B. LE PROGRAMME 205 « SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES, PÊCHE ET AQUACULTURE »

Depuis l'intégration en 2012 de la direction des pêches maritimes et aquaculture (DPMA) au ministère chargé de l'écologie, le programme 205 a été élargi et renommé (« Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture »).

Ce programme couvre toute l'action régulatrice de l'État vis-à-vis du navire, du marin, de la mer et de ses ressources. Son domaine est très vaste, comprenant la sécurité et la sûreté maritime, les politiques en faveur de l'emploi maritime, le soutien au pavillon français, la protection de l'environnement marin et littoral, l'arbitrage entre les différents usagers de la mer (commerce, pêche, élevage, nautisme, littoral), ainsi que l'exploitation durable des ressources aquatiques.

Il se décompose en deux parties : un volet « sécurité et affaires maritimes » et un volet « pêche et aquaculture ». Ce dernier s'inscrit dans le cadre de la politique commune de la pêche et relève de la compétence de la commission des affaires économiques : il ne sera donc pas examiné dans ce rapport. En ce qui concerne le premier volet, trois grandes priorités sont ciblées :

- l'achèvement de la modernisation des systèmes d'information des centres régionaux opérationnels de sauvetage et de surveillance (CROSS) et le maintien en condition opérationnelle de la signalisation maritime ;

- le développement de l' École nationale supérieure maritime (ENSM) qui assure, depuis sa création en 2011, la formation maritime supérieure  à laquelle s'ajoutent quatre classes de BTS maritimes ouvertes en septembre 2014 ;

- la protection de l'environnement , avec l'accompagnement des armateurs pour la mise en conformité des navires avec la directive « soufre » de 2012 1 ( * ) , l'acquisition et l'entretien du matériel de lutte contre les pollutions des centres de stockage POLMAR, l'intégration du module SURPOL de suivi et d'identification des pollutions dans les systèmes des CROSS ou encore l'acquisition de vedettes régionales et de patrouilleurs hauturiers.

Ce volet « sécurité et affaires maritimes » voit ses plafonds de crédits diminuer avec 139 M€ en autorisations d'engagement (AE) et 136,5 M€ en crédits de paiement (CP) pour 2016. Par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2015, cela correspond à une baisse de 2 % en AE et de 4 % en CP. Cette érosion est principalement due à l' achèvement du financement de la part État pour le nouveau bâtiment du Havre de l'ENSM ainsi qu'à une baisse du montant des exonérations de charges due aux perspectives d'emploi dans la branche « ferries » (notamment en raison des difficultés de la SNCM et de MyFerryLink ).

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 1

Sécurité et sûreté maritimes

25 636 482

26 072 222

28 155 940

25 550 415

10%

-2%

Action 2

Gens de mer et enseignement maritime

30 123 356

30 123 656

27 811 755

27 811 755

-8%

-8%

Action 3

Flotte de commerce

68 811 358

68 811 358

64 451 600

64 451 600

-6%

-6%

Action 4

Action interministérielle de la mer

9 971 290

10 095 472

11 961 914

11 961 914

20%

18%

Action 5

Soutien au programme

7 430 331

6 430 441

6 703 653

6 759 705

-10%

5%

TOTAL (périmètre avis)

141 972 817

141 533 149

139 084 862

136 535 389

-2%

-4%

Action 6

Gestion durable des pêches et aquaculture

47 485 831

47 487 483

46 835 067

46 835 067

-1%

-1%

TOTAL (programme)

189 458 648

189 020 632

185 919 929

183 370 456

-2%

-3%

1. L'action 01 « Sécurité et sûreté maritimes »

L'action « Sécurité et sûreté maritimes » a principalement pour objet la mise en oeuvre des obligations découlant des conventions internationales de l'Organisation maritime internationale (OMI), relatives à la sauvegarde de la vie humaine en mer et la prévention des pollutions marines.

La France exerce ainsi son autorité de différentes manières :

- en tant qu'État du pavillon, elle doit garantir le respect des normes internationales par les navires français ;

- en tant qu'État du port, elle doit contrôler les navires de commerce étrangers en escale ;

- en tant qu'État côtier, elle doit sécuriser les routes de navigation et exercer une surveillance permanente le long de ses côtes.

La direction des affaires maritimes (DAM) s'appuie sur différents services spécialisés pour la mise en oeuvre de ces prérogatives : les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), les centres de sécurité des navires (CSN), les services maritimes des phares et balises, la société nationale de sauvetage en mer (SNSM) et enfin le Bureau enquête accidents en mer (BEA-Mer).

Au total, les crédits de cette action représentent 15,1 % des crédits alloués au programme 205 : ils s'élèvent à 28 M€ en AE et 25,5 M€ en CP pour 2016, contre 25,6 M€ et 26 M€ en 2015, soit une augmentation de 10 % en AE et une baisse de 2 % en CP. La dotation supplémentaire en AE est rendue nécessaire par la modernisation des systèmes d'information Marylin (sauvetage des vies humaines en mer) et Spationav V2 (surveillance du trafic maritime) des CROSS. Ces crédits se ventilent comme suit :

- 20 M€ en fonctionnement technique (c'est-à-dire hors personnel) principalement pour les systèmes de surveillance du trafic maritime des CROSS (3,8 M€), les CSN (1,1 M€), les services des phares et balises maritimes (14 M€) ainsi que le BEA-Mer (100 000 euros) 2 ( * ) .

- 5,5 M€ en investissement, pour des équipements de télécommunications, de systèmes de gestion des voies de transmission et pour des systèmes informatiques nécessaires à la surveillance du trafic maritime (3,3 M€) ainsi que pour des opérations d'entretien des équipements de signalisation maritime (2,2 M€) ;

- 2,3 M€ en dépenses d'intervention pour la SNSM, association qui participe au sauvetage en mer grâce à la mise en oeuvre de moyens matériels et humains déployés sur 230 stations de sauvetage le long des côtes métropolitaines françaises.

À noter, lors de l'examen du PLF2016 à l'Assemblée nationale, un amendement du Gouvernement a été adopté qui prévoit d'affecter une subvention exceptionnelle de 1,4 M€ à la SNSM en 2016 pour le financement des investissements. Ce montant devrait être pérennisé ensuite par l'affectation de 5 % de la taxe éolienne à la SNSM.

Votre rapporteur tient ici à rappeler l'importance de l'accidentologie en mer. Il souligne depuis de nombreuses années l'intérêt d' équiper l'ensemble des marins de balises de détresse , pour les localiser plus facilement en cas d'accident. Il a conscience de la difficulté à faire évoluer les mentalités à propos du port du gilet de sauvetage, en raison de son encombrement qui peut gêner le travail sur le navire. Une balise de détresse ne souffre pas du même inconvénient et présente un intérêt évident lorsque l'on sait que le temps est le facteur déterminant pour sauver une vie.

2. L'action 02 « Gens de mer et enseignement maritime »

Cette action regroupe la composante humaine du programme 205, qui concerne l'ensemble des gens de mer travaillant pour la marine marchande, les pêches maritimes, les cultures marines et la plaisance professionnelle. Elle s'adresse donc autant aux marins professionnels qu'aux autres personnels techniques et hôteliers embarqués.

Les crédits de cette action s'élèvent à 27,8 M€ (en AE et en CP) pour 2016 et représentent 15 % des crédits alloués au programme 205. Par rapport à 2015, la baisse de 2,3 M€ des crédits (-8 %) s'explique par la fin de l'opération de construction des nouveaux locaux de l'École nationale supérieure maritime (ENSM) au Havre .

La répartition des crédits par nature fait apparaître 18,5 M€ de dépenses de fonctionnement, 0,4 M€ de dépenses d'investissement et 8,8 M€ de dépenses d'intervention. Ces moyens sont alloués à deux composantes d'importance inégale sur le plan financier : la formation des gens de mer et le soutien à l'emploi maritime.

a) La formation maritime

La formation initiale consomme l'essentiel des crédits de cette action. L'École nationale supérieure maritime (ENSM) est le principal opérateur du programme 205, puisque 18 M€ de subvention pour charges de service public lui sont octroyés pour son fonctionnement (80% de cette somme servant à financer la masse salariale des emplois transférés à l'ENSM).

La formation initiale absorbe également la majeure partie des dépenses d'intervention, puisque 6,7 M€ sont destinés au seul enseignement secondaire dont 4,8 M€ pour les douze lycées professionnels maritimes (LPM) formant des élèves du CAP au baccalauréat professionnel et au BTS (depuis la rentrée 2014), 0,7 M€ pour les établissements agréés hors LPM (notamment outre-mer et certains établissements privés métropolitains) et 1,2 M€ pour les élèves boursiers (dont la proportion dépasse régulièrement 50 % dans l'enseignement maritime secondaire, contre 36 % en moyenne pour l'éducation nationale).

La formation continue dispose de 0,8 M€ de crédits d'intervention permettant en particulier de couvrir près de 1 260 mois de stage et de rémunérer 320 stagiaires.

b) Le développement de l'emploi maritime

Le financement du soutien à l'emploi maritime est plus modeste :

- 0,4 M€ servent au fonctionnement des services de santé, à la réalisation de plaquettes de communication et à la reproduction des titres de formation sécurisés (contrat avec l'imprimerie nationale) ;

- 0,4 M€ sont prévus pour le développement de systèmes informatiques en faveur de la télé-déclaration des services des marins, de la consultation des brevets des marins et de la gestion des dossiers médicaux ;

- 0,2 M€ de crédits d'intervention ont vocation à gérer les cessations d'activité des marins (« plans de sortie de flotte » ou cessations anticipées d'activité), les subventions au fonctionnement des organisations syndicales et l'accueil des gens de mer dans des conditions de bien-être conformes aux obligations internationales.

3. L'action 03 « Flotte de commerce »

Cette action est la plus importante du programme 205 en termes de surface financière . Il s'agit uniquement de dépenses d'intervention destinées à soutenir la compétitivité du pavillon français en favorisant l'implantation d'activités maritimes sur le territoire français, en soutenant l'emploi maritime par des dispositifs d'allègements de charges sociales et fiscales et en orientant les efforts vers une modernisation qualitative de la flotte commerciale française.

Les crédits de cette action représentent 34,7 % des crédits alloués au programme 205 : ils s'élèvent à 64,5 M€ (en AE et en CP) contre 68,9 M€ (en AE et en CP) en 2015, soit une baisse de 6 % dans le PLF 2016. Cette tendance baissière (-2 % en 2015, -2% en 2014, -4% en 2013) s'explique par l'ajustement mécanique des compensations versées à l'ENIM aux évolutions de l'emploi marin.

Ces crédits servent en effet à exonérer de charges patronales les équipages des navires commerciaux inscrits au registre international français 3 ( * ) et des armements à passagers bénéficiant des mêmes facilités 4 ( * ) (53,6 M€), ainsi qu'à compenser les surcharges spécifiques supportées au titre des retraites du personnel sédentaire de l'ancienne Compagnie générale maritime (CGM) privatisée en 1996 (10,9 M€).

Votre rapporteur déplore l' effet opportuniste pour les finances publiques de cette dynamique malthusienne : puisque le pavillon français comporte de moins en moins de navires, il y a de moins en moins de marins, et donc de moins en moins d'exonérations de charges sociales. Il s'agit à coup sûr d'un moyen de réaliser des économies , mais certainement pas de renouer avec la croissance et l'emploi. Les exonérations de charges devraient a contrario servir d'instrument à destination d'une politique volontariste de développement de notre flotte commerciale.

4. L'action 04 « Action interministérielle de la mer »

Cette action traduit l'implication de la direction des affaires maritimes (DAM) à l' action civile de l'État en mer (AEM), qui est par essence une politique interministérielle (45 missions prises en charge par une dizaine de ministères). La DAM participe à plus de 40 de ces 45 missions et en coordonne une quinzaine. Ses services assurent des activités de contrôle et de surveillance des activités maritimes et des pêches maritimes, avec une compétence large au titre de l'ensemble des polices spéciales en mer.

Les crédits de cette action s'élèvent à 12 M€ en AE et en CP (+20 % par rapport à 2015). Ils représentent 6,4 % des crédits alloués au programme 205 dans le PLF 2016 et se ventilent comme suit :

- 6,5 M€ en fonctionnement technique, essentiellement pour le dispositif de contrôle et de surveillance (DCS) au titre de la pêche, de la plaisance et de la sécurité de la navigation (4,5 M€), pour la mise en oeuvre de la réglementation « Polmar » de lutte contre les pollutions maritimes accidentelles 5 ( * ) (1,5 M€) ainsi que pour la gestion courante des activités de plaisance (0,5 M€) ;

- 5,4 M€ en investissement, servant notamment à financer l'acquisition de licences d'utilisation d'images satellites et l'entretien lourd des moyens nautiques du DCS (1,7 M€), l'évolution du dispositif de surveillance satellitaire et l'amélioration des moyens nautiques (3,6 M€) ;

- 100 000 € en intervention pour le fonctionnement du patrouilleur Osiris, un ancien palangrier uruguayen confisqué par la Marine nationale après avoir été pris en flagrant délit de pêche illicite de légine au large des Kerguelen et qui est actuellement basé à La Réunion.

5. L'action 05 « Soutien au programme »

Cette action regroupe les crédits nécessaires au fonctionnement transversal des affaires maritimes (gestion courante, immobilier, etc.).

Les crédits de cette action représentent 3,6 % des crédits alloués au programme 205 : ils s'élèvent à 6,7 M€ en AE et CP pour 2016. Les CP sont en hausse de 5 % contre -10 % pour les AE, en conséquence du renouvellement des baux intervenu en 2015.


* 1 Directive 2012/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 modifiant la directive 1999/32/CE en ce qui concerne la teneur en soufre des combustibles marins.

* 2 Ces crédits ont uniquement vocation à financer les expertises menées par le BEA-Mer (soit une vingtaine d'enquêtes par an), les frais de fonctionnement de la structure étant supportés sur le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de mobilité durable ».

* 3 Article 10 de la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français.

* 4 Article 137 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 5 Il s'agit pour l'essentiel du dispositif « Polmar-Terre », les moyens mis à disposition pour « Polmar-Mer » étant principalement ceux de la marine nationale (ministère de la Défense).

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