B. LES POUVOIRS PUBLICS PRENNENT PROGRESSIVEMENT CONSCIENCE DU RÔLE STRATÉGIQUE DE NOS PORTS

1. Une stratégie nationale portuaire méconnue des acteurs portuaires

Depuis 2013, les ports français sont engagés dans une nouvelle étape, celle de la reconquête de parts de marché . À ce titre, le Gouvernement a présenté une feuille de route visant à transformer les ports français en véritables « architectes » de solutions logistiques maritimes et terrestres sur un hinterland de portée européenne. Votre rapporteur ne peut que souscrire aux ambitions portées par cette stratégie nationale de relance portuaire. Encore faut-il qu'elle soit effectivement suivie d'effets.

Ainsi, la stratégie nationale portuaire, annoncée en 2013, repose sur trois principaux piliers : le renforcement des ports dans leur dimension logistique avec un accent sur l'intermodalité, la valorisation de la situation des ports et la promotion de l'installation d'activités industrielles, enfin l'essor du rôle nouveau des ports dans la gestion intégrée de leurs espaces. Cette stratégie est également déclinée dans une stratégie nationale portuaire en outre-mer, publiée en juin 2016 .

À la suite des travaux de la conférence nationale sur la logistique de juillet 2015, un plan d'action pour la stratégie nationale « France Logistique 2025 » a également été élaboré : il décline, dans son volet portuaire, les ambitions de la France en matière d'optimisation des infrastructures, de renforcement des portes du territoire avec en particulier la fluidification du passage portuaire, et la massification des flux et la complémentarité des modes de transport.

D'une façon générale, votre rapporteur salue les efforts récents visant à simplifier la gestion administrative des ports, à renforcer le dialogue et la concertation, ou à clarifier la répartition des compétences. Il n'en reste pas moins qu' il ne s'agit là que de palliatifs nécessaires car, sans investissements massifs dans nos infrastructures portuaires, la France ne pourra espérer rattraper ses concurrents européens.

Les grandes orientations de la stratégie nationale portuaire

L'État entend franchir un nouveau cap et affirmer son ambition pour ses ports dans une feuille de route portant sur l'ensemble du système portuaire français et reposant sur trois principaux piliers : logistique et intermodalité, développement industriel et aménagement des espaces. Cette stratégie vise avant tout les grands ports maritimes (GPM) dont l'État a la responsabilité mais elle se fera en liaison étroite avec les ports décentralisés.

Premier pilier - La logistique et l'intermodalité

Le premier objectif de la stratégie nationale portuaire est de mettre en place des offres de transport de bout en bout fiables et compétitives . Les ports français doivent devenir des « architectes » de solutions logistiques maritimes et terrestres sur un hinterland de portée européenne forts de chaînes logistiques intégrées, économiquement compétitives et pérennes, favorisant les moyens massifiés, afin d'attirer et fidéliser les opérateurs et les clients.

Le deuxième objectif est de rendre les modes massifiés plus compétitifs pour développer le report modal , ce qui nécessite de meilleures connexions entre les ports et les réseaux fluviaux et ferroviaires.

Le troisième objectif est de fluidifier le passage portuaire des marchandises pour le rendre compétitif par rapport aux ports européens. Il s'agit de mobiliser l'ensemble des acteurs locaux, d'impulser des évolutions au sein de la place, afin de simplifier et partager les flux d'information et documentaires, notamment administratifs et douaniers.

- dans cet esprit, l'État a mis en place un guichet unique portuaire , afin qui permettra aux armateurs et aux entreprises de ne procéder qu'à une seule formalité déclarative à l'entrée ou à la sortie des ports, conformément à la directive 2010/65/UE applicable depuis le 1 er juin 2015 ;

- les services de l'État travaillent également à simplifier le régime de TVA applicable aux importateurs : l'article 27 de la loi pour l'économie bleue du 20 juin 2016 a permis d'en élargir le bénéfice à tous les opérateurs nationaux ou communautaires réalisant une opération d'importation, sans condition d'accès ;

- enfin, il a été proposé d' ouvrir aux chargeurs opérateurs économiques agréés, le Cargo Community System AP + , système informatique communautaire permettant de suivre l'ensemble des flux physiques, administratifs et douaniers de marchandises en temps réel : des expérimentations sont en cours dans les Grands Ports Maritimes de Marseille et Le Havre.

Ces trois objectifs de compétitivité, de report modal, et de fluidification du passage portuaire des marchandises doivent contribuer à conforter le statut de la France en tant que puissance maritime ouverte sur le monde : il s'agit de gagner en attractivité pour capter de nouveaux flux au-delà de l' hinterland actuel des ports français.

Deuxième pilier - Le développement industriel

Le quatrième objectif consiste à disposer d'un plan d'actions pour l'accueil et le développement des activités industrielles génératrices de trafic maritime . Les espaces portuaires constituent en effet une emprise idéale pour le développement d'industries lourdes, qui profitent de leur savoir-faire industriel.

Le système portuaire doit ainsi être partie intégrante des réflexions sur les filières d'avenir . Les ports ont vocation à renforcer leur association à travers des projets avec les milieux universitaires, la recherche, et les pôles de compétitivité, pour faire bénéficier les industriels d'un tissu local innovant. En particulier, le développement d'énergies nouvelles comme le biocarburant marin, la biomasse ou l'éolien offshore montre le lien étroit que les zones portuaires doivent jouer à l'avenir dans la production d'énergie et non pas uniquement dans l'approvisionnement énergétique.

Les ports doivent également participer à la réduction des gaz à effet de serre dans les transports, en l'occurrence dans le transport maritime, grâce à l'utilisation de carburants alternatifs propres comme le gaz naturel liquéfié (GNL). L'utilisation du GNL comme carburant marin offre de nouvelles opportunités pour développer une filière industrielle, qui passe par une bonne coordination entre les ports, pour offrir aux armateurs un réseau de soutage en France et en Europe.

Enfin, le CGEDD-CGEIET a rendu un rapport fin 2013 9 ( * ) sur les implantations logistiques et industrielles dans les GPM . Il fait apparaître clairement que des efforts doivent être entrepris afin de simplifier l'installation des entreprises sur le domaine portuaire.

Le cinquième objectif de la stratégie portuaire consiste corrélativement à mettre en place des processus compétitifs pour l'implantation d'industries. Les zones portuaires étant appelées à être de véritables pierres angulaires du développement industriel, les ports ont un besoin impérieux de maîtriser la gestion de leurs espaces et de leurs capacités d'accueil. L'État entend par conséquent simplifier les procédures d'installations d'activités économiques sur les ports .

Troisième pilier - L'aménagement des espaces

Le sixième objectif de la stratégie nationale portuaire vise à consacrer le rôle nouveau des ports dans la gestion intégrée de leurs espaces , dans toutes leurs composantes (industrielle, logistique, naturelle), sans négliger l'interface ville-port et en liaison avec les territoires.

À l'échelle de leur circonscription, les ports disposent en effet d'une compétence précieuse : la gestion de leur patrimoine foncier, qui constitue un réel atout stratégique. Il leur revient de jouer leur rôle d'aménageur durable , en déterminant la vocation des différents espaces du port, et en organisant leur gestion. Cette gestion équilibrée s'accompagne de la nécessité pour l'État de veiller à ne pas imposer aux ports de contraintes plus fortes que celles en vigueur dans les autres pays européens.

***

Au-delà de ces trois grands axes, l'État souhaite accorder la plus grande importance à la promotion sur le terrain d'un dialogue social de qualité , entre partenaires responsables contribuant collectivement au développement des ports, comme prôné par la convention collective nationale unifiée (CCNU) « ports et manutention » de 2011, qui a permis de refonder le dialogue social.

Par ailleurs, le développement d'une politique de formation professionnelle dynamique doit permettre aux salariés de bénéficier de compétences adaptées à l'évolution de leurs métiers, mais aussi aux places portuaires d'accroître leur compétitivité.

Ce volet social constitue un aspect essentiel de la stratégie nationale portuaire. La stabilité du climat social est décisive pour attirer le trafic dans les ports français, ce qu'illustre la confiance de plus en plus affichée par les grands armateurs depuis la relative accalmie consécutive à la réforme.

Enfin, au plan européen et plus généralement à l'international, en Asie mais aussi en Amérique, le Gouvernement entend promouvoir le savoir-faire des ports français et assurer à nos partenaires étrangers qu'ils recevront le meilleur accueil possible, fiable et à l'écoute de leurs besoins.

En pratique, l'administration précise que la stratégie nationale portuaire est prise en compte dans les projets stratégiques des grands ports maritimes (GPM) , qui ont désormais tous été validés en conseil de surveillance. Ces projets seront accompagnés par un nouveau contrat entre l'État et chacun des GPM, qui identifiera les engagements réciproques en matière de résultats et de soutien financier de l'État.

ÉTAT D'AVANCEMENT DES PROJETS STRATÉGIQUES DES GPM

Grand port maritime

Avis de l'Autorité environnementale

Consultation publique

Approbation par le conseil de surveillance

Marseille

25-févr-15

26 février - 26 mars 2015

27 mars 2015

Dunkerque

25-févr-15

2 avril - 3 mai 2015

22 mai 2015

Le Havre

08-oct-14

8 décembre 2014 - 8 janvier 2015

27 mars 2015

Rouen

25-févr-15

8 décembre 2014 - 8 janvier 2015

2 octobre 2015

Nantes Saint-Nazaire

26-août-15

7 septembre - 6 octobre 2015

23 octobre 2015

La Rochelle

08-oct-14

21 novembre - 21 décembre 2014

17 avril 2015

Bordeaux

10-juin-15

3 juillet 2015 - 19 novembre 2015

19 novembre 2015

La Réunion

10-sept-14

10 octobre - 10 novembre 2014

25 novembre 2014

Guadeloupe

23-oct-13

30 septembre - 30 octobre 2015

24 novembre 2015

Martinique

2-déc-2015

-

1 er mars 2016

Guyane

14-janv-15

2 février - 2 mars 2015

25 mars 2015

En matière de desserte ferroviaire , le Gouvernement assure que les ports travaillent en étroite collaboration avec les directions régionales de SNCF Réseau et Voies navigables de France (VNF) pour identifier les infrastructures nécessitant d'être modernisées ou mieux exploitées. Par ailleurs, le projet d'amélioration de la desserte du port du Havre par l'électrification de la ligne ferroviaire Serqueux-Gisors , figure au nombre des priorités retenues par la commission Mobilité 21 10 ( * ) et des 32 projets présentés par la France pour le plan Juncker. Il bénéficiera par ailleurs d'une subvention à hauteur de 31% dans le cadre du réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Le projet vient d'être déclaré d'utilité publique , le 18 novembre 2016, moyennant quelques travaux de protection acoustique des riverains. Il est désormais impératif d'engager les travaux dans les meilleurs délais , mais combien d'années précieuses auront été perdues pour mettre en place ce projet ?

Votre rapporteur se félicite également des avancées en matière de facilitation du passage portuaire, notamment sur l' autoliquidation de la TVA à l'importation qui permet de simplifier le régime applicable aux importateurs. L'article 27 de la loi pour l'économie bleue du 20 juin 2016 a permis d'en élargir le bénéfice à tous les opérateurs nationaux ou communautaires réalisant une opération d'importation, sans condition d'accès . Un amendement a été déposé par le Gouvernement et adopté dans le cadre du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, afin de compléter le dispositif : outre l'ouverture aux opérateurs tiers, exclus du premier texte, celui-ci a pour objectif de ne retenir que les opérateurs fiables . Votre rapporteur espère que cette restriction du champ d'application n'occasionnera pas des pertes de trafic .

2. Les missions parlementaires sur l'attractivité et la compétitivité des portes d'entrée maritimes françaises

En janvier 2016, le Premier Ministre a confié à quatre binômes de parlementaires des missions portant sur le renforcement de l'attractivité et de la compétitivité des principales portes d'entrée maritimes françaises, qui se sont achevées en juillet. Ces quatre missions concernaient l'axe Seine, l'axe Nord, l'axe Rhône-Méditerranée et la façade Atlantique .

Au-delà des recommandations particulières formulées sur chacun des axes, elles ont dressé un bilan commun autour de trois enjeux structurants pour les ports français : la simplification des procédures administratives pour fluidifier le passage portuaire, une nécessité de dresser des perspectives d'avenir en pérennisant les infrastructures existantes, en encourageant le report modal, en assurant la stabilité sociale, et un besoin de convergence et de coopération à la fois entre les différentes places portuaires, mais aussi entre les ports et les territoires. Parmi les pistes d'actions évoquées, certaines sont nouvelles, d'autres confirment la pertinence des démarches déjà lancées.

Au niveau institutionnel, on distingue deux approches : les rapports sur l'axe Seine et l'axe Rhône-Méditerranée interpellent principalement l'État , considéré comme l'interlocuteur de référence pour soutenir une plus grande intégration interportuaire et élargir l'hinterland des places portuaires ; les rapports sur l'axe Nord et la façade Atlantique invitent surtout les collectivités territoriales, et notamment les régions , à se saisir de leurs nouvelles compétences en matière d'économie et d'aménagement du territoire, en jouant un rôle accru dans le développement des ports (gouvernance, choix d'investissement, élargissement des hinterlands et promotion des ports).

LES PRINCIPALES CONCLUSIONS DES MISSIONS PARLEMENTAIRES SUR L'ATTRACTIVITÉ DES PORTES D'ENTRÉE MARITIMES FRANÇAISES

Axe Nord (René Vandierendonck et Jérôme Bignon)

La mission a mis en avant un besoin de structuration des acteurs et de l'offre portuaire et logistique des Hauts-de-France. Un des enjeux majeurs est de repenser la gouvernance en créant une entité dédiée regroupant les trois ports de Boulogne, Calais, Dunkerque ainsi qu'Eurotunnel . Cette entité aurait vocation à renforcer la coopération portuaire, comme c'est le cas sur les ports flamands, mais aussi à renforcer la coopération entre les différents acteurs publics des Hauts-de-France afin de structurer l'offre logistique en cohérence avec les différents schémas territoriaux. La mission propose également que cette « conférence régionale portuaire » soit associée à l'instauration d'une conférence portuaire de dimension nationale.

En parallèle, la mission recommande de s'appuyer sur la mise en oeuvre du Canal Seine-Nord Europe , en raison de son caractère stratégique et des retombées économiques importantes attendues pour la région des Hauts-de-France. Sur ce point la mission met en exergue la nécessité de réaliser les investissements connexes au canal , la mise en oeuvre de la société de projet, prévue à l'ordonnance n° 2016-489 mais également la mise en place d'une stratégie d'anticipation foncière sur le territoire du projet.

Au-delà la mission recommande la mise en place de mesures fiscales et économiques adaptées aux spécificités portuaires, notamment par le rétablissement du financement réglementaire par l'État des dragages d'accès des ports , l'établissement d'un niveau de prélèvement global de l'État inférieur à celui observé en moyenne sur la dernière décennie (impôt sur les sociétés et prélèvement d'actionnaire), la création de zones franches .

Axe Seine (Valérie Fourneyron et Charles Revet)

La mission propose une trentaine de recommandations, en positionnant les ports français vis-à-vis de leurs concurrents européens. Les recommandations concernent aussi bien les ports de l'axe Seine que la politique nationale de transport, prônant un engagement de l'État, notamment financier, dans le développement de la compétitivité portuaire, la mise en oeuvre d'une offre de service fluide et la desserte de l'hinterland.

Plusieurs investissements sont recommandés en faveur des modes massifiés . Il s'agit notamment de la ligne ferroviaire Serqueux-Gisors , de l' entretien des écluses de la Seine et notamment celle de Méricourt, de la mise au gabarit européen de l'Oise (MAGEO) et de l' accès fluvial direct à Port 2000 . La mission recommande aussi la montée en charge du terminal multimodal.

La mission propose également des pistes pour limiter le niveau de pression fiscale sur les ports : maintien de l'exonération de la taxe foncière , réduction du champ d'application de l'impôt sur les sociétés , adaptation du montant de prélèvement des dividendes réclamés au grand port maritime et confirmation de la responsabilité de l'État sur le dragage des chenaux d'accès .

Façade Atlantique (Yannick Vaugrenard et Gérard César)

La mission constate le poids marginal des ports de la façade Atlantique dans les échanges européens et internationaux : les ports de Rotterdam et Amsterdam représentent 15 fois le trafic des trois grands ports maritimes de la façade Atlantique. La mission constate un « manque cruel d'ambition » en matière de coordination, notamment du fait des positionnements stratégiques différents des trois ports, mais aussi de configurations différentes en matière d'accès nautiques notamment.

En termes de gouvernance , la mission propose : le pilotage par les régions de l'Ouest et du Centre d'une stratégie et d'un plan d'actions relatif au développement des réseaux de transport ferroviaire, routier et fluvial, et des zones logistiques en arrière des trois ports qui pourrait notamment s'appuyer sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (dit « Fonds Junker ») ; le renforcement du rôle de l'instance de coordination interportuaire existante (CCIA), avec une réflexion sur les possibilités d'une intégration renforcée, voire d'un changement de statut (GIE), associant les ports décentralisés.

En ce qui concerne la compétitivité de l'offre de service portuaires, la mission propose : de permettre une vision pérenne et dépassionnée en matière de dragage en renforçant l'adhésion autour des décisions prises dans le cadre du GIE Dragages-Ports ; de lancer une étude de parangonnage sur les structures portuaires et leurs coûts par rapport aux autres ports européens .

Enfin, pour une meilleure adaptation aux enjeux locaux, la mission propose de créer deux pôles distincts : le pôle de Nantes Saint-Nazaire constitué du grand port maritime de Nantes Saint-Nazaire ; le pôle de La Rochelle et Bordeaux constitué des deux autres ports, dont la gouvernance pourrait faire l'objet d'un projet de décentralisation. La mission propose qu'une structure de holding puisse être pilotée par la région , en précisant qu'Alain Rousset, président de la région Nouvelle-Aquitaine, a confirmé sa volonté de renforcer son positionnement dans la gestion de ces deux ports.

Axe Rhône-Méditerranée (Elisabeth Lamure et François-Michel Lambert)

Le rapport souligne l'importance d'articuler les enjeux portuaires, le développement économique et les performances logistiques. Des nombreuses mesures de simplification sont préconisées, pour faciliter l'installation des investisseurs sur le territoire en réduisant notamment la complexité bureaucratique des escales portuaires et en mettant en place un cargo community system unique.

La mission recommande également l' organisation de deux territoires pour multiplier les implantations de plateformes logistiques et d'industries en lien avec les ports de la façade méditerranéenne : d'un côté, l'axe Rhône-Saône, de l'autre, les ports méditerranéens coordonnés sous une gouvernance à construire, le Range France Med (de Port La Nouvelle jusqu'à Nice, en passant par Sète, Marseille-Fos et Toulon), sur le modèle des multi-port gateways .

La mission propose également des mesures de compétitivité en matière fiscale, de revoir la politique tarifaire du grand port maritime de Marseille, et d'améliorer la desserte de son hinterland .

3. Le Comité interministériel de la mer du 4 novembre 2016

Le Comité interministériel de la mer (CIMER) du 4 novembre 2016 a tracé plusieurs orientations de la politique portuaire pour l'année à venir , parmi lesquelles figurent notamment : l'augmentation de la participation financière de l'État aux dépenses de dragage ; l'harmonisation des systèmes d'informations de la chaîne logistique, douanière et sanitaire pour plus de simplicité et de rapidité ; la pérennisation du modèle fiscal des ports.

LES MESURES PORTUAIRES DU CIMER DU 4 NOVEMBRE 2016

1. L'État pourra augmenter sa participation financière au dragage des ports jusqu'à 26 M€ en 2017 et jusqu'à 30 M€ en 2018 avec la mise en place de contrats de progrès dans les Grands ports maritimes. Le système national de dragage sera réformé, afin de permettre à l'ensemble des places portuaires de gagner en attractivité et en compétitivité face à leurs concurrents européens.

2. L'État renforce l' attractivité des ports ultramarins , notamment s'agissant de la croisière : aboutissement de la stratégie nationale portuaire outre-mer, développement du système de détaxe pour les croisiéristes, amélioration des installations portuaires destinées à la croisière et à l'activité de transbordement, soutien financier au développement d'un terminal de croisières au port de Saint-Pierre-et-Miquelon.

3. Le Gouvernement défend l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les ports devant la Commission européenne.

4. Le Gouvernement facilite l'instruction des autorisations d'exploitation des espaces industrialo-portuaires dans le respect des enjeux environnementaux.

5. La gouvernance des axes portuaires va être structurée pour renforcer l'attractivité des grands ports et la dynamique logistique.

6. La convergence des modes de fonctionnement des Cargo community system (CCS) vers un système universel compatible avec le système douanier est engagée en rendant interopérables les systèmes existants.

7. Le projet de modernisation de la ligne ferroviaire Serqueux-Gisors sera déclaré d'utilité publique avant la fin de l'année 2016.

8. L'État investit 40 M€ à travers l'appel à projets « Ports à énergie positive » afin de renforcer la maîtrise des pollutions et des gaz à effet de serre.

9. Un cadre national est défini pour le déploiement d'une offre logistique pour carburants alternatifs en concertation avec les parties prenantes.

Votre rapporteur se félicite de ces mesures supplémentaires, qui ne sont pas prises en compte dans le PLF 2017 , et viendront augmenter la compétitivité des ports français. Ces mesures font en partie écho à certaines préconisations qu'il avait formulées dans le rapport sur l'axe Seine .

En particulier, l' interopérabilité des Cargo Community System (CCS), les systèmes informatiques de suivi de la marchandise, est aujourd'hui indispensable pour assurer la sûreté/sécurité, faciliter les contrôles douaniers, simplifier les échanges entre les intervenants et fluidifier les opérations grâce à une traçabilité de l'ensemble des marchandises et des documents dématérialisés. Actuellement , deux CCS concurrents et non-interfaçables sont développés : S)One par la société SOGET basée au Havre, et Ci5 par la société MGI basée à Marseille. Ils viennent directement concurrencer le déploiement du CCS unique AP+ développé à partir de 2001 sous l'impulsion de l'État. Or la multiplication de CCS différenciés nuit à l'efficacité d'ensemble de notre système portuaire , dans la mesure où ils peuvent être utilisés pour réserver l'accès à l'information à un nombre limité d'acteurs ou à faire payer un tarif excessif aux nouveaux entrants.

S'agissant de l' augmentation de la contribution de l'État au dragage des ports , votre rapporteur rappelle qu'il s'agit d'une mesure de bon sens. Les opérations de dragage en milieu marin et estuarien représentent chaque année en France près de 35 millions de mètres cubes de sédiments , issus des chenaux d'accès aux ports et de leurs bassins. Le dragage de ces matériaux est indispensable pour des raisons de sécurité liées à l' accueil des navires dont les gabarits sont croissants , mais également dans un souci de prévention des risques naturels tels que les inondations. La nécessité de garantir la sécurité des accès aux infrastructures portuaires mais également de maîtriser les flux hydrauliques, fait du dragage une activité de service public .

Ainsi, la loi n° 65-491 du 29 juin 1965 portant création des ports maritimes autonomes désigne l'État comme responsable de l'accès aux ports français . Or celui-ci assume aujourd'hui seulement 41% du financement de ces accès et cette part décroit un peu plus chaque année. Entre 2006 et 2014, les dotations de l'État sur les dragages d'accès aux ports maritimes d'Haropa se sont élevées à 162 M€ pour une charge totale de 342,5 M€, pendant qu'en Belgique le gouvernement les finançait en totalité pour un montant de 2,12 milliards d'euros (754 M€ pour Anvers, 217 M€ pour Gand et 317 M€ pour Zeebrugge). L'État doit prendre intégralement en charge cette mission , afin de permettre à nos ports de réduire leurs droits de ports à due proportion , et d'améliorer leur compétitivité-prix.


* 9 La mise en oeuvre des projets portuaires pour y développer durablement les activités logistiques et industrielles - Rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET), octobre 2013.

* 10 « Pour un schéma national de mobilité durable » - Rapport de la commission Mobilité 21 présidée par Philippe Duron, remis au ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche, le 27 juin 2013.

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