B. DES SOLIDARITÉS FRAGILES

1. Le rôle majeur de la régulation
a) Une gouvernance bicéphale qui a fait la preuve de son efficacité

L'entrée de la presse écrite dans une phase de grave crise économique et les intérêts parfois divergents des acteurs de la filière au regard des réformes, parfois douloureuses, que nécessitait la situation a conduit le législateur, dans le cadre de la loi n° 2011-852 du 20 juillet 2011 relative à la régulation du système de distribution de la presse, à créer, au côté de l'instance de gouvernance professionnelle que représente le CSMP, une Autorité de régulation de la presse (ARDP).

Cette autorité administrative s'est vue chargée de rendre exécutoires les décisions normatives prises par le CSMP et d'arbitrer les différends relatifs au fonctionnement des messageries ou à l'organisation du réseau de distribution en cas d'échec de la procédure de conciliation devant le Conseil supérieur.

Cet attelage, déséquilibré à première vue - l'ARDP ne compte que quatre membres, ne dispose pas de sa propre expertise et est financée par la profession -, a largement contribué à la restructuration de la filière , même si de nombreux blocages, sous la forme de recours contre ses décisions, ont conduit à ralentir la mise en oeuvre des chantiers prévus.

Pour tenter de remédier à ce constat, la loi précitée du 17 avril 2015 a renforcé le pouvoir de l'ARDP , en l'installant dans un statut d'autorité administrative indépendante , financée à ce titre par les pouvoirs publics et non plus, ce qui représentait une sérieuse brèche dans le principe d'indépendance, par les éditeurs. À ce titre, 400 000 euros sont, pour la première fois, inscrits au bénéfice de son fonctionnement dans le présent projet de budget. 200 000 euros seront consacrés à la rémunération d'un cabinet d'expertise financière chargé d'accompagner l'ARDP dans sa réforme des barèmes des messageries.

En outre, la loi est venue renforcer son expertise en lui assignant un quatrième membre, désigné par le président de l'Autorité de la concurrence pour ses compétences dans les domaines économique et industriel. Afin d' éviter toute déperdition brutale des compétences à l'issue du mandat du collège, l'Autorité de régulation sera désormais renouvelée par moitié tous les deux ans et le mandat de ses membres pourra être reconduit une fois.

Enfin, l'ARDP a désormais la faculté d'inscrire une question à l'ordre du jour du CSMP, mais également le pouvoir de réformer ses décisions.

b) Des décisions majeures en faveur du caractère coopératif de la distribution

Aux aides publiques s'ajoute une solidarité professionnelle , en application des principes de la loi « Bichet » du 2 avril 1947. À ce titre, le système de régulation bicéphale a permis, depuis son installation, de réelles avancées en encourageant, voire en imposant, les synergies financières et logistiques nécessaires à la survie du réseau coopératif de distribution.

La décision la plus symbolique, dans ce domaine fut l'institution, par la décision du CSMP en date du septembre 2012, d' un mécanisme de péréquation inter-coopératives pour le financement, hors surcoûts sociaux liés à la convention collective applicable aux salariés de Presstalis, de la distribution de la presse quotidienne nationale.

Le dispositif s'appuie sur les conclusions du rapport commandé au cabinet Mazars, fixant le coût de la péréquation due par les MLP à Presstalis qui, seule, distribue les quotidiens, sur la base du calcul des surcoûts exclusivement liés à la distribution de ces derniers. La presse quotidienne nationale doit être disponible, sur l'ensemble du territoire, dès avant l'ouverture des points de vente. Ce postulat génère des surcoûts spécifiques estimés à une vingtaine de millions d'euros dont six compensés par les MLP , engendrés par le caractère nocturne, la célérité et la flexibilité du traitement de ces publications, mais également par l'extrême capillarité du réseau de diffuseurs. Une heure de bouclage tardive aggrave en outre ces difficultés : les journaux du soir posent un problème spécifique de distribution. À titre d'illustration, une tournée ad hoc est consacrée par Presstalis à la distribution du Monde à Paris et dans quelques grandes villes, dont le surcoût est pris en charge par l'ensemble des éditeurs de la presse quotidienne nationale.

La compensation d'une partie de ces frais supplémentaires par les MLP, c'est-à-dire par les éditeurs de magazines, dispose, depuis la loi du 17 avril 1015, d'un fondement législatif. Votre rapporteur pour avis est favorable au principe de solidarité entre les familles de presse, estimant qu'elle constitue non seulement la garantie de la pérennité de la distribution de la presse quotidienne d'information politique et générale , mais également la contrepartie juste des aides reçues par les éditeurs , sans distinction, notamment le taux « super réduit » de TVA.

La solidarité nationale, la péréquation inter-coopératives et les tentatives de mutualisation des réseaux de distribution ne peuvent suffire à équilibrer le système de distribution. Un véritable effort doit également être réalisé sur les barèmes des messageries.

Aux termes de la loi du 20 juillet 2011, l'ARDP rend un avis annuel sur l'action du CSMP en la matière. Or, depuis 2012, elle n'a eu de cesse d'appeler le Conseil supérieur à ouvrir ce dossier, jugeant que les barèmes appliqués n'étaient ni égaux ni transparents dans la mesure où « les éditeurs les plus puissants entrent dans une stratégie de chantage avec les messageries afin d'obtenir les tarifs les plus avantageux, au détriment des éditeurs les plus modestes et les moins influents ». L'opacité du système est en outre aggravée par la multiplication d'offres commerciales et de tarifs hors barème.

Le CSMP a finalement consenti à se pencher sur la question et a confié à cet effet une étude au cabinet Mazars, dont les conclusions ont été rendues publiques au mois de juin 2014. Il y est fait état de la complexité des grilles tarifaires proposées par les messageries, de l'absence de définition des prestations proposées pour un prix donné et, surtout, de la faible adaptation des barèmes aux coûts réels de la distribution des publications. Ce constat, dont les conséquences sur l'équilibre financier des messageries sont particulièrement lourdes, s'explique par le mécanisme de fixation des tarifs par les éditeurs, à la fois actionnaires et clients des messageries .

Les pouvoirs publics ont également, par le passé, usé de leur influence pour que les tarifs restent favorables aux éditeurs . Ainsi, il y a une quinzaine d'années, l'État a demandé aux messageries de réduire leurs tarifs afin d'aider les entreprises de presse, décision qu'Anne-Marie Couderc, présidente de Presstalis, qualifie de « péché originel », qui, en réduisant brutalement ses recettes avant même la diminution des ventes au numéro, a conduit l'entreprise à la crise.

Prenant acte de la motivation toute relative du CSMP à s'emparer de cette réforme, la loi du 17 avril 2015 a confié à l'ARDP le soin d' homologuer les barèmes des messageries décidés par leur conseil d'administration. Préalablement à la décision d'homologation, le président du CSMP devra transmettre à l'ARDP un avis relatif aux barèmes proposés par les messageries . Il pourra, à cet effet , s'appuyer sur sa commission de suivi économique et financière, qui apporte déjà un soutien technique à l'ARDP dans le cadre de la formulation de son avis annuel sur les tarifs.

La réforme des barèmes des messageries devrait constituer la priorité des autorités de régulation en 2016. Pour indispensable qu'elle soit pour l'équilibre des messageries de presse dans un contexte où la diminution des volumes va se poursuivre, l'augmentation des barèmes demeure un sujet de tension et d'inquiétude pour des éditeurs majoritairement en difficulté financière, même si certains, souhaite rappeler votre rapporteur pour avis, appartiennent à de solides actionnaires.

Auditionné par votre rapporteur pour avis, Roch-Olivier Maistre, président de l'ARDP, a indiqué que les éditeurs seraient prochainement invités à réfléchir à une méthodologie de travail, dans une approche partenariale. À cet égard, il a estimé que les éditeurs de quotidiens pourraient difficilement éviter d'accepter un effort tarifaire , au risque que la solidarité des magazines, déjà soumis à la péréquation, ne soit mise à mal. Selon lui, la réforme des aides postales, ciblée sur les magazines, va accroître le ressentiment des magazines et pèsera, en conséquence, sur les conditions de la négociation des nouveaux barèmes des messageries

2. La réforme des aides postales ou la menace d'une rupture
a) Un désengagement progressif de l'État

La Poste est, avec les messageries de presse, l'un des principaux acteurs de la diffusion de la presse française. En 2013, l'entreprise a acheminé et distribué 1,3 milliard d'exemplaires , dont 1,2 milliard dans le cadre de sa mission de service public, soit environ 30 % de la diffusion de la presse sur le territoire.

Cette moyenne masque cependant des situations contrastées entre les différentes familles de presse . Si la presse quotidienne privilégie le portage à la diffusion postale dans les zones à forte densité de population, notamment pour des questions d'horaires de distribution, le postage demeure un vecteur de diffusion très largement utilisé par les magazines. Le taux de postage peut, en outre, dépasser 75 %, voire 90 %, des exemplaires diffusés pour la presse professionnelle et de la presse associative.

Le transport et la distribution de la presse par La Poste représente 9 % des volumes de courrier distribués, mais seulement 5 % du chiffre d'affaires courrier de l'entreprise.

Les tarifs postaux sont soumis à l'homologation des ministres chargés des postes et de l'économie, après avis public de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Ce dispositif constitutif du « régime économique de la presse » est réservé aux publications titulaires d'un certificat d'inscription délivré par la CPPAP. Son évolution tarifaire est fixé par les accords tripartites entres l'État, les éditeurs et La Poste.

Prenant la suite des « accords Paul » 1 ( * ) , les accords conclus le 23 juillet 2008 pour la période 2009-2015, dits « accords Schwartz », ont prévu une réduction de progressive de l'aide postale concomitante à une revalorisation des tarifs postaux de presse et à une diminution des charges de La Poste liées au transport de la presse de 200 millions d'euros sur la période, grâce à des efforts de modernisation et de productivité.

Le mécanisme initialement prévu reposait sur :

- une diminution graduelle de la contribution publique à partir de 2012 ;

Contribution de l'État à la mission de service public confiée à La Poste
(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

242

242

242

232

217

200

180

Source : Ministère de la culture et de la communication

- la définition de trois catégories de tarifs : presse hors presse d'IPG, presse d'IPG et quotidiens à faible ressources publicitaires ;

- une évolution en pourcentage progressive, prévisible et différenciée pour chacune de ces catégories . Ainsi, l'évolution des tarifs devait être légèrement inférieure à 11 % pour les publications de presse quotidienne à faibles ressources publicitaires et de petites annonces et à 25 % pour la presse d'information politique et générale ; elle devait être proche de 34 % pour le reste de la presse.

Toutefois, dès le 23 juillet 2009, lors de la clôture des États généraux de la presse écrite, le Président de la République de l'époque a décidé qu'en raison du changement radical du contexte économique « la mise en oeuvre de l'accord Presse-Poste sera reportée d'un an, le manque à gagner pour La Poste étant intégralement compensé par l'État ».

Le report d'application de la hausse tarifaire, appelé « moratoire postal », a eu un impact d'environ 30 millions d'euros chaque année sur les comptes de La Poste , ce que Pierre Laurent, dans son avis sur le programme 180 dans le cadre de l'examen, par votre commission de la culture, de l'éducation et de la communication, du projet de loi de finances pour 2014 avait justement qualifié de « coup de Jarnac sur le moratoire postal ».

Le désengagement unilatéral de l'État s'est poursuivi avec l'annonce, le 10 juillet 2013, de la sortie progressive du moratoire sur les tarifs postaux, afin de rejoindre la trajectoire initialement prévue par les « accords Schwartz ». L'objectif affiché était de préparer, en concertation avec les parties concernées, le cadre qui fera suite aux accords à partir de 2016. Pire, en 2014 et en 2015, la contribution prévue dans l'accord a été réduite chaque année de 50 millions d'euros afin de tenir compte du bénéfice, pour La Poste, du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Pierre Laurent, rapporteur pour avis, avait alors souligné qu' il n'existait guère de rapport entre un crédit d'impôt et une aide au transport de la presse.

En conséquence, l'aide de l'État au titre du transport postal s'est établie à 150,5 millions d'euros en 2014 au lieu des 200 millions d'euros prévus, puis à 130 millions d'euros en 2015, contre 180 millions d'euros prévus. Pourtant, le 1 er juillet 2013, cinq ministres, dont la ministre de la culture et de la communication, signaient avec La Poste le contrat d'entreprise 2013-2017, dans lequel les parties réitéraient leurs engagements résultant des « accords Schwartz ».

b) Une inquiétude générale sur « l'après Schwartz »

Les accords Schwartz arrivant à échéance le 31 décembre 2015, Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, et Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, ont confié une mission sur l'avenir du transport postal de la presse à Emmanuel Giannesini, membre de la Cour des comptes et président du comité d'orientation du Fonds stratégique pour le développement de la presse.

Cette mission devra proposer différents scénarios (politique tarifaire à compter de 2016, recentrage de l'aide postale, montant et forme de la compensation de l'État) afin de définir le nouveau cadre du soutien public à l'acheminement des abonnements de presse , comprenant à la fois l'aide au transport postal et l'aide au portage. Ses conclusions n'en sont pas encore connues.

Dans cette attente, l'aide au transport postal a été fixée, pour 2016, à 119 millions d'euros dans le cadre de la mission « Économie » du projet de loi de finances, soit une nouvelle diminution drastique, qui augure mal du résultat des négociations relatives à l' « après Schwartz ».

La Poste, comme les représentants des différentes familles de presse auditionnés, ont fait part à votre rapporteur pour avis de leurs craintes pour l'avenir. Nul ne sait d'ailleurs si un nouvel accord sera conclu ou si, comme le proposait le rapport de Roch-Olivier Maistre sur les aides à la presse en 2013, il sera choisi d'instaurer une relation commerciale « normale » entre La Poste et les éditeurs de presse.

En tout état de cause, une augmentation des tarifs postaux est bel et bien prévue , alors que les éditeurs ont, durant la période d'application des accords Schwartz, déjà consenti à un effort de 110 millions d'euros. Elle devrait majoritairement peser sur les magazines , notamment sur ceux appartenant à une nouvelle catégorie de « presse de divertissement et de loisir », sur lesquels pourrait s'appliquer une hausse de plus de 60 % en quatre ans.

Lors de son audition par votre commission de la culture, de l'éducation et de la communication le 17 novembre dernier, Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, a confirmé que les arbitrages étaient en cours et devraient être rendus dans les prochaines semaines. Après une année de transition et donc de hausse modérée des tarifs postaux en 2016, l'augmentation devrait être importante , d'autant qu'en réponse aux craintes exprimées par votre rapporteur pour avis, la réponse fut que le taux unique de TVA était à lui seul garant de la solidarité entre familles de presse.

Votre rapporteur pour avis juge cette perspective déraisonnable , dans un contexte où les magazines connaissent également des difficultés financières et, surtout, où le maintien d'une solidarité entre familles de presse, au-delà de la seule TVA, est plus que jamais nécessaire . Il rappelle, en outre, que les tarifs postaux applicables aux magazines sont déjà parmi les plus élevés d'Europe : leur soutenabilité doit donc demeurée garantie.

Tarifs postage de presse 2015 en €

Titre

France

Belgique

Allemagne

Grande-Bretagne

Suède

Pays-Bas

Italie

Suisse

Télé 7

0,433

0,403

0,411

0,628

0,426

0,475

0,290

0,450

Closer

0,539

0,319

0,372

0,759

0,531

0,493

0,193

0,414

Elle

0,692

0,660

0,549

0,949

0,659

0,677

0,678

0,546

Marie-Claire

1,050

0,912

0,885

1,303

0,928

0,845

0,871

0,654

+ cher

- cher

Source : Syndicat des Éditeurs de la presse magazine

Il lui semble enfin que la définition de la catégorie « presse de la connaissance et des savoirs » au sein des magazines, qui continuerait à bénéficier de tarifs préférentiels, pourrait s'avérer complexe, voire s'apparenter à un jugement de valeur entre titres et, pire, entre lecteurs.

Il appelle donc chacun à raison garder sur ce sujet et appelle de ses voeux, comme le souhaitent La Poste et les éditeurs, la mise en oeuvre d'une négociation entre les parties pour définir une augmentation raisonnable des tarifs pour les prochaines années.

3. Les risques d'une application brutale de la responsabilité élargie du producteur à la presse

Concrétisation du principe du « pollueur-payeur » , la notion de responsabilité élargie du producteur (REP) appliquée à la filière papier est inscrite à l'article L.541-10-1 du code de l'environnement, qui dispose que « tout donneur d'ordre qui émet ou fait émettre des imprimés papiers, y compris à titre gratuit, à destination des utilisateurs finaux, contribue à la collecte, à la valorisation et à l'élimination des déchets d'imprimés papiers, ménagers et assimilés ainsi produits » .

La REP institue une contribution volontaire annuelle calculée sur la base du tonnage de papier émis . En 2015, le montant de l'éco-contribution s'établit à 52 euros/tonne. Elle est collectée par l'organisme Ecofolio, société privée agréée par l'État, qui la reverse sous forme de soutiens financiers aux collectivités locales en charge du service public de gestion des déchets et d'actions de sensibilisation au tri sélectif et au recyclage des papiers.

Depuis 2008, les publications de presse reconnues par la CPPAP en sont exonérées , en raison tant du rôle particulier joué par la presse dans l'expression du pluralisme des opinions que des difficultés économiques rencontrées par le secteur. Par ailleurs, la presse s'est engagée en faveur du recyclage par d'autres moyens, en particulier par la signature, le 17 juillet 2013, d'une convention-cadre entre la presse, l'État et l'éco-organisme Ecofolio. Cet accord prévoit la diffusion coordonnée de campagnes de sensibilisation au tri et au recyclage des papiers imprimés , élaborées par Ecofolio, sur toutes les formes de presse.

Enfin, la presse papier s'est montrée sensible aux enjeux environnementaux, en améliorant son éco-conception par l'intégration de plus en plus de fibres issues de papiers recyclés . Par ailleurs, les exemplaires invendus sont traités par une filière de recyclage à l'initiative des éditeurs, ce qui réduit d'autant le volume des journaux déposés dans le circuit de collecte des collectivités territoriales. Entre 1990 et 2013, la consommation annuelle de papier de la presse nationale d'information générale et politique a perdu près de 100 000 tonnes, diminution qui s'est accélérée depuis 2008 avec la disparition progressive de la presse gratuite d'annonces.

La répartition de la quantité de papier consommé selon les familles de presse a considérablement évolué. La presse spécialisée grand public consomme un peu plus de 44 % de la quantité de papier utilisée par les éditeurs de presse en 2013, soit dix points de plus qu'il y a trente ans. La presse technique et professionnelle consomme fort peu de papier, malgré un nombre de titres important (2,3 % des volumes en 2013), en raison de la faiblesse des tirages. Le poids de la presse gratuite d'annonces, à 15 % des volumes en 2007, n'en représente plus que 1,9 % en 2013. Enfin, la presse d'information politique et générale contribue désormais à 14,1 % des volumes papier en 2013 (21,1 % en 1990) pour la presse nationale et à environ 30 % pour la presse locale.

Faisant fi des engagements, tenus, du secteur de la presse, la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte supprime l'exonération dont il bénéficiait : la presse contribuera désormais, à compter du 1 er janvier 2017, à la collecte, à la valorisation et à l'élimination des déchets d'imprimés papiers qu'elle produit.

Néanmoins, la presse bénéficie d'un aménagement particulier dans la mise en oeuvre de cette contribution, puisque celle-ci pourra être versée en « tout ou partie sous forme de prestations en nature prenant la forme d'une mise à disposition d'encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier ». Ce compromis s'inspire du mécanisme mis en place dans le cadre de la convention d'engagement volontaire signée en 2013.

Les conditions dans lesquelles cette contribution en nature sera apportée seront établies par décret, « en fonction des caractéristiques des publications » . Là réside le principal risque du dispositif : il s'agit de déterminer la proportion dans laquelle les publications pourront contribuer en nature , solution moins coûteuse pour les éditeurs, mais également si tel ou tel type de publication pourrait être mis davantage à contribution.

Afin de fixer les modalités concrètes d'application de cette nouvelle taxe, une mission d'expertise a été confiée au député Serge Bardy et au sénateur Gérard Miquel. Elle rendra ses conclusions à la fin du mois de novembre. Votre rapporteur pour avis espère qu'il y sera à tout le moins tenu compte tant des contraintes budgétaires des éditeurs que de la nécessaire équité entre familles de presse, afin de ne pas affaiblir un peu plus les solidarités qui les lient. À titre personnel, il serait favorable à ce que la presse soit intégralement déchargée des obligations de la REP, en numéraire comme en nature.


* 1 Les accords « Paul » avaient instauré, du 1 er janvier 2005 au 31 décembre 2008, un dispositif d'aide publique au transport postal de la presse qui prenait deux formes : d'une part, une aide à l'exemplaire, versée à La Poste pour le compte des éditeurs, destinée aux publications permettant de favoriser le pluralisme ; d'autre part, une aide à l'exemplaire distribué en zones peu denses pour permettre l'égal accès des citoyens aux publications de presse.

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