AVANT-PROPOS

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2018 comporte, pour la défense, un enjeu particulier : il intervient à un moment « charnière » entre la fin de la période de programmation militaire actuelle et celle qui est en préparation, constituant ainsi le dernier budget avant la prochaine loi de programmation militaire ( LPM ).

Dans cette perspective, le présent rapport s'attache à détailler les enjeux financiers majeurs pour la défense que s'avère concentrer l'automne 2017 : non seulement les prévisions pour l'année prochaine, et donc la fin de l'exécution en cours, qui en effet conditionnera ce budget 2018 , mais aussi la programmation au-delà, telle qu'elle se trouve esquissée déjà - et a priori contrainte - par les dispositions du projet de loi de programmation des finances publiques ( PLPFP ) pour 2018-2022 (I e partie).

À la suite de cette présentation d'ensemble, on trouvera une analyse spécifique des crédits inscrits dans le PLF pour le programme 146 « Équipement des forces » (II e partie) et un point sur l'avancement des différentes opérations d'armement en cours (III e partie).

IÈRE PARTIE - 2018 : LE DERNIER BUDGET DE LA DÉFENSE AVANT LA PROCHAINE LPM

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2018 se présente au premier abord pour la défense, suivant les termes retenus par la ministre des armées, comme « un budget de remontée en puissance 5 ( * ) ». En effet, tous les indicateurs semblent orientés à la hausse.

De fait, ce budget doit s'élever l'année prochaine, toutes ressources incluses hors pensions, à 34,39 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) : c'est une augmentation de 1,7 milliard d'euros ( + 5,2 % ) par rapport à la prévision initiale pour 2017 (32,69 milliard d'euros) inscrite en loi de finances (LFI). En particulier, la mission « Défense », avec 34,2 milliards d'euros de CP hors pensions, enregistre une hausse de 1,76 milliard d'euros (+ 5,4 %).

Cette prévision, comparée à celle qui figure pour 2018 dans la loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019 6 ( * ) dans sa version actualisée par la loi du 28 juillet 2015 7 ( * ) , représente 1,7 milliard d'euros supplémentaires (+ 4,9 %). L'effort de défense nationale passerait ainsi de 1,77 % du produit intérieur brut (PIB) cette année à 1,82 % du PIB l'an prochain - sous toutes les réserves méthodologiques qu'appelle, au demeurant, ce calcul 8 ( * ) .

Vos rapporteurs pour avis relèvent notamment l'importance des efforts d'investissement et d'équipement que traduit, globalement, ce budget : par rapport à la LFI 2017, les investissements, avec une prévision de 10,24 milliards d'euros en CP, marquent une hausse de 1,53 milliard d'euros ( + 17,6 % ), la mission « Défense » devant concentrer ainsi plus de 80 % des crédits d'investissement inscrits au budget général de l'État ; les équipements, avec une prévision de 18,5 milliards d'euros en CP, augmentent de 1,2 milliard d'euros ( + 6,9 % ). En particulier, le programme 146 « Équipement des forces », doté de 13,67 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 10,24 milliards d'euros en CP (hors fonds de concours et attributions de produits), enregistre une croissance de 35 % en AE et de 2 % en CP ; ainsi se trouve assurée, l'année prochaine, la poursuite des programmes d'armement prévus par la LPM actualisée en 2015. Il en va de même du soutien à l'innovation : à cet égard, le PLF comporte une prévision de recherche et développement (R&D) de défense à hauteur 4,67 milliards d'euros en CP, dont 723 millions d'euros pour les études amont , dotation en ligne avec l'objectif fixé en la matière par la LPM d'un budget moyen annuel de 730 millions d'euros 9 ( * ) .

Vos rapporteurs observent avec la même satisfaction la poursuite des opérations de régénération des équipements (munitions, équipements individuels, rénovation...) et du rehaussement de l'activité touchant à la préparation opérationnelle ; celle des recrutements - lesquels doivent donner lieu à une augmentation nette des effectifs à hauteur de 500 équivalents temps plein (ETP), l'année prochaine, au bénéfice principalement de la sécurité, du renseignement et de la cyberdéfense ; une accentuation des efforts en faveur de la protection des hommes et des emprises militaires, ainsi que pour l' entretien des infrastructures ; le début de l'application du plan « familles et conditions de vie des militaires », que la ministre des armées a présenté le 31 octobre dernier 10 ( * ) ...

Néanmoins , à l'analyse, la hausse budgétaire se révèle comme un « trompe-l'oeil » : 90 % de l'augmentation prévue pour la mission « Défense » se trouvent consommés d'avance .

D'une part, cette augmentation sera en partie absorbée par l'aggravation du report de charges , à hauteur de 420 millions d'euros , résultant des mesures mises en oeuvre par le ministère des armées consécutivement à l'annulation de crédits intervenue en juillet dernier (850 millions d'euros pris sur le programme 146 11 ( * ) ). Elle sera entamée, de plus, par la première étape d'un « resoclage » budgétaire des dépenses d'opérations extérieures (OPEX) décidé par le Gouvernement - soit, en pratique, un transfert de la charge en la matière, de l'interministériel vers le ministère de la défense 12 ( * ) -, justifiant l'ouverture de 200 millions d'euros supplémentaires pour l'année prochaine. En toute rigueur, eu égard à ces deux premiers éléments, la hausse de CP constatée à hauteur de 1,76 milliard d'euros de la LFI 2017 au PLF 2018 (+ 5,4 %) doit être ramenée à 1,14 milliard d'euros (+ 3,5 %).

D'autre part, près d'un milliard d'euros (996 millions) sont requis en 2018 pour le financement des mesures arrêtées en 2016 13 ( * ) - recrutements, amélioration des conditions du personnel, acquisition de nouveaux équipements - qui n'avaient pas été inscrites dans la LPM actualisée en 2015. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait d'ailleurs critiquée cette forme d'« impasse » budgétaire 14 ( * ) .

De la sorte, le PLF 2018 apparaît comme stabilisant les moyens de la défense davantage que les accroissant . Or les conditions d'entrée dans la gestion de ce budget prévu pour l'an prochain restent subordonnées à la régulation de la fin de l'exercice en cours .

Pour le financement des surcoûts nets d'OPEX et d'opérations intérieures (OPINT) encore à couvrir aujourd'hui, soit un montant de plus de 365 millions d'euros au total, un équilibre satisfaisant a été trouvé par le projet de loi de finances rectificative (PLFR) de fin d'année 15 ( * ) et le projet de décret d'avance qui lui est associé : ce financement sera réalisé par la solidarité ministérielle à hauteur de près de 313 millions d'euros, et la couverture du solde grâce à l'excédent prévisionnel de crédits de masse salariale du ministère des armées. Encore convient-il de s'assurer qu'aucun ré-arbitrage de dernière minute ne vienne remettre en cause ce schéma.

Mais 700 millions d'euros de crédits se trouvent encore « gelés » sur le programme 146 , à titre de réserve de précaution ; la situation interdit de fait à la direction générale de l'armement (DGA) l'exécution normale de ses paiements. Et, sous les hypothèses les plus favorables incluant le « dégel » intégral de ces crédits, le report de charges de la mission « Défense », de 2017 sur 2018, pourrait atteindre un niveau historiquement élevé d'au moins 3,5 milliards d'euros .

C'est dire l'importance des risques d'entrave auxquels se trouve exposée la remontée en puissance annoncée par le Gouvernement - restauration des moyens pourtant éminemment nécessaire pour nos armées.

Faut-il le rappeler au seuil du présent rapport ? Nos forces sont aujourd'hui éreintées par leur sur-engagement, depuis plusieurs années, à la fois sur les théâtres extérieurs de l'intervention française et sur le territoire national, dans des opérations intenses et durables qui usent, à rythme accéléré, les hommes comme les équipements. Dans le même temps, les menaces, telles que vient de les identifier la revue stratégique de défense et de sécurité nationale 16 ( * ) , vont croissantes.

La situation s'avère d'autant plus préoccupante que l'exécution du budget 2018 de la défense conditionnera l'entrée dans la prochaine période de programmation militaire ( 2019 à 2025 ). La première partie de celle-ci - jusqu'en 2020 au moins - se trouve d'ores et déjà contrainte par la trajectoire fixée pour la mission « Défense » par le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) pour 2018-2022 adopté en première lecture par le Sénat 17 ( * ) à la suite de l'Assemblée nationale.

La remontée en puissance des capacités militaires de notre pays ne pourra être considérée comme véritablement amorcée par le PLF 2018 que si ces contraintes majeures - risques tenant à la fin de l'exécution en cours, hypothèques de la programmation financière - trouvent à être surmontées .

I. L'AMORCE D'UNE REMONTÉE EN PUISSANCE ?

A. UN BUDGET ORIENTÉ À LA HAUSSE

Toutes ressources incluses hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » (près de 8,44 milliards d'euros), le budget de la défense prévu par le PLF 2018 s'élève en CP à 34,39 milliards d'euros :

- 34,2 milliards d'euros se trouvent inscrits sur les programmes de la mission « Défense » ;

- 190 millions d'euros sont attendus en provenance de cessions du ministère des armées - ventes immobilières pour 140 millions d'euros (recettes retracées par le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ») et ventes de matériels pour 50 millions d'euros (recettes affectées à la mission « Défense » sous forme d'attribution de produits).

Ce budget représente :

- par rapport à la prévision pour 2018 de la LPM actualisée en 2015 (32,77 milliard d'euros), 1,62 milliard d'euros de plus ( + 4,9 % ) ;

- par rapport à la prévision de la LFI 2017 (32,69 milliard d'euros), une augmentation de 1,7 milliard d'euros ( + 5,2 % ).

Il doit permettre, notamment :

- d'une part, un accroissement net des effectifs du ministère de la défense à hauteur de 500 ETP , soit 300 ETP de plus que dans la prévision arrêtée en 2016 ;

- d'autre part, une accentuation significative des efforts en matière d'équipements et d'investissements , postes de dépenses en hausse, par rapport à la LFI 2017, de 1,2 milliard d'euros ( + 6,9 % ) et de 1,53 milliard d'euros ( + 17,6 % ) respectivement.

1. Des ressources supérieures aux prévisions de la LPM et de la LFI 2017
a) + 4,9 % par rapport à la LPM actualisée en 2015 (1,62 milliard d'euros)

Dans sa version initiale de 2013, la LPM 2014-2019 prévoyait pour la défense en 2018 un budget de 31,78 milliards d'euros hors pensions ; cette prévision a été relevée à hauteur de 32,77 milliards par la loi d'actualisation du 28 juillet 2015 (+ 1 milliard d'euros). La prévision inscrite dans le PLF 2018 représente 1,62 milliard d'euros de plus que cette prévision actualisée (+ 4,9 %) et 2,61 milliards de plus que la prévision initiale ( + 8,2 % ).

Cette « sur-conformité » à la LPM, déjà constatée en LFI 2017 (+ 417 millions d'euros par rapport aux prévisions actualisées en 2015), doit permettre de financer, en particulier, les besoins liés au contrat de protection des armées et aux OPEX. En particulier, se poursuivront :

- d'une part, la remontée des effectifs : une progression nette de 500 ETP est programmée pour l'année prochaine, faisant suite à l'augmentation de 400 ETP prévue pour 2017 ;

- d'autre part, le renouvellement capacitaire : l'agrégat « Équipement » doit représenter, l'an prochain, 18,5 milliards d'euros en CP, montant supérieur de 1,2 milliard d'euros à la prévision pour 2017 (+ 6,9 %).

Comme on l'a déjà noté, l'effort de défense nationale passerait ainsi de 1,77 % du PIB prévu pour 2017 à 1,82 % du PIB en 2018, avec toutes les réserves méthodologiques dont il convient d'accompagner cet indicateur 18 ( * ) .

Évolution prévisionnelle du budget de la défense

(CP, hors pensions, en milliards d'euros courants)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

LPM initiale

(2013)

Total

31,38

31,38

31,38

31,56

31,78

32,51

- dont CP

29,61

29,61

30,13

30,65

31,50

32,36

- dont cessions

1,77

1,77

1,25

0,91

0,28

0,15

LPM actualisée

(2015)

Total

31,38

31,98

32,26

32,77

34,02

- dont CP

31,15

31,73

32,11

32,62

33,87

- dont cessions

0,23

0,25

0,15

0,15

0,15

LFI 2017

&

PLF 2018

Total

32,69

34,39

36,05*

- dont CP

32,44

34,20

35,90*

- dont cessions

0,25

0,19

0,15*

(*) Prévisions du PLPFP 2018-2022 pour les CP et de la LPM actualisée en 2015 pour les cessions.

Source : documentation budgétaire

b) + 5,2 % par rapport à la LFI 2017 (1,7 milliard d'euros)

La LFI 2017 a prévu pour la défense, toutes ressources comprises hors pensions, 32,44 milliards d'euros ; le PLF 2018 accroît cette prévision de 1,7 milliard d'euros (+ 5,2 %). La hausse se monte à 1,76 milliard d'euros ( + 5,4 % ) pour ce qui concerne les seuls crédits budgétaires , que regroupe la mission « Défense ».

L'essentiel de cette hausse d'une année sur l'autre tient à l'augmentation des dépenses d'investissement (titre 5 : + 1,53 milliard d'euros en CP) et à la progression des dépenses de masse salariale (titre 2 : + 324 millions d'euros hors pensions).

Évolution prévisionnelle du budget de la défense

(CP, en millions d'euros)

LFI 2017

PLF 2018

Évolution 2017-2018

Crédits budgétaires hors pensions

32 436,83

34 195,84

+ 5,42 %

Ressources de cessions (immeubles et matériels)

250,00

190,00

- 24,00 %

Ressources totales hors pensions

32 686,83

34 385,84

+ 5,20 %

Pensions

8 154,21

8 437,92

+ 3,48 %

Crédits budgétaires avec pensions (état B)

40 591,04

42 633,76

+ 5,03 %

Ressources totales (cessions et pensions incluses)

40 841,04

42 823,76

+ 4,85 %

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire établi en application de l'article 49 de la LOLF

Du point de vue du volume de CP inscrits à l'état B annexé au PLF 2018 - c'est-à-dire pensions incluses, mais hors recettes de cessions -, cette prévision conserve à la mission « Défense » (42,82 milliards d'euros au total) le rang de deuxième mission de l'État , derrière la mission « Enseignement scolaire » (71,53 milliards d'euros) et devant la mission « Recherche et enseignement supérieur » (27,67 milliards d'euros), compte non tenu de la charge de la dette et des remboursements et dégrèvements d'impôts. Elle représente 15,2 % du budget général établi pour l'année prochaine hors charge de la dette et remboursements et dégrèvements d'impôts, contre 14,9 % en LFI 2017.

Évolution des crédits de la mission « Défense » par programme*

(CP, en millions d'euros)

1. - Pensions et recettes de cessions incluses

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

Evolution AE 2017-2018

CP

Evolution CP 2017-2018

144 Environnement et prospective de la politique de défense

hors titre 2

1 531,8

1 336,0

1 443,1

-5,8%

1 395,7

4,5%

146 Equipement des forces

hors titre 2

10 140,2

10 051,4

13 661,0

34,7%

10 243,2

1,9%

178 Préparation et emploi des forces

hors titre 2

8 371,7

7 347,0

8 818,0

5,3%

8 116,9

10,5%

212 Soutien de la politique de défense

hors titre 2

2 439,2

2 345,4

2 890,7

18,5%

2 698,7

15,1%

titre 2

19 761,3

19 761,3

20 369,2

3,1%

20 369,2

3,1%

Total pour la mission

42 244,2

40 841,0

47 182,0

11,7%

42 823,8

4,9%

2. - Hors pensions et recettes de cessions incluses

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

Evolution AE 2017-2018

CP

Evolution CP 2017-2018

144 Environnement et prospective de la politique de défense

hors titre 2

1 531,8

1 336,0

1 443,1

-5,8%

1 395,7

4,5%

146 Equipement des forces

hors titre 2

10 140,2

10 051,4

13 661,0

34,7%

10 243,2

1,9%

178 Préparation et emploi des forces

hors titre 2

8 371,7

7 347,0

8 818,0

5,3%

8 116,9

10,5%

212 Soutien de la politique de défense

hors titre 2

2 439,2

2 345,4

2 890,7

18,5%

2 698,7

15,1%

titre 2

11 607,1

11 607,1

11 931,3

2,8%

11 931,3

2,8%

Total pour la mission

34 090,0

32 686,8

38 744,1

13,7%

34 385,8

5,2%

3. - Hors pensions et hors recettes de cessions

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

Evolution AE 2017-2018

CP

Evolution CP 2017-2018

144 Environnement et prospective de la politique de défense

hors titre 2

1 531,8

1 336,0

1 443,1

-5,8%

1 395,7

4,5%

146 Equipement des forces

hors titre 2

10 140,2

10 051,4

13 661,0

34,7%

10 243,2

1,9%

178 Préparation et emploi des forces

hors titre 2

8 371,7

7 297,0

8 818,0

5,3%

8 066,9

10,6%

212 Soutien de la politique de défense

hors titre 2

2 439,2

2 145,4

2 890,7

18,5%

2 558,7

19,3%

titre 2

11 607,1

11 607,1

11 931,3

2,8%

11 931,3

2,8%

Total pour la mission

34 090,0

32 436,8

38 744,1

13,7%

34 195,8

5,4%

(*) : Pour mémoire, la LFI 2015 a regroupé au sein du programme 212 les crédits de masse salariale (titre 2) de la mission.

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire établi en application de l'article 49 de la LOLF

2. Des effectifs en augmentation nette de 500 ETP

Le PLF 2018 prévoit pour la défense la création de 500 équivalents temps plein (ETP), compte non tenu de 18 ETP pour le service industriel de l'aéronautique (SIAé). Cet accroissement des effectifs, faisant suite à l'augmentation de 400 ETP (outre 64 ETP pour le SIAé) prévue en 2017, est destinée à renforcer la défense du territoire national, le renseignement, la cyberdéfense, ainsi que la protection des emprises militaires.

Il s'agit de 300 ETP supplémentaires par rapport à la trajectoire d'effectifs arrêtée par le conseil de défense du 6 avril 2016 , qui avait programmé pour l'an prochain une hausse de 200 ETP. Cette mesure et les prévisions pour 2019 de la lettre-plafond associée au PLPFP 2018-2022 permettent de limiter la réduction des effectifs du ministère de la défense à 4 437 ETP sur la période 2014-2019 - soit, notamment, une moindre de réduction de 568 ETP (11,5 %) par rapport à la trajectoire établie en 2016 et de 10 568 ETP (71 %) par rapport à celle de la LPM actualisée en 2015.

Évolution prévisionnelle des effectifs de la défense*

(en ETP)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

LPM initiale ( 2013 ) (a)

- 7 881

- 7 500

- 7 397

- 7 397

- 3 500

0

- 33 675

LPM actualisée ( 2015 ) (b)

0

+ 2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 14 925

Écart b/a

0

9 697

4 797

700

3 818

18 750

Trajectoire actualisée en 2016 (c)

+ 2 300

+ 400

+ 200

+ 182

- 4 925

Écart c/b

0

3 000

3 000

4 000

10 000

Trajectoire actualisée en 2017 (d)

+ 400

+ 500

+ 450

- 4 357

Écart d/c

0

300

268

568

(*) : Hors SIAé.

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire établi en application de l'article 49 de la LOLF

Le plafond des autorisations d'emplois du ministère des armées se trouve ainsi fixé pour l'année prochaine à hauteur de 274 580 ETP , soit 14 % du plafond des autorisations d'emplois de l'État prévu (1 960 333 ETP). Ce ministère constitue ainsi le troisième plus gros employeur de l'État, après le ministère de l'éducation nationale (1 021 721 ETP) et le ministère de l'intérieur (287 325 ETP).

La masse salariale correspondante (dépenses de titre 2 de la mission « Défense ») s'élèvera à 11,83 milliards d'euros hors pensions , soit une augmentation de 324 millions d'euros par rapport à la LFI 2017 (et à 20,37 milliards d'euros avec pensions, soit + 608 millions d'euros).

3. Des efforts d'équipement et d'investissement accentués
a) + 6,9 % pour les CP d'équipement (1,2 milliard d'euros)

La présentation du budget de la défense par agrégat fait ressortir la priorité donnée aux dépenses d'équipement : 18,5 milliards d'euros leurs sont affectés, en CP, dans le PLF 2018, contre 17,3 milliards d'euros en LFI 2017, soit une notable progression de 6,9 % ( + 1,2 milliard d'euros ) et 53,7 % des crédits prévus l'an prochain, contre 52,9 % du budget initial pour l'année en cours. L'accroissement du budget d'équipement constaté depuis 2013 est ainsi amplifié ; compte tenu de la prévision des LFI 2017 et du PLF 2018, sur la période 2014-2019, ce budget s'établit à 17,16 milliards d'euros par an en moyenne .

Évolution du budget de la défense par agrégat

(CP, hors pensions, en milliards d'euros courants)

LFI

PLF

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Dépenses d'équipement

15,3

17,9

17,0

16,0

16,2

16,0

16,4

16,7

16,9

17,3

18,5

Ressources totales (hors pensions)

30,2

33,0

32,2

31,2

31,4

31,4

31,3

31,4

32,1

32,7

34,4

Part des dépenses d'équipement

50,7 %

54,2 %

52,8 %

51,3 %

51,6 %

51,0 %

52,4 %

53,2 %

52,7 %

52,9 %

53,7 %

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire établi en application de l'article 49 de la LOLF

La hausse en la matière vise à accélérer la régénération et le renouvellement des matériels militaires .

En particulier, les CP alloués au programme 146 « Équipement des forces » pour l'année prochaine (10,24 milliards d'euros, soit une hausse de 2 % par rapport à la LFI 2017) doivent couvrir la livraison de plusieurs matériels structurants pour les forces ; mentionnons ici 19 ( * ) : les trois premiers véhicules blindés multi-rôles (VBMR) lourds Griffon ; les 500 premiers véhicules légers tactiques polyvalents non protégés (VLTP NP) et les derniers 40 camions porteurs polyvalents terrestres (PPT) attendus au titre de la LPM 2014-2019 ; 5 hélicoptères de combat Tigre HAD, les derniers de la programmation d'ici 2019 ; 10 hélicoptères de transport et de surveillance NH90 (2 en version navale et 8 en version terrestre) ; 2 avions de transport A400M Atlas ; un avion de transport C 130 J ; 3 avions de combat Rafale neufs (fin de la livraison pour l'armée de l'air décalée en 2016 afin d'honorer la commande de l'Égypte) et un Rafale Marine F1 mis au standard F3 ; le premier avion-ravitailleur MRTT ( multi-role transport tanker ) Phénix ; le premier avion léger de surveillance et de reconnaissance (ALSR) ; une cinquième frégate multi-mission (FREMM) ; les deux premiers bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers (BSAH) ; 8 000 fusils d'assaut HK 416 F de nouvelle génération, arme individuelle future (AIF) destinée à remplacer le FAMAS...

Parallèlement, les AE du programme (13,67 milliards d'euros, soit une hausse de 35 % par rapport à la LFI 2017) doivent permettre de passer les commandes , notamment, des trois derniers MRTT Phénix prévus par la LPM 2014-2019, de la rénovation de 55 avions Mirage 2000D et de 50 chars Leclerc, de 20 nouveaux VBMR Griffon, de 1 200 VLTP NP, d'un cinquième sous-marin d'attaque (SNA) Barracuda...

b) + 17,6 % pour les CP d'investissement (1,53 milliard d'euros)

La décomposition par nature de dépenses des crédits de la mission « Défense » inscrits dans le PLF 2018 fait apparaître l'importance et la nette accentuation de l'effort d'investissement que comporte ce budget. En effet, les dépenses de titre 5 de la mission représentent près de 14,67 milliards d'euros en AE et de 10,24 milliards d'euros en CP : c'est une hausse, par rapport à la LFI 2017, de 39,1 % en AE ( + 4,12 milliards d'euros ) et de 17,6 % en CP ( + 1,53 milliard d'euros ).

Évolution des crédits de la mission « Défense » par titre

(CP, en millions d'euros)

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

Evolution AE 2017-2018

CP

Evolution CP 2017-2018

Titre 2 Dépenses de personnel

19 761,3

19 761,3

20 369,2

3,1%

20 369,2

3,1%

Titre 3 Dépenses de fonctionnement

11 633,4

11 819,8

11 836,3

1,7%

11 681,6

-1,2%

Titre 5 Dépenses d'investisement

10 548,0

8 705,5

14 667,7

39,1%

10 238,5

17,6%

Titre 6 Dépenses d'intervention

263,6

286,1

294,9

11,9%

305,7

6,8%

Titre 7 Dépenses d'opérations financières

37,8

18,4

13,9

-63,4%

38,7

110,7%

Total pour la mission

42 244,2

40 591,0

47 182,0

11,7%

42 633,8

5,0%

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire établi en application de l'article 49 de la LOLF

Il s'agit de plus de 80 % des crédits d'investissement inscrits au budget général de l'État pour l'année prochaine (82 % des 17,9 milliards d'euros prévus en AE et 81,5 % des 12,57 milliards d'euros prévus en CP). À eux seuls, les CP de titre 5 du programme 146 « Équipement des forces » (8,02 milliards d'euros) constituent près des deux tiers (64 %) des CP d'investissement de l'État inscrits dans le PLF (cf. infra , II e partie). Le reste de cette enveloppe bénéficiera aux infrastructures , suivant les actions programmées sur le programme 212 20 ( * ) .


* 5 Mme Florence Parly, ministre des armées, auditionnée au Sénat, le 31 octobre 2017, par la commission des finances. Au titre de l'examen du PLF 2018, elle a été auditionnée le 7 novembre dernier par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

* 6 Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

* 7 Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

* 8 Cf . le rapport d'information n° 562 (2016-2017) de nos anciens collègues Jean-Pierre Raffarin et Daniel Reiner, « 2 % du PIB : les moyens de la défense nationale », mai 2017.

* 9 En prenant en compte les exécutions passées et les prévisions pour 2017 et 2018, le budget consacré aux études amont s'avère de 726,8 millions d'euros par an, en moyenne, depuis 2014. Cf . le rapport pour avis de nos collègues Pascal Allizard et Michel Boutant sur les crédits du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense ».

* 10 Cf . le rapport pour avis de nos collègues Jean-Marie Bockel et Christine Prunaud sur les crédits du programme 178 « Préparation et emploi des forces » et celui de nos collègues Joël Guerriau et Gilbert Roger sur les crédits du programme 212 « Soutien de la politique de la défense ».

* 11 Décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 12 Hors précision d'ordre chronologique, le présent rapport conserve l'intitulé « ministère de la défense » pour désigner le ministère chargé de la défense, indépendamment de son actuelle appellation de « ministère des armées ».

* 13 Conseil de défense du 6 avril 2016. Ce coût, chiffré par le Gouvernement lui-même en octobre 2016, a été confirmé dans les réponses au questionnaire sur le PLF 2018 établi en application de l'article 49 de la LOLF.

* 14 Cf . notamment le rapport d'information susmentionné, « 2 % du PIB : les moyens de la défense nationale ».

* 15 Projet de loi n° 384 (AN, XV e législature) déposé à l'Assemblée nationale le 15 novembre 2017.

* 16 Cf . le débat tenu par le Sénat sur ce sujet, en séance publique, le 24 octobre 2017, précédé par l'audition de M. Arnaud Danjean, président du comité de rédaction de la revue stratégique de défense et de sécurité nationale, le 17 octobre dernier, par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

* 17 Texte n° 17 (2017-2018) adopté le 9 novembre 2017.

* 18 Cf . le rapport d'information déjà cité de nos anciens collègues Jean-Pierre Raffarin et Daniel Reiner, « 2 % du PIB : les moyens de la défense nationale », mai 2017.

* 19 Cf . le détail donné infra , II e partie.

* 20 Cf . le rapport pour avis de nos collègues Joël Guerriau et Gilbert Roger.

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