C. UNE CONCURRENCE QUI INTERROGE SUR LA DÉFINITION DE LA PRESSE

1. Journalisme et Internet : atout ou danger des nouveaux canaux d'information ?
a) Les dérives de l'information à l'ère d'Internet

L'essor des usages digitaux, qui s'est considérablement accéléré avec la généralisation des smartphones , concerne l'ensemble des industries de contenus : la musique, qui fut le premier secteur touché par la mutation numérique, le visionnage de vidéos et, dans une moindre mesure, le livre. Parallèlement aux industries culturelles, la presse n'a pas échappé à ce bouleversement. En mettant en oeuvre une politique dynamique de mise à disposition de ses contenus en ligne, gratuitement, en paiement à l'acte ou sur abonnement, elle l'a même accompagné.

Avec l'apparition puis le succès phénoménal, notamment auprès des jeunes, des réseaux sociaux, l'enjeu a évolué pour les éditeurs de presse : il ne s'agit plus seulement d'être présents sur Internet et de développer une offre digitale économiquement efficiente, mais également désormais de lutter contre la concurrence de sites diffusant, sur les réseaux sociaux, des informations pour le moins sujettes à caution , les fake news .

Relayée par les internautes par le biais des partages et des like , ces informations, dont la véracité ne fait l'objet d'aucun contrôle et ses diffuseurs d'aucune responsabilité, peuvent rapidement devenir virales et aisément tromper les lecteurs.

Longtemps, les hébergeurs de ces sites et les réseaux sociaux qui laissent apparaître leurs contenus sur leur fil n'ont pas jugé leur responsabilité mise en cause, limitant leur contrôle aux post faisant l'apologie du terrorisme, du racisme ou à caractère pornographique. La prolifération des fake news a conduit plusieurs acteurs à s'emparer du phénomène, notamment en cherchant à promouvoir les contenus diffusés par de véritables titres de presse et, parfois, à les accompagner dans le développement de leurs activités numériques .

En août dernier, Facebook a annoncé le lancement, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et aux États-Unis, d' articles vérifiés par des partenaires tiers, liés à des publications largement partagées ou suspectées d'être fausses ou trompeuses. Ils apparaitront sous la publication incriminée pour proposer d'autres points de vue et analyses à l'internaute.

b) Le rôle ambigu des diffuseurs de contenus
(1) Du paternalisme

Pionnier en la matière, non pas tant en raison, à l'époque, de sa volonté de promouvoir une information fiable et de qualité, mais pour répondre aux critiques relatives à la captation, par le moteur de recherche, d'une grande partie des revenus publicitaires tirés des contenus de presse qu'il met à disposition.

Afin de se soustraire à la menace d'une législation défavorable à son activité de moteur de recherche, Google a négocié, avec l'Association de la presse d'information politique et générale (AIGP), un accord conclu le 13 juin 2013, prévoyant la mise en place d' un fonds pour l'innovation numérique de la presse (FINP) abondé par Google à hauteur de 60 millions d'euros pour trois années de fonctionnement et d'une coopération en matière de régie publicitaire en ligne .

Le fonds a été effectivement créé au deuxième semestre 2013 au bénéfice des seuls services de presse en ligne d'information politique et générale, bimédias ou pure players . Les projets retenus, qui ne peuvent parallèlement bénéficier des crédits du fonds stratégique, doivent avoir pour objectif direct de créer de nouvelles sources de revenus pour les éditeurs de presse en ligne ou de promouvoir de nouveaux modèles économiques , notamment par la production de contenus éditoriaux innovants. Sont éligibles à ce titre l'ensemble des dépenses : investissement, prestations extérieures et exploitation, y compris les salaires de journalistes et techniciens. Un plafond de 2 millions d'euros et 60 % des dépenses engagées est applicable. Une première avance de 30 % du montant de l'aide est consentie ab initio, sans devis ni facture.

En 2016, pour sa dernière année d'existence - le fonds aurait dû clore son activité en 2015 mais la signature n'étant intervenue qu'au milieu de l'année 2013, le dispositif a été prolongé -, sur 54 projets présentés, 33 ont été retenus par les administrateurs.

Le 28 avril 2015, dans le contexte de l'enquête pour abus de position dominante engagée par la Commission européenne, Google a annoncé la création du Digital News Initiative . Inspiré de l'expérience française, le projet est conçu comme un partenariat entre Google et des éditeurs de presse européens , notamment les grands noms que représentent Les Échos en France, le Frankfurter Allgemeine Zeitung et Die Zeit en Allemagne, The Financial Times et The Guardian au Royaume-Uni, NRC Media aux Pays-Bas (éditeur du Handelsblatt ), El Pais en Espagne et La Stampa en Italie. À cet effet, un fonds doté de 150 millions d'euros pour trois ans est destiné à soutenir l'innovation, notamment en vue d'aider les titres de presse à faire face à trois défis majeurs : l'enrichissement en vidéo des sites de presse en ligne, une meilleure monétisation des contenus et un partage de la valeur plus juste entre les éditeurs de presse et Google sur les revenus publicitaires.

En février 2016, Google a publié un rapport d'étape présentant les principaux critères de sélection : le fonds est ouvert aux éditeurs de toutes tailles, aux pure-players et aux start-up ayant leur siège dans un pays de l'Union européenne ou de l'Association européenne de libre-échange. Si l'enveloppe qui reviendra aux projets français sera moindre , compte tenu de la dimension européenne du nouveau fonds, la France a d'ores et déjà bénéficié de 15,3 millions d'euros d'aides en 2016 pour 37 projets, notamment au profit de l'Agence France-Presse, d'Euronews, de la Société éditrice du Monde et de La Nouvelle République du Centre Ouest, sur un total de 51 millions d'euros distribués.

Si l'initiative de Google peut être saluée, quand bien même elle apparaîtrait utilitariste, votre rapporteur pour avis s'interroge sur la pérennité des financements du fonds européen qui, depuis 2016, n'a pas été doté d'une nouvelle enveloppe , qui aurait dû avoisiner les 50 millions d'euros pour l'année 2017.

Parallèlement, la société a annoncé la mise en place de nouveaux outils pour aider les éditeurs de presse à recruter de nouveaux abonnés. Est notamment mis fin, depuis le mois d'octobre 2017, après une série de tests effectués auprès du New York Times et du Financial Times , au système du « premier clic gratuit » au profil d' un modèle au choix de l'éditeur en fonction de sa stratégie commerciale . L'entreprise prévoit également de faciliter l'abonnement par un simple clic en lieu et place du fastidieux processus d'inscription sur un site.

En janvier 2017, Facebook a, pour sa part, lancé le Facebook Journalism project destiné à mettre en valeur sur son fil d'actualité les contenus des éditeurs de presse, via en particulier l'outil Instant articles , sorte de flux d'informations correspondant aux thématiques qui intéressent l'internaute utilisé à ce jour par plus de 10 000 éditeurs à l'échelle mondiale. Depuis le mois d'octobre et pour un nombre limité d'éditeurs seulement, Instant articles permet également de monétiser les contenus après un certain nombre de visionnages et de mettre leurs articles à disposition de leurs abonnés via Facebook. L'entreprise a annoncé cet été, avant même la mise en place de ce service, reverser au niveau mondial un million de dollars par jour aux éditeurs par le biais de Facebook audience network , qui calcule l'audience réalisée par les contenus postés.

(2) À l'abus de position dominante

À rebours de ses tentatives de monétisation des contenus des éditeurs de presse sur son réseau social, Facebook a lancé, depuis quelques semaines, au Sri Lanka, en Bolivie, au Guatemala, au Cambodge, en Serbie et en Slovaquie, une expérimentation visant à exclure les pages d'éditeurs ou de marques tierces du fil principal des utilisateurs pour les cantonner à un onglet dédié intitulé « Explore ». L'objectif annoncé est d'analyser si les internautes préfèrent utiliser des espaces séparés pour leurs informations personnelles et leurs contenus publics.

En réalité, l'onglet Explore, symbolisé par une fusée, n'est pas encore entré dans les moeurs des utilisateurs du réseau social. Le déplacement des pages d'éditeurs et de marques tierces sur ce second fil pourrait donc fortement nuire à leur visibilité et à leur diffusion , obligeant les entreprises concernées à acheter des espaces publicitaires sur le fil principal d'actualité pour y conserver une place, même minime et dégradée.

De fait, les premiers retours des pays concernés par l'expérimentation sont inquiétants : en Slovaquie, le nombre de moyen d'interactions ( likes , commentaires, partages) sur les soixante pages Facebook de médias les plus importantes a chuté de moitié, tandis qu'au Guatemala, la fréquentation des sites de presse via Facebook a diminué de 66 %, alors même que dans cette démocratie fragile, le réseau social représente une source d'information essentielle.

En outre, malgré les bons offices du fonds Google à l'échelle française et désormais européenne et les efforts de monétisation de la presse par Facebook, les revenus publicitaires en ligne continuent à être largement captés par les deux sociétés au détriment des éditeurs de presse . Au premier semestre 2017, le marché de la publicité en ligne a progressé de 9,8 % par rapport aux six premiers mois de l'année 2016 pour atteindre 1,8 milliard d'euros , porté à la fois par le display (644 millions d'euros, soit 34 % du marché, en croissance de 17,7 %), notamment les réseaux sociaux (45 % du display , en augmentation de 45 %) et la vidéo (36 % du display en hausse de 26 %), et par le mobile (690 millions d'euros, en croissance de 63 %). Sur ce total, Google et Facebook s'arrogent, en France, 71 % des recettes, contre 65 % au Royaume-Uni.

Ce déséquilibre contribue à la très faible rentabilité de l'activité digitale des éditeurs de presse. Votre rapporteur pour avis est, à cet égard, impatient de connaître les résultats à venir de l'étude de l'Autorité de la concurrence sur la publicité en ligne, qui pourrait, le cas échéant, conduire à une adaptation de la législation voire à des enquêtes antitrust. Il salue également les initiatives de rapprochement des éditeurs français pour lutter contre l'hégémonie des géants de l'Internet , et notamment l'alliance Skyline nouée cet été entre Le Monde et Le Figaro pour commercialiser ensemble leurs espaces de publicité numérique. Les régies publicitaires des deux groupes, qui rassemblent une vingtaine de médias, proposent désormais des offres conjointes et sans intermédiaire. Cette initiative place, en termes d'audience nationale, les deux groupes français au niveau de Microsoft (36 millions de visiteurs uniques mensuels) et non loin de Google (44 millions) et de Facebook (40 millions).

Les éditeurs de presse sont également à la manoeuvre de l'autre côté de l'Atlantique : en juillet dernier, 2 000 titres de presse ont demandé au Congrès américain de légiférer pour leur permettre de négocier collectivement avec Google et Facebook , démarche actuellement prohibée par la loi antitrust, en particulier s'agissant de la monétisation de leurs contenus.

Autre acteur à la fois partenaire et concurrent pour les éditeurs de presse, les kiosques numériques des opérateurs télécom (SFR Presse de SFP ou LeKiosk et son partenariat avec Bouygues Télécom et Canal +) interrogent également s'agissant de leur stratégie en matière de presse. Les opérateurs, en proposant gratuitement des contenus de presse dans leurs offres commerciales, élargissent le lectorat des titres de presse mais n'améliorent guère leur situation en termes de rentabilité ni de valorisation des contenus auprès du public, alors que la presse cherche à imposer sur Internet le modèle des abonnements payants.

Les offres de presse couplées posent également question en matière fiscale en raison d' un risque d'instrumentalisation du taux de TVA super réduit pour la presse en ligne au service d'acteurs économiques dont la presse ne constitue pas le principal métier.

L'activation automatique de ces offres, sans rapport avec les demandes ni les besoins des abonnés, à la résiliation complexe (uniquement sur appel au service client), laisse craindre que leur fonction essentielle soit, pour les opérateurs, de réduire l'impôt. À titre d'illustration, ce sont plusieurs dizaines de millions de clients SFR qui se voient appliquer la TVA à 2,1 % sur une partie de leur facture, alors que le service ne revendique que 100 000 téléchargements quotidiens.

Cette optimisation fiscale pourrait conduire, selon les calculs du SPIIL, à une multiplication par six du coût budgétaire de la TVA à taux super réduit sur la presse . Ainsi, si l'on estime à environ 1,36 euro par abonné le gain net pour SFR de l'inclusion des offres de presse aux factures, cela correspond à près de 300 millions d'euros par an de perte de recettes fiscales pour l'État. Si les quatre opérateurs proposaient un kiosque, le coût annuel dépasserait donc le milliard d'euros, ce qui nuirait indéniablement à la légitimité du dispositif. En comparaison, le coût global du taux de TVA réduit sur l'ensemble de la presse était de 160 millions d'euros en 2017.

L'évolution du coût du taux super réduit de TVA
en cas d'application à tous les opérateurs télécom

Source : Spiil

Par ailleurs, les offres presse des opérateurs télécom se caractérisent par l'opacité des conditions d'accès et de rémunérations proposées aux médias participants . Il est, par exemple, impossible de savoir si le groupe Altice (SFR) favorise certains médias, soit qui lui appartiennent, soit qu'il juge leur participation indispensable au succès de l'offre.

Enfin, votre rapporteur pour avis estime que cette situation fiscale pourrait attirer l'attention de la Commission européenne et être considérée à terme comme une aide d'État indirecte aux opérateurs télécom . Il se réjouit à cet égard que l'article 4 du présent projet de loi de finances, adopté sans modification par l'Assemblée nationale, prévoie des règles spécifiques de ventilation d'assiette , à l'instar de celle prévues pour les offres couplées de services de télévision ( triple play ), en fixant l'assiette du taux super réduit de TVA à raison du coût d'acquisition des services de presse en ligne proposés. Dès lors, il ne reviendra plus, à compter du 1 er janvier 2018, à chaque opérateur, de ventiler lui-même les recettes correspondant à chaque taux comme le droit commun le permet, au risque d'une erreur d'interprétation ou d'un effet d'aubaine.

2. La vigilance légitime des pouvoirs publics

Parce qu' une presse indépendante, qualitative et pluraliste est indispensable , en ce qu'elle permet la bonne information du citoyen, et un bon fonctionnement de la démocratie, l'État soutient, au travers d'aides directes et de dispositifs fiscaux dédiés, la presse d'information politique et générale. Il veille particulièrement, dans ce cadre, au maintien d'un pluralisme vivant.

a) Les privilèges de la presse d'information politique et générale
(1) Des investissements encouragés

Aux termes de l'article 39 bis A du code général des impôts, les entreprises exploitant soit un journal quotidien, soit une publication de périodicité au maximum mensuelle consacrée pour une large part à l'information politique et générale, soit un service de presse en ligne, reconnu par la CPPAP et consacré pour une large part à l'information politique et générale, sont autorisées à constituer une provision déductible du résultat imposable, en vue de faire face à différentes dépenses d'investissement. Ces dépenses doivent être réalisées avant la fin de la cinquième année suivant celle de la constitution de la provision et ne sont prises en compte que pour la partie des journaux ou des publications que les entreprises impriment dans un État membre de l'Union européenne.

Les sommes déduites sont limitées à 30 % du bénéfice de l'exercice concerné pour la généralité des publications et pour les services de presse en ligne reconnus et à 60 % pour les quotidiens et publications assimilées (titres de presse hebdomadaire régionale), dans la limite du financement d'une fraction du prix de revient des immobilisations qui y sont définies (40 % pour la généralité des publications et pour les services de presse en ligne reconnus et à 90 % pour les quotidiens et les publications assimilées).

Depuis la loi de finances pour 2011, ce dispositif a été reconduit chaque année pour un an, jusqu'à ce que la loi de finances rectificative pour 2014 n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 le proroge jusqu'en 2017. Une prolongation pour trois années supplémentaires, soit jusqu'en 2020 , est prévue par l'article 44 bis du présent projet de loi de finances, afin de s'aligner sur le dispositif prévu pour les SPEL à l'article 39 bis B du code général des impôts, institué par la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

Le montant de la dépense fiscale est évalué, pour 2018, à un million d'euros au bénéfice de 78 entreprises de presse .

(2) Des particuliers mobilisés

La loi n° 2015-433 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse a introduit, dans le code général des impôts, le nouvel article 199 terdecies -0 C, qui, à l'initiative de notre collègue David Assouline, institue une réduction d'impôt sur le revenu en faveur des particuliers qui souscrivent au capital d'entreprises de presse au sens de l'article 39 bis A du même code.

Il s'agissait, au lendemain des attentats du 7 janvier 2015 contre la rédaction de Charlie Hebdo , de rendre plus attractive la prise de participation des lecteurs dans des projets innovants de la presse d'information politique et générale imprimée ou numérique ou la reprise d'entreprises en difficulté, sous la forme de financement participatif . Le taux de la réduction d'impôt est fixé à 30 % dans la limite d'un plafond de versement de 1 000 euros par an pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et 2 000 euros pour les contribuables soumis à imposition commune.

Il est porté à 50 %, lorsque les souscriptions sont effectuées au capital d'entreprises solidaires de presse d'information (ESPI) créé par la loi n° 2015-433 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse. L'avantage fiscal renforcé à leur profit a pour objectif de développer ce type d'entreprises de presse, dans lesquelles les actionnaires s'engagent à réinvestir une part significative des bénéfices de l'activité. À titre d'illustration, L'Humanité , Charlie Hebdo et Les Jours ont opté pour ce statut.

Le dispositif a été doté par le législateur d'un caractère temporaire : seuls les versements effectués jusqu'au 31 décembre 2018 y sont éligibles. Son coût estimé pour l'année 2018 est inférieur à 500 000 euros. La mesure a bénéficié, en 2016, à 158 ménages.

Afin de renforcer l'attractivité du dispositif , la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias y a apporté plusieurs adaptations :

- le relèvement du plafond de versement ouvrant droit à une réduction d'impôt à 5 000 euros pour les célibataires et à 10 000 euros pour les contribuables soumis à imposition commune ;

- l'élargissement du périmètre des entreprises éligibles aux titres d'information politique et générale de longue périodicité ;

- l' extension du bénéfice de la réduction d'impôt aux versements effectués en faveur d'une société dont l'objet statutaire exclusif est de prendre une participation au capital d'une entreprise de presse et regroupant exclusivement des actionnaires individuels, notamment les « sociétés des amis » ou « sociétés de lecteurs ». Le quotidien Le Monde dispose, par exemple, d'une société des lecteurs actionnaire de la société éditrice. C réée en 1985, elle réunit 12 000 lecteurs-actionnaires, qui se sont mobilisés à trois reprises (1985, 1987 et 2002) pour lever 6 millions d'euros intégralement investis dans le quotidien. Il existe également depuis vingt ans une association des amis du Monde Diplomatique et une association des amis de La Vie. Libération dispose d'une société des lecteurs depuis 2006 ; L'Humanité a une société des amis depuis 1996 et une société des lecteurs depuis 2002 qui compte 11 200 adhérents. En presse magazine, Alternatives économiques a une société civile des lecteurs. C'est également le cas de Médiapart en presse digitale.

Par ailleurs, la loi susmentionnée du 17 avril 2015, grâce à l'adoption de « l'amendement Charb » à l'initiative de nos collègues Pierre Laurent et David Assouline, a donné un ancrage légal au rescrit fiscal précédemment applicable en matière de mécénat au bénéfice de presse. L'article 200 du code général des impôts a ainsi été complété pour ouvrir le bénéfice du régime fiscal du mécénat , institué par la loi n° 2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, aux associations oeuvrant pour le pluralisme de la presse . Par ailleurs, est ouverte, pour des fonds de dotation, la possibilité de soutenir des associations ou fondations agissant dans le soutien du pluralisme de la presse .

Dans ce cadre, les dons et versements aux associations d'intérêt général exerçant des actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse, par la prise de participations minoritaires, l'octroi de subventions ou encore de prêts bonifiés à des entreprises de presse d'information politique et générale au sens de l'article 39 bis A du code général des impôts, ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % du montant du don dans la limite de 20 % du revenu imposable .

La même réduction s'applique aux fonds de dotation conduisant des actions identiques. Les dons peuvent être nominatifs ou généraux (le montant des dons est alors affecté par un comité d'orientation) ; ils sont gérés par deux associations : Presse et Pluralisme et J'aime l'info .

L'association Presse et Pluralisme a été créée en 2007 à l'initiative des principaux syndicats de la presse imprimée. Elle a pour vocation d' « oeuvrer en faveur du pluralisme de la presse payante en France » par des actions financées par appel au don. En 2015, les dons collectés ont atteint à 7,4 millions d'euros, dont 2,9 millions d'euros issus de dons en ligne , cette proportion croissant chaque année. La quasi-totalité des dons sont nominatifs au bénéfice d'une ou plusieurs publications (46 en 2015). L'année fut particulièrement exceptionnelle puisque c'est à l'initiative de Presse et Pluralisme qu' une collecte d'envergure s'est organisée au profit de Charlie Hebdo . L'association a apporté un concours immédiat de 200 000 euros à Charlie Hebdo pour que puisse être publié son numéro « historique » du 14 janvier. Surtout, elle a mis en place, en moins de 48 heures, le site www.jaidecharlie.fr , sur lequel plus d'un million d'euros de dons en ligne ont été collectés dans les cinq jours qui ont suivi l'attentat, en provenance de plus de 80 pays. 2,7 millions d'euros, issus de près de 45 000 dons, ont pu être reversés au titre.

L'effet « Charlie hebdo » quelque peu émoussé, l'année 2016 a enregistré une diminution sensible du montant total des dons à 5,6 millions d'euros, mais au bénéfice d'un nombre plus élevé de publications (49). En réalité, faisant abstraction des événements tragiques de 2015, le dispositif poursuit sa montée en charge . Pour mémoire, Presse et Pluralisme n'avait engrangé que 900 000 euros de dons en 2010, 1,7 million d'euros en 2012 et 3,3 millions d'euros en 2014.

Pour sa part, l'association J'aime l'info a été créée en 2011, à l'initiative de la presse en ligne et notamment du SPIIL et du site Rue89 . En 2016, 42 sites ont bénéficié de dons avec 308 593 euros récoltés , contre 757 340 euros en 2015, année record en raison des collectes réalisées au bénéfice d' Arrêt sur images et de Médiapart , mais seulement 147 402 euros en 2014 .

b) Un soutien réitéré au pluralisme

Au total, les aides au pluralisme, sans lesquelles ne pourrait survivre une presse d'opinion diversifiée, atteindront 16,03 millions d'euros en 2018, stables par rapport à 2017 où l'enveloppe avait bénéficié d'une augmentation de 3,5 %. Comme l'a rappelé Françoise Nyssen, ministre de la culture lors de son audition devant notre commission de culture, de l'éducation et de la communication, la défense du pluralisme constitue une priorité du Gouvernement en matière d'aides à la presse.

(1) Un élément de survie pour la presse à faible ressources publicitaires

Dans le double contexte de l'attentat contre l'hebdomadaire Charlie Hebdo et du risque d'érosion de la diversité de l'offre de presse d'information politique et générale, il est apparu évident de renforcer les aides au pluralisme de la presse.

À ce titre, l'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires, régie par le décret n° 86-616 du 12 mars 1986, a été étendue à l'ensemble des publications nationales d'information politique et générale, sans distinction de périodicité , par le décret n° 2015-1440 du 6 novembre 2015 relatif au soutien de l'État au pluralisme de la presse, élargissement applaudi à l'époque par votre rapporteur pour avis .

À cette occasion, l'aide existante pour les quotidiens n'a pas été modifiée, compte tenu de sa sensibilité pour les titres concernés, mais deux conditions supplémentaires ont été ajoutées pour les titres de périodicités longues : ne pas avoir touché l'aide aux revues du Centre national du livre (CNL) et ne pas se limiter à la republication d'articles déjà parus dans des publications à périodicité plus courte.

En outre, une nouvelle condition d'éligibilité s'applique à l'ensemble des titres : le contenu d'une publication ne doit pas avoir donné lieu à une condamnation du directeur de la publication devenue définitive au cours des cinq années précédant la demande d'aide, en application des articles 24 ou 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

Cette aide, rebaptisée en 2015 « aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires » et à laquelle deux nouvelles sections ont été ajoutées aux trois existantes, vise à soutenir les titres qui bénéficient structurellement de recettes publicitaires faibles compte tenu de leur positionnement éditorial, comme ceux qui traversent de façon conjoncturelle des difficultés financières. L'aide contribue ainsi au maintien de la diversité de l'offre de presse et au pluralisme du débat démocratique .

L'aide attribuée au titre de la première section du fonds bénéficie aux quotidiens répondant à certaines conditions relatives au prix de vente (dans une fourchette de 80 à 130 % du prix moyen pondéré pour les quotidiens nationaux), à la diffusion (moins de 150 000 exemplaires), au tirage (moins de 250 000 exemplaires) et au pourcentage de recettes publicitaires dans leurs recettes totales (moins de 25 %). L'aide accordée dans le cadre de cette section ne peut dépasser 25 % des recettes totales du titre, hors subventions publiques. En 2016, La Croix, L'Humanité et Libération en ont bénéficié.

L'aide attribuée au titre de la deuxième section bénéficie à des quotidiens qui répondent aux critères de la première section mais n'y sont pas éligibles car leur prix est inférieur à 80 % du prix moyen pondéré. Seul l'éditeur Play Bac Presse émarge à cette section, pour différents quotidiens à destination des enfants et adolescents, diffusés exclusivement par abonnement : Mon Quotidien, Le Petit Quotidien et L'Actu.

L'aide attribuée au titre de la troisième section est destinée à des quotidiens qui ont bénéficié de crédits de la première section pendant au moins trois ans et dont les recettes de publicité représentent moins de 35 % des recettes totales. Il s'agit de permettre une sortie progressive du dispositif d'aide. En 2016, seul Présent y a été éligible.

Sur le modèle de ce qui existait pour les quotidiens, la quatrième section est ouverte aux publications d'autres périodicités et répondant à plusieurs critères : relever de l'information politique et générale ; être vendues à un prix inférieur à 130 % du prix moyen pour les hebdomadaires, bimensuels et mensuels, et 160 % pour les bimestriels et trimestriels ; avoir eu une diffusion par numéro inférieure à 300 000 exemplaires ; enfin, tirer ses recettes pour moins de 25 % de la publicité. Un taux unitaire de subvention est fixé en divisant les crédits par la diffusion totale des publications éligibles. Un abattement de 50 % s'applique entre un et deux millions d'exemplaires diffusés annuellement ; il est intégral au-delà de ce seuil. En outre, comme pour les quotidiens, nul titre ne peut recevoir dans ce cadre une aide supérieure à 25 % de ses recettes annuelles.

En 2016, trente-six publications, dont Famille chrétienne , Courrier international , La Vie , Le Monde diplomatique, Marianne, Alternatives économiques et, - votre rapporteur pour avis s'en étonne, compte tenu du caractère plus indiscutable de sa qualité de publication d'information politique et générale -, VSD , pour les plus importants bénéficiaires, ont reçu une aide de cette section pour un montant maximum de 300 000 euros.

La cinquième section du fonds est destinée, sur le modèle des quotidiens, aux publications ayant été éligibles pendant trois ans à la quatrième section, mais dont la publicité représente désormais entre 25 % et 35 % des recettes. Pour éviter un effet de seuil brutal, la sortie du dispositif se fait ainsi en sifflet avec le versement d'une aide dégressive d'une année sur l'autre. Par définition, aucun titre n'a pu bénéficier de l'aide au titre de cette section en 2016.

La réforme opérée en 2015 avait porté, en loi de finances pour 2016, le montant de l'aide à 12,6 millions d'euros, contre 8,6 millions d'euros l'année précédente. En 2017, l'aide aux publications nationale d'information politique et générale à faibles ressources publicitaire s'est établie à 13,2 millions d'euros. Elle sera identique en 2018 .

(2) Un élargissement utile à la presse locale

L' aide aux quotidiens locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) a pour objet de concourir au maintien du pluralisme et à la préservation de l'indépendance des titres concernés. Les règles régissant le fonds, divisé en deux sections , sont fixées par le décret n° 89-528 du 28 juillet 1989 modifié par le décret n° 2010-1088 du 15 septembre 2010 relatif au développement et à la modernisation de la presse en Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, qui a admis à son bénéfice les journaux édités dans les collectivités d'outre-mer.

L'aide attribuée au titre de la première section bénéficie aux quotidiens locaux répondant à certaines conditions relatives au prix de vente (l'édition locale la plus diffusée doit être vendue à un prix inférieur à 130 % du prix de vente moyen des quotidiens régionaux), à la diffusion (un maximum de 60 000 exemplaires en moyenne), au tirage (un maximum de 70 000 exemplaires en moyenne) et au pourcentage de recettes de petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales (moins de 5 %).

L'aide attribuée au titre de la seconde section bénéficie à des quotidiens locaux qui ne sont pas éligibles à la première section, en raison notamment de la part des petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales, mais qui répondent néanmoins aux conditions relatives au prix de vente, à la diffusion, dont plus du quart doit être assurée par voie postale, et au tirage moyen, ainsi qu'au pourcentage de recettes de petites annonces dans leurs recettes publicitaires totales (moins de 15 %).

Pour la première section, le taux unitaire de subvention attribué à chaque titre est multiplié par le nombre d'exemplaires effectivement vendus au cours de l'année civile précédant l'année d'attribution de l'aide ; pour la deuxième section, il est multiplié par le nombre d'exemplaires acheminés par voie postale au cours de l'année civile précédente.

En 2018, comme en 2017, l'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces reste stable à 1,4 million d'euros . La dotation 2016 a été consommée en intégralité au bénéfice de titres comme L'Écho , La République des Pyrénées , Le Journal de la Haute-Marne , La Presse de la Manche et Presse Océan . Au titre de la seconde section, seul Centre Presse a reçu une subvention, qui s'est élevée à 84 000 euros.

Par ailleurs un fonds spécifique a été créé par le décret n° 96-1067 du 10 mai 1996, afin de favoriser la diffusion au numéro des titres de la presse hebdomadaire régionale d'information politique et générale . Son dispositif a été modifié à quatre reprises :

- par le décret n° 97-1067 du 20 novembre 1997, qui a scindé le fonds en deux sections, afin de tenir compte de la situation des hebdomadaires les plus touchés par l'augmentation des tarifs postaux résultant des accords dits « Galmot » conclus entre les éditeurs de presse, La Poste et l'État ;

- par le décret n° 2004-1312 du 26 novembre 2004, qui a ouvert le bénéfice du fonds aux titres de la presse locale rédigés en langue française ou dans une langue régionale en usage en France et a renforcé l'égalité de traitement entre les titres, en introduisant pour la seconde section un plafond de diffusion fixé à 10 000 exemplaires ;

- par le décret n° 2014-659 du 23 juin 2014 réformant les aides à la presse, qui a institué un plafonnement progressif du soutien pouvant être reçu par un même groupe de presse au titre de l'aide à la presse hebdomadaire régionale ;

- enfin, par le décret n° 2016-1161 du 26 août 2016 relatif au soutien, à l'émergence et à l'innovation dans la presse et réformant les aides à la presse, qui a étendu l'aide aux titres locaux d'information politique et générale de périodicité jusque trimestrielle et l'a rebaptisée « aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale » . À compter de cette date, le total des aides attribuées au cours d'une même année à des sociétés filiales ou sous contrôle d'une même société ne peut être supérieur à 25 % du montant de la dotation du fonds. Par ailleurs, aux termes du même décret, les titres concernés deviennent éligibles au fonds stratégique et au nouveau fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse.

Le fonds est désormais scindé en trois sections : la première, qui bénéficie d' a minima 85 % des crédits, concerne l'ensemble des hebdomadaires éligibles. Sa répartition est définie proportionnellement au nombre d'exemplaires vendus au numéro, dans la limite d'un plafond de 20 000 exemplaires et d'un plancher de 2 000 exemplaires.

La deuxième section est ouverte aux hebdomadaires qui, répondant aux conditions fixées pour bénéficier de la première section, peuvent en outre justifier d'une part, que 50 % au moins des exemplaires parus au cours de l'année civile précédant l'année d'attribution de l'aide pesaient moins de cent grammes, d'autre part, que leur diffusion effective par abonnement postal a représenté, en nombre d'exemplaires par parution, au moins 50 % de leur diffusion totale. L'aide attribuée à chaque titre, qui peut se cumuler avec celle reçue au titre de la première section, est définie proportionnellement au nombre d'exemplaires effectivement vendus par abonnement postal au cours de l'année précédente, dans la limite de 10 000 exemplaires par parution.

Enfin, la nouvelle troisième section est ouverte aux publications éligibles autres que les hebdomadaires. Sa répartition est réalisée proportionnellement au nombre d'exemplaires effectivement vendus, dans la limite d'un plafond de 200 000 exemplaires et d'un plancher de 20 000 exemplaires.

L'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale, avec 1,47 million d'euros en 2017 , soit 50 000 euros supplémentaires pour financer son extension à l'ensemble des titres locaux d'information autres que les quotidiens par le décret précité du 26 août 2016, a bénéficié à 93,7 % à la première section du fond, contre 97,8 % en 2016 avant la réforme de l'aide. Au 31 août, la dotation était intégralement consommée. Le montant prévu pour 2018 est identique, afin de doter de façon pérenne la troisième section de 50 000 euros.

c) Un législateur attentif à la déontologie de la presse

Au-delà du ciblage de la majorité des aides directes à la presse au profit de la presse d'information politique et générale et du renforcement récent des aides au pluralisme, le législateur a pris soin, pour assurer la qualité, l'indépendance et donc la valeur des informations diffusées par les éditeurs de presse, de doter le secteur de solides règles déontologiques .

La ventilation des aides directes en 2016 (millions d'euros)

Source : Rapport annuel de performance (RAP) 2016 du programme 180 « Presse »

L'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose : « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi . » Un siècle plus tard, l'article 1 er de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse confirme ce principe : « L'imprimerie et la librairie sont libres ».

Au niveau européen, la Convention européenne des droits de l'homme de 1950, en son article 10, prévoit que « toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière . » La résolution 1003 adoptée par l'Assemblée parlementaire du conseil de l'Europe relative à l'éthique du journalisme rappelle pour sa part que « l'exercice du journalisme comporte des droits et des devoirs, des libertés et des responsabilités », « que la fin ne justifie pas les moyens » mais également que « dans les rapports nécessaires qu'il leur faut entretenir avec les pouvoirs publics ou les milieux économiques, les journalistes doivent éviter d'en arriver à une connivence de nature à nuire à l'indépendance et l'impartialité de leur profession ».

À titre particulier, le législateur a entendu fixer les obligations fondamentales des journalistes et de leur employeur. Ainsi en est-il de l'Agence France-Presse (AFP), qui « ne peut en aucune circonstance tenir compte d'influences ou de considérations de nature à compromettre l'exactitude ou l'objectivité de l'information » , et « ne doit, en aucune circonstance, passer sous le contrôle de droit ou de fait d'un groupement idéologique, politique ou économique » (article 2 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse).

Par ailleurs, dans le seul secteur de la publicité, l'article 10 de la loi n° 86-897 du 1 er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse prévoit qu'« il est interdit à toute entreprise éditrice ou à l'un de ses collaborateurs de recevoir ou de se faire promettre une somme d'argent, ou tout autre avantage, aux fins de travestir en information de la publicité financière . Tout article de publicité à présentation rédactionnelle doit être précédé de la mention "publicité" ou "communiqué" ».

En 2009, le législateur est à nouveau intervenu pour reconnaître un droit d'opposition aux journalistes de l'audiovisuel public (loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision), droit récemment étendu à l'ensemble de la profession par l'article 1 er de la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, dite « loi Bloche ».

Les dispositions de la loi Bloche
relative à la déontologie de la presse et leur mise en oeuvre

La loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias reconnaît un droit d'opposition aux journalistes . En effet, l'article 1 er étend à l'ensemble des journalistes la protection prévue en faveur des journalistes de l'audiovisuel public aux termes de laquelle ils peuvent refuser tout acte contraire à leur conviction professionnelle formée dans le respect de la charte déontologique de l'entreprise .

En outre, est imposée aux entreprises ou sociétés éditrices de presse ou audiovisuelles, l'adoption d'une charte déontologique rédigée conjointement par la direction et les représentants des journalistes. À défaut de conclusion d'une charte avant le 1 er juillet 2017 et jusqu'à l'adoption de celle-ci, les déclarations et les usages professionnels relatifs à la profession de journaliste peuvent être invoqués en cas de litige. La loi oblige les employeurs à remettre cette charte à tous leurs journalistes et garantit l'information du comité d'entreprise de l'application de ces chartes à travers un bilan annuel.

L'article 20 de la loi prévoit que la violation, par une entreprise éditrice de presse, des dispositions relatives au droit d'opposition des journalistes, aux chartes déontologiques ou à l'information du public sur les modifications relatives aux titres entraîne la suspension de tout ou partie des aides directes ou indirectes dont elle bénéficie.

En ce qui concerne les 39 titres édités par des entreprises devant, aux termes des dispositions du décret du 13 avril 2012, signer une convention-cadre avec l'État, 15 titres étaient dotés d'une charte déontologique au 1 er juillet 2017. Pour les autres titres, la quasi-intégralité des entreprises éditrices déclarent que les négociations sont en cours avec les représentants des journalistes et, parmi elles, près de la moitié estiment que la charte pourrait être adoptée avant la fin de l'année 2017.

Pour l'ensemble de la presse française, un bilan quantitatif de l'adoption des chartes déontologiques est en cours de réalisation avec l'aide des syndicats professionnels. Ce travail de recensement se heurte toutefois, pour certains syndicats, à un taux de réponse relativement faible de la part des sociétés éditrices concernées, de sorte que les statistiques présentées ci-après doivent être appréhendées avec prudence. Au 30 septembre 2017 :

- pour le SPQN, sept des dix sociétés éditrices affiliées, représentant neuf des treize titres rattachés, déclarent avoir adopté une charte ; celles dont ce n'est pas encore le cas estiment que ce sera chose faite à la fin de l'année 2017 ;

- pour l'Union pour la presse régionale (UPREG), 23 des 43 sociétés éditrices, représentant 27 des 51 titres rattachés, déclarent avoir adopté une charte (soit 53 % des éditeurs et des titres) ; la plupart des sociétés éditrices déclarant ne pas être dotées de charte précisent que les négociations sont en cours et devraient, pour une part significative d'entre elles, être signée d'ici la fin de l'année ;

- Pour la Fédération de la presse périodique régionale (FPPR), le très faible taux de réponse des sociétés éditrices du SNPJ et du SNPR ne permet pas de disposer de vision claire de la situation ;

- pour le SPIIL, 45 % des sociétés ayant répondu déclarent être dotées de chartes ; elles représentent 15 % des 119 éditeurs affiliés et des 130 titres rattachés ; là encore, les sociétés déclarant ne pas être dotées de charte précisent que les négociations sont en cours avec les représentants des journalistes.

Ce premier bilan quantitatif n'a pas pu être réalisé à temps par le SEPM et la FNPS, deux organisations comptant de très nombreux membres et dont le taux de réponse est, à ce jour, demeuré très bas.

Enfin, conformément aux dispositions combinées de l'article 20 de la loi et du chapitre I er du décret n° 2012-484 du 13 avril 2012 modifié, les conventions-cadres entre l'État et les titres et groupes de presse ont pour but de conditionner le versement des aides à la presse à l'adoption par ces derniers d'engagements et de bonnes pratiques sociales, environnementales, éducatives, etc. Elles portent sur les années 2017 à 2019 et concernent principalement les titres et groupes percevant plus d'un million d'euros d'aides par an.

Le ministère de la culture assurera un suivi régulier des engagements pris , au moyen de rapports annuels qui lui seront remis et qui contiendront des indicateurs de suivi. Il pourra suspendre en partie les aides en cas de non-respect des engagements. Le modèle des conventions-cadres a été finalisé fin 2016 en accord avec les organisations professionnelles et a été transmis aux groupes concernés. Les négociations sont en cours.

Source : Ministère de la culture

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