B. UN NOUVEAU CAP ?

Le dossier de presse du ministère de la culture indique clairement que le programme 131 a vocation à s'inscrire dans le cadre plus large des priorités fixées par le Président de la République pour la culture, ce qui justifie que « au-delà du soutien à diversité de la création et à la pérennisation du maillage territorial de l'offre culturelle [...] , priorité sera donnée aux actions favorisant la vie culturelle des régions et la diffusion des oeuvres auprès d'un public plus large ».

C'est sans doute ce qui explique le soutien renforcé aux structures labellisées, compte tenu de la place qu'elles occupent dans la politique culturelle d'aménagement du territoire . Les conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens peuvent comporter des dispositions servant les priorités de la politique culturelle définies par le Gouvernement. C'est également ce qui motive les efforts financiers particuliers déployés en 2018 en direction de la promotion de la diffusion.

Les labels reconnus dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques

Les douze labels définis par l''article 1 er du décret n° 2017-432 du 28 mars 2017 sont les suivants :

1° Dans le domaine des arts plastiques :

- Centre d'art contemporain d'intérêt national (CAC), au titre d'une activité d'exposition et production d'oeuvres et de diffusion des arts visuels contemporains ;

- Fonds régional d'art contemporain (FRAC), au titre de l'activité mentionnée à l'article L. 116-1 du code du patrimoine ;

2° dans le domaine de la danse :

- Centre chorégraphique national (CCN), au titre d'une activité de création, production et diffusion de spectacles de danse ;

- Centre de développement chorégraphique national (CDC), au titre d'une activité de diffusion et de mise en valeur de la diversité de la création chorégraphique ;

3° dans le domaine de la musique :

- Opéra national en région , au titre d'une activité de création, production et diffusion de spectacles lyriques, musicaux et chorégraphiques ;

- Orchestre national en région , au titre d'une activité de valorisation des répertoires de musique symphonique et de leur renouvellement par la création contemporaine ;

- Centre national de création musicale (CNCM), au titre d'une activité de création, production et diffusion de musique contemporaine ;

- Scène de musiques actuelles (SMAC), au titre d'une activité de création, diffusion et accompagnement des pratiques dans le domaine des musiques actuelles ;

4° dans le domaine du théâtre :

- Centre dramatique national `CDN), au titre d'une activité de création, production et diffusion de spectacles de théâtre ;

- Centre national des arts de la rue et de l'espace public (CNAREP), au titre d'une activité de création, production et diffusion de spectacles et oeuvres conçus pour l'espace public ;

- Pôle national du cirque (PNAC), au titre d'une activité de création, production et diffusion de spectacles des arts du cirque ;

5° en matière pluridisciplinaire :

- Scène nationale , au titre d'une activité pluridisciplinaire de diffusion et de soutien à la création.

Source: Commission de la culture, de l'éducation et la communication

1. Un soutien renforcé aux labels

L' article 5 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine a fixé le cadre à la politique de la labellisation des structures dans le domaine du spectacle vivant et des arts plastiques , lui donnant pour la première fois une base législative. Elle a mis en place une procédure permettant à l'État de labelliser les institutions qui présentent un intérêt général pour la création artistique.

Pris pour son application, le décret du 28 mars 2017 relatif aux labels et au conventionnement dans le domaine du spectacle vivant et des arts plastiques a dressé la liste des douze labels reconnus et défini les principes communs à l'ensemble des labels, en particulier les conditions requises en termes d' exigence artistique et de développement culturel pour leur obtention. Il impose ainsi des engagements en matière de développement et de renouvellement de la qualité et de la diversité artistiques, de démocratisation culturelle, d'actions en direction des jeunes et des publics spécifiques et d'inscription dans les territoires. Il fixe également la procédure d'attribution, de suspension et de retrait du label, la procédure de sélection des dirigeants et de l'agrément du ministre, ainsi que le travail d'accompagnement partenarial de l'État et des collectivités partenaires, qui s'appliquent uniformément à tous les labels.

L'ensemble des douze arrêtés fixant le cahier des missions et des charges applicable à chacun des labels, datant du 5 mai, est paru le 11 mai dernier. En apportant des clarifications sur les modalités de l'organisation, du fonctionnement et de l'évaluation de chacun des labels, ils ont ouvert la voie à l' entrée en vigueur du nouveau dispositif le 1 er juillet dernier .

Les structures disposent désormais de deux ans pour se mettre en conformité avec les textes . Cette période devrait notamment être marquée, dans un premier temps, par la signature des nouvelles conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens avec chacune des structures, en association avec les collectivités territoriales partenaires, à moins qu'elles ne le souhaitent pas. L'élaboration de ces instruments sera l'occasion d'y intégrer systématiquement des dispositions en matière d'éducation artistique et culturelle, de représentations hors les murs ou d'accueil d'artistes en résidence pour accroître la contribution des labels à la priorité ministérielle de l'accès de tous à la culture.

Fort de ces clarifications, le soutien de l'État en direction des structures labellisées sera accru en 2018 .

D'une part, une enveloppe de 2,6 millions d'euros est prévue pour consolider les marges artistiques des structures labellisées existantes et financer les nouvelles labellisations.

Répartition des crédits déconcentrés en fonctionnement pour le spectacle vivant

Source : Ministère de la culture

D'autre part, à l'exception des crédits des opéras nationaux en région, qui reculent de plus de 4 %, les crédits des autres labels progressent , sans que le nombre de bénéficiaires, dans la majorité des cas, augmente. L'objectif de ces crédits supplémentaires est de les accompagner dans la mise en oeuvre des nouveaux cahiers des charges.

À l'inverse, le soutien de l'État hors structures labellisées et réseaux devrait décroître en 2018 . Ainsi, les aides aux lieux non labellisés reculent de 11 %, les aides aux équipes conventionnées de près de 9 % et les aides aux équipes non conventionnées de près de 6 %. Ces reculs devraient se traduire par une baisse à la fois du nombre de bénéficiaires et du montant des aides octroyés, même si les planchers n'ont pas été abaissés. Des difficultés en matière d'aménagement culturel équilibré du territoire pourraient en découler, compte tenu de l'importance de ces lieux et ces équipes pour la structuration des zones rurales en particulier.

2. Une attention particulière portée à la diffusion des oeuvres

L'un des objectifs assignés au programme 131 pour 2018 est d'améliorer la diffusion des oeuvres. L'enjeu est en effet important au regard des deux premières priorités désormais poursuivies par la politique culturelle : offrir à tous un accès à la culture et favoriser par la vie culturelle la cohésion sociale et le dynamisme économique des territoires.

Le partenariat avec les collectivités territoriales est indispensable dans ce domaine . L'élaboration des schémas d'orientation, qu'il s'agisse des schémas d'orientation et de développement des lieux de musiques actuelles (SOLIMA) dans le domaine du spectacle vivant ou des SODAVI en ce qui concerne les arts plastiques, fait figure de priorité. Un accent devrait également être mis sur la signature de contrats de filière dans le domaine des musiques actuelles et des variétés, conclus entre l'État, les régions et le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV). Un premier contrat de ce type a été signé avec la région Nouvelle-Aquitaine en septembre dernier. L'objectif est d'instituer, à l'échelle d'un territoire, un dialogue pérenne entre la filière musicale et ses différents partenaires, publics et privés pour mieux répondre aux enjeux en termes de création et de diffusion.

L'enjeu d'animer la vie culturelle des régions devrait conduire à privilégier les projets les plus structurants pour les territoires . C'est ce qui motive la forte progression (+ 13,7 %) des crédits destinés aux résidences d'artistes, qui devrait permettre de porter le nombre prévisionnel de bénéficiaires de 160 à 210. C'est aussi ce qui explique que les crédits destinés aux festivals soient à peu près préservés (- 2 %), dans un contexte où l'État a considérablement revu sa politique de soutien à ces manifestations.

C'est enfin ce qui devrait conduire l'État à orienter son soutien aux équipes artistiques en premier lieu vers les projets qui se déploient largement dans les territoires et favorisent l'itinérance.

Les crédits de l'Office national de diffusion artistique (ONDA), qui est chargé de diffuser les oeuvres théâtrales, musicales et chorégraphiques sur le territoire national et de jouer le rôle de médiateur entre professionnels français étrangers dans le cadre européen, devraient être très légèrement revalorisés (+ 50 000 euros). Cet établissement attribue des aides financières pour permettre d'augmenter la durée globale du temps d'exploitation de spectacles dont l'exigence artistique est reconnue dans l'objectif de toucher un plus large public.

Le renforcement du soutien aux structures labellisées doit aussi être appréhendé comme un moyen de faciliter l'accès géographique aux oeuvres, compte tenu de la contribution de ces établissements au maillage territorial. Se pose alors la question de leur juste répartition sur le territoire . L'objectif du ministère de parvenir, d'ici deux ans, à l'ouverture d'une SMAC par département constitue une première étape. Votre rapporteure pour avis sera vigilante à ce que le maillage territorial progresse.

Pourtant, cette attention particulière portée par le programme sur les questions de diffusion fait naître des interrogations chez un certain nombre d'artistes et professionnels du spectacle qui y voient le signe d'une inflexion des crédits, d'une part, en direction des plus grandes structures culturelles et, d'autre part, au détriment de la création et des créateurs .

Mais la diffusion n'est-elle pas le nécessaire prolongement de la création ? Elle constitue un outil de soutien aux artistes , à leur circulation et à celle de leurs oeuvres. Les difficultés croissantes rencontrées en matière de production de créations d'ampleur montrent les besoins qui existent à développer les coproductions et à rechercher une meilleure diffusion pour les oeuvres. Alors qu'il y a dix ans, deux structures suffisaient pour produire un spectacle, cinq coproducteurs sont aujourd'hui souvent nécessaires, voire dix pour les spectacles les plus importants. Cet axe a d'ailleurs été intégré aux nouveaux cahiers des missions et des charges des labels. Ils fixent des exigences en matière d'inscription dans les réseaux de diffusion et de production nationaux : c'est ainsi que les CDN ont l'obligation d'accueillir un nombre minimal d'autres scènes ou d'autres compagnies chaque année et de leur garantir une durée d'exploitation raisonnable. Ils encouragent également la diffusion à l'international, en particulier chez nos voisins européens.

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