B. UNE BAISSE DE FINANCEMENT QUI DOIT CONDUIRE À UNE RÉFLEXION SUR LES RÔLES RESPECTIFS DES ACTEURS DU MONDE DE LA CONSOMMATION

1. Opter pour une intervention plus stratégique au profit des associations de consommateurs

Il ressort des auditions menées par votre rapporteur l'absence actuelle d'un réel pilotage dans le subventionnement des associations agréées de consommateurs. Lors de leur audition, les représentants de la DGCCRF ont en effet souligné que la répartition des crédits disponibles entre les associations existantes s'effectuait simplement sur une base « historique », sans obéir à d'autres critères. Et, jusqu'ici, la baisse tendancielle des crédits d'intervention (- 15 % sur trois ans) a été appliquée de manière identique à l'ensemble des associations , quel que soit leur niveau de financement.

À ce stade, il semble que le Gouvernement n'a pas encore décidé de la stratégie de soutien aux associations qu'il entendait privilégier. Cependant, la réduction drastique des crédits d'intervention prévue pour 2018 doit conduire à s'interroger sur cette gestion « au fil de l'eau ». Votre rapporteur est en effet partagé sur la pertinence du maintien de financements de quelques milliers d'euros aux plus petites associations, qui peut s'apparenter à un « saupoudrage » sans effet réel en termes de politiques publiques.

Le monde de la consommation doit pouvoir conserver une réelle diversité, et c'est d'ailleurs à ce titre qu'a été retenu jusqu'ici le principe du versement d'une subvention à chaque association agréée. Mais il est également important que le budget de l'État puisse servir de levier pour des actions menées par des associations, et l'on peut s'interroger sur les effets réels de subventions qui ne dépasseraient pas à l'avenir, pour certaines, 15 000 € par an. Dans ces conditions, il semble souhaitable d'engager une réflexion sur une modulation du niveau des subventions en fonction de critères objectifs permettant de mieux soutenir et valoriser les actions des associations, en fonction de leurs activités et de leurs projets.

En outre, à défaut d'autres sources de financement public d'un montant équivalent, les associations devront renforcer leurs modes de financement privés, comme l'activité « presse » ou « partenariale » (qui, pour certaines, est importante) ou, à tout le moins, afin de voir leurs coûts fixes diminuer , rechercher davantage de synergies et de complémentarités entre elles, alors qu'elles ont aujourd'hui tendance à agir chacune séparément .

La réforme de 2010 13 ( * ) , qui avait conduit à la mise en place d'une « reconnaissance spécifique » (c'est-à-dire une sorte de « super agrément ») au profit de certaines associations (aujourd'hui l'AFOC, la CLCV, la CFL et Familles rurales) n'a pas eu les effets escomptés, non seulement parce qu'elle n'emporte pas de bénéfices suffisamment concrets pour les associations concernées mais qu'au surplus certaines d'entre elles la refusent même dans son principe. Votre rapporteur appelle donc à ce qu'une réflexion effective soit menée en concertation avec les associations de consommateurs sur la nature des relations nouvelles qu'engendrerait nécessairement une forte diminution de ces crédits. Une réflexion de même nature doit être conduite s'agissant de l'Institut national de la consommation.

2. Des interrogations sur le positionnement de l'Institut national de la consommation

En mai 2016, la Cour des comptes s'était montrée critique sur l'activité de l'Institut national de la consommation au cours de la période 2010-2015. Elle soulignait qu'il n'assurait plus son activité de soutien qu'aux associations de consommateurs et aux CTRC « les plus fragiles » dont le « maintien laisse perdurer une dilution des moyens alloués au mouvement consumériste, préjudiciable à l'efficience de son action », qu'un pilotage défaillant de l'établissement ne permettait pas de définir de véritables objectifs stratégiques et que l'activité « presse » était en fort déclin, ce qui conduisait à déséquilibrer les ressources de l'EPIC et à s'interroger sur un nouveau modèle.

Depuis lors, il est incontestable que la situation de l'INC s'est améliorée. Ainsi que l'a souligné au cours de son audition la directrice générale de l'Institut, les objectifs prévus dans le contrat d'objectifs et de moyens (COP) de 2016 ont été remplis, tandis que l'activité « presse » s'est considérablement redressée avec une augmentation de 40 % du nombre des abonnés à la revue et de 60 % du nombre des ventes du mensuel (60 000 exemplaires vendus en 2016). L'INC a par ailleurs développé une politique active de partenariats avec des organismes ou des entreprises pour des actions de recherche ou l'élaboration d'études, ce qui constitue une source de plus en plus importante de son financement. Ainsi, en 2016, l'INC a réalisé un chiffre d'affaires de 18,5 millions d'euros, dégageant un résultat net de 897 000 euros.

Pour l'avenir, et en l'absence à ce stade d'un nouveau COP négocié avec sa tutelle, l'INC entend suivre une stratégie de renforcement de sa position comme acteur de la modernisation du monde consumériste, afin notamment « d'optimiser, valoriser et réinventer les activités du service public », et de poursuivre le développement de ses activités de presse et partenariales.

Votre rapporteur relève néanmoins que, s'agissant de son activité « de service public », c'est-à-dire essentiellement d'information du consommateur et d'appui au mouvement consumériste, le positionnement actuel de l'INC peut être questionné dans la mesure où :

- d'une part, sa mission d'information des consommateurs doublonne de plus en plus avec les actions d'information menées directement la DGCCRF par le biais de son propre site internet. La question doit alors être posée de la pertinence de la coexistence de deux canaux d'information délivrant des contenus similaires. La bonne gestion des ressources publiques implique de trouver un positionnement non redondant entre les actions de l'EPIC et celles menées par l'administration, sans qu'à ce stade il puisse être clairement décidé lequel de ces acteurs doit être privilégié ;

- d'autre part, où, en pratique, le rôle d'appui de l'INC est voué à diminuer structurellement dans le futur à mesure que les CTRC se regroupent et gagnent ainsi en expertise opérationnelle. En outre, l'activité d'appui semble ne concerner véritablement que les plus petites associations de consommateurs, tandis que les grandes associations assurent de plus en plus par elles-mêmes un soutien et des actions de formation pour leurs membres.

En tout état de cause, la volonté de l'INC de voir son activité se développer ne devrait pas pouvoir se réaliser en l'état des mesures de réduction budgétaires initialement projetées. Selon sa directrice générale, la baisse de 40 %, si elle était répercutée sur les crédits dévolus à l'INC et au réseau des CTRC, impliquerait une perte de 1,6 million d'euros de financement, ce qui conduirait à une réduction de masse salariale de 15 emplois sur les 68 que compte l'INC ainsi qu'à la disparition vraisemblable de certains CTRC.

3. En l'absence de réflexion encore engagée, préserver davantage les crédits destinés aux acteurs de la consommation

Votre rapporteur avait proposé à votre commission, compte tenu du faible montant, en valeur absolue, des sommes en jeu, de préserver davantage les crédits destinés aux acteurs de la consommation, estimant important de ne pas mettre le monde de la consommation dans une impasse financière en 2018 , alors qu'aucune réflexion avec les acteurs n'est encore engagée. Consciente de la nécessité d'assurer une contribution au redressement des finances de l'État, elle avait ainsi préconisé une voie médiane pour le prochain exercice budgétaire, en limitant à 20 % la baisse envisagée des crédits l'an prochain, en abondant l'action n° 17 de 1,6 million d'euros, prélevés à parts égales sur l'action n° 1 et l'action n° 2 du programme 305 « Stratégie économique et fiscale ».

En séance publique, l'Assemblée nationale a cependant été plus loin, en prévoyant une augmentation de 3,1 millions d'euros de cette action, réduisant dès lors la baisse de crédits à 5 % seulement . Même si elle s'inscrit moins dans l'objectif de redressement des finances publiques que celui poursuivi par votre rapporteur, cette mesure permet en tout état de cause aux instituts et associations de ne pas voir leur activité mise à mal en 2018. Néanmoins, cette mesure ne doit pas retarder l'engagement d'une réflexion globale sur les conditions de l'aide publique au monde de la consommation .


* 13 Issue du décret n° 2010-801 du 13 juillet 2010 relatif à la représentation des associations de défense des consommateurs et aux institutions de la consommation.

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