.

(a) Pour le Royaume-Uni, le chiffre retenu comme budget de la défense correspond à ce qui est appelé « Provision of Defence capability ». Le budget indiqué pour l'année n correspond au budget du 1 er avril n au 31 mars n+1. Le chiffre indiqué pour 2014 correspond au budget révisé, les chiffres du budget exécuté n'étant pas encore connus. Le taux de change entre livre et euro utilisé est moyenné sur l'année : pour 2015, il n'était pas encore établi à la date d'élaboration du présent tableau. L'évolution du budget de la défense en monnaie nationale est d'ailleurs différente de celle qu'on observe en euros, en raison des fluctuations du taux de change. Enfin, la publication des chiffres de R&T a pris beaucoup de retard. Ainsi, les chiffres de R&T pour 2013-2014 n'étaient pas encore tous publiés à la date d'élaboration du présent tableau ; les données ont donc été actualisées des éléments officiels connus.

(b)  La R&D italienne est principalement financée par des crédits extérieurs au ministère de la défense, ceux des ministère du développement économique, ministère de la recherche, fonds régionaux et programmes d'armement notamment.

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

4. La gestion des moyens et subventions (276 millions d'euros en CP)

La sous-action 7-4 « Gestion des moyens et subventions » est dotée de 276 millions d'euros par le PLF 2016. Cette action retrace :

- les subventions pour charges de service public aux opérateurs de l'État rattachés au programme 144 (ONERA et écoles relevant de la tutelle de la DGA) ;

- des subventions versées à des organismes d'études et à l'institut Saint-Louis ;

- la masse salariale des élèves de l'École polytechnique (17,3 millions d'euros en 2016, dont 1,8 million d'euros de charges patronales - hors compte d'affectation spéciale « Pensions » - désormais incluses) ;

- enfin, des dotations en fonds propres d'écoles sous la tutelle de la DGA , afin d'assurer le financement de travaux et l'engagement financier du ministère de la défense dans le cadre du contrat de plan État-région (CPER) Midi-Pyrénées 2015-2020 (8,7 millions d'euros en AE et 3,2 millions d'euros en CP).

À périmètre constant (comprenant les subventions pour charges de service public, les subventions à des organismes d'étude et à l'institut Saint-Louis, et la masse salariale des élèves polytechniciens hors charges patronales), les crédits de cette sous-action sont en hausse de 2,5 % ( + 7 millions d'euros ) par rapport à la LFI 2015. Cette hausse correspond au relèvement, dans la prévision initiale, de la subvention de l'ONERA. La situation de cet établissement, objet de préoccupation pour vos rapporteurs, justifie un développement particulier dans le présent rapport 17 ( * ) .

a) L'ONERA : une situation difficile qui appelle à la fois des réponses d'urgence et des solutions structurelles

L'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA), établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), a pour mission de développer, d'orienter, de coordonner et de promouvoir les recherches dans le domaine aérospatial. Référence internationale dans son champ de compétence et d'expertise, outil clé pour l'ensemble de la filière aéronautique, l'Office a en charge les essais nécessaires à l'exécution de ces recherches 18 ( * ) . À ce titre, il gère notamment douze souffleries, premier parc européen en la matière.

Le PLF 2016 prévoit pour cet établissement une subvention de 105 millions d'euros , soit une augmentation de 7 millions d'euros par rapport à la prévision inscrite en LFI 2015 (98 millions d'euros) mais, en réalité, une baisse de 9 millions d'euros par rapport la subvention totale effectivement versée pour 2015 (114 millions d'euros) : d'une part, cette année, 7 millions d'euros sont venus abonder la prévision initiale, grâce à la mobilisation de reports de crédits, comme l'avait annoncé le PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015 ; d'autre part, un complément exceptionnel de 9 millions d'euros a été versé par le ministère de la défense. Ces dernières mesures, bienvenues, ne suffisent cependant pas à régler les nombreuses difficultés que traverse aujourd'hui l'ONERA, mises en lumière par un rapport de la Cour des comptes rendu public en septembre dernier 19 ( * ) .

(1) La situation actuelle

En synthèse, les difficultés de l'ONERA relèvent de trois domaines : la gouvernance, les ressources et les infrastructures de l'établissement.

(a) Des problèmes de gouvernance

Le rapport précité de la Cour des comptes, analysant la gestion entre 2008 et 2013 de l'ONERA, a souligné, notamment :

- d'une part, de nombreuses anomalies caractérisant le fonctionnement du conseil d'administration (absentéisme, transmission des procès-verbaux très au-delà du délai réglementaire, délais de convocation restreints), qui ont amoindri son rôle décisionnel ;

- d'autre part, la faible implication de la tutelle de l'établissement - le ministère de la défense, en pratique la DGA -, dans sa mission d'orientation, de supervision et de contrôle ;

- enfin, l' insuffisance du pilotage stratégique . En effet, le dernier document de stratégie générale date de 2002 et l'Office ne dispose plus de contrat d'objectifs et de performance depuis la fin 2008.

(b) Des problèmes de ressources

Traditionnellement, le ministère en charge des transports , par le canal de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), versait à l'ONERA une subvention représentant environ 3,7 millions d'euros dans les dernières années. Or le versement de cette subvention s'est arrêté en 2011 , sans concertation avec l'Office 20 ( * ) .

Malgré le relèvement de la subvention du ministère de la défense , comme ci-dessus indiqué, à hauteur de 105 millions d'euros pour 2016, après une subvention effective de 114 millions d'euros en 2015 comprenant 9 millions d'euros de complément exceptionnel, le budget de l'établissement s'avère déficitaire : le compte de résultat fait apparaître une perte de 3,7 millions d'euros pour l'année en cours.

Parallèlement, nonobstant une amélioration en 2014 et prévue pour 2015, l'activité contractuelle de l'ONERA est orientée à la baisse , alors que cette activité constitue l'essentiel des ressources propres de l'établissement (près de 109 millions d'euros sur un total de 131 millions d'euros, soit 83 %, selon la prévision pour 2015).

Évolution des prises de commandes par l'ONERA

(en euros, hors taxe)

2010

2011

2012

2013

2014

2015 (août)

Industriel (secteur privé)

32 843 413

44 239 617

31 017 748

28 373 075

40 756 459

12 641 796

Institutionnel civil

54 159 886

36 317 295

40 165 482

30 004 073

24 819 772

21 010 263

Total Industriel + Institutionnel civil

87 003 299

80 556 911

71 183 229

58 377 148

65 576 230

33 652 059

Institutionnel défense

38 092 101

39 247 175

43 343 438

25 399 084

28 746 964

8 908 090

Total

125 095 400

119 804 086

114 526 667

83 776 232

94 323 195

42 560 149

Source : ONERA

Le ministère de la défense demeure un client majeur de l'ONERA, sa part dans l'activité contractuelle de l'établissement représentant le tiers de celle-ci.

Évolution de l'activité contractuelle de l'ONERA par commanditaire

2014

Prévision pour 2015

Ministère de la défense

33%

32%

Direction générale de l'aviation civile

3 %

3 %

Agence nationale de la recherche

7 %

7 %

Autres institutionnels civils

10 %

13 %

Union Européenne

11 %

11 %

Industries aérospatiales

32 %

26 %

Autres industries et divers

4 %

8 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

(c) Des problèmes d'infrastructures

Depuis plusieurs années, l'ONERA, implanté sur huit centres principaux, cherche à rationaliser ses implantations en Île-de-France (sites de Châtillon, Meudon et Palaiseau). Ce dossier paraît gelé. L'immeuble de grande hauteur (IGH) de Châtillon constitue un enjeu particulier, en raison des contraintes lourdes qui s'y attachent en matière d'hygiène et de sécurité au travail et du coût afférent de mise aux normes. Comme l'a noté la Cour des comptes, « malgré d'importants travaux engagés en 2003, l'Office reste sous une menace permanente de non-conformité. Les travaux de remise aux normes (plus de 50 millions d'euros) ne permettant pas d'y rester à terme, la direction a initié un départ partiel. »

Par ailleurs, alors que des investissements substantiels sont nécessaires pour les souffleries (3,5 millions d'euros par an pour le maintien en condition opérationnelle, le triple en incluant une remise à niveau), la soufflerie SM1A de Modane (Savoie) présente un besoin urgent de travaux , eu égard à l'affaissement des sols constaté en 2009 puis, à nouveau, à l'été 2015. La situation actuelle met l'ouvrage en danger. Le montant de l'opération de renforcement requise est estimé à 20 millions d'euros.

(2) Les solutions à mettre en place

Cette situation préoccupante appelle à la fois des réponses d'urgence et des solutions structurelles.

(a) Traiter les urgences

Deux urgences sont à traiter au plus vite : d'une part, le financement des travaux requis par la soufflerie SM1A de Modane et d'autre part, au-delà de cette aide, l' ajustement de la subvention de l'ONERA à un niveau qui assure l'équilibre du budget de l'établissement à court terme. Cet effort budgétaire doit permettre, en particulier, de mener les plus urgents travaux de mise aux normes requis par l' immeuble de Châtillon susmentionné.

Dans cette perspective, en concertation avec nos collègues rapporteurs pour avis du programme 146 21 ( * ) , vos rapporteurs sont à l'initiative d'un amendement de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées 22 ( * ) visant à majorer de 15 millions d'euros la subvention prévue par le PLF 2016 pour l'ONERA, en prélevant cette somme sur des opérations d'armement dont la conduite ne sera pas remise en question pour autant.

Le contexte exige aussi une complète remobilisation de la tutelle de l'établissement, à la fois pour traiter les urgences précitées et pour préparer l'avenir. M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, a donné un signal positif en ce sens, lors de l'examen du PLF 2016 par l'Assemblée nationale, en soulignant « l'intérêt et l'importance que nous accordons à cet Office 23 ( * ) » et en déclarant notamment : « Je suis très sensible au sort de l'ONERA, et notamment aux questions qui touchent à la soufflerie de Modane, dont je suis directement informé. J'ai demandé à la direction un rapport stratégique, à partir duquel j'espère pouvoir établir un contrat d'objectifs avant la fin de l'année. Cela permettra d'assurer le développement de ce très bel outil, qu'il faut quelque peu réorienter - mais je sais que la nouvelle direction s'y attelle 24 ( * ) ».

(b) Préparer l'avenir

Pour le moyen terme, il est en effet nécessaire de doter l'ONERA, dans les meilleurs délais, d'un contrat d'objectifs et de performance . L'élaboration d'un tel document de stratégie constituera la première des solutions structurelles permettant de résoudre les difficultés actuelles de l'établissement.

Le PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016 précise qu'une action a été engagée à cet effet, entre l'ONERA et le ministère de la défense, en concertation avec les autres ministères concernés (chargés notamment de la recherche et des transports) et les industriels du domaine aéronautique. Le contrat en projet couvrira la période 2016-2020 ; il doit porter à la fois sur la stratégie scientifique et technologique , la valorisation des travaux et la stratégie immobilière . Par ailleurs, un nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) de l'Office est en cours d'élaboration, avec les services de France Domaine. Vos rapporteurs souhaitent que ce document permette un rapide déblocage des opérations de regroupement des sites franciliens de l'établissement.

Une réflexion sur la gouvernance de l'ONERA paraît également indispensable, comme l'a préconisée la Cour des comptes.

Enfin, dans le cadre qui sera ainsi défini et pour développer les ressources propres de l'Office , en suivant des recommandations présentées par le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) 25 ( * ) , il paraît nécessaire que l'établissement poursuive l' adaptation de son offre de recherche aux besoins actuels de l'industrie aéronautique . À cet effet, il devra sans doute abandonner ou réduire certaines thématiques, en renforcer d'autres, et affirmer un rôle de synthèse. De même, il semble opportun qu'il trouve à se rapprocher des acteurs clés de la recherche et de l'enseignement dans les domaines de l'aérospatial et de la défense , notamment dans l'objectif de consolider des pôles géographiques cohérents dans la région parisienne et la région toulousaine.

Vos rapporteurs, attachés à la pérennité d'un outil essentiel pour la filière aéronautique et spatiale, tiennent à marquer leur confiance dans ces évolutions de l'ONERA.

b) Les autres subventions retracées par le programme

Au-delà de la subvention de l'ONERA, et outre la masse salariale des élèves de l'École polytechnique et des dotations en fonds propres d'écoles relevant de la tutelle de la DGA dans le cadre du CPER Midi-Pyrénées 2015-2020, déjà mentionnées, la sous-action « Gestion des moyens et subventions », l'année prochaine, financera :

(1) Les subventions des écoles sous la tutelle de la DGA

Les subventions pour les écoles placées sous la tutelle de la DGA sont prévues, globalement, à hauteur de 130,8 millions d'euros . Elles se répartiront comme suit :

- pour l'École polytechnique (X), 65,47 millions d'euros, auxquels s'ajoute la masse salariale des élèves polytechniciens déjà mentionnée (17,36 millions d'euros) ;

- pour l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE), 34,06 millions d'euros ;

- enfin, pour l'École nationale supérieure de techniques avancées (ENSTA) Paris Tech , 17,12 millions d'euros, et, pour l'ENSTA Bretagne , 14,19 millions d'euros.

Tous ces montants sont stables par rapport à 2015.

(2) La subvention de l'Institut de recherche de Saint-Louis

La subvention de l'Institut de recherche de Saint-Louis , fixée conventionnellement entre la France et l'Allemagne, sera l'année prochaine identique à celle des années précédentes depuis 2011 : 17,74 millions d'euros . Rappelons que cet établissement franco-allemand, créé par une convention de 1958 dans le but de mettre en oeuvre une coopération étroite entre les deux États en ce qui concerne les recherches et études, tant scientifiques que techniques, dans le domaine de l'armement, et de renforcer ainsi une défense commune, réalise des recherches fondamentales et appliquées, des études techniques et des démonstrateurs de faisabilité technologique, ainsi que des travaux d'expertise.

(3) Des subventions à des fondations reconnues d'utilité publique

Des subventions à des fondations reconnues d'utilité publique , principalement la Fondation pour la recherche stratégique, sont prévues, à hauteur de 1,2 million d'euros comme en 2015, au bénéfice de travaux portant sur l'entretien de la pensée stratégique de défense dans le domaine de l'armement, des technologies et de la base industrielle et technologique de défense (BITD).

(4) Le soutien d'actions en faveur des PME-PMI stratégiques

Pour 0,8 million d'euros comme en 2015, le PLF 2016 prévoit enfin des subventions de soutien d'actions en faveur des PME-PMI stratégiques pour la défense, lancées notamment dans le cadre de partenariats avec les organisations professionnelles, les acteurs locaux du développement économique (notamment les agences de développement régionales ou les chambres consulaires) ou des associations représentatives de PME technologiques.

C. RELATIONS INTERNATIONALES ET DIPLOMATIE DE DÉFENSE

L'action 8 « Relations internationales et diplomatie de défense » du programme 144 regroupe les crédits destinés aux actions de coopération internationale et d'influence du ministère de la défense , soit en pratique, pour l'essentiel : l'aide versée par la France au gouvernement de la République de Djibouti sur le fondement du traité du 20 décembre 2011 ; la contribution française au budget de l'Agence européenne de défense (AED) ; les dépenses de fonctionnement des postes permanents à l'étranger (PPE) des missions de défense ; enfin, la contribution aux actions de coopération bilatérales et multilatérales entreprises dans le cadre du partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes (PMG8). Cette action est gérée par la DGRIS. Déjà réorganisée en 2015 26 ( * ) , elle fait l'objet, dans le PLF 20P16, de deux mesures structurelles :

- d'une part, le budget de l' indemnité compensatrice SNCF versée aux effectifs militaires relevant de la DGRIS (soit 0,16 million d'euros pour l'année prochaine) se trouve désormais transféré au programme 178 « Emploi des forces » de la mission « Défense » ;

- d'autre part, la contribution annuelle versée au gouvernement de la République de Djibouti en compensation de l'implantation des forces françaises sur son territoire requiert une mesure de périmètre (augmentation pérenne) de + 4,8 millions d'euros l'année prochaine.

1. La mise en place de la DGRIS

Née d'une décision prise en 2013 afin d'assurer une meilleure cohérence des composantes de l'action internationale du ministère de la défense et pour permettre à chacune des entités concernées de se recentrer sur ses missions propres, la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) a été créée en janvier 2015 27 ( * ) à partir de la fusion de la délégation aux affaires stratégiques (DAS) et d'éléments transférés de l'état-major des armées (EMA) et de la direction générale de l'armement (DGA).

L'effectif de la DGRIS comprend, au total, 213 agents : 107 militaires (72 officiers, 28 sous-officiers, 7 militaires du rang) et 102 civils (86 agents de catégorie A, 7 agents de catégorie B et 9 agents de catégorie C), soit 209 agents du ministère de la défense, auxquels s'ajoutent quatre agents ne relevant pas du ministère (deux officiers étrangers, un ingénieur du CNES et un ingénieur du CEA). D'après les renseignements fournis à vos rapporteurs, la création de la DGRIS a conduit à regrouper certaines fonctions et à supprimer plusieurs doublons ; la conséquence en est une économie de 57 postes sur le périmètre de la fonction « relations internationales » du ministère de la défense . Ces déflations d'effectifs proviennent de l'ancienne DAS (-15 ETPT), de l'EMA (-17 ETPT) et de la DGA (-25 ETPT).

Les emplois sont répartis entre :

- la direction générale (directeur général, directeur général adjoint, cabinet et secrétariat ; 4 % de l'effectif total) ;

- la direction de la stratégie de défense, de la prospective et de la contre-prolifération (DSPC, 28 % de l'effectif) ;

- le service Europe Amérique du Nord et action multilatérale (SEAM, 22 % de l'effectif) ;

- le service des questions régionales (SQR, 20 % de l'effectif) ;

- enfin, le service du pilotage des ressources et de l'influence internationale (SPRI, 26 % de l'effectif).

Les compétences de la DGRIS

Aux termes de l'article 2 du décret n° 2015-4 du 2 janvier 2015, « la direction générale des relations internationales et de la stratégie contribue à la politique internationale coordonnée par le ministère des affaires étrangères et pilote l'action internationale du ministère de la défense, en y associant l'état-major des armées, la direction générale de l'armement et le secrétariat général pour l'administration. Elle pilote les travaux de prospective stratégique et coordonne ceux nécessaires à la préparation du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et à son actualisation régulière.

« Elle est notamment chargée :

« 1° De piloter et de coordonner l'action internationale du ministère en matière de relations bilatérales avec les Etats étrangers, de valider les plans de coopération et d'en superviser le déroulement ;

« 2° De contribuer à la définition des positions de la France au sein des organisations internationales traitant des questions de défense, de coordonner, de valider et d'adresser les instructions du ministre destinées aux représentations militaires et de la défense auprès de ces organisations internationales et de promouvoir les positions françaises. Cette compétence ne fait pas obstacle à la possibilité pour le chef d'état-major des armées d'adresser des instructions à ses représentants au sein de ces organisations internationales, dans le périmètre de ses attributions, après coordination entre l'état-major des armées et la direction générale des relations internationales et de la stratégie ;

« 3° De définir la stratégie d'influence internationale du ministère de la défense. A ce titre, elle propose au ministre :

« a) Conjointement avec l'état-major des armées et la direction générale de l'armement, chacun en ce qui le concerne, les affectations des attachés de défense ;

« b) Conjointement avec l'état-major des armées, la direction générale de l'armement et le secrétariat général pour l'administration, chacun en ce qui le concerne, celles des représentants militaires de la France et celles des officiers et des civils occupant au sein des organisations internationales les postes d'influence définis par décision ministérielle ;

« 4° D'élaborer des études et des propositions en matière de stratégie de défense. A ce titre, le directeur général ou son représentant anime le conseil de la stratégie de défense chargé de préparer les orientations stratégiques. La composition, l'organisation et le fonctionnement du conseil de la stratégie de défense sont fixés par arrêté ;

« 5° De suivre la planification de défense et de veiller, en liaison avec le chef d'état-major des armées, le délégué général pour l'armement et le secrétaire général pour l'administration, à l'articulation entre la stratégie de défense et ses évolutions et la programmation militaire élaborée par le chef d'état-major des armées ;

« 6° De piloter et de coordonner l'action du ministère dans le domaine de la lutte contre la prolifération, de la maîtrise des armements et du désarmement ;

« 7° De proposer les orientations en matière de contrôle des exportations de matériels de guerre et assimilés et de biens à double usage et de coordonner les travaux du ministère dans ce domaine ;

« 8° De représenter le ministère auprès des autres départements ministériels pour les questions touchant à l'action internationale du ministère de la défense, à l'exception des activités opérationnelles, de la conduite des coopérations en matière d'armement et du soutien aux opérations d'exportation . »

Source : Légifrance

Organigramme de la DGRIS

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Vos rapporteurs pour avis sont heureux que la mise en place de cette nouvelle direction générale d'administration centrale se soit bien déroulée, malgré un calendrier contraint, dans le contexte de réformes multiples au sein du ministère de la défense et de l'emménagement sur le site de Balard.

2. Les crédits pour 2016 (40 millions d'euros en CP)

La dotation prévue par le PLF 2016 pour l'action 8 « Relations internationales et diplomatie de défense » s'élève à 40,76 millions d'euros en AE et CP, soit 3,2 % des CP du programme 144 et une augmentation de 15 % par rapport à la LFI 2015. Comme on l'a déjà signalé, cette hausse des crédits de l'action est liée à celle de la contribution versée au gouvernement de la République de Djibouti en compensation de l'implantation des forces françaises sur son territoire.

Répartition pour 2016 des crédits de l'action 8 « Relations internationales et diplomatie de défense »

(en milliers d'euros)

Opérations budgétaires

AE = CP

Part du total

Déplacements et transports

668

1,7 %

Déplacements internationaux

2 185

5,3 %

Mobilité des personnels

460

1,1 %

Relations internationales

31 378

77 ,0%

Communication et relations publiques

228

0,5 %

Subventions et transferts (dont AED)

4 760

11,7 %

Accords internationaux (PMG8)

1 080

2,6 %

Total

40 759

100,0 %

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

a) L'aide versée au gouvernement de la République de Djibouti

L' aide versée au gouvernement de la République de Djibouti au titre de l'implantation de forces permanentes françaises sur le territoire de celle-ci, à elle seule, représente 67 % des crédits prévus pour l'action « Relations internationales et diplomatie de défense » en 2016 : 27,3 millions d'euros . Ce montant comprend la mesure de périmètre précitée de + 4,8 millions d'euros .

En 2017, une nouvelle augmentation pérenne sera nécessaire pour cette contribution annuelle, en vue de la porter à 30 millions d'euros. En effet, le traité de coopération signé avec Djibouti le 21 décembre 2011 , succédant à celui de 2003, est entré en vigueur le 1 er mai 2014, à la suite de sa ratification autorisée par les Parlements des deux États cosignataires : ce nouveau traité prévoit, notamment, que les impôts sur le revenu des militaires français sont désormais versés en France, ce qui minore le montant déductible de l'aide (impôts, droits divers et taxes jusqu'alors versées à Djibouti). L'impact de la mesure sur le niveau de l'aide à Djibouti ne sera complet qu'en 2017, en raison du décalage entre la date de paiement des impositions et l'ajustement, en conséquence, de cette contribution.

b) La contribution au budget de l'AED

La contribution française au budget administratif de l'Agence européenne de défense (AED) est prévue pour 2016 à hauteur de 4,76 millions d'euros . Ce montant apparaît en augmentation par rapport à la prévision actualisée pour 2015 (+ 3,5 %), mais il n'est inscrit qu' à titre conservatoire dans le PLF 2016, le niveau de la contribution due l'année prochaine par chaque État membre n'ayant pas encore été notifié par l'AED.

Du reste, les contributions françaises à l'AED sont demeurées relativement stables ces dernières années, représentant de l'ordre de 16 % du budget global de l'agence.

Évolution de la contribution au budget de l'AED

(CP, en millions d'euros)

Exécution 2013

Exécution 2014

Prévision 2015

PLF 2016

PLF

Actualisation

4,53

4,60

4,67

4,60

4,76

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

c) La contribution aux actions du PMG8

La contribution au partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes (PMG8) est fixée pour 2016 à hauteur d' un million d'euros , comme en 2014 et 2015. Les projets ainsi financés, qui participent du contrôle des transferts de biens et technologies sensibles et de la maîtrise des armements, s'inscrivent dans le cadre politique et les objectifs définis par le document adopté par les chefs d'État et de gouvernement lors du sommet du G8 de Deauville de 2011 ; le domaine biologique, notamment, est privilégié.

d) Les dépenses de déplacements et transports et le fonctionnement des postes permanents à l'étranger des missions de défense

Les déplacements et transports , y compris internationaux, du personnel affecté dans les missions de défense et des autres effectifs de la DGRIS, pour l'accomplissement de leurs missions (représentation, études, coordination), requerront, l'année prochaine, l'emploi de 2,8 millions d'euros au total, soit 7 % des crédits de l'action. Cette dotation est stable, l'accroissement d'activité du fait du contexte international ayant déjà été pris en compte par la LFI 2015 (+ 7 % par rapport à 2014).

Le reste des crédits prévus pour l'action par le PLF 2016 - 4,8 millions d'euros - vise à couvrir, pour l'essentiel, le fonctionnement des postes permanents à l'étranger (PPE) des missions de défense (attachés de défense et leurs adjoints) en place au sein de 85 ambassades et représentations permanentes auprès d'organisations internationales, hors charges communes (lesquelles sont financées sur le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » de la mission « Action extérieure de l'État »). Pour mémoire, les attachés de défense ont pour mission principale de contribuer à la préservation, au développement et à la promotion des intérêts français du domaine de la défense ; cette mission recouvre les échanges en matière de politique de défense, la coopération militaire et les relations en matière d'armement.

III. LA MESURE DES PERFORMANCES DU PROGRAMME

Les performances du programme 144, depuis 2015, sont mesurées par quatre objectifs 28 ( * ) :

- « renforcer une démarche prospective européenne en matière de sécurité et de défense en promouvant une démarche prospective commune » ;

- « améliorer le niveau de sécurité des forces et du patrimoine industriel et économique lié à la défense » ;

- « développer les capacités scientifiques technologiques et industrielles nécessaires à la défense » ;

- « contribuer à l'autorisation et au contrôle des transferts des biens et technologies sensibles ».

A. LE RENFORCEMENT DE LA DÉMARCHE PROSPECTIVE EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSE

Le ministère de la défense s'efforce de renforcer la dimension européenne des études de prospective géostratégique et géopolitique, destinées à nourrir l'analyse stratégique, comme celle des études opérationnelles et technico-opérationnelles (EOTO) permettant l'élaboration des systèmes de forces et de la prospective technologique susceptible de déboucher sur la définition de capacités technologiques et industrielles de l'outil de défense. Cette démarche se concrétise notamment par l'organisation de programmes de coopération, dans un cadre bilatéral ou par le canal de l'Agence européenne de défense (AED).

Les résultats obtenus sont mesurés par le calcul d'un « taux de coopération européenne en matière de prospective, de recherche et de technologie » , c'est-à-dire la proportion d'études ou de programmes de coopération ayant une dimension européenne par rapport au total de ces études et programmes.

Le sous-indicateur relatif aux études opérationnelles et technico-opérationnelles (EOTO) est abandonné à compter de 2016, dans la mesure notamment où, selon la justification donnée au sein du PAP annexé au PLF, « la difficulté de mener des EOTO en coopération résulte de facteurs en grande partie structurels. Une part importante des études, portant sur des domaines sensibles, ne peut être traitée en coopération (plus de 50 %). C'est notamment le cas des systèmes de souveraineté nationale (dissuasion, renseignement et sécurité des informations, etc.), et de la rénovation à mi-vie de nos systèmes d'armes (une large majorité d'entre eux est définie au niveau national et exportée). » Vos rapporteurs pour avis en prennent acte, comme ils l'ont fait, l'année dernière, de la suppression du sous-indicateur relatif aux études prospectives et stratégiques, en place jusqu'à 2014 29 ( * ) . Désormais, un seul sous-indicateur reste associé au taux de coopération européenne en matière de prospective de défense, visant les études amont et subventions aux organismes de recherche .

Taux de coopération européenne en matière de prospective, de recherche et de technologie

(en %)

Réalisations

Prévisions

Cible

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

PLF

Actuali-sation

Études amont et subventions aux organismes de recherche

17,2

17,7

18,0

15,8

15,2

13,9

15

15

15

15

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

La modestie de la cible (15 %) s'explique par le contexte économique européen, et la restriction des budgets publics de R&D de défense, qui conduisent, depuis 2011, à un ralentissement des lancements de nouvelles coopérations en matière d'études amont et à la diminution des montants financiers consacrées à celles-ci, en dehors des travaux réalisés en coopération franco-britannique.

La réalisation en 2013, orientée à la baisse par rapport à 2012, s'expliquait, notamment, par le report à 2014 d'une partie des paiements du projet NEURON (démonstrateur technologique de drone de combat). La faiblesse de la réalisation en 2014 (13,9 %), quant à elle, a résulté principalement du décalage, par rapport à ce qui avait été prévu, des paiements liés aux travaux du projet de démonstration d'aéronautique de combat FCAS DP menés en coopération avec le Royaume-Uni.

B. L'AMÉLIORATION DU NIVEAU DE SÉCURITÉ DES FORCES ET DU PATRIMOINE INDUSTRIEL ET ÉCONOMIQUE LIÉ À LA DÉFENSE

Depuis plusieurs années la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) a rationalisé son fonctionnement afin non seulement de mettre en oeuvre les orientations fixées pour la réforme du ministère de la défense, mais aussi d'améliorer la qualité du service rendu en l'adaptant aux missions prioritaires.

Dans ce cadre, la mission de contre-ingérence de la DPSD repose sur deux activités complémentaires : l'acquisition de renseignement de sécurité et l'application de mesures de protection, dans le but d'assurer et de maintenir au meilleur niveau la sécurité des forces armées et des acteurs industriels liés à la défense. Son action s'exerce de manière préventive.

Deux indicateurs ont été mis en place pour apprécier la performance de la DPSD dans l'exécution de ses missions d'enquête en vue de l'habilitation des personnels de la défense nationale d'une part, d'inspections des sites militaires sensibles et industriels liés à la défense.

1. La mission d'enquête en vue de l'habilitation

Cette fonction enquêtrice est exercée au titre de la protection du secret de la défense nationale. L'instruction interministérielle générale n°1300 30 ( * ) organise cette protection qui concerne tous les domaines d'activité relevant de la défense et de la sécurité nationale.

La DSPD est le service enquêteur du ministère de la défense. À ce titre, elle conduit les enquêtes de sécurité et émet les avis de sécurité permettant aux autorités compétentes de prendre les décisions d'habilitations. Elle agit de même pour le contrôle élémentaire, enquête administrative simplifiée, sollicité par l'autorité d'habilitation destinée à s'assurer de l'intégrité d'une personne. Il garantit que le degré de confiance qu'il est possible d'accorder à cette personne est compatible avec la fonction, l'affectation ou le recrutement pour lequel elle est pressentie ou lui permet d'avoir accès à certaines zones protégées.

Taux d'avis émis dans les délais prescrits

(en %)

2013 réalisation

2014 réalisation

2015 prévision PAP

2015 prévision actualisée

2016 prévision

2017

cible

96,3

96

96

90

94

98

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Cible

94

96

Réalisation et prévision actualisée (2015)

92,6

88,7

95,5

96,3

96

90

Cet indicateur mesure la performance de la fonction « habilitation » , en additionnant toutefois des procédures d'habilitations très différentes : contrôle élémentaire et « confidentiel défense » ; « secret défense » et « très secret défense » (enquêtes plus approfondies). Le bénéfice attendu des efforts consacrés à l'optimisation de la chaîne d'acquisition et d'exploitation du renseignement de sécurité et notamment le déploiement du logiciel SOPHIA, expliquait le maintien, pour 2015, d'un objectif de performance à 96%.

Les décisions prises au début de l'année suite aux attentats, visant à renforcer la protection du territoire national, ont conduit le service à devoir gérer des demandes d'avis de sécurité en sensible augmentation.

Ces besoins nouveaux ont eu pour conséquence un accroissement des délais et un taux de retard avoisinant les 10 %. L'établissement du niveau de performance à 98 %, est néanmoins justifié par le renforcement des effectifs accordés au service qui devrait se traduire par une amélioration.

Dans son rapport spécial sur les crédits de la mission défense pour 2016 31 ( * ) , le député François Cornut-Gentille estime que cet indicateur n'est pour la représentation nationale d'aucune utilité. Ce n'est pas le point de vue de vos rapporteurs : dans le contexte sécuritaire actuel, il permettra de mesurer la capacité du service à répondre aux nouveaux besoins.

2. La mission d'inspection

Les inspections conduites par la DPSD permettent de s'assurer que les sites militaires sensibles et industriels liés à la défense sont maintenus au meilleur niveau de sécurité. Un catalogue de sites, avec des fréquences d'inspection associées, est ainsi défini, dans une programmation annuelle.

Le contrôle de la protection du secret de la défense et du patrimoine industriel et scientifique est assuré par le centre du conseil, de la prévention et des inspections (CCPI) qui dispose d'officiers inspecteurs spécialisés en sécurité économique et industrielle.

Le nombre des entreprises contrôlées évolue chaque année en fonction, d'une part, des nouvelles entreprises liées à la défense par des contrats avec détention et accès à des informations ou supports classifiés, et d'autre part à la sortie d'entreprises du périmètre à la suite de fins de contrats, dépôts de bilan ou regroupements.

Le catalogue des sites et la périodicité des inspections sont des données sensibles qui ne peuvent faire l'objet d'une communication publique.

La performance du service repose sur deux leviers : l'évolution du besoin d'inspection et la disponibilité des inspecteurs. Chaque année, un programme d'inspection est arrêté. Le nombre d'inspections réalisées dépend de la capacité d'inspection du CCPI et donc de ses effectifs. Le recours à des officiers inspecteurs de réserve permet d'ajuster en partie cette capacité. Vos rapporteurs ont pu néanmoins constater que cette capacité se situe légèrement en dessous de la cible. L'accroissement des effectifs dans le cadre de l'actualisation de la loi de programmation militaire 2014-2019 devrait se concrétiser par une légère augmentation de la capacité des inspections et des actions préventives.

Taux des sites inspectés dans les délais prescrits

(en %)

2013 réalisation

2014 réalisation

2015 prévision PAP

2015 prévision actualisée

2016 prévision

2017

cible

91,9

94

94

96

97

98

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Cible

96

96

Réalisation et prévision actualisée (2015)

63

76,7

91,9

94

93

96

L'indicateur, « taux des sites du domaine militaire et des sites industriels et économiques liés à la défense inspectés dans les délais prescrits » montre qu'un effort significatif de la DPSD sans toutefois parvenir à atteindre les 100%.

Toutefois, comme le note dans son rapport spécial sur les crédits de la mission « Défense » 32 ( * ) , le député François Cornut-Gentille, ce pourcentage ne porte que sur une liste de sites et non sur la totalité et qu'il ne mesure pas la fréquence des inspections, ce qui en montre les limites.

L'intrusion le 7 juillet 2015 dans l'enceinte de l'établissement de munitions régional de Miramas a mis en avant la vulnérabilité de ce site qui avait été inspecté par la DPSD en 2007 et fait l'objet de plusieurs visites régulières annuelles depuis 2009. Cet exemple conduit à une interrogation légitime sur le niveau de protection des sites de même type.

La régularité des inspections et la pertinence des rapports produits n'est pas en cause, mais bien plutôt la mise en oeuvre de leurs recommandations. La protection peut supposer un ensemble de mesures comme le renforcement de la protection physique, la réparation et le maintien en condition des systèmes de surveillance, l'installation de systèmes de vidéo-surveillance, voire des mesures pérennes de reconstruction de magasins de stockage de munitions et de renforcement des capacités de détection des sites, qui incombent aux établissements mais pour lesquelles ceux-ci ne disposent manifestement pas des crédits suffisants. Le ministre de la défense a annoncé dans l'urgence qu'il confiait à la structure de préfiguration de la direction de la protection des installations (DPID) la réalisation d'une évaluation et l'inscription de crédits supplémentaires à hauteur de 60 millions d'euros pour 2016 afin de rehausser les mesures de protection, ce qui paraît une enveloppe limitée compte tenu du niveau de vulnérabilité et de celui de la menace.

L'enchevêtrement des responsabilités réparties entre les armées, les zones de défense et les services en charge de la réalisation des infrastructures (SID) explique sans doute en partie que cet incident ait pu avoir lieu. La mise en place d'une direction de la protection des installations, dont les crédits figurent aux programmes 212 « soutien à la politique de la défense » permettra peut-être de progresser en ce domaine. Elle ne suffira pas sans une clarification des responsabilités de chacune des entités concernées et un renforcement de la gouvernance.

Vos rapporteurs invitent donc le ministère du budget et le ministère de la défense à une réflexion sur la perfectibilité de cet indicateur pour assurer l'information des parlementaires concernant le suivi de la mise en oeuvre des rapports d'inspection de la DPSD et sur les moyens nécessaires pour renforcer rapidement la sécurité des sites de stockage des munitions et explosifs. Un indicateur sur le taux de suivi des recommandations des rapports d'inspection serait sans doute approprié pour mesurer la performance de la DPID.

C. LE DÉVELOPPEMENT DES CAPACITÉS SCIENTIFIQUES, TECHNOLOGIQUES ET INDUSTRIELLES NÉCESSAIRES À LA DÉFENSE

La composante scientifique, technologique et industrielle de l'autonomie stratégique constitue un enjeu majeur de la politique de défense. Cette autonomie suppose en effet de disposer, en France et en Europe, d'une base industrielle et technologique de défense (BITD) adéquate, soutenant le tissu des PME/PMI, et d'un dispositif de formation stimulant les échanges au niveau européen.

L'indicateur associé à l'objectif de développer ces capacités mesure le « taux de progression des technologies spécifiques nécessaires à la défense », c'est-à-dire la progression de la réponse des études amont aux besoins capacitaires, industriels et de base technologique qui sont exprimés pour les orienter. Il rend compte du franchissement des étapes clés que sont les principaux jalons des feuilles de route d'acquisition de ces technologies prévus pour chaque année.

Taux de progression des technologies spécifiques nécessaires à la défense

(en %)

Réalisations

Prévisions

Cible

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

• • • • • PLF

actualisation

• • 75

63,5

62

82

67

80

80

80

80

Source : PAP de la mission « Défense » annexé au PLF 2016

La cible de 80 % constitue un compromis entre une ambition trop importante et une exploration insuffisante d'innovations risquées mais à fort potentiel : il prend en compte le fait que certaines études amont explorent des voies qui - c'est le propre de la recherche - n'aboutiront pas toutes, ou nécessiteront un délai supérieur à la prévision initiale.

Le résultat constaté en 2014 (67 %) correspond en pratique au franchissement de 63 jalons technologiques sur les 85 prévus. Parmi les jalons validés, on peut citer, par exemple, la validation au sol de kits de discrétion pour avions de combat et de technologies de réduction de la signature des drones de combat ; des améliorations dans le domaine des radars aéroportés ; la validation d'échanges de données tactiques en temps réel entre le démonstrateur de tenue de situation multiplateformes de la marine et le système opérationnel équivalent de l'armée de l'air ; la finalisation des choix technologiques pour la définition d'une tête militaire à effets collatéraux réduits pour une roquette à précision métrique ; la validation des performances d'une maquette de désignateur laser léger pour fantassin ; la validation des briques technologiques destinées à la charge utile nouvelle génération des futurs satellites de télécommunications... Sur les 22 jalons non franchis, deux résultent d'échecs techniques : les travaux en cause n'ont pas conduit aux résultats espérés et ne seront donc sans doute pas poursuivis. Les autres jalons ont vocation à être franchis avec retard.

D. LA CONTRIBUTION À L'AUTORISATION ET AU CONTRÔLE DES TRANSFERTS DES BIENS ET TECHNOLOGIES SENSIBLES

Le contrôle des transferts des biens de défense et des technologies sensibles représente un enjeu essentiel pour prévenir la prolifération des armes et des technologies susceptibles de menacer la sécurité des forces déployées et celles de nos alliés. En outre, un contrôle défaillant en la matière pourrait priver les entreprises françaises de la possibilité de concourir aux marchés d'armement dans certains pays.

Jusqu'en 2013, la mise en oeuvre de l'objectif de contribuer à ce contrôle était suivi au moyen d'un indicateur mesurant les délais moyens de traitement des demandes d'agrément préalable pour l'exportation des matériels de guerre, d'une part, en procédure dite « continue » (visant des matériels peu sensibles, pour des projets peu sensibles), pour laquelle la cible était de 20 jours ouvrés, et, d'autre part, en procédure normale, dont la cible était de 43 jours. La transposition de la directive européenne sur les transferts intracommunautaires d'équipements militaires ayant entraîné une réforme globale du système de contrôle de ces transferts 33 ( * ) , dont l'entrée en vigueur est intervenue le 4 juin 2014, lorsque la mise en service du système d'information interministériel SIGALE a permis de traiter les nouvelles licences d'exportation, un nouvel indicateur a été élaboré : il rend compte du « délai de traitement des dossiers d'exportation de matériels de guerre » . Pour 80 à 90 % des demandes de licences, ce délai est assimilable à celui des agréments préalables qui étaient traités, avant la réforme du contrôle, en procédure « continue ».

Le résultat pour 2014 s'est établi à 18 jours. Au vu de celui-ci et des objectifs fixés au niveau interministériel, la prévision révisée pour l'année 2015, ainsi que pour 2016 et 2017, a été fixée à 20 jours . Ce délai prend en compte la présence de licences complexes, les difficultés liées à la nouveauté de l'outil SIGALE susmentionné et l'augmentation du nombre de demandes de modification de licences - que facilite l'interactivité de l'outil - au bénéfice de l'industrie de défense.

À l'issue de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 18 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » de la mission « Défense » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016.

Après l'exposé des rapporteurs, un débat s'est engagé.

M. Gilbert Roger . - Comme d'autres parlementaires, j'ai été alerté sur la situation de l'ONERA. Je soutiens l'amendement que présentent nos collègues à cet égard. Alors que les différentes administrations et services concernés semblent se renvoyer l'un à l'autre la responsabilité de prendre en charge le redressement de cet établissement, nous devons obtenir du Gouvernement des engagements précis en la matière. L'ONERA constitue en effet un outil très important, unique au plan européen.

M. André Trillard , rapporteur . - Notre amendement, au-delà du soutien direct qu'il entend apporter à l'ONERA, est bien conçu comme une invitation à s'exprimer en direction de chaque partie prenante du dossier.

M. Gilbert Roger . - Très bien !

M. Jeanny Lorgeoux , rapporteur . - La période que nous traversons montre bien qu'il nous faut savoir concilier les exigences du court terme et les besoins du moyen terme. La France doit garder son rang. Notre amendement, en visant à préserver les capacités de l'ONERA, s'inscrit dans cette perspective.

M. Jacques Gautier . - Je veux saluer le travail de nos collègues rapporteurs et, en particulier, souligner l'importance de l'amendement qui a été présenté. L'ONERA constitue une véritable « pépite » de notre base industrielle et technologique de défense. La soufflerie de Modane est la plus grande d'Europe, elle remplit une mission essentielle pour la filière aéronautique. Or l'affaissement des sols met actuellement cet outil en danger ; des travaux sont nécessaires, à hauteur de 20 millions d'euros. L'amendement vise donc les difficultés les plus pressantes de l'ONERA, mais un effort beaucoup plus important devra être fait afin d'assurer l'avenir de cet établissement, pour lequel l'État doit définir clairement ses intentions et ses ambitions.

M. André Trillard , rapporteur . - L'heure serait mal venue pour une politique d'abandon de nos ressources de défense. J'ajoute que le montant de 20 millions d'euros à dégager pour les travaux urgents de la soufflerie de Modane reste, chacun en conviendra, relativement modeste, au regard de l'ensemble des ressources de la mission.

M. Jean-Pierre Raffarin, président . - Je mets aux voix l'amendement sur les crédits de la mission « Défense » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016, présenté par nos collègues André Trillard et Jeanny Lorgeoux, rapporteurs du programme 144, et cosigné par nos collègues Jacques Gautier, Daniel Reiner et Xavier Pintat, rapporteurs du programme 146.

La commission adopte cet amendement.

* *

*

À l'issue de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

ANNEXE 1 - AMENDEMENT PRÉSENTÉ PAR VOS RAPPORTEURS POUR AVIS AU NOM DE LA COMMISSION

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016

SECONDE PARTIE

MISSION DÉFENSE

II-84

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n° 163, 164, avis 166)

A M E N D E M E N T

présenté par

MM. TRILLARD, LORGEOUX, J. GAUTIER, REINER et PINTAT

au nom de la commission des affaires étrangères

_______________

ARTICLE 24

ÉTAT B

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

15 000 000

0

15 000 000

0

Préparation et emploi des forces

0

0

0

0

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

0

0

0

0

Équipement des forces

0

15 000 000

0

15 000 000

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

OBJET

Le présent amendement vise à majorer de 15 millions d'euros la subvention pour charges de service public prévue par le PLF 2016 pour l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA), portant celle-ci à 120 millions d'euros au total. Il s'agit ainsi d'apporter une réponse aux difficultés les plus pressantes que traverse actuellement l'établissement, référence internationale dans son champ de compétence et d'expertise et outil clé pour l'ensemble de la filière aéronautique. Cet amendement doit en effet permettre :

- d'une part, de financer les travaux requis par la soufflerie SM1A de Modane, mise en danger par l'affaissement des sols constaté en 2009 puis, à nouveau, à l'été 2015 ;

- d'autre part, d'ajuster le niveau de la subvention de l'ONERA à un niveau qui assure l'équilibre du budget de l'établissement à court terme et rende possible, en particulier, de mener les plus urgents travaux de mise aux normes d'hygiène et de sécurité requis par l'immeuble de grande hauteur (IGH) de Châtillon.

La somme, créditée en abondement de la sous-action 7-4 « Gestion des moyens et subventions » de l'action « Prospective de défense » du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », sera prélevée sur des opérations d'armement dont la conduite ne sera pas remise en question pour autant, par soustraction au programme 146 « Équipement des forces » à hauteur de :

- 10 millions d'euros sur la sous-action 7-35 « Communiquer-Autres opérations » de l'action « Commandement et maîtrise de l'information » ;

- 5 millions d'euros sur la sous-action 11-90 « Investissements pour les opérations d'armement » de l'action « Préparation et conduite des opérations d'armement ».

ANNEXE 2 - AUDITIONS DES RAPPORTEURS POUR AVIS

Mercredi 14 octobre 2015

M. Bruno Sainjon, président - directeur général de l'ONERA

M. Bernard Bajolet, directeur général de la sécurité extérieure

Mercredi 21 octobre 2015

M. le Général Jean-François Hogard, directeur de la protection et de la sécurité de la défense

Mercredi 4 novembre 2015

M. Philippe Errera, directeur général des relations internationale et de la stratégie du ministère de la défense, responsable du programme 144, « Environnement et prospective de la politique de la défense ».


* 1 La loi de finances initiale (LFI) pour 2015 a regroupé au sein du programme 212 « Soutien de la politique de la défense » l'ensemble des crédits de masse salariale (titre 2) de la mission « Défense ».

* 2 Décret n° 2015-4 du 2 janvier 2015 fixant les attributions et l'organisation de la direction générale des relations internationales et de la stratégie du ministère de la défense.

* 3 La sous-action « Soutien aux exportations » a été supprimée du programme 144 par la LFI 2015 ; les crédits de promotion des exportations se trouvent désormais retracés par le programme 146 « Équipement des forces ».

* 4 Dans le cadre de l'examen du PLF 2016, M. Philippe Errera a été auditionné le 4 novembre 2015 par vos rapporteurs pour avis.

* 5 Pour mémoire, le redéploiement d'un milliard d'euros a été prévu, d'ici à 2019, au bénéfice des opérations d'armement, grâce aux économies dégagées au sein de la mission « Défense » par l'évolution favorable, depuis le vote de la LPM du 18 décembre 2013, des indices économiques (prix du pétrole, prix de certains marchés de fourniture, cours de la monnaie). Cf. le rapport n° 547 (2014-2015) de notre collègue Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sur le projet de loi d'actualisation de la programmation militaire.

* 6 Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF.

* 7 Source : réponse au questionnaire adressé en application de l'article 49 de la LOLF.

* 8 Dans le PLF 2015, les AE au titre 5 de la DGSE avaient progressé de 63,2 % des AE (+ 44 millions d'euros) par rapport à 2014.

* 9 M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, a confirmé ce point lors de son audition par votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, dans le cadre de l'examen du PLF 2016, le 21 octobre 2015.

* 10 Voir les avis de la Commission sur le projet de loi relative au renseignement et sur la proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales :

Avis n° 445 (2014-2015) de M. Jean-Pierre Raffarin http://www.senat.fr/rap/a14-445/a14-445.html

Avis n° 100 (2015-2016) de M. Michel Boutant http://www.senat.fr/rap/a15-100/a15-100.html

* 11 Retour au niveau inscrit en loi de finances pour 2014.

* 12 Article D. 3126-5 du code de la défense

* 13 Arrêté du 22 octobre 2013

* 14 Le déploiement des détachements en OPEX est financé par le BOP OPEX du programme 178.

* 15 La mise en place de la nouvelle architecture budgétaire à partir du 1 er janvier 2015 a mis fin à la responsabilité de la DPSD s'agissant de la gestion des crédits de titre 2 et a réparti la masse salariale entre les BOP T2 du programme 212. De ce fait, il n'est plus de la responsabilité de la DPSD de programmer, suivre et rendre compte de la masse salariale finançant ses effectifs.

* 16 M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, a confirmé ce point lors de son audition par votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, dans le cadre de l'examen du PLF 2016, le 21 octobre 2015.

* 17 Vos rapporteurs pour avis, avec nos collègues Jacques Gautier et Daniel Reiner, rapporteurs pour avis sur le programme 146, ont auditionné M. Bruno Sainjon, président-directeur général de l'ONERA, le 14 octobre 2015. Le 23 juin dernier, votre rapporteur Jeanny Lorgeoux avait posé au Gouvernement, en séance publique, une question orale sans débat (n° 1 120S) sur la situation de cet établissement.

* 18 Dans le domaine de la défense, l'ONERA a participé aux réalisations, entre autres, des missiles équipant la force océanique stratégique (FOST) et les forces aériennes stratégiques (FAS) ; des radars transhorizon à onde de ciel (NOSTRADAMUS) ou de sol (ROS) et du radar de surveillance de l'espace GRAVES (grand réseau appliqué à la veille spatiale) ; de l'avion Rafale et ses équipements ; du démonstrateur nEUROn de drone aérien futur ; du programme ACCS ( Air Command and Control System , visant à doter l'OTAN d'un système unique et interopérable de commandement et de conduite des opérations aérospatiales). Dans le domaine civil, l'apport de l'Office se retrouve dans tous les avions qui ont vu le jour depuis les années 1950 ; l'avion de ligne du futur figure parmi les recherches en cours de l'établissement (projet NOVA - Next Onera Versatile Aircraft ).

* 19 Rapport particulier de la Cour des comptes n° 72 351 sur les comptes et la gestion de l'ONERA (exercices 2008 à 2013), mars 2015.

* 20 La Cour des comptes a noté que plusieurs raisons avaient concouru à cette décision : « réduction du budget de la DGAC, volonté de la DGAC de cibler son soutien et d'encadrer l'utilisation de sa subvention afin d'éviter une contrariété potentielle aux règles du commerce international et du droit de la concurrence, perte de pertinence de l'ONERA aux yeux de la DGAC et dégradation des relations ».

* 21 Nos collègues Jacques Gautier, Daniel Reiner et Xavier Pintat.

* 22 Amendement joint en annexe au présent rapport.

* 23 Première séance de l'Assemblée nationale du 27 octobre 2015.

* 24 Réunion de la commission élargie de nos collègues députés, pour l'examen du budget de la défense dans le PLF 2016, le 21 octobre 2015. Le même jour, au cours de son audition par votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, est intervenu dans le même sens.

* 25 La note « Quelles orientations pour l'ONERA ? » produite en juillet 2015 par un groupe de travail du GIFAS, transmise à vos rapporteurs, conclut que « les industriels du GIFAS considèrent que l'existence d'un institut de recherche aérospatial national, bien positionné au plan européen, devrait être un facteur clé de succès pour le développement de la filière. Pour atteindre cet objectif, le modèle de l'Office doit être réformé en profondeur pour instituer une véritable orientation par les finalités, largement insuffisante aujourd'hui. »

* 26 Cf. le rapport pour avis n° 110 (2014-2015), tome V, sur le PLF 2015.

* 27 Décret n° 2015-4 du 2 janvier 2015 fixant les attributions et l'organisation de la direction générale des relations internationales et de la stratégie du ministère de la défense.

* 28 Le PAP annexé au PLF 2015 a fait disparaître l'objectif d'« améliorer les résultats obtenus par la mise en oeuvre de la diplomatie de défense », cette décision étant expressément justifiée par un motif de simplification. Vos rapporteurs pour avis ont déploré un appauvrissement du dispositif d'évaluation des performances du programme et relevé le paradoxe de supprimer un objectif se rapportant à la diplomatie de défense au moment même où le ministère de la défense réorganisait sa fonction « relations internationales » avec la création de la DGRIS. Cf. le rapport pour avis n° 110 (2014-2015), tome V, sur le PLF 2015.

* 29 « Cet indicateur ne permettait pas de rendre compte du pilotage de la performance des études prospectives et stratégiques au regard de l'objectif de référence, s'agissant d'études académiques et de productions intellectuelles d'expertise », exposait le PAP annexé au PLF 2015.

* 30 http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2011/12/cir_34288.pdf

* 31 n° 3110 annexe 11 - Rapport de M. François Cornut-Gentille sur le projet de loi de finances pour 2016 (n°3096) http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/b3110-tIII-a11.asp#P963_128139

* 32 n° 3110 annexe 11 - Rapport de M. François Cornut-Gentille sur le projet de loi de finances pour 2016 (n°3096) http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/b3110-tIII-a11.asp#P963_128139

* 33 Loi n° 2011-702 du 22 juin 2011 relative au contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et de matériels assimilés, à la simplification des transferts des produits liés à la défense dans l'Union européenne et aux marchés de défense et de sécurité.

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