II. AIDES À L'ACCÈS AU LOGEMENT : LES EFFETS DIFFICILES À APPRÉHENDER DES RÉFORMES DES APL ET UN ACCÈS FACILITÉ AU LOGEMENT GRÂCE À VISALE (PROGRAMME 109)

Le programme 109 « Aides à l'accès au logement » comporte les crédits destinés au financement des aides à la personne, à l'information relative au logement, à l'accompagnement des publics en difficulté et à la garantie des risques locatifs. Ces crédits sont stables pour 2017.

ÉVOLUTION EN 2017 DES CRÉDITS DU PROGRAMME

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2016

PLF 2017

Évolution

LFI 2016

PLF 2017

Évolution

Aides personnelles

15 421 967 265

15 422 000 000

0,0%

15 421 967 265

15 422 000 000

0,0%

Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté

8 119 000

8 000 000

-1,5%

8 119 000

8 000 000

-1,5%

Sécurisation des risques locatifs

8 200 000

9 300 000

13,4%

8 200 000

9 300 000

13,4%

Aide à l'accès au logement

15 438 286 265

15 439 300 000

0,01%

15 438 286 265

15 439 300 000

0,01%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017.

A. LES EFFETS DIFFICILES À APPRÉHENDER DES RÉFORMES DES APL

1. Les aides personnelles au logement : une dépense de guichet qui continue d'augmenter

En 2015, 18 milliards d'euros d'aides au logement ont été versés à 6,5 millions de bénéficiaires.

Après une hausse significative entre 2007 et 2015, le nombre de bénéficiaires a diminué de 0,3 % entre 2014 et 2015. Toutefois, cette évolution masque des évolutions différenciées selon le type d'aide. Le nombre de bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement (APL), versée aux occupants de logements conventionnés quelles que soient leurs caractéristiques familiales continue d'augmenter (+0,6 %), tandis que le nombre de bénéficiaires des allocations de logement à caractère familial (ALF) et des allocations de logement à caractère social (ALS) diminue.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DES AIDES AU LOGEMENT (en milliers)

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Évolution 2014/2015

ALF

1 244

1 263

1 351

1 356

1 335

1 332

1 323

1 317

1 319

1 299

- 1,5%

APL

2 482

2 496

2 620

2 619

2 621

2 681

2 724

2 773

2 803

2 819

+ 0,6%

ALS

2 198

2 216

2 345

2 364

2 353

2 388

2 374

2 405

2 416

2 402

- 0,6 %

Total

5 924

5 975

6 316

6 339

6 309

6 401

6 421

6 496

6 538

6 520

- 0,3%

Source : Estimation à partir des statistiques annuelles au 31 décembre de la CNAF et de la CCMSA. Nombres arrondis au millier de bénéficiaires. La répartition par parc est estimée pour la CCMSA.

Par ailleurs, le nombre de bénéficiaires en logement-foyer et en accession a diminué. Selon la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), le nombre des bénéficiaires de l'APL-accession est tendanciellement à la baisse depuis plusieurs années. La DHUP a indiqué à votre rapporteur qu'elle se penchera attentivement sur la baisse des bénéficiaires en logements-foyers lorsqu'elle disposera des informations consolidées par les organismes payeurs.

Le montant global des prestations a de nouveau augmenté de 1,7 %. Cette différence d'évolution entre une diminution du nombre de bénéficiaires et une augmentation des prestations s'explique selon la DHUP par l'augmentation du nombre de ménages bénéficiaires dans le secteur locatif pour lesquels l'aide moyenne versée est en augmentation et par les effets de l'actualisation du barème.

ÉVOLUTION DU MONTANT TOTAL DES PRESTATIONS VERSÉES (en milliards d'euros)

2006

2007

2008

2008

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Évolution

2014/2015

ALF

3,60

3,67

3,90

4,07

4,15

4,21

4,24

4,369

4,424

4,466

+ 0,94%

APL

6,23

6,20

6,57

6,72

6,86

7,14

7,41

7,767

7,988

8,220

+ 2,9%

ALS

4,30

4,36

4,71

4,82

4,90

5,00

5,07

5,254

5,296

5,327

+0,58%

Total

14,14

14,24

15,19

15,61

15,92

16,35

16,73

17,39

17,708

18,013

+1,7%

Source : Éléments statistiques et comptables (y compris 13 ème balance) émanant des caisses des régimes général et agricole. Comptabilité en décaissements. Chiffres arrondis au million le plus proche.

2. Les réformes de l'APL progressivement mises en oeuvre en 2016


• L'action 1 « Aides personnelles au logement » comporte les crédits dédiés à la contribution de l'État au financement des aides personnelles au logement. Cette contribution prend la forme d'une subvention d'équilibre au Fonds national d'aide au logement (FNAL).

Après deux années d'augmentation des crédits budgétaires en raison de modification de périmètre, l'État ayant décidé de budgétiser les aides personnelles au logement en 2015 et 2016, les crédits sont stables. L'État assure désormais la part la plus importante du financement des dépenses du FNAL : 84% en 2017 contre 34% en 2010.

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DU FINANCEMENT DES DÉPENSES DU FNAL (en millions d'euros)

Source : Commission des affaires économiques.

Pour 2017, le FNAL bénéficiera des ressources suivantes :

- les cotisations employeurs à hauteur de 2 706 millions d'euros ;

- une contribution de l'État, qui tient compte de la perte d'une partie des recettes de cotisations employeurs résultant du pacte de responsabilité et de solidarité à hauteur de 15 422 millions d'euros ;

- dans la limite de 43 millions, le produit de la taxe sur les plus-values de cession d'immeuble autres que des terrains à bâtir.

En outre, le FNAL percevra en 2017 une nouvelle recette : une fraction du produit de la taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux, dans la limite de 146 millions d'euros. Cette recette supplémentaire devrait compenser l'absence de contribution d'Action logement au FNAL.

Votre rapporteur constate que si Action Logement n'est pas mis à contribution directement, il l'est en réalité de façon indirecte puisque l'article 17 du projet de loi de finances pour 2017 supprime les dispositions prévoyant l'affectation de 80,25% de la part non affectée du produit de la taxe sur les bureaux vacants en compensation des pertes de recettes supportées par Action Logement pour les services apportés aux salariés des entreprises de 10 à 20 salariés qui ne sont plus assujetties à la PEEC depuis 2005, ce qui a représenté en 2015 133 millions d'euros. Il s'agit selon le gouvernement d'assurer l'équilibre du FNAL et de prendre en compte les « gains de fonctionnement permis à court terme par la réforme du réseau » d'Action Logement.

Outre que la méthode est discutable, la disposition étant contraire à la convention quinquennale entre l'État et Action logement laquelle prévoit cette compensation, votre rapporteur espère que cette initiative sera sans conséquences sur les engagements d'Action Logement quant au niveau des aides attribuées ou du financement du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU).


• Au regard de la hausse continue des dépenses consacrées aux aides au logement, le gouvernement a engagé une réforme des modalités d'octroi de ces aides. Ainsi, plusieurs mesures destinées à contenir la hausse des dépenses liées aux aides personnelles au logement ont été adoptées lors de la loi de finances pour 2016. Ces mesures sont entrées progressivement en vigueur et venaient compléter la réforme du forfait R0 du barème locatif qui conduit depuis le 1 er janvier 2015 à calculer ce montant à partir du forfait R0 de l'année N-1 revalorisé en fonction de l'inflation de l'année N-2. Selon les informations transmises par le gouvernement, en l'absence de cette mesure, 78 millions auraient dû être versés en supplément. Ces sommes sont estimées à 298 millions d'euros en 2016, 525 millions d'euros en 2017 et 675 millions d'euros en 2018.

Une première mesure est entrée en vigueur le 1 er janvier 2016 afin d'arrondir par souci de simplification les allocations à l'euro inférieur . 40 millions d'euros d'économies sont attendues.

Une deuxième mesure, entrée en vigueur le 1 er juillet 2016, vise à limiter le montant des aides au logement afin selon le gouvernement « de ne pas subventionner des logements dont la taille serait trop grande par rapport aux besoins réels du ménage ou dont le loyer rapporté à la taille du ménage serait excessif » , cette mesure devant participer «  à la lutte contre les loyers élevés et à l'optimisation du parc de logement ».

Ainsi, les allocations diminuent progressivement au-delà d'un premier plafond de loyer et sont supprimées au-delà d'un second plafond de loyer . Ces plafonds sont déterminés par référence au plafond de loyer de base affecté d'un coefficient fonction de la zone géographique qui varie entre 2,5 et 4.

SEUILS DE DÉGRESSIVITÉ ET DE SUPPRESSION DU VERSEMENT DE L'APL (en euros)

Zone 1 (Paris et sa petite couronne)

Zone 2 (Région Île-de-France hors zone I et autres grandes agglomérations)

Zone 3 (reste du territoire)

Seuil de dégressivité

Seuil de suppression

Seuil de dégressivité

Seuil de suppression

Seuil de dégressivité

Seuil de suppression

Une personne seule

995,69

1 171,40

638,08

791,21

598,03

741,55

Couple sans personne à charge

1 200,88

1 412,80

781

968,44

724,98

898,97

Personne seule ou couple ayant une personne à charge

1 357,25

1 596,76

878,83

1 089,74

812,88

1 007,97

Par personne à charge supplémentaire

+ 196,89

+ 234,64

+ 127,90

+ 158,60

+ 116,50

+ 144,46

96 millions d'euros d'économie sont attendues de cette mesure en année pleine. 80 000 ménages devraient être concernés.

La troisième mesure vise à tenir compte du patrimoine des allocataires. Ainsi, depuis le 1 er octobre 2016, le patrimoine du demandeur est pris en compte dans les règles d'éligibilité aux APL lorsque celui-ci est supérieur à 30 000 euros. Cette mesure avait été préconisée par le groupe de travail sur les APL constitué à l'Assemblée nationale. L'article R. 351-5-1 du code de la construction et de l'habitation précise que le patrimoine est « considéré comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de sa valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux ». Cette mesure s'appliquera aux nouveaux demandeurs avant de s'appliquer aux actuels bénéficiaires au fur et à mesure du renouvellement de leurs droits.

Cette mesure devrait permettre 63 millions d'euros d'économie en année pleine. Elle pourrait concerner un allocataire sur dix.

Enfin, depuis le 1 er octobre, sont également entrées en vigueur les dispositions de l'article 143 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 qui prévoient que ne peuvent bénéficier de l'APL les personnes rattachées au foyer fiscal de leurs parents, lorsque ces derniers sont redevables de l'impôt annuel de solidarité sur la fortune . Le gouvernement n'est pas en mesure de fournir une estimation du nombre de personnes concernées, cette mesure étant une mesure symbolique.

3. Les effets de ces réformes difficiles à appréhender

Votre rapporteur avait estimé l'an dernier que les conséquences sociales et financières des réformes proposées en matière d'APL ne semblaient pas complètement maîtrisées par le Gouvernement lequel n'était alors pas en mesure de préciser les différents critères qui seraient retenus.

Ces mesures ont été très critiquées par les associations dont la Fondation Abbé Pierre, CSF, l'Union nationale des associations familiales ou encore Familles de France, qui y voient une mesure injuste. La Fondation Abbé Pierre a dénoncé « une double peine : le Gouvernement fait payer aux locataires l'incapacité des pouvoirs publics à maîtriser et faire baisser les loyers du parc privé depuis la hausse des années 2000 ». La FNARS a souligné les contradictions du gouvernement qui diminue pour certains bénéficiaires leurs aides au logement et met en place dans le même temps des dispositifs de prévention des expulsions et de maintien du versement de l'allocation de logement lorsque le bénéficiaire ne règle pas la part de la dépense de logement restant à sa charge.

Le conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) a émis un avis défavorable au projet de décret sur la prise en compte du patrimoine.

Votre rapporteur regrette que le gouvernement ne soit pas en mesure de lui transmettre des données précises quant aux premiers effets de ces mesures. Selon les estimations de la Cnaf diffusées sur son site Internet ou dans la presse, 77 600 foyers seraient concernés par les nouvelles règles de dégressivité des APL, soit 1,2 % des allocataires. Pour ces allocataires, dans 78,3 % des cas, l'APL serait diminuée de 70 euros en moyenne et dans 21,7 % des cas, l'APL serait supprimée.

Selon Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable, 666 dérogations auraient été accordées sur 1 590 réclamations . Elles concerneraient principalement des bénéficiaires du RSA mais aussi des « parents d'enfants en résidence alternée » ou encore des assistantes maternelles. Le Gouvernement a demandé aux caisses d'allocations familiales d'apprécier les situations « avec souplesse et au cas par cas ».

Votre rapporteur considère qu'à ce stade il est difficile d'apprécier pleinement les effets de ces réformes tant du point de vue des économies effectivement induites que des conséquences pour les bénéficiaires .

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