Avis n° 151 (2018-2019) de MM. Jean-Jacques LOZACH et Jacques-Bernard MAGNER , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 22 novembre 2018

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N° 151

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , pour 2019 ,

TOME VI

SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE

Par MM. Jean-Jacques LOZACH et Jacques-Bernard MAGNER,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Morin-Desailly , présidente ; M. Max Brisson, Mme Catherine Dumas, MM. Jacques Grosperrin, Antoine Karam, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Pierre Leleux, Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Mélot, M. Pierre Ouzoulias, Mme Sylvie Robert , vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Claude Kern, Mme Claudine Lepage, M. Michel Savin , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin, Céline Boulay-Espéronnier, Marie-Thérèse Bruguière, Céline Brulin, M. Joseph Castelli, Mmes Laure Darcos, Nicole Duranton, M. André Gattolin, Mme Samia Ghali, MM. Abdallah Hassani, Jean-Raymond Hugonet, Mmes Mireille Jouve, Claudine Kauffmann, MM. Guy-Dominique Kennel, Laurent Lafon, Michel Laugier, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, Jean-Marie Mizzon, Mme Marie-Pierre Monier, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Stéphane Piednoir, Mme Sonia de la Provôté, MM. Damien Regnard, Bruno Retailleau, Jean-Yves Roux, Alain Schmitz, Mme Dominique Vérien .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 1255 , 1285 , 1288 , 1302 à 1307 , 1357 et T.A. 189

Sénat : 146 et 147 à 153 (2018-2019)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 2019 à 1,18 milliard d'euros en autorisations d'engagement (+ 22,2 %) et 998,8 millions d'euros en crédits de paiement (+ 4,2 %).

Le présent rapport présente les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » de la manière suivante :

- l'avis de Jean-Jacques Lozach retrace les évolutions des dotations des programmes 219 « Sport » et 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 » ;

- l'avis de Jacques-Bernard Magner est consacré à l'étude des crédits dédiés à la jeunesse et à la vie associative (programme 163).

Le ministère du sport est probablement celui qui connaît le plus de bouleversements depuis deux ans. Cette mutation est d'autant plus profonde qu'elle est soudaine et que ses conséquences restent encore largement méconnues ou mal identifiées.

Nous pensions l'année dernière avoir assisté à une transformation majeure avec la redéfinition des missions et des moyens respectifs du Centre national pour le développement du sport (CNDS) et du budget du sport. Le CNDS avait vu, à cette occasion ses recettes fiscales divisées par deux à 133,4 millions d'euros tandis que les crédits du programme 219 augmentaient fortement à 348,23 millions d'euros en crédits de paiement au profit des dépenses d'intervention. Cette hausse avait bénéficié essentiellement aux dépenses de l'action n° 1 de « Promotion du sport pour le plus grand nombre » et de l'action n° 2 de « Développement du sport de haut niveau ».

Face à l'inquiétude concernant les engagements du CNDS, une enveloppe supplémentaire avait été prévue dans le projet de loi de finances rectificative pour 2017, ce qui avait permis de stabiliser les crédits du sport. Pour autant, votre rapporteur pour avis s'était interrogé sur l'avenir du CNDS et du financement des projets engagés en 2019 et 2020. Une rebudgétisation totale du CNDS et un changement de nom étaient évoqués.

Les changements annoncés cette année sont encore plus considérables que ceux initiés par le PLF 2018. C'est l'organisation même de la politique du sport et le rôle de ses acteurs respectifs qui vont être profondément redéfinis à l'issue de la consultation menée depuis janvier 2018 sur la rénovation du modèle sportif français.

L'annonce de la suppression du CNDS, ou plutôt son intégration dans la future Agence nationale du sport attendue au second semestre 2019, constitue le fait majeur de ce débat budgétaire . Cette agence doit fonctionner sur un mode quadripartite associant l'État, le mouvement sportif, les collectivités territoriales et le monde économique.

Votre rapporteur pour avis regrette que les commissions en charge du sport des deux assemblées n'aient pas été véritablement associées à cette réflexion alors même que les rapporteurs pour avis sont membres invités du conseil d'administration du CNDS avec voix consultative. Le fonctionnement opérationnel de la nouvelle agence reste, en effet, très peu précis qu'il s'agisse d'une part des modalités d'association des collectivités territoriales et des entreprises dans le financement des projets locaux et, d'autre part, de l'articulation entre l'agence, les Centre de ressources, d'expertise et de performance sportives (CREPS) et l'institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP).

Les interrogations qui entourent le fonctionnement de la future agence ne remettent pas en cause, pour autant, la nécessité d'une réforme afin de moderniser le modèle sportif français afin de mieux tenir compte notamment de la mondialisation, de l'hyper-médiatisation et de la diplomatie sportive. Votre rapporteur pour avis alerte depuis longtemps sur les risques que représente l'explosion du sport-business dans certaines disciplines. La montée en puissance des collectivités territoriales est devenue une réalité comme la responsabilisation du mouvement sportif. Il est grand temps par ailleurs de densifier le sport-entreprise en associant le monde économique, de mettre en oeuvre une stratégie en matière de sport-santé et de mieux répondre aux opportunités offertes par les évolutions technologiques (recherche, innovation, développement...) qui impactent tant l'activité physique du quotidien que le sport de haut niveau.

Plus généralement, le sport doit contribuer à l'activité économique, à l'emploi, à une société plus inclusive ce qui implique de moderniser la mission de service public déléguée par l'État.

Dans le nouveau schéma d'organisation il est prévu que les services du ministère recentrent leur action sur les missions de stratégie, de régulation, de réglementation et de contrôle, notamment éthique. La réussite de cette mutation se mesurera à l'aune des résultats des athlètes français aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Nous devons être à la hauteur de l'enjeu tant pour l'organisation que pour le nombre de médailles. Nous avons une double obligation de résultat.

Le Gouvernement a souhaité commencer par réformer l'organisation du sport français. Votre rapporteur pour avis estime qu'il n'est pas possible de faire l'impasse sur la question des moyens au risque sinon de compromettre les résultats aux Jeux olympiques et paralympiques d'été de 2020 et aux Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2022, sans oublier les autres rendez-vous internationaux avant 2024.

Les crédits en faveur de la jeunesse et de la vie associative s'élèvent à 614,3 millions d'euros, soit une progression de près de 9 % par rapport à l'année dernière. Ils se caractérisent par deux tendances contrastées :

- la poursuite de l'effort en matière de service civique : les crédits qui lui sont consacrés représentent près de 81 % du programme 163. Pour 2019, ils augmentent de 50 millions d'euros pour atteindre 497 millions d'euros, ce qui devrait permettre de financer le service civique de 140 000 volontaires ;

- la reconduction des crédits en faveur des actions 1 et 2 , à l'exception de l'augmentation de deux millions d'euros des crédits accordés à l'Office franco-allemand pour la jeunesse et de la diminution de 2,8 millions d'euros des crédits finançant le compte d'engagement citoyen afin d'ajuster la dotation à la consommation réelle de crédits.

Cette baisse de facto des crédits si on tient compte de l'inflation a été accentuée par la suppression de la réserve parlementaire intervenue l'année dernière, soit un manque à gagner de 52 millions d'euros pour les associations, qui n'a été compensé que partiellement à travers l'octroi de 25 millions d'euros au FDVA. Les crédits du FDVA destinés à la formation des bénévoles sont également largement insuffisants. D'un montant de 8,2 millions d'euros, ils permettent de satisfaire moins de 29 % des demandes, et ce pour seulement la moitié de leur montant. Le dispositif finance la formation d'1,2 % des bénévoles uniquement !

Les crédits du FONJEP (Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) sont également sous-dimensionnés par rapport aux besoins. Destinés à asseoir les projets associatifs dans la durée en facilitant l'emploi associatif, ils ne financent que 3650 postes à hauteur de 7 200 euros annuels pour trois ans.

Par ailleurs, plusieurs mesures prises par le gouvernement ont eu un impact négatif sur les associations :

- la réforme des contrats aidés : entre 2016 et 2019, les crédits destinés à leur financement sont passés de 4,2 milliards d'euros à 600 millions, ce qui correspond à une perte d'1,6 milliard d'euros de subventions indirectes pour les associations ;

- le remplacement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui a fait passer le nombre d'assujettis à cet impôt de 358 000 à 120 000 foyers et a entraîné une baisse moyenne d'au moins 50 % des dons provenant de l'IFI, ce qui représente une perte de l'ordre de 130 à 150 millions d'euros pour les fondations reconnues d'utilité publique ;

- la réévaluation du taux de contribution sociale généralisée (CSG) - qui touche également les retraités, donateurs traditionnels - et les inquiétudes soulevées par la mise en oeuvre du prélèvement à la source à partir de 2019 qui conduisent à une baisse générale de la collecte grand public.

Il y a un an, le gouvernement a annoncé un plan en faveur du développement de la vie associative. Une réflexion très large a alors été lancée, qui a rassemblé l'ensemble des organisations représentatives de la vie associative et a associé de nombreuses administrations. À l'issue de cette large consultation, un rapport a été remis le 8 juin dernier au Premier ministre comportant 59 propositions. Or, cet immense travail n'a abouti à aucune mesure concrète de la part du gouvernement. Ainsi, aucune initiative n'a été prise afin d'introduire un soutien direct aux emplois associatifs au regard de leur utilité sociale . Alors que le gouvernement fixe des objectifs ambitieux aux associations en matière d'accompagnement de la politique publique, que ce soit pour la mise en place du service national universel, du plan pauvreté ou du développement du sport pour tous, sa politique conduit à une fragilisation durable du milieu associatif et entraîne de graves répercussions en matière de cohésion sociale et de réponse à des besoins non couverts par les pouvoirs publics.

PREMIÈRE PARTIE - SPORT

I. UN BUDGET EN RETRAIT DU FAIT DE DOTATIONS CALCULÉES « AU PLUS JUSTE »

A. DES CRÉDITS EN BAISSE EN RAISON DE NOMBREUX AJUSTEMENTS

Votre rapporteur pour avis rappelle que le sport occupe une place particulière dans les politiques publiques, qui lui permet, souvent, de dépasser les clivages et de rassembler largement. C'est ainsi, par exemple, que les crédits du sport ont reçu un avis favorable de votre commission de la culture lors de l'examen des crédits inscrits aux projets de loi de finances (PLF) pour 2015, 2016, 2017 et 2018 . De la même façon, la proposition de loi visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs a été adoptée par le Sénat à une large majorité.

L'année dernière, votre commission de la culture avait souhaité tenir compte des annonces du Gouvernement concernant un abondement des crédits du CNDS dans le cadre du PLFR. Ces crédits supplémentaires permettaient en effet de nuancer le scénario d'une baisse des crédits de 7 % qui ressortait du PLF, pour privilégier celui d'une quasi stabilité des crédits (-1,1 %). Votre commission avait ainsi donné un avis favorable sur les crédits du sport dans le PLF 2018.

La situation n'est pas très différente cette année puisque le PLF déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale 1 ( * ) prévoyait une baisse des crédits consacrés au sport, ceux-ci s'établiront en effet à 319,2 millions d'euros en crédits de paiement contre 347,2 millions dans la loi de finances initiale pour 2018 soit une baisse de 8,1 % .

Cette baisse de crédits se répercute uniquement sur l'action n° 1 « Promotion du sport pour le plus grand nombre » qui voit ses crédits baisser de 45 % à 49,5 millions d'euros . Les crédits de l'action n° 3 « Prévention par le sport et protection des sportifs » restent stable à 20,3 millions d'euros. Les crédits de l'action n° 2 augmentent pour leur part de 4,6 % en crédits de paiement à 219,5 millions d'euros et ceux de l'action n° 4 connaissent une augmentation de 8,3 % à 30 millions d'euros.

La diminution des crédits de l'action n° 1 trouve son origine dans une baisse de l'évaluation d'une compensation à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) d'une exonération de cotisations sociales sur la rémunération des arbitres et juges sportifs. L'évaluation du montant de cette compensation s'avère difficile puisqu'elle s'est révélée insuffisante dans la loi de finances pour 2017 puis excédentaire dans la loi de finances pour 2018. Compte tenu de cette difficulté technique le rapporteur spécial de la commission des finances, notre collègue Éric Jeansannetas, a estimé, au vu de ses échanges avec le ministère, que cette évaluation « relève davantage d'un arbitrage afin de concilier les besoins de financement des programmes 219 et 350 avec la maîtrise des dépenses publiques » 2 ( * ) . Pour notre collègue, « un tel ajustement, par nature non pérenne, permet certes de préserver les soutiens effectifs au mouvement sportif en 2019. Il ne résout toutefois pas la question de la montée en puissance du programme 350 » .

Cette évaluation « au plus juste » ne se limite pas à la compensation due à l'Acoss. De nombreuses lignes du programme 219 ont, en effet, été revues à la baisse de manière opportune pour contenir la présentation du budget .

À structure constante, c'est-à-dire avant transfert de crédits à la nouvelle agence du sport dont la création est prévue en 2019, le montant du programme 219, en retrait par rapport à 2018, s'explique donc par :

- une baisse de 39 millions des crédits de l'action n°1 du fait de l'évolution tendancielle des compensations auprès de l'ACOSS des exonérations de charges sociales sur la rémunération des arbitres et juges sportifs ;

- des moyens nouveaux à hauteur de 40 millions d'euros prévus pour la nouvelle agence du sport ;

- une remise à niveau des dotations consacrées aux travaux d'investissement et de rénovation de la partie Sud de l'INSEP (-2,33 M€ en crédits de paiement) ainsi que des écoles nationales (-1,43 M€ en crédits de paiement), les travaux programmés les plus importants ayant déjà été réalisés ;

- l'ajustement aux besoins réels et à une programmation pluriannuelle des principaux dispositifs opérationnels transférés au programme 219 en 2018 : les moyens dédiés aux grands événements sportifs internationaux (GESI) baissent de 16 M€ en crédits de paiement et ceux consacrés au soutien aux équipements structurants nationaux baissent de 6,74 M€ en crédits de paiement ;

- enfin, d'autres dispositifs font également l'objet d'ajustements comme la prise en charge des cotisations de retraite des sportifs de hauts niveau (-1,2 M€ en crédits de paiement) ainsi que les aides personnalisées versées aux sportifs de haut niveau (-1,27 M€ en crédits de paiement).

Compte tenu de ces ajustements, la ministre des sports évoque un budget « préservé » et revendique une « démarche de budgétisation sincère visant à mieux mettre en adéquation les moyens et les besoins » .

Ce PLF 2019 porte la marque de deux évolutions significatives :

- la nouvelle agence du sport bénéficiera en 2019 d'un budget évalué à près de 350 millions d'euros , qui intégrera les subventions accordées par le ministère des sports au Comité national olympique et sportif français (CNOSF), et au Comité paralympique et sportif français (CPSF).

Près de 70 % des moyens d'intervention de cette agence seront dédiés au développement des pratiques. L'enveloppe destinée à la haute performance, évaluée à 90 millions pour 2019, sera quant à elle en hausse de plus de 40 % par rapport à 2018 ;

- Un exercice d'optimisation a été mené lors de la préparation du PLF 2019, afin de dégager des moyens nouveaux en faveur de la future agence du sport. Le sport de haut niveau et la haute performance bénéficieront ainsi de 25 millions d'euros et le développement des pratiques, de 15 millions. Pour accompagner le développement des pratiques, la ministre des sports a fait voter, lors du débat à l'Assemblée nationale, un amendement gouvernemental augmentant de 15 millions le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite taxe Buffet .

Ces 15 millions supplémentaires seront affectés aux mesures en faveur de la lutte contre les inégalités d'accès à la pratique sportive ainsi qu'au programme « savoir nager ». Au total, les mesures nouvelles qui accompagnent la création de la future agence représentent donc 55 millions d'euros.

Cette augmentation de crédits décidée lors de l'examen du budget à l'Assemblée nationale permet de contenir la baisse des moyens en faveur du sport en 2019, à défaut de clarifier le financement des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 .

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Dépense publique constatée en faveur des politiques sportives (hors programme 350 "JOP 2024")

B. UN FINANCEMENT DES JEUX OLYMPIQUES DE 2024 QUI PÈSE SUR LES CRÉDITS DU SPORT ?

Le PLF 2019 prévoit d'accorder 65 millions d'euros au programme 350 qui bénéficie à la SOLIDEO, ces crédits devant être portés à 120 millions d'euros en 2020. Votre rapporteur pour avis est vigilant à ce que le financement des Jeux olympiques et paralympiques soit à la fois suffisant pour permettre l'organisation de cet événement dans de bonnes conditions sans pour autant porter atteinte aux disciplines non olympiques ni à la pratique sportive . Le risque en effet est que le Gouvernement choisisse de concentrer les moyens de la politique du sport sur les 36 disciplines olympiques au détriment des 46 autres disciplines qui ne sont pas olympiques. Notre collègue Éric Jeansannetas, rapporteur spécial, a ainsi calculé que pour 2019 et 2020 « ce sont 42 millions d'euros qui seront prélevés sur les crédits du sport afin de financer les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ».

Compte tenu de la montée en puissance des besoins de financement de la SOLIDEO qui devraient quasiment doubler 3 ( * ) entre 2020 et 2021, il est évident que la tentation de transférer des crédits ne saurait constituer une perspective crédible, ceci d'autant plus que les engagements financiers des contributeurs devront être actualisés en 2021 ce qui pourra entraîner une évolution de l'enveloppe actuelle de 1,374 milliard d'euros.

Compte tenu des incertitudes qui planent depuis l'origine sur le financement des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, votre rapporteur pour avis avait proposé l'année dernière au Gouvernement de mettre en chantier rapidement une loi de programmation budgétaire pour les préparer d'ici à 2024 ainsi que la Coupe du monde de rugby 2023.

Faute de pouvoir disposer de cet outil qui sanctuariserait les moyens nécessaires à l'organisation de ces grands événements, le risque était inévitable que les crédits du sport pour tous soient sollicités pour les financer.

Si cette crainte est en train de devenir réalité et que ce budget a été décrié, c'est aussi parce que le Gouvernement n'a pas pris la précaution d'isoler les crédits de la SOLIDEO du reste des crédits du ministère du sport comme l'aurait souhaité également le délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques (DIJOP), Jean Castex.

Lors de son audition par votre rapporteur pour avis le 17 octobre dernier, le délégué interministériel a par ailleurs indiqué que le montant demandé en 2019 pour financer les infrastructures était à l'origine de 80 millions d'euros, à comparer aux 65 millions d'euros qui figurent dans le PLF. La différence de 15 millions d'euros a fait l'objet d'un accord avec l'établissement public régional afin que les acquisitions foncières actées cette année ne soient payées qu'en 2020 .

Jean Castex a également indiqué à votre rapporteur pour avis que les dépenses de la SOLIDEO devraient, en 2019, se monter en réalité à 152 millions d'euros compte tenu des 65 millions d'euros apportés par l'État, des 40 millions d'euros prévus par les collectivités territoriales ainsi que d'un report de 45 millions d'euros versés par avance par les collectivités territoriales . Cette contribution est le fruit de « la bonne entente » entre les partenaires selon le délégué interministériel.

Jean Castex a également indiqué que si les financements n'étaient pas au rendez-vous l'année prochaine, « c'est le pacte de confiance qui sera entamé » . Le mur du financement sera donc important en 2020 d'autant que certaines dépenses calculées au plus juste en 2019, comme les grands événements sportifs internationaux, pourraient nécessiter plus de crédits en 2020.

Les sites des épreuves olympiques

Sites

Disciplines (programmation provisoire, susceptible de modifications)

Stade de France

Athlétisme

Cérémonies d'ouvertures et de clôtures des jeux olympiques et paralympiques

Athlétisme en fauteuil

Roland Garros

Boxe

Tennis et Tennis en fauteuil

Basket en fauteuil

Rugby en fauteuil

Football à 5

Parc des Princes

Stade Pierre Mauroy Villeneuve d'Ascq

Stade la Beaujoire Nantes

Parc Olympique Lyonnais à Décines

MatMut Atlantique Bordeaux

Geoffroy Guichard Saint-Etienne

Allianz Riviera Nice

Stadium de Toulouse

Stade Vélodrome de Marseille

Football

Stade Jean Bouin

Rugby à 7

Stade Pierre de Coubertin

Basketball (phases préliminaires)

Accorhôtels Arena

Basket

Basket en fauteuil

Paris Arena II - à construire

Badminton olympique et paralympique

ou Judo et Lutte

Goalball paralympique

Tour Eiffel - Champ de Mars - provisoire

Volleyball de plage

Boccia

Tour Eiffel - Seine

Natation en eau libre

Triathlon

Champs Elysées - provisoire

Cyclisme sur route

Cyclisme sur route paralympique

La Villette

Para-haltérophilie

Grand Palais

Escrime

Escrime en fauteuil

Taekwondo

Structure éphémère - Champ de Mars - provisoire

Badminton olympique et paralympique

ou Judo et Lutte

Esplanade des Invalides - provisoire

Tir à l'Arc

Tir à l'Arc en fauteuil

Paris Expo - Hall I

Handball

Paris Expo - Hall IV

Tennis de Table

Nanterre - U Arena

Gymnastique artistique

Gymnastique rythmique

Trampoline

Colombes - Stade Yves du Manoir

Hockey sur Gazon

Saint Quentin en Yvelines Golf National

Golf

Coline d'Elancourt - provisoire

VTT

Saint Quentin-en Yvelines - Vélodrome National

Cyclisme sur piste

BMX

Pentathlon moderne (escrime)

Cyclisme sur piste paralympique

Vallée de Chevreuse

Cyclisme sur route

Vaires sur Marne - Base nautique

Aviron

Canoë-Kayak (en ligne et slalom)

Aviron paralympique

Canoë paralympique


Versailles - Château - provisoire

Sports Equestres

Pentathlon moderne (épreuves autres que l'escrime)

Zénith

Haltérophilie

Judo paralympique

Taekwondo paralympique

Saint-Denis - Centre aquatique principal - à construire

Water Polo

Plongeon

Saint-Denis - Centre aquatique principal - provisoire

Natation

Natation synchronisée

Le Bourget Pavillon - provisoire

Volley-ball olympique et paralympique

Le Bourget stand de tir - provisoire

Tir

La rade de Marseille et sa marina

Voile

Source : réponse au questionnaire budgétaire

II. UN BUDGET MARQUÉ PAR LA CRÉATION DE L'AGENCE NATIONALE DU SPORT

A. LA CRÉATION DE L'AGENCE NATIONALE DU SPORT

La nécessité de réformer l'organisation de la politique du sport et sa gouvernance s'est imposée au cours des dernières années à mesure que l'insuffisante coordination entre les acteurs est devenue source d'inefficacité. Les subventions du CNDS qui jouent un rôle essentiel pour la vie de nombreux clubs et fédérations ne font l'objet d'aucune concertation avec les collectivités territoriales qui constituent pourtant le premier financeur du sport local . Les collectivités territoriales ne coordonnent par ailleurs que très peu leurs investissements, ce qui permet à certains acteurs de cumuler les aides tandis que d'autres, moins informés, ne savent pas comment obtenir un soutien.

Les fédérations sportives peuvent ainsi être amenées à renoncer à demander une subvention au CNDS compte du rapport défavorable entre la complexité de la procédure d'appel à projets et le montant de l'aide qui est le plus souvent limité. Par ailleurs, les priorités thématiques retenues par le CNDS ne peuvent pas toujours être satisfaites par les fédérations les plus fragiles 4 ( * ) qui se concentrent sur leurs missions essentielles.

La création de l'Agence nationale du sport au premier trimestre 2019 doit permettre de répondre à ce besoin de coordination . Elle devrait prendre la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP) dont l'État, les collectivités territoriales et le mouvement sportif disposeraient chacun de 30 % des droits de vote, les 10 % restants étant attribués aux acteurs économiques.

Il reviendra à cette nouvelle structure de développer les pratiques sportives et de soutenir la haute performance. Les missions confiées à cette agence seront donc vastes :

- assurer une cohérence stratégique entre les niveaux nationaux et locaux ;

- améliorer l'évaluation des performances des fédérations dans la détection et la formation des athlètes à fort potentiel ;

- mobiliser des professionnels de soutien de très haut niveau ;

- rattraper le retard en matière de veille, de recherche et d'innovation ;

- attirer les meilleurs entraîneurs ;

- et mobiliser les startups du monde du sport.

Comme le proposait Claude Onesta dans son rapport de janvier 2018, il reviendra à cette agence de créer un accompagnement individualisé de l'athlète dans sa fédération mais également de veiller au suivi et à l'évaluation de la performance de l'allocation des moyens au sein des fédérations. Ce type d'organisation a déjà par le passé démontré sa pertinence au Royaume-Uni et au Canada pour améliorer la performance.

Afin de développer le sport pour tous, l'Agence nationale du sport devra répondre aux difficultés de coordination entre les financeurs. Une conférence régionale des financeurs pourrait ainsi être créée afin de coordonner les projets de financements au niveau local. Votre rapporteur pour avis n'a pas pu obtenir beaucoup de précisions sur le fonctionnement de cette conférence régionale et notamment sur la manière dont les collectivités territoriales pourraient être amenées à devoir s'inscrire dans un cadre collectif pour développer leurs projets . Sur le plan administratif, l'objectif serait qu'un seul dossier de subvention soit partagé entre les différentes collectivités territoriales pour chaque projet.

Le président du CNOSF a indiqué lors de son audition par votre rapporteur le 17 octobre dernier, qu'il faudrait sans doute de 5 à 6 ans pour opérer la transition.

La nouvelle agence du sport bénéficiera, en 2019, d'un budget évalué à près de 350 millions d'euros, qui intégrera les subventions accordées par le ministère des sports au Comité national olympique et sportif français (CNOSF), et au Comité paralympique et sportif français (CPSF). Le président du CNOSF, Denis Masseglia, souhaite que ce budget soit porté à 400 millions d'euros d'ici 2020 grâce à un prélèvement de 5 % sur les paris sportifs.

La création de cette agence a suscité de nombreuses interrogations et quelques inquiétudes, notamment de la part des fédérations mais aussi des syndicats. Les représentants du SNEPS s'inquiètent que l'agence ne soit qu'une « coquille vide » et s'interrogent sur les modalités de prise de décision. Comment les associations d'élus pourraient-elles notamment décider à la place des collectivités concernant des engagements financiers ? Qui siégera pour représenter les entreprises ? Le Medef n'a pas développé de compétence en matière sportive. Pour le SNEPS, « l'État va abandonner ses crédits d'intervention à une agence de concertation » . Plus généralement, les représentants de ce syndicat estiment qu'il s'agit d'une réforme budgétaire qui vise en particulier à remplacer des fonctionnaires par des agents privés .

Ces inquiétudes n'ont pas été apaisées par l'annonce du Gouvernement selon laquelle l'État ne rémunérera plus directement quelques 1 600 conseillers techniques sportifs (CTS). Même si cette évolution n'est pas prévue dans le présent PLF, la réaction a été vive dans le mouvement sportif comme en témoigne la lettre ouverte aux élus signée par près de 400 sportifs de haut niveau. La mobilisation a été d'autant plus forte que la réduction drastique des contrats aidés et la suppression de nombreux emplois associatifs a aussi fragilisé notre maillage territorial de clubs 5 ( * ) .

Pour les représentants du SNEPS, le changement de statut des CTS risque de bousculer toute l'organisation du sport pour dix ans car seuls 20 % d'entre eux seraient prêts à accepter ce changement de statut.

Le SNEP partage les inquiétudes évoquées précédemment d'une réforme uniquement budgétaire. Il souhaite le maintien d'un ministère des sports à côté du pôle éducatif sportif qui existe au ministère de l'éducation nationale. Ses représentants déplorent la baisse de 21 % en 2018 de nombre de postes d'enseignants en EPS. Ils estiment qu' « il y a un problème avec le sport en France car on ne donne pas envie aux jeunes de continuer notamment en milieu rural » .

Cette préoccupation concernant le sport scolaire est partagée par Jean-Luc Rougé, qui rappelle qu'il existe différents modèles dans le monde, le Royaume-Uni privilégiant l'école et les États-Unis l'université comme maillons principaux. En France, « le sport fait partie du monde éducatif, c'est un choix de l'État » . Il regrette que la priorité donnée au sport pour tous ait décrédibilisé le rôle de la licence.

Concernant l'évolution de la gouvernance, Jean-Luc Rougé n'approuve pas la création d'un GIP et préconise par contre la création d'une structure interfédérale au niveau national.

B. UNE FRAGILISATION DES ACTEURS DE TERRAIN

L'audition des responsables de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES) le 24 octobre dernier a été l'occasion pour les élus en charge du sport dans les collectivités territoriales de déplorer la dégradation du parc d'équipements sportifs locaux. Sur les 200 000 équipements locaux que possèdent les collectivités territoriales, 20 % auraient plus de 50 ans . La situation des piscines est particulièrement préoccupante car on ne compte plus les fermetures de bassins pour cause de vétusté.

Votre rapporteur pour avis estime indispensable qu'un plan d'investissement dans les équipements sportifs locaux soit élaboré . Un tel plan constitue une condition nécessaire pour permettre l'augmentation du nombre de pratiquants sportifs.

Les représentants de l'ANDES ont aussi exprimé leurs inquiétudes face à la baisse du nombre d'emplois aidés dans les associations et regretté l'insuffisante volonté d'aider les collectivités territoriales.

Votre rapporteur pour avis a également eu l'occasion de constater la fragilisation du tissu de clubs sportifs locaux qui pâtissent de la diminution du nombre de contrats aidés, de la suppression de la dotation d'action parlementaire, de la diminution de la part territoriale du CNDS et de la diminution des concours financiers des collectivités territoriales. La réforme des rythmes scolaires semble également avoir eu un impact négatif sur le nombre de jeunes licenciés.

Tout comme les équipements sportifs locaux, le maillage du territoire par des clubs sportifs nombreux et actifs constitue une condition du développement de la pratique sportive des jeunes mais également un réseau incontournable pour détecter les jeunes à fort potentiel . Votre rapporteur pour avis sera vigilant à ce que les clubs ne deviennent pas les « parents pauvres » de la nouvelle politique du sport qui sera mise en place en 2019.

III. UN SOUTIEN AU SPORT DE HAUT NIVEAU APPELÉ À ÉVOLUER

Les moyens de l'action n° 2 « Développement du sport de haut niveau » augmenteront d'une dizaine millions d'euros (en crédits de paiement) en 2019 pour atteindre 219,5 millions d'euros en crédits de paiement et 230,8 millions d'euros en autorisations d'engagement. Ces moyens servent à soutenir la préparation aux compétitions de haut niveau et aux parcours de l'excellence sportive. Ils permettent également à l'État de contribuer à l'organisation de grands événements sportifs.

A. LE SOUTIEN À LA PRÉPARATION AUX COMPÉTITIONS DE HAUT NIVEAU

Les moyens supplémentaires alloués à l'action n° 2 visent à conforter la contribution de l'État à l'organisation et au financement du sport de haut niveau. La politique ministérielle de soutien au sport de haut niveau repose sur une ambition en matière de performances sportives dans les grandes compétitions internationales et sur l'exigence d'une intégrité morale et physique des athlètes.

Les interventions du ministère dans le cadre de l'action n° 2 concernent tant les parcours de l'excellence sportive - à travers notamment les pôles « France » et « Espoirs » labellisés qui sont implantés dans le réseau des établissements nationaux (INSEP, écoles) et dans les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) - que le soutien financier aux fédérations sportives pour la préparation et la participation aux grandes compétitions sportives par le biais des conventions d'objectifs.

Les 1 560 agents exerçant les missions de conseillers techniques sportifs (CTS) auprès des fédérations sportives jouent un rôle essentiel dans la mise en oeuvre de la politique du sport de haut niveau, c'est pour cela que le projet de transfert de ces personnels aux fédérations a créé un légitime émoi au sein du mouvement sportif.

Plus généralement, le soutien à la préparation des sportifs de haut niveau est appelé à évoluer compte tenu de la création de l'Agence nationale du sport en 2019. En particulier, des moyens nouveaux à hauteur de 40 millions d'euros sont prévus en 2019 en faveur de la nouvelle agence du sport qui sera compétente pour favoriser le développement de la pratique du sport mais également pour garantir un niveau de ressources aux sportifs de haut niveau sélectionnables pour les prochains Jeux olympiques et paralympiques, mettre en place des plateaux techniques et acquérir du matériel de haute technologie afin notamment d'améliorer l'entraînement et la récupération des athlètes.

B. L'INSTITUT NATIONAL DU SPORT, DE L'EXPERTISE ET DE LA PERFORMANCE (INSEP)

Les crédits de l'INSEP sont également inscrits à l'action n° 2 relative au « développement du sport de haut niveau ».

Le vaste plan de rénovation de l'INSEP mis en oeuvre depuis plusieurs années arrive aujourd'hui à son terme. Si le résultat des travaux est globalement satisfaisant, votre rapporteur pour avis rappelait l'année dernière les difficultés posées par le recours à un partenariat public-privé (PPP) pour une partie des travaux puisque « le budget du projet a quasiment doublé entre les premières évaluations, qui s'établissaient à 115 millions d'euros, et le coût final compte tenu des dépenses à financer en 2018 et 2019, aujourd'hui estimé à 225,6 millions d'euros » .

Les moyens de l'INSEP baisseront de 6,5 % en 2019 à 37,3 millions d'euros . Toutefois cette baisse ne concerne pas le fonctionnement de l'établissement puisque la subvention de l'État sera de 22,37 millions d'euros dont 19,4 millions consacrés à la masse salariale et 2,11 millions d'euros pour accompagner les sportifs de haut niveau dans la réalisation de leur double projet sportif et professionnel.

En application du contrat de PPP signé en 2006 pour la rénovation de l'INSEP, le PLF 2019 prévoit de verser 9,57 millions d'euros de loyer d'exploitation à la société Sport partenariat . Une enveloppe de 4,3 millions d'euros est également prévue qui correspond aux charges financières liées au financement des ouvrages par le prestataire et à la rémunération des fonds propres.

Les sommes versées par l'État à l'INSEP depuis 5 ans

(en milliers d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

Fonctionnement

4 170

2 592

1 422

3 377

3 944

Masse salariale

17 372

17 383

17 474

17 713

18 257

Investissement

904

1 900

-

-

899

Transferts

18

15

27

18

Total

22 464

21 890

18 923

21 108

23 100

Sources : RAP 2014 à 2017 et prévision financement 2018

Enfin, il convient d'observer que les dotations consacrées aux travaux d'investissement et de rénovation de la partie Sud de l'INSEP seront « remises à niveau » en 2019 ce qui signifie qu'elles baisseront de 2,33 millions d'euros en crédits de paiement.

Votre rapporteur pour avis avait indiqué l'année dernière que l'INSEP avait identifié deux types de besoins nouveaux. Le directeur général de l'établissement souhaitait, en effet, internaliser la restauration qui n'était pas adaptée aux athlètes de haut niveau et il souhaitait pouvoir disposer d'un mur d'escalade, d'un dojo pour le karaté et d'une grande salle multisport pour le handball et le volley-ball. Ces trois équipements nécessiteraient, à eux-seuls, une enveloppe de 10 millions d'euros. Or ces projets d'investissement ne semblent pas avoir progressé ce qui pourrait être contradictoire avec l'objectif revendiqué de hausse des médailles lors des Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Par ailleurs, la gouvernance de l'INSEP est aujourd'hui fragilisée suite à des contestations internes et sa place dans le nouveau schéma d'organisation de la politique du sport de haut niveau doit être précisée .

C. LES MOYENS DES CREPS EN LÉGÈRE BAISSE SUITE À LEUR TRANSFERT AUX RÉGIONS

Le transfert des CREPS aux régions prévu par l'article 28 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République est devenu effectif en 2016.

Si l'État a souhaité transférer les infrastructures et les personnels, il conserve un rôle afin d'assurer la cohérence de la politique de sport de haut niveau. La réforme conforte les missions nationales mises en oeuvre par les CREPS en matière de sport de haut niveau, à savoir assurer la formation et la préparation des sportifs de haut niveau et participer au réseau national du sport de haut niveau. Les régions se voient dotées d'un véritable outil pour développer une politique du sport de haut niveau et conforter ainsi également leur compétence en matière de formation professionnelle.

Les compétences transférées aux régions ont porté sur les dépenses d'investissement (constructions, extensions, grosses réparations), l'équipement, la maintenance et le fonctionnement, à l'exception des matériels et logiciels informatiques. Ce transfert de charges s'accompagne du transfert gratuit aux régions de la propriété des biens domaniaux et du transfert des personnels affectés à des missions d'accueil, de restauration, d'hébergement, d'entretien général et technique.

La répartition régionale des CREPS

Noms des régions bénéficiaires

Noms des CREPS transférés

Grand Est

Nancy

Reims

Strasbourg

Nouvelle Aquitaine

Bordeaux

Poitiers

Auvergne-Rhône-Alpes

Rhône-Alpes

Vichy

Bourgogne-Franche-Comté

Dijon

Centre-Val de Loire

Centre

Guadeloupe

Pointe-à-Pitre

Ile-de-France

Ile-de-France

Occitanie

Montpellier

Toulouse

La Réunion

La Réunion

Hauts-de-France

Wattignies

Pays de la Loire

Pays de la Loire

Provence-Alpes-Côte d'Azur

Provence-Alpes-Côte d'Azur

L'État conserve la charge de la rémunération des autres agents des CREPS (notamment ceux chargés de la gestion administrative de l'établissement, du sport de haut niveau et des formations, soit plus des deux tiers des agents des centres) ainsi que les dépenses de fonctionnement liées à la pédagogie, à la recherche et à l'expertise dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire. Il conserve en outre la responsabilité de l'encadrement et de la surveillance des sportifs et stagiaires.

Sur un modèle s'apparentant à celui des lycées, établissements publics locaux d'enseignement, les 17 CREPS sont devenus des établissements publics locaux de formation dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire.

Trois régions restent dépourvues de CREPS, la Bretagne, la Normandie et la Corse mais l'article L. 114-1 du code du sport ouvre la possibilité de les en doter « par arrêté du ministre chargé des sports sur proposition de la région » sur la base de l'activité des trois structures existantes : le syndicat mixte « Centre du sport et de la jeunesse de Corse », l'association de gestion « Centre sportif de Normandie » et le groupement d'intérêt public « Campus de l'excellence sportive de Bretagne » (GIP CES), structures créées afin de maintenir une partie des activités des anciens CREPS d'Ajaccio, de Houlgate et de Dinard. Le patrimoine de ces trois structures a été transféré aux trois collectivités concernées par l'article 29 de la loi NOTRe.

La subvention correspondant à la rémunération du personnel baissera en 2019 à 49,33 millions d'euros du fait de la poursuite du transfert d'une partie du personnel de service aux régions. Mais la subvention de fonctionnement (hors personnel) augmente pour sa part à 7,23 millions d'euros.

Plus globalement on ne peut que s'interroger sur l'articulation nécessaire entre les CREPS et la future Agence nationale du sport . L'État va-t-il transférer à cette dernière les missions et les crédits correspondants à sa compétence à l'égard de ces structures ou bien des modalités plus souples de coopération sont-elles envisagées ?

D. L'ORGANISATION DES GRANDS ÉVÉNEMENTS SPORTIFS

L'année 2018 aura été marquée par le succès de l'organisation du Grand prix de France de Formule 1 le 24 juin sur le circuit Paul-Ricard du Castellet et de la Ryder Cup du 25 au 30 septembre au Golf National de Saint-Quentin-en-Yvelines tandis que 2019 se distinguera par l'organisation de la Coupe du monde de football féminine.

L'organisation de ces deux grands événements sportifs illustre une évolution importante dans la stratégie de la France après l'échec de la candidature de Paris à l'organisation des JO de 2012. Les décideurs du mouvement sportif ont pris conscience qu'il était indispensable, avant de prétendre accueillir les plus grands événements sportifs, d'être capable d'organiser des épreuves de moindre envergure afin de développer un savoir-faire et d'améliorer progressivement la qualité de nos équipements. Le ministère et le mouvement sportif ont ainsi fait de l'accueil des grands événements sportifs une priorité.

À ces événements ponctuels s'ajoutent certains événements récurrents totalement privés ou ne faisant pas l'objet d'une aide directe de l'État comme Roland-Garros, le Tour de France cycliste et les 24 heures du Mans, qui illustrent un savoir-faire indéniable dans l'organisation des grands événements sportifs. Ce savoir-faire a été une nouvelle fois récompensé avec l'attribution à la France de la Coupe du monde de rugby pour 2023 à l'issue d'une compétition avec l'Afrique du Sud et l'Irlande.

Le bilan de l'accueil de ces compétitions est sans aucun doute positif, car elles permettent d'irriguer économiquement des territoires et sont pourvoyeuses d'investissements, d'activités et d'emplois. Ces compétitions sportives constituent également des sources de revenus essentielles pour les nouvelles salles ou stades multi usages qui ont été construits dans plusieurs régions ces dernières années.

Pour autant la question de l'adaptation de cette offre se pose aujourd'hui compte tenu du nombre au final limité d'événements à organiser. Si l'abandon du projet de stade de la Fédération française de rugby (FFR) au sud de Paris se révèle probablement la plus sage décision compte tenu de la rénovation à venir du stade de France et de l'inauguration de la U Arena de Nanterre, il apparaît que l'Euro 2016 a donné lieu à la construction de stades dont la taille dépasse souvent les besoins locaux avec pour conséquence des risques pour les finances publiques, notamment locales.

Certains grands équipements comme le Stade de France se retrouvent également rapidement obsolètes au regard des nouveaux standards, ce qui pose la question de leur rénovation et de leur valorisation lorsqu'ils appartiennent à la puissance publique.

Entre autres, l'économie de ces grands événements sportifs repose le plus souvent sur l'inflation des droits sportifs de retransmission audiovisuelle, ce qui pourrait être de nature à créer de sérieuses difficultés en cas de « dégonflement de bulle ».

En termes budgétaires, les subventions pour l'organisation de grands événements sportifs internationaux (GESI) seront en 2019 ajustées aux besoins réels et à une programmation pluriannuelle pour un montant ramené à 10 millions d'euros en autorisations d'engagements et 3,75 millions d'euros en crédits de paiement (contre 19,8 millions d'euros en 2018).

Effectifs des opérateurs du programme 219 « Sport » (en ETPT)

Opérateurs

2013
(RAP)

2014
(RAP)

2015
(RAP)

2016
(RAP)

2017
(RAP) (*)

2018
(LFI) (*)

2019
(PLF) (*)

INSEP

292

293

291

284

287

287

288

CREPS (*)

1 045

1 024

1 015

-

-

-

-

Ecoles nationales

195

193

200

199

197

198

203

Musée national du sport (MNS)

15

17

19

18

18

21

22

CNDS

21

24

23

23

23

23

21

Total

1 568

1 551

1 548

524

525

529

534

(*) A partir de 2016, les CREPS ne sont plus des opérateurs de l'Etat. Pour information,
le cumul de leurs emplois en BI 2016 s'élève à 1 162 ETPT
Source : direction des sports

IV. LA RECONDUCTION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA PROTECTION DES SPORTIFS ET À LA PROMOTION DES MÉTIERS DU SPORT

A. LA PROTECTION DES SPORTIFS ET L'AFLD

Les crédits de l'action n° 3, consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs s'établiront en 2019 à 20,28 millions d'euros soit un niveau identique à celui de 2018.

Ces crédits permettent d'initier des actions de prévention des accidents de sport, de promotion de la santé et de protection des sportifs. Dans ce cadre, le ministère conduit des initiatives visant à promouvoir l'exercice d'une activité sportive ayant des effets bénéfiques sur la santé. Il mène des politiques de prévention des accidents, par exemple en effectuant un suivi de la règlementation en relation avec les administrations et les fédérations concernées visant à sécuriser la pratique physique et sportive. Il assure également une prise en charge partielle du suivi médical des sportifs de haut niveau aux côtés des fédérations.

Dans ces conditions, l'action n° 3 prévoit, en 2019, d'accorder à nouveau 6,85 millions d'euros aux fédérations sportives dans le cadre des conventions d'objectifs en vue de la structuration et du développement des activités médicales. Les actions nationales de prévention de la santé par le sport et le programme de recherche de portée nationale bénéficieront pour leur part de 0,38 million d'euros tandis que 1,46 million d'euros seront à nouveau consacrés aux actions déconcentrées de promotion des activités physiques et sportives (APS) et de suivi médical des sportifs. Les actions de prévention et de lutte contre les incivilités et la violence dans le sport bénéficieront pour leur part de 0,74 million d'euros, soit le même niveau qu'en 2018.

Près de la moitié des crédits de l'action n° 3 sont par ailleurs consacrés à la lutte contre le dopage et financent l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) , qui recevra en 2019 une subvention de 10,34 millions d'euros (dont 9,59 millions d'euros pour l'AFLD), le même niveau qu'en 2018, contre 8,5 millions d'euros en 2017 et 7,8 millions d'euros en 2016.

La contribution annuelle de la France au fonctionnement de l'Agence mondiale antidopage (AMA) est stable à 0,75 million d'euros en 2019 pour être en phase avec l'augmentation du budget de l'agence elle-même, alimenté par tous les États participants. La contribution de la France représente près de 3 % du budget voté par cette institution.

L'Agence française de lutte contre le dopage est aujourd'hui à la croisée des chemins puisqu'elle doit impérativement se doter d'un nouveau laboratoire afin de remplacer celui de Chatenay-Malabry qui ne pourra en aucun cas répondre aux besoins pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

Alors qu'un projet solide a été élaboré par l'Agence afin de créer un cluster à Saclay, on ne peut que regretter les atermoiements de l'État qui examine également la possibilité de localiser le laboratoire à Evry où il n'existe aucun écosystème scientifique. La lutte contre le dopage constitue un enjeu national et la localisation d'un équipement de cette importance ne doit pas dépendre des subventions que les collectivités territoriales sont prêtes à mobiliser mais davantage de l'excellence scientifique qui pourra profiter aux personnels du laboratoire.

Lors de son audition par votre rapporteur pour avis, Dominique Laurent, présidente de l'AFLD, a indiqué que l'AMA avait salué l'excellent niveau de l'Agence dans la détection des substances dopantes ce qui clôt le chapitre de la suspension de l'accréditation 6 ( * ) . Elle a observé que la décision d'implantation du nouveau laboratoire devait intervenir dans les meilleurs délais si l'on souhaitait qu'il soit opérationnel dès 2023 compte tenu des délais nécessaires pour les études (1 an et demi) et les travaux (1 an et demi également). L'accréditation du nouveau laboratoire 2023 pourra quant à elle nécessiter plusieurs mois. Ce laboratoire devra réaliser au moins autant de contrôles que les 8 000 tests prévus en quinze jours à Tokyo en 2020.

Il existe aujourd'hui une compétition internationale entre les laboratoires anti-dopage avec l'arrivée de nouveaux acteurs (Qatar, Kenya). Par ailleurs, il existe également une communauté de travail entre grands laboratoires européens (Lausanne, Gand) qui rend d'autant plus essentiel pour la France de maintenir son rang. La présidente de l'AFLD a également indiqué que ce nouveau laboratoire bénéficierait de la nouvelle gouvernance qui doit être mise en place d'ici 2021 afin de séparer l'autorité et le laboratoire. Ce dernier devra selon toute vraisemblance être adossé à une université ce qui devrait renforcer la recherche sur le dopage.

B. LA PROMOTION DES MÉTIERS SPORTIFS

L'action n° 4 consacrée à la « Promotion des métiers du sport » concourt à l'atteinte de la « promotion du sport pour le plus grand nombre » visée par l'action n° 1 en permettant la formation d'éducateurs pour encadrer la pratique sportive.

Les crédits de cette action qui étaient de 27,95 millions d'euros en 2017 et 28,14 millions d'euros en 2018 devraient s'établir à près de 30 millions d'euros en 2019.

Une part prépondérante de ces crédits sera consacrée au financement des trois écoles nationales - l'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) pour 7,62 millions d'euros, l'École nationale des sports de montagne (ENSM) pour 7,96 millions d'euros, l'École nationale de voile et des sports nautiques (ENVSN) pour 4,13 millions d'euros - et, à titre accessoire, l'INSEP (pour 0,25 million d'euros) à hauteur de 19,96 millions d'euros, soit un niveau légèrement inférieur à celui de 2018.

L'essentiel de ces crédits sert à financer la masse salariale à hauteur de 7,44 millions d'euros pour l'ENSM, 3,88 millions d'euros pour l'ENVSN et 7,45 millions d'euros pour l'IFCE. Cette subvention est en baisse en raison du schéma d'emplois appliqué à ces écoles (ENSM et ENVSN) et à une minoration de la subvention liée à la masse salariale de l'IFCE.

*

* *

En conclusion, les chantiers que devra conduire la nouvelle ministre en 2019 sont considérables . Votre rapporteur pour avis estime notamment indispensable de :

- lancer la montée en puissance de la SOLIDEO en préservant ses financements ;

- permettre la transition vers l'Agence nationale du sport sans négliger les engagements du CNDS qui doivent être honorés ;

- mettre en place un grand plan de rattrapage des équipements sportifs afin de permettre l'augmentation de la pratique du sport

Compte tenu de ces points de vigilance, votre rapporteur pour avis retient que les difficultés qui focalisent les mécontentements concernent tant le PLF 2019 que les incertitudes plus générales concernant l'avenir du ministère des sports (avenir des 1600 CTS). Il propose donc de donner un avis défavorable à l'adoption de ces crédits en réaffirmant la nécessité pour le Gouvernement de prendre la réelle mesure de l'effort à produire pour atteindre nos objectifs en 2024.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, votre rapporteur pour avis propose à la commission d'émettre un avis défavorable sur l'adoption des crédits du programme « Sport » de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

DEUXIÈME PARTIE - JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE

I. LA POURSUITE DU DÉVELOPPEMENT DU SERVICE CIVIQUE

A. UN EFFORT MAINTENU ET AMPLIFIÉ

1. Des crédits en augmentation

Les crédits destinés au service civique représentent près de 81 % du programme 163. Ceux-ci progressent, au sein du projet de loi de finances pour 2019, de 11 % pour atteindre 497 millions d'euros. Ils ont été multipliés par 4,4 depuis 2012 ; ils s'élevaient alors à 113 millions d'euros.

Évolution des crédits destinés au service civique (AE=CP)

(en millions d'euros)

Numéro de l'action

Crédits ouverts en LFI pour 2018

Crédits demandés pour 2019

Évolution
en %

04 - Développement du service civique

447,6

497

+ 11

Source : projet de performances pour 2019 et commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Depuis 2010, le service civique connaît une montée en charge continue, même si sa croissance est irrégulière selon les périodes. Alors que le nombre de volontaires a stagné entre 2012 et 2014, il a fortement augmenté entre 2015 et 2017. Depuis deux ans, sa croissance est plus faible. L'objectif de 350 000 volontaires du service civique par an (soit une classe d'âge), avancé sous la législature précédente, a été abandonné pour une cible plus modeste de 150 000 volontaires.

Le budget prévu pour 2019 permettra l'indemnisation de 140 000 jeunes, soit 4 000 de plus que l'exécution prévue pour 2018.

En 2017 (derniers chiffres disponibles), 79 000 volontaires sont entrés en mission, soit un accroissement de 25 % par rapport à l'année 2016, portant à plus de 123 000 le nombre de jeunes ayant réalisé une mission au cours de l'année.

2. Un profil des volontaires qui évolue peu

Depuis 2013, le profil des volontaires est sensiblement identique. En 2017, comme les années précédentes, les volontaires ont été majoritairement des femmes. L'âge moyen des volontaires est resté également stable, autour de 21 ans. 42,3 % des volontaires disposaient d'une formation de niveau Bac, soit une hausse de 2,5 points par rapport à l'année 2016. On observe ainsi que la part de jeunes affichant un niveau d'études supérieur au Bac fléchit légèrement, tandis que la part de jeunes qui disposent d'un niveau Bac augmente. Une majorité de volontaires se déclarent demandeurs d'emploi au moment de démarrer leur mission. Le nombre de volontaires qui se déclarent en situation de handicap progresse légèrement, mais ils ne représentaient qu'1,2 % des volontaires en 2017.

La durée moyenne des missions, comme les années précédentes, est de huit mois.

B. LES INCERTITUDES SUR LES CONSÉQUENCES DE LA CRÉATION DU SERVICE NATIONAL UNIVERSEL SUR LE SERVICE CIVIQUE

1. Les grandes lignes du service national universel

Promesse de campagne du candidat Macron, le service national universel (SNU) reste un projet controversé dont les modalités pratiques n'ont pas encore été arrêtées complètement et qui soulève de nombreuses interrogations, notamment au regard de son coût.

En avril dernier, le groupe de travail sur le service national universel a remis un rapport 7 ( * ) qui arrête les principes suivants.

Le service national universel s'organiserait en deux phases majeures :

- la phase I, obligatoire, interviendrait après la classe de la troisième, entre 15 et 18 ans et comprendrait un temps de cohésion (15 jours en hébergement, centrés sur les valeurs, les savoir-faire et les savoir-être) et un temps de projet collectif (15 jours également, mais sans hébergement). Concrètement ce sont 800 000 à 900 000 jeunes qui devraient être appelés chaque année pour réaliser leur service national universel ;

- la phase II, non obligatoire, reposerait sur l'engagement volontaire, pour une durée de trois à six mois, avant 25 ans. Deux types d'engagement sont envisagés : les engagements militaires ou dans la sphère de la sécurité publique qui seraient réservés aux nationaux ; les engagements civils, « qui s'inspireraient très largement de ceux proposés par le service civique aujourd'hui » . Quatre filières d'engagement sont envisagées : la diffusion de la culture patrimoniale et numérique (notamment dans une optique de solidarité intergénérationnelle, territoriale ou envers les plus défavorisés) ; l'environnement et le développement durable ; l'aide aux personnes ; le tutorat (y compris au service des jeunes accomplissant leur service national).

2. Une articulation avec le service civique à préciser

Le rapport précité indique que « les engagements civils s'opéreront, pour l'essentiel, en généralisant le modèle existant du service civique, par l'exercice de fonctions pour lesquelles idéalement plusieurs jeunes sont placés auprès d'un tuteur qui supervise l'accomplissement des tâches, et demeure, notamment, le garant du professionnalisme et de la compétence nécessaire dans leur exécution ».

Il apparaît donc que le service civique a vocation à être intégré dans le service national universel. Néanmoins, la durée retenue jusqu'à présent pour la phase « volontaire » du service national universel - trois à six mois - est plus courte que la durée actuelle moyenne du service civique - huit mois. Or, depuis la création de ce dernier, les associations, mais de manière générale toutes les institutions accueillant des volontaires, soulignent la nécessité d'une durée minimale afin que le temps passé à former le jeune et à l'intégrer dans la structure puisse in fine profiter au service d'accueil. Si les périodes d'engagement correspondent à la durée de formation des jeunes volontaires, l'attrait de ce dispositif pour les structures d'accueil risque de se réduire considérablement, entraînant une diminution rapide du nombre d'offres pour réaliser un volontariat.

Le Mouvement associatif l'a confirmé avec force lors de son audition : « L'inscription dans un temps long fait partie des fondamentaux qui font la réussite de l'engagement du service civique. Il n'est pas souhaitable d'imposer une limitation de durée qui reviendrait sur ce principe ». 8 ( * )

La réduction de la durée de l'engagement volontaire serait également préjudiciable pour les jeunes. En effet, au-delà de l'objectif d'engagement au service de la communauté défendu par le service civique, celui-ci constitue également une période d'orientation pour de nombreux jeunes et aide ces derniers à la fois à prendre conscience de leurs centres d'intérêt et de leurs capacités ainsi qu'à définir leur projet professionnel. Toutefois, le service civique ne peut jouer ce rôle que s'il s'étale sur une durée suffisamment longue.

Enfin, à l'heure actuelle, le nombre d'offres de service civique est insuffisant. Il ne faudrait pas que la moindre durée de l'engagement volontaire introduite par le service national universel soit une manière de gérer la pénurie des offres de service civique par rapport à la demande .

II. LA SIMPLE RECONDUCTION DES CRÉDITS EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DE LA VIE ASSOCIATIVE ET AUX ACTIONS EN FAVEUR DE LA JEUNESSE

A. UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES CRÉDITS

Outre ceux dédiés au service civique, le programme 163 regroupe les crédits de deux actions :

- l'action 1 « Développement de la vie associative » dotée de 45,5 millions d'euros en AE et CP dans le projet de loi de finances pour 2019 ;

- l'action 2 « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire » (71,8 millions d'euros en AE et CP prévus pour 2019).

Évolution des crédits de l'action 1 et de l'action 2 (AE=CP)

(en millions d'euros)

Numéro de l'action

Crédits ouverts en LFI pour 2018

Crédits demandés pour 2019

Évolution
en %

01 - Développement de la vie associative

46,5

45,5

- 2,15

02 - Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire

69,7

71,8

+ 3,01

Total des deux actions

116,2

117,3

+ 0,95

Source : projet annuel de performances pour 2019

Les crédits de ces deux actions pour 2019 augmentent légèrement (+ 0,95 %) par rapport aux crédits votés en 2018 pour atteindre 117,3 millions d'euros. Cette faible hausse cache une évolution contrastée, avec une baisse de - 2,15 % pour l'action 1 et une hausse de + 3,01 % pour l'action 2.

1. L'action 1 : L'ajustement des crédits du compte d'engagement citoyen pour tenir compte de leur consommation réelle

Par rapport au projet de loi de finances pour 2018, les crédits de l'action 1 pour 2019 sont reconduits à l'identique avec :

- 31,15 millions d'euros pour le fonds de développement de la vie associative qui participe au financement des plans de formation des associations et soutient désormais le fonctionnement des associations et les nouveaux projets (cf infra ) ;

- 1,87 million d'euros pour les centres de ressources et d'information des bénévoles ;

- 665 000 euros pour soutenir les fédérations nationales et régionales ;

- 260 000 euros destinés au fonctionnement des délégués départementaux à la vie associative.

En revanche, les crédits destinés à financer le compte d'engagement citoyen (CEC) diminuent fortement (- 48 %) .

Cette ligne de dépenses avait été créée l'année dernière et 5,8 millions d'euros y avaient été affectés. Toutefois, selon les informations obtenues par votre rapporteur pour avis, une partie des crédits ne sera pas consommée cette année et sera reportée sur 2019. Les crédits pour le compte d'engagement citoyen sont donc ajustés en conséquence pour 2019, ce qui explique leur diminution de 2,8 millions d'euros.

Le compte d'engagement citoyen

Créé par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, le compte d'engagement citoyen (CEC) vise à reconnaître et valoriser l'engagement à travers l'octroi d'heures de formation citoyenne ou professionnelle.

Ce nouveau droit à formation vaut quel que soit le statut de l'engagé : étudiant dès 16 ans, actif (salarié, agent public, indépendant, chômeur) ou retraité. Ce droit s'ajoute aux droits à formation acquis au titre de l'activité professionnelle, pour valoriser l'importance de l'engagement citoyen au service de la collectivité de certains citoyens particulièrement engagés. Des jours de congés pour l'exercice de ces activités peuvent aussi être octroyés si l'accord ou la convention d'entreprise de l'individu prévoit de tels droits.

Le périmètre des activités éligibles a été complété à plusieurs reprises. Elles sont actuellement au nombre de huit : les bénévoles associatifs, les services civiques, les maîtres d'apprentissage, les sapeurs-pompiers volontaires et certains réservistes opérationnels ou ceux de la réserve civique et de ses réserves thématiques.

Dans la limite d'un plafond de 60 heures cumulables au titre du compte d'engagement citoyen, 20 heures de formation peuvent être allouées aux individus impliqués dans l'une de ces formes d'engagement.

Les droits peuvent être utilisés pour compléter le financement d'une formation en lien avec le parcours professionnel (dont le permis de conduire), ou, pour les bénévoles, volontaires et sapeurs-pompiers volontaires pour financer des formations destinées à faciliter l'exercice de leur engagement. Le choix de la date de mobilisation de ses droits comme de leur objet appartient au bénéficiaire.

Les droits acquis au titre du CEC sont financés par les autorités publiques responsables des huit activités précitées, les communes pour la réserve communale, l'Agence nationale de santé publique pour la réserve sanitaire et l'Etat pour toutes les autres formes d'engagement éligibles. Ce dispositif a vocation à inciter de nouveaux citoyens à s'engager, à valoriser et à fidéliser ceux déjà investis .

Source : projet annuel de performances pour 2019

La stabilité des crédits de l'action 1 conduit aux remarques suivantes .

D'abord, cette stabilité correspond de facto à une diminution des crédits puisque l'inflation n'est pas prise en compte.

Ensuite, le « gonflement » des crédits du fonds de développement de la vie associative (FDVA) de 25 millions d'euros depuis 2018 ne doit pas faire illusion.

Le FDVA est le principal outil financier de la politique de l'Etat en matière de soutien au secteur associatif aux plans national et local.

Trois missions lui sont attribuées.

D'abord, il participe au financement des plans de formation que les associations conçoivent en fonction de leurs besoins, pour développer les compétences et encourager la prise de responsabilités des bénévoles dans la mise en oeuvre de leurs actions. Les actions de formation soutenues peuvent concerner le projet lui-même ou le fonctionnement de l'association (dimension juridique, comptable, gestion des ressources humaines, informatique, etc.).

8,2 millions d'euros sont consacrés à cette mission , ce qui est largement insuffisant comparés aux 15 millions de bénévoles ! Ces crédits n'ont pas été réévalués depuis 2001. En moyenne, 1 900 associations sont soutenues chaque année sur tout le territoire pour la formation de 180 000 bénévoles, soit 1,2 % des bénévoles. Ainsi, en 2017, seuls 28,5 % des demandes ont pu être satisfaites. Ce chiffre était tombé à 21,8 % en 2015. L'insuffisance du budget alloué aux formations conduit à un écrêtement systématique des demandes adressées au niveau national. Celui-ci tend à augmenter d'année en année et représente désormais 50 % du montant global des demandes au niveau national.

Le FDVA finance également des études, expérimentations nationales et projets innovants territoriaux. Toutefois, selon les informations obtenues par votre rapporteur pour avis auprès du Mouvement associatif, le budget contraint du FDVA ne permet pas de financer cette mission.

Enfin, depuis la loi de finances pour 2018, le FDVA s'est vu confier une troisième mission : la responsabilité d'attribuer aux associations sur les territoires les fonds anciennement versés au titre de la réserve parlementaire .

Le nouveau décret n° 2018-460 du 8 juin 2018 relatif au fonds pour le développement de la vie associative, qui prend en compte cette nouvelle mission, organise les modalités d'attribution de subventions aux associations de métropole, et à celles des collectivités régies par les articles 73, 74 et 76 de la Constitution. De la sorte, les petites associations de tous les territoires bénéficiant autrefois de la réserve parlementaire, sans condition d'agrément ou de secteur y compris sportif, peuvent effectuer des demandes de subventions au titre du FDVA aussi bien pour leur fonctionnement que pour leurs nouveaux projets, pour la consolidation du tissu associatif local, son développement et sa structuration.

Dans chaque département a été créé un collège consultatif présidé par le représentant de l'État. Y siègent des représentants de maires et des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) désignés par l'association des maires du département. Ce collège émet un avis sur les priorités et les propositions de financement (en tenant compte des priorités identifiées au niveau régional) et apporte un avis à la commission régionale consultative.

Les 25 millions d'euros attribués depuis 2018 au FDVA pour accomplir cette mission doivent néanmoins être comparés aux 52 millions d'euros qui bénéficiaient aux projets associatifs par le biais de la réserve parlementaire. Ils ne permettent donc pas de couvrir les besoins associatifs précédemment financés .

Les exemples suivants illustrent cette situation.

En région Auvergne-Rhône-Alpes, 2 806 dossiers de demandes de subvention ont été déposés en septembre pour un montant de 18,5 millions d'euros alors que l'enveloppe allouée à l'ensemble de ce territoire s'est élevée à 2,9 millions d'euros.

Dans le Val d'Oise, 248 dossiers ont été déposés. 43 ont été retenus pour un département qui compte plus d'un million et demi d'habitants.

Dans le Val de Marne, 340 402 euros ont été attribués en 2018 contre 2,9 millions d'euros par les parlementaires en 2016.

Dans l'Oise, 234 900 euros ont été attribués en 2018 contre plus d'un million d'euros par les parlementaires les années précédentes.

Votre rapporteur pour avis exhorte donc le gouvernement à augmenter les crédits à la disposition du FDVA à hauteur de la réserve parlementaire, soit 27 millions d'euros supplémentaires .

Par ailleurs, le FDVA pourrait disposer d'une manne financière non négligeable s'il pouvait être destinataire des dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations en déshérence.

En 2013, la Cour des comptes avait mis en évidence certaines pratiques d'établissements de crédit portant atteinte à la protection des épargnants en matière de gestion des comptes bancaires inactifs. Elle avait estimé à 1,2 milliard d'euros les encours et avoirs bancaires non réclamés.

La loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence est venue remédier à ces dysfonctionnements en ce qui concerne les personnes physiques. Or, il existe également un nombre important de comptes inactifs appartenant à des associations en déshérence dont les dépôts et avoirs mériteraient d'être récupérés par le milieu associatif .

Dans ce but, il est indispensable de distinguer les comptes inactifs des associations. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur pour avis vous propose un amendement visant à obliger les établissements de crédits à distinguer les comptes des personnes physiques des comptes des personnes morales et, parmi ces derniers, ceux des associations.

L'objectif, à l'issue de la prescription légale, serait de verser les sommes qui figurent sur les comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale destiné à financer le fonds de développement de la vie associative.

Malheureusement, un tel amendement est irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, car le fléchage de recettes vers un fonds est interprété comme une incitation à la dépense supplémentaire.

C'est la raison pour laquelle le II. du présent amendement propose que le gouvernement étudie cette question et remette à la représentation nationale un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative. Il s'agit de sensibiliser le gouvernement sur cette question afin qu'il prenne rapidement les mesures qui s'imposent.

2. L'action 2 : l'augmentation des crédits finançant les échanges internationaux des jeunes

Les crédits de l'action 2 sont également reconduits à l'identique, à l'exception de ceux finançant les échanges internationaux des jeunes.

Ainsi, les crédits de l'Office franco-allemand pour la Jeunesse (OFAJ) augmentent d'1,95 million d'euros à l'initiative des gouvernements français et allemand dans le cadre de la réforme du traité de l'Élysée. Ils atteindront 13,6 millions d'euros en 2019. Cette augmentation vise à accroitre la mobilité des jeunes élèves et des apprentis.

Pour rappel, l'OFAJ est un organisme bi-gouvernemental financé à parité par l'Etat allemand et l'Etat français. L'augmentation des contributions de la part d'une des parties prenantes implique donc une hausse identique de la participation de l'autre partenaire.

Par ailleurs, à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'Office franco-québécois pour la Jeunesse (OFQJ), sa dotation est augmentée de 150 000 euros. Pour 2019, la contribution de la France sera ainsi portée à 2,1 millions d'euros.

À l'instar de ce qui a été dit pour les crédits de l'action 1, la reconduction à l'identique des crédits de l'action 2 correspond de facto à une baisse si l'on prend en compte l'inflation. Ils se répartissent de la manière suivante :

- 6,3 millions d'euros pour l'information des jeunes à travers notamment le financement du centre d'information et de documentation jeunesse - (CDIJ) - ;

- 2,49 millions d'euros pour les loisirs éducatifs des jeunes, qui financent les « colos nouvelles générations » fondée sur les principes de mixité sociale, d'accessibilité des activités, de loisirs de qualité à des prix abordables ;

- 1,36 million pour le métiers de l'animation : 950 000 euros seront consacrés au dispositif « Sésame vers l'emploi pour le sport et l'animation dans les métiers de l'encadrement » afin d'accompagner vers un emploi d'animateur des jeunes âgés de 16 à 25 ans rencontrant des difficultés d'insertion sociale et/ou professionnelle et résidant dans un quartier prioritaire de la ville ou dans une zone de revitalisation rurale ; 410 840 euros serviront à financer l'organisation des examens et certifications des diplômes professionnels du champ de l'animation ;

- 44,3 millions d'euros pour soutenir les projets associatifs « Jeunesse Éducation Populaire » (JEP) : les subventions versées par l'intermédiaire du FONJEP (Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) sont les plus importantes (31,4 millions d'euros). Elles permettent d'asseoir des projets associatifs dans la durée, en facilitant la rétribution du personnel associatif qui remplit des fonctions de pilotage, d'animation ou de « tête de réseau associative ». La subvention FONJEP s'élève à 7 194 euros annuels pour trois ans. Les crédits FONJEP profitent à 2 900 associations pour 3 654 postes FOJEP. La plupart des subventions sont versées au niveau déconcentré (plus de 84 %) et bénéficient à des associations disposant en règle générale d'un seul salarié, parfois en temps partiel. 12,9 millions d'euros sont également accordés au niveau déconcentré aux associations agréées JEP par les préfets.

Les subventions versées par le FONJEP jouent un rôle déterminant dans la structuration du milieu associatif. Toutefois, elles sont largement insuffisantes pour couvrir l'ensemble des besoins.

III. UNE FRAGILISATION DURABLE DU SECTEUR ASSOCIATIF NON PRISE EN COMPTE PAR LE GOUVERNEMENT

A. UN MOUVEMENT ASSOCIATIF DURABLEMENT AFFAIBLI

1. La contraction de l'emploi associatif à la suite de la réforme des contrats aidés

En 2018, le gouvernement a réformé en profondeur le régime des contrats aidés.

D'une part, leur nombre a été fortement réduit : 200 0000 ont été votés en 2018 (dont 30 500 ont été réservés à l'Éducation nationale au titre de l'accompagnement des élèves en situation de handicap) et 100 000 9 ( * ) sont prévus pour 2019, alors qu'ils s'élevaient à 453 000 en 2016 et encore à 291 000 en 2017.

D'autre part, les contrats aidés ont été transformé en « parcours emplois compétences » (PEC) et recentrés exclusivement sur leur finalité d'insertion durable dans l'emploi pour les publics les plus en difficulté. Afin d'atteindre cet objectif, les obligations qualitatives des employeurs ont été accrues : introduction d'un entretien associant, aux côtés du prescripteur, l'employeur et le bénéficiaire, mise en oeuvre effective des obligations en matière d'engagements de formation et d'accompagnement par l'employeur.

Or, ces exigences induisent des coûts directs (formation) et indirects (encadrement) alors même que le dispositif introduit par le ministère du travail ne prévoit ni aide au tutorat, ni contribution à la formation pour les employeurs.

Au contraire, la prise en charge des PEC a été abaissée à 50 % du SMIC 10 ( * ) brut contre 75 % auparavant, avec des différences de prise en charge notables selon les régions. Ainsi, certains arrêtés préfectoraux ont imposé des taux de prise en charge plus restrictifs que la circulaire nationale : dans les régions Normandie et Bretagne, le taux s'élève à 35 % ; dans la région Grand Est et dans les Pays de la Loire, il est de 40 %.

Il en résulte qu'entre 2017 et 2018, le nombre de contrats aidés signés par les associations est passé de 83 661 à 32 773 tandis que 12 500 employeurs associatifs ont disparu dès 2017, en raison de la réduction brutale du nombre de contrats aidés décidée par le gouvernement.

Ainsi, les régies de quartier (7 000 emplois, 133 implantations) ont perdu 250 emplois. À Rouen, 70 personnes étaient employées. Seules 20 ont été maintenues dans leur emploi, mais la structure n'est plus viable.

Il est encore trop tôt pour disposer de statistiques précises sur les répercussions de la réforme des contrats aidés sur les associations et sur les secteurs particulièrement concernés par la réduction des contrats aidés. Toutefois, selon les représentants des associations et des collectivités territoriales entendus par votre rapporteur pour avis, les petites associations culturelles et sportives sont celles qui ont le plus souffert de la réforme . 20 % des clubs sportifs étaient menacés dans certaines régions en 2018.

La diminution des emplois associatifs va encore s'accentuer puisqu'en mai 2018, 92 000 salariés étaient encore bénéficiaires des anciens contrats aidés, lesquels ne seront pas renouvelés à échéance.

Les crédits affectés au financement des contrats aidés (en crédits de paiement) sont ainsi passés de 4,2 milliards d'euros en 2016 à 2,4 milliards en 2017, 1,4 milliard d'euros en 2018 et 600 millions d'euros en 2019. Cela constitue pour les associations, qui représentent plus du tiers du total des emplois aidés (38 %), une perte d'1,6 milliard d'euros de subventions indirectes.

2. L'impact négatif des réformes fiscales sur les ressources des associations

Les dispositions fiscales mises en oeuvre par la loi de finances pour 2018 ont eu un impact négatif important sur la générosité des contribuables en faveur des fondations reconnues d'utilité publique.

Ainsi, le remplacement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) a fait passer le nombre d'assujettis à cet impôt de 358 000 à 120 000 foyers (soit 66 % de foyers en moins), supprimant l'incitation qu'avaient de nombreux contribuables à faire preuve de générosité envers les fondations reconnues d'utilité publique.

Selon les chiffres de France Générosités, les premières estimations des fondations collectrices montrent une baisse moyenne d'au moins 50 % des dons provenant de l'IFI par rapport à 2017 . Cela représenterait pour l'année 2018 une perte de l'ordre de 130 à 150 millions d'euros.

Cette baisse de la collecte auprès des particuliers fortunés doit être replacée dans le contexte d'une baisse générale de la collecte grand public en raison de la réévaluation du taux de contribution sociale généralisée (CSG) - qui touche également les retraités, donateurs traditionnels - et les inquiétudes soulevées par la mise en oeuvre du prélèvement à la source à partir de 2019 11 ( * ) .

Ainsi, en 2018, la baisse des sommes collectées par l'Institut Pasteur attribuable aux réformes fiscales devrait s'élever à 3,5 millions d'euros sur douze mois, soit une diminution de 16 % sur un an (la collecte réalisée auprès des particuliers en 2017 avait permis de recueillir 21 millions d'euros au total).

Les réformes lancées en ce début de quinquennat ont donc grandement fragilisé le mouvement associatif. Or, si les discours du gouvernement insistent sur l'importance du secteur associatif, aucune mesure concrète n'a été prise jusqu'à présent pour le soutenir.

B. UNE RÉPONSE GOUVERNEMENTALE QUI TARDE À VENIR

1. Consultation ou temporisation ?

Il y a déjà un an, le Premier ministre, Édouard Philippe, entouré par le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot et le ministre chargé de la jeunesse et de la vie associative, Jean-Michel Blanquer, avait présenté le plan du Gouvernement en faveur du développement de la vie associative.

Cette intervention avait surtout vocation à rassurer les associations sur les intentions du Gouvernement . Peu de mesures concrètes avaient été annoncées, à l'exception de la mise en place d'une semaine nationale de l'engagement et du développement de plateformes numériques pour favoriser les nouveaux usages en matière d'engagement.

Le Premier ministre avait rappelé que plusieurs groupes de travail avaient été créés, l'un sur l'innovation sociale, l'autre sur la stratégie de développement des acteurs de l'économie sociale et solidaire, auxquels avait été ajouté un troisième chargé de réfléchir sur la manière d'inciter les citoyens à s'engager davantage dans le bénévolat.

Néanmoins, à la suite de cette communication, une réflexion a été lancée qui a rassemblé l'ensemble des organisations et têtes de réseaux représentatives de la vie associative en provenance de tous les domaines d'activité et d'intervention associatifs (le sport, l'environnement, le social et médico-social, la solidarité nationale et internationale, la culture et le patrimoine, les droits des femmes, la jeunesse et l'organisations de jeunes, l'éducation populaire, ou encore le tourisme social, etc.). Cette réflexion a également mobilisé plus de 15 représentants des administrations publiques en plus de la DJEPVA 12 ( * ) et des équipes du Haut-Commissaire à l'économie sociale et solidaire, venant des ministères de l'intérieur, de l'économie et des finances, de la justice, des affaires sociales, de la transition écologique et solidaire ou encore des affaires étrangères.

À l'issue de cette large consultation, un rapport a été remis le 8 juin dernier au Premier ministre après avoir fait l'objet d'un avis par le Haut conseil à la vie associative. Parmi les 59 propositions avancées, plusieurs visent la mise en place d'une « politique de développement, de soutien et de reconnaissance de la vie associative » à travers une meilleure structuration de la vie associative et la mise en place de parcours d'accompagnement adaptés aux besoins associatifs.

Or, cet immense travail n'a abouti à aucune mesure concrète de la part du gouvernement, créant une désillusion à la hauteur des espoirs qui avaient été mis dans ce document. Certes, le dernier remaniement ministériel a donné aux associations un interlocuteur dédié en la personne de Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse. Toutefois, la mission de ce dernier consiste principalement à la mise en oeuvre du service nationale universel.

Votre rapporteur pour avis regrette donc que le milieu associatif reste le parent pauvre de ce gouvernement. Cette attitude est d'autant plus paradoxale que ce même gouvernement ne cache pas sa volonté d'associer le secteur associatif à nombre de ses politiques : qu'il s'agisse de la mise en place du service national universel, de la lutte contre la pauvreté, ou encore du développement du sport pour tous, les associations sont censées être au coeur du dispositif gouvernemental.

En réalité, les objectifs ambitieux qui leur sont fixés ressemblent plus à des slogans et s'éloignent largement de la réalité qui se caractérise par une fragilisation durable du milieu associatif.

Comme l'ont fait remarquer les responsables du Haut conseil à la vie associative lors de leur audition par votre rapporteur : « on ne peut pas avoir une dynamique associative et une stagnation, voire une baisse de leurs ressources et de leurs emplois » .

2. L'absence de politique d'emploi au profit des projets associatifs

L'absence de réflexion sur une politique d'emploi au profit des projets associatifs illustre le relatif désintérêt du gouvernement vis-à-vis du secteur associatif.

Comme il a été rappelé précédemment, la réduction drastique du nombre des contrats aidés et leur transformation en parcours emplois compétences résulte du recentrage du dispositif réalisé en 2017 vers une logique d'insertion durable par l'emploi des publics les plus en difficulté à travers le tryptique « emploi - formation - accompagnement ». Il a mis un terme à une situation insatisfaisante dans laquelle les contrats aidés servaient à financer indirectement des emplois associatifs, sans pour autant correspondre aux besoins des associations ni répondre aux objectifs d'insertion qui auraient dû guider lesdits contrats.

Comme l'a reconnu la représentante du Mouvement associatif lors de son audition : « Si les associations peuvent participer au travers des actions qu'elles développent à la politique de l'emploi, leur rôle premier n'est pas d'accompagner des personnes très en difficulté sur le marché de l'emploi. C'était l'une des difficultés et l'un des biais de la politique des contrats aidés, qui est aujourd'hui encore renforcé dans la logique des Parcours emplois compétences. Ne sont ciblées que des personnes très éloignées de l'emploi. La correspondance entre le profil et le projet associatif n'entre pas en considération ».

En réalité, le secteur associatif a longtemps servi de variable d'ajustement pour les politiques de l'emploi : utilisé en période de crise pour amortir les effets sociaux, il est réduit au profit du secteur marchand à chaque amélioration de la situation du marché de l'emploi.

Votre rapporteur pour avis partage le souci du gouvernement de mettre un terme à ces pratiques, mais il regrette qu'aucune initiative parallèle ne soit prise afin d'introduire un soutien direct aux emplois associatifs au regard de leur utilité sociale, ce qui met en péril de nombreuses associations et entraîne de graves répercussions en matière de cohésion sociale et de réponse à des besoins non couverts par les pouvoirs publics.

Le document issu de la concertation menée dans le cadre du chantier « vie associative » précité dispose : « Les besoins associatifs en matière d'emploi doivent être pris en compte en tant que tels. Les associations ont besoin notamment d'emplois qualifiés pour les missions qu'elles mènent, pour assurer les fonctions d'encadrement ou encore d'accompagnement nécessaires . Dans certains secteurs (EHPAD, CHRS, centres d'accueil de migrants, protection de l'enfance etc.) qui deviennent de moins en moins attractifs compte tenu des conditions de travail particulièrement difficiles qu'ils offrent, induites par les diminutions de financements et de personnel, les associations ont également besoin de soutien et d'accompagnement spécifique pour améliorer la qualité de leurs emplois et permettre de relancer des dynamiques pérennes d'emploi. Les moyens de renforcer l'accès à la formation des salariés dans les petites et moyennes associations employeuses doivent aussi être explorés, pour permettre le renforcement des qualifications en interne. Enfin, s'adapter aux évolutions du monde du travail actuel, nécessite de porter une attention spécifique à la mobilité des salariés et aux parcours personnels de ces derniers».

Votre rapporteur pour avis exhorte donc le gouvernement à lancer une véritable politique de soutien à l'emploi associatif .

À l'occasion de leur audition, les représentants du Mouvement associatif ont défendu la création d'une ligne budgétaire spécifique dans le fonds d'inclusion dans l'emploi 13 ( * ) permettant le financement de 38 000 emplois utiles socialement afin de soutenir la professionnalisation des projets associatifs, tout particulièrement dans les petites et moyennes associations.

Les auteurs de cette proposition suggèrent d'assurer le financement de ces emplois par un prélèvement de 3 % des crédits consacrés au Plan d'investissement compétences.

Votre rapporteur pour avis rappelle que pour 2018, l'enveloppe prévue pour les « Parcours emplois compétences « (200 000 contrats) sera loin d'être dépensée compte tenu du succès mitigé rencontré par les PEC. Au 15 septembre 2018, moins de 87 000 PEC avaient été signés tous prescripteurs confondus en raison de leur manque d'attractivité financière et des obligations renforcées qui pèsent sur les employeurs.

Le manque d'attractivité financière des PC :
l'exemple du département de l'Hérault

Dans l'Hérault, la mise en oeuvre des PEC a été arrêtée au 1 er juin 2018 avec un objectif de 600 PEC pour les bénéficiaires du RSA sans emploi recrutés par les employeurs associatifs et les employeurs des établissements publics hospitaliers (y compris EHPAD). Le taux de prise en charge retenu par arrêté préfectoral a été de 50 % du Smic brut pour une durée hebdomadaire de travail de 20 heures.

Ainsi, pour un PEC de 20 heures hebdomadaires, l'aide totale est de 428,13 euros (50 % du SMIC brut). Le département ayant l'obligation de financer 88 % du RSA socle soit 485 euros, L'État finance 0 euro sur les PEC pour les bénéficiaires du RSA.

Par comparaison en 2017, pour un CUI-CAE de 20 heures hebdomadaires, l'aide totale était de 761,28 euros (90 % du SMIC brut) avec un financement de l'État à hauteur de 281,28 euros.

Au 30 septembre, seuls 70 PEC sur l'enveloppe des 600 ont été signés en l'absence d'attractivité financière.

Source : document fourni par l'Assemblée des départements de France

Le gouvernement en a tiré la leçon puisque seuls 100 000 PEC sont financés pour 2019. Il est regrettable qu'une partie des crédits ainsi économisés ne soient pas investis dans une politique ambitieuse en faveur de l'emploi associatif.

Si le gouvernement ne souhaite pas aggraver le déficit pour financer cette politique, votre rapporteur pour avis renvoie au rapport d'information 14 ( * ) qu'il a rédigé avec son collègue Alain Dufaut sur les contrats aidés dans lequel ils proposaient de financer ces emplois socialement utiles via le transfert d'une partie des exonérations générales des cotisations patronales et des dépenses fiscales qui relèvent de la politique des « services à la personne ».

En conclusion, votre rapporteur pour avis vous propose de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de la jeunesse et de la vie associative.

*

Votre commission de la culture, de l'éducation et de la communication a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission .

AMENDEMENT

présenté par

M. Jacques-Bernard MAGNER, au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication,

_________________

Article 34

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le II de l'article L. 312-19 du code monétaire et financier est complété par les mots : «, en distinguant les personnes physiques des personnes morales et, pour ces dernières, les différents statuts juridiques ».

II. - Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1 er juillet 2019, un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative.

OBJET

En 2013, la Cour des comptes avait mis en évidence certaines pratiques d'établissement de crédit portant atteinte à la protection des épargnants en matière de gestion des comptes bancaires inactifs. Elle avait estimé à 1,2 milliard d'euros les encours et avoirs bancaires non réclamés.

La loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence est venue remédier à ces dysfonctionnements en ce qui concerne les personnes physiques.

Le présent amendement propose d'adapter ce dispositif afin de permettre au fonds pour le développement de la vie associative de récupérer les dépôts et avoirs des associations en déshérence.

Dans ce but, il est indispensable de distinguer les comptes inactifs des associations. C'est la raison pour laquelle il est proposé d'obliger les établissements de crédits à distinguer les comptes des personnes physiques des comptes des personnes morales et, parmi ces derniers, ceux des associations.

L'objectif à rechercher, à l'issue de la prescription légale, serait de verser les sommes qui figurent sur les comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale destiné à financer le fonds de développement de la vie associative.

Malheureusement, un tel amendement serait irrecevable au titre de l'article 40 de la constitution, car le fléchage de recettes vers un fonds est interprété comme une incitation à la dépense supplémentaire.

C'est la raison pour laquelle le présent amendement propose que le gouvernement étudie cette question et remette à la représentation nationale un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative.

Il serait temps que l'argent des associations en déshérence profite aux associations, par le biais du fonds de développement de la vie associative !

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

par M. Jean-Jacques LOZACH,
rapporteur pour avis des crédits consacrés au sport

Mardi 2 octobre 2018

- Comité national olympique et sportif français : M. Jean-Luc ROUGÉ , Président de la Fédération Française de Judo et disciplines associées.

- Syndicat national de l'éducation physique : M. Benoît HUBERT , Secrétaire général, M. Polo LEMONNIER , Secrétaire national.

- Syndicat national des activités physiques et sportives : M. Tony MARTIN , Secrétaire général.

Mardi 16 octobre 2018

- Institut national des sports, de l'expertise et de la performance (INSEP) : M. Ghani YALOUZ , Directeur général, M. Babak AMIR-THAMASSEB , Chargé de mission auprès du directeur général, M. Denis AVDIBEGOVIC , Directeur général adjoint chargé de l'administration.

Mercredi 17 octobre 2018

- Comité national olympique et sportif français : M. Denis MASSEGLIA , Président.

M. Jean CASTEX , Délégué interministériel aux Jeux Olympiques et Paralympiques.

Mardi 23 octobre 2018

- Sport et citoyenneté : M. Julian JAPPERT , Directeur général.

Mercredi 24 octobre 2018

- Association nationale des élus en charge du sport : M. Marc SANCHEZ , Président.

Jeudi 25 octobre 2018

- Agence française de lutte contre le dopage : Mme Dominique LAURENT , Présidente, M. Mathieu TEORAN , Secrétaire général, Mme Marilyn HESRY , Secrétaire générale adjointe.

Mercredi 31 octobre 2018

- Centre national pour le développement du sport : Mme Armelle DAAM , Directrice générale, M. Jérôme RODRIGUEZ , Directeur financier et chef du département comptable.

Jeudi 8 novembre 2018

- SPORSORA : M. Olivier DULAC , Président, M. Didier POULMAIRE , Administrateur délégué aux relations institutionnelles, Mme Magali TEZENAS DU MONTCEL , Déléguée générale.

par M. Jacques-Bernard MAGNER,
rapporteur pour avis des crédits consacrés à la vie associative

Mardi 2 octobre 2018

- Pôle Emploi : M. Michaël OHIER , Directeur général adjoint.

- Union Nationale des Missions Locales : M. Serge KROICHVILI , Délégué général.

- Haut conseil à la vie associative : Mme Chantal BRUNEAU , secrétaire générale.

Mardi 16 octobre 2018

- Association des maires de France : Mme Marie-Claude JARROT , maire de Montceau-les-Mines.

- Ministère de l'Education nationale - Direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative : M. Jean-Benoît DUJOL , Directeur, Mme Évelyne HOUDOIN , Cheffe de la division des ressources humaines, des finances et de la logistique, M. Alexis PITON , Adjoint à la Cheffe de la division des ressources humaines, des finances et de la logistique.

Mardi 23 octobre 2018

- M. Camille LANET , Secrétaire général, administrateur civil hors classe, M. Guy LAVOCAT , Consultant, Mme Juliette MEADEL , Avocate référendaire à la cour des comptes, ancienne secrétaire d'Etat.

- Conseil social du mouvement sportif (CoSMos) : M. Philippe DIALLO , Président, Mme Gladys BEZIER , Trésorière.

Jeudi 25 octobre 2018

- Mouvement associatif : Mme Lucie SUCHET , Responsable plaidoyer ; Secours populaire français : M. Mathieu HUMBERT , Directeur des Relations et Ressources institutionnelles ; France bénévolat : M. Jean-Philippe BRUN , Trésorier national ; Comité national de liaison des régies de quartier (CNLRQ) : M. Jamel ARFI , Directeur de la Régie de Quartier de Trélazé et administrateur du CNLRQ.

- Institut Pasteur : M. Jean-François CHAMBON , Directeur de la communication et du mécénat, M. David ITIER , Coordinateur des affaires européennes.

- Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES) : M. Sébastien DARRIGRAND , Délégué général, M. Serge GUYOT , Responsable des relations sociales.

- UnisCité : Mme Marie TRELLU-KANE , Présidente fondatrice.

Mercredi 7 novembre 2018

- Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle : M. Yann DEBOS , Adjoint à la sous directrice des parcours d'accès à l'emploi, M. Laurent SUSTER , Chef de la mission insertion professionnelle.

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 21 NOVEMBRE 2018

___________

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Notre ordre du jour appelle la présentation de nos deux rapporteurs pour avis des crédits 2019 de la mission « sport, jeunesse et vie associative ».

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » . - Le ministère des sports est probablement celui qui a connu le plus de bouleversements depuis deux ans. Cette mutation est d'autant plus profonde qu'elle est soudaine et que ses conséquences restent encore largement méconnues ou mal identifiées. Il me semble donc indispensable de remettre les différents aspects de ces changements en perspective, pour en apprécier l'importance et mieux évaluer leur pertinence.

Nous pensions l'année dernière avoir assisté à une transformation majeure avec la redéfinition des missions et des moyens respectifs du Centre national pour le développement du sport (CNDS) et du budget du sport. Le CNDS avait vu ses recettes fiscales divisées par deux à 133,4 millions d'euros tandis que les crédits du programme 219 augmentaient fortement à 348,23 millions d'euros en crédits de paiement au profit des dépenses d'intervention. Cette hausse avait bénéficié essentiellement aux dépenses de l'action n° 1 de « promotion du sport pour le plus grand nombre » et de l'action n° 2 de « développement du sport de haut niveau ».

Face à notre inquiétude concernant les engagements du CNDS, une enveloppe supplémentaire avait été prévue dans le Projet de loi de finances rectificative (PLFR), ce qui avait permis de stabiliser les crédits du sport. Pour autant, je m'étais interrogé sur l'avenir du CNDS et du financement des projets engagés en 2019 et 2020. Une rebudgétisation totale du CNDS et un changement de nom étaient évoqués. Si je reviens sur ce débat de l'année dernière, c'est que les changements annoncés cette année sont encore plus considérables que ceux initiés par le Projet de loi de finances (PLF) 2018. C'est l'organisation même de la politique du sport et le rôle de ses acteurs respectifs qui vont être profondément redéfinis suite à la consultation menée depuis janvier 2018 sur la rénovation du modèle sportif français. Différentes réflexions ont, par ailleurs, été conduites ces derniers mois, je pense notamment au groupe de travail de Claude Onesta, ancien sélectionneur et entraîneur de l'équipe de France de handball, « Performance 2024 ».

L'annonce de la suppression du CNDS, ou plutôt de son intégration dans la future Agence nationale du sport qui sera créée au premier semestre 2019, constitue le fait majeur de ce débat budgétaire. Cette agence doit fonctionner sur un mode quadripartite associant l'État, le mouvement sportif, les collectivités territoriales et le monde économique.

Je regrette que les commissions en charge du sport des deux assemblées n'aient pas été véritablement associées à cette réflexion alors même que nous sommes membres invités du conseil d'administration du CNDS avec voix consultative. Nous aurions pu poser des questions sur le fonctionnement opérationnel de la nouvelle agence qui reste très peu précis à ce stade. Je pense notamment au fonctionnement des commissions régionales de financement et à la façon dont les collectivités territoriales et les entreprises seront associées, mais aussi à l'articulation entre l'agence et l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP) qui ne sont pas clairs.

Je vous rappelle que les missions confiées à cette agence seront vastes puisqu'il lui reviendra d'assurer une cohérence stratégique entre les niveaux nationaux et locaux ; d'améliorer l'évaluation des performances des fédérations dans la détection et la formation des athlètes à fort potentiel ; de mobiliser des professionnels de soutien de très haut niveau ; de rattraper notre retard en matière de veille, de recherche et d'innovation ; d'attirer les meilleurs entraîneurs alors que cinquante d'entre eux travaillent désormais auprès d'équipes étrangères et de mobiliser les startups du monde du sport.

La création de cette agence, qui ne sera effective qu'en mars 2019, a suscité de nombreuses interrogations et inquiétudes, notamment de la part des fédérations.

Ces inquiétudes n'ont pas été apaisées par l'annonce du Gouvernement selon laquelle l'État ne rémunérera plus directement quelques 1 600 conseillers techniques sportifs (CTS). Même si cette évolution n'est pas prévue dans le présent PLF, la réaction a été vive dans le mouvement sportif comme en témoigne la lettre ouverte aux élus signée par près de 400 sportifs de haut niveau. La mobilisation a été d'autant plus forte que la réduction drastique des contrats aidés et la suppression de nombreux emplois associatifs a aussi fragilisé et va encore plus fragiliser dans l'avenir notre maillage territorial des clubs.

L'absence de moyens nouveaux suffisants pour préparer les sportifs de haut niveau pour 2024 a aussi créé un doute sur les ambitions du Gouvernement. Même le Président du Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris (COJOP), Tony Estanguet, malgré son devoir de réserve, a fait part de ses préoccupations, rejoignant celles du mouvement sportif.

Pour autant, nous avons bien conscience de la nécessité d'actualiser, de moderniser le modèle sportif français, en intégrant le phénomène de mondialisation, l'hypermédiatisation, la diplomatie sportive. Il est urgent d'avancer afin de répondre à l'explosion du sport-business dans certaines disciplines, à la montée en puissance des collectivités territoriales, à la nécessité de densifier le sport-entreprise, en associant le monde économique, à la responsabilisation attendue du mouvement sportif, à la mise en oeuvre d'une stratégie en matière de sport-santé et aux opportunités offertes par les évolutions technologiques impactant tant l'activité physique du quotidien que le sport de haut niveau.

Plus généralement, le sport doit contribuer à l'activité économique, à l'emploi et à une société plus inclusive ; ce qui implique de moderniser la mission de service public déléguée par l'État. Dans le nouveau schéma d'organisation il est prévu que les services du ministère recentrent leur action sur les missions de stratégie, de régulation, de réglementation et de contrôle, notamment éthique. La réussite de cette mutation se mesurera à l'aune des résultats des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Nous devons être à la hauteur de l'enjeu tant pour l'organisation que pour le nombre de médailles. Nous avons une double obligation de résultat.

Avec la tenue des Jeux olympiques et paralympiques à Paris, l'occasion est belle de s'atteler à optimiser la haute performance du sport français au XXI e siècle. Depuis les Jeux olympiques de Séoul en 1988, la France s'est toujours classée parmi les dix nations ayant obtenu le plus grand nombre de médailles, oscillant entre une cinquième place en 1996 et une dixième en 2008.

Mais depuis les Jeux olympiques d'Atlanta de 1996, elle ne parvient pas à faire partie du « Top 5 » ; son ambition à chaque édition. Et elle ne vise jamais le « Top 3 », qui correspondrait pour 2024 à l'objectif de quatre-vingt médailles, exprimé par Laura Flessel, l'ex-ministre des sports, et confirmé le vendredi 16 novembre par Roxana Maracineanu, l'actuelle ministre.

J'avais proposé l'année dernière au Gouvernement de mettre en chantier rapidement une loi de programmation budgétaire pour préparer les Jeux olympiques et paralympiques au cours de la période 2019-2024, ainsi que la Coupe du monde de rugby de 2023. Faute de pouvoir disposer de cet outil qui sanctuariserait les moyens nécessaires à l'organisation de ces grands événements, le risque est grand que la baisse des crédits du programme 219, après des ajustements, soit perçue comme un transfert de crédits vers le programme 350 ; ce qui pourrait nuire à ce grand événement populaire que doivent être les Jeux olympiques et paralympiques.

Si ce sentiment est en train de devenir quelque peu réalité et que ce budget a été décrié, c'est aussi parce que le Gouvernement n'a pas pris la précaution d'isoler les crédits de la société de livraison des équipements olympiques (SOLIDEO) du reste des crédits du ministère du sport comme l'aurait souhaité également le délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques, Jean Castex.

Du coup, non seulement les crédits du ministère apparaissent en baisse à 319 millions d'euros en 2019 contre 347 millions d'euros en 2018 mais, surtout, les crédits de l'action n° 1 « promotion du sport pour le plus grand nombre » chutent de 40 millions d'euros - passant de 89 millions d'euros en 2018 à 49,4 millions d'euros en 2019 - tandis que les crédits consacrés à la SOLIDEO dans le programme 350 augmentent de plus de 17 millions d'euros.

Permettez-moi à cet égard de rétablir la vérité des chiffres pour que nous puissions porter un regard objectif sur ce budget très médiatisé. À structure constante, c'est-à-dire avant transfert de crédits à la nouvelle agence du sport, le montant du programme 219, en retrait par rapport à 2018, s'explique à la fois par une baisse de 39 millions des crédits de l'action n° 1 du fait de l'évolution tendancielle des compensations auprès de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) des exonérations de charges sociales sur la rémunération des arbitres et juges sportifs. Ce montant s'explique également par des moyens nouveaux, à hauteur de 40 millions d'euros, prévus pour la nouvelle agence du sport, par la remise à niveau des dotations consacrées aux travaux d'investissement et de rénovation de la partie Sud de l'INSEP, soit une baisse de 2,33 millions d'euros en crédits de paiement, - la réalisation des travaux programmés les plus importants impliquant une baisse de 1,43 million d'euros en crédits de paiement -, et par l'ajustement aux besoins réels et à une programmation pluriannuelle des principaux dispositifs opérationnels transférés au programme 219 en 2018. Ainsi, les moyens dédiés aux grands événements sportifs internationaux (GESI) baissent de 16 millions d'euros en crédits de paiement, alors que la France doit accueillir la coupe de monde de football féminin en 2019, et ceux consacrés au soutien aux équipements structurants nationaux baissent de 6,74 millions d'euros en crédits de paiement. Enfin, d'autres dispositifs font également l'objet d'ajustements comme la prise en charge des cotisations de retraite des sportifs de hauts niveau - baisse de 1,2 million d'euros en crédits de paiement - ainsi que les aides personnalisées versées aux sportifs de haut niveau, soit une baisse de 1,27 million d'euros en crédits de paiement.

Compte tenu de ces ajustements, la ministre des sports évoque un budget « préservé » et elle revendique une « démarche de budgétisation sincère visant à mieux mettre en adéquation les moyens et les besoins ».

Je retiens pour ma part deux évolutions significatives : d'une part, la nouvelle agence du sport bénéficiera en 2019 d'un budget évalué à près de 350 millions d'euros, au lieu des 400 millions euros arrêtés par la concertation, qui intégrera les subventions accordées par le ministère des sports au Comité national olympique et sportif français (CNOSF), et au Comité paralympique et sportif français (CPSF). Près de 70 % des moyens d'intervention de cette agence seront dédiés au développement des pratiques. L'enveloppe destinée à la haute performance, évaluée à 90 millions pour 2019, sera quant à elle en hausse de plus de 40 % par rapport à 2018, année pré-olympique. D'autre part, un exercice d'optimisation a été mené lors de la préparation du PLF 2019, afin de dégager des moyens nouveaux en faveur de la future agence du sport. Le sport de haut niveau et la haute performance bénéficieront ainsi de 25 millions d'euros et le développement des pratiques, de 15 millions d'euros. Pour accompagner le développement des pratiques, la ministre des sports a fait adopter, lors du débat à l'Assemblée nationale, un amendement gouvernemental augmentant de 15 millions d'euros le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite taxe Buffet. Ces 15 millions supplémentaires seront affectés aux mesures en faveur de la lutte contre les inégalités d'accès à la pratique sportive ainsi qu'au programme « savoir nager ». Au total, les mesures nouvelles qui accompagnent la création de la future agence représentent donc 55 millions d'euros.

Ces moyens ne sont pas suffisants, si nous souhaitons véritablement donner une nouvelle impulsion au sport dans notre pays. Mais ce n'est pas parce que le « grand bond en avant » n'est pas au rendez-vous que nous pourrions pour autant évoquer un recul.

J'observe que le Gouvernement a souhaité commencer par réformer l'organisation du sport français. Je souhaite qu'il s'attelle demain aux moyens afin de ne pas faire l'impasse sur les Jeux olympiques et paralympiques d'été de 2020 et les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2022, sans oublier les autres rendez-vous internationaux avant 2024.

Permettez-moi maintenant d'évoquer deux institutions auxquelles je reste attaché, l'INSEP et l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).

Les moyens de l'INSEP baissent de 6,5 % à 37,3 millions d'euros. Cette baisse ne concerne pas le fonctionnement de l'établissement mais les investissements qui diminuent de 1,4 million d'euros compte tenu de l'achèvement du programme de rénovation.

J'avais indiqué l'année dernière que l'INSEP avait identifié deux types de besoins nouveaux. Le directeur général de l'établissement souhaitait internaliser la restauration qui n'était plus adaptée aux athlètes de haut niveau et il souhaitait pouvoir disposer d'un mur d'escalade, d'un dojo pour le karaté et d'une grande salle multisport pour le handball et le volley-ball. Ces trois équipements nécessiteraient à eux-seuls une enveloppe de 10 millions d'euros. Or ces projets d'investissement ne semblent pas avoir progressé, ce qui est contradictoire avec l'objectif revendiqué d'augmentation du nombre des médailles lors des Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Je remarque, par ailleurs, que la gouvernance de l'INSEP est aujourd'hui fragilisée et que sa place dans le nouveau schéma d'organisation de la politique du sport de haut niveau doit être précisée.

Un mot sur les centres de ressources, d'expertise et de performance sportives (CREPS) auxquels nous restons attentifs. La subvention correspondant à la rémunération du personnel baisse à 49,33 millions d'euros du fait de la poursuite du transfert d'une partie du personnel de service aux régions. Mais la subvention de fonctionnement, hors personnel, augmente à 7,23 millions d'euros.

Concernant la lutte contre le dopage, vous avez accepté madame la présidente que nous organisions au premier trimestre 2019 une table-ronde, afin de faire le point sur ce sujet fondamental pour l'éthique du sport et la santé des sportifs. Ce sera aussi l'occasion de faire le bilan des suites du rapport de la commission d'enquête du Sénat de 2013.

L'Agence française de lutte contre le dopage est aujourd'hui à la croisée des chemins puisqu'elle doit impérativement se doter d'un nouveau laboratoire. Je dois dire que je suis très étonné des atermoiements de l'État qui, pour de mauvaises raisons, tarde à valider le projet élaboré par l'AFLD de création d'un cluster scientifique sur le plateau de Saclay. L'alternative, poussée par certains, d'une localisation à Évry ne présente aucun des avantages de Saclay en termes scientifiques. Je souhaite que ce dossier aboutisse dès 2019 afin de ne plus perdre un temps précieux. Il est impératif que le savoir-faire français en matière de lutte contre le dopage soit à nouveau reconnu au niveau mondial. Les moyens de l'AFLD sont, pour leur part reconduits, en 2019.

En conclusion, madame la présidente, je crois pouvoir dire que les chantiers que devra conduire la nouvelle ministre sont considérables. J'en citerai trois en particulier : la montée en puissance de la SOLIDEO doit être organisée et ses financements préservés ; la transition vers l'Agence nationale du sport ne doit pas négliger les engagements du CNDS qui doivent être honorés ; enfin, un grand plan de rattrapage des équipements sportifs doit impérativement être lancé comme le rappelle l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES). Nous équipements locaux ont vieilli et ils ne permettront pas d'augmenter la pratique du sport comme le souhaite, à juste titre, la ministre.

Compte tenu de ces points de vigilance, je retiens que les difficultés qui focalisent les mécontentements concernent à la fois le PLF 2019 et les incertitudes plus générales relatives notamment à l'avenir du ministère des sports et de ses 1 600 CTS.

Le 13 septembre 2017, à la réunion du (C.I.O.) de Lima, la France obtenait l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, soulevant un grand enthousiasme dans le pays. La préparation de ces jeux nécessite de construire d'ici 2024 un « héritage olympique », ce qui fait aujourd'hui consensus. La préparation des jeux s'accompagne également d'un objectif d'accroissement de trois millions du nombre de pratiquants sportifs initialement porté par Laura Flessel, puis confirmé par Roxana Maracineanu.

Pour atteindre ces objectifs, des moyens financiers et humains doivent être à la hauteur des enjeux. Mais après un budget des sports pour 2018 en baisse, le Gouvernement nous propose à nouveau un budget en diminution. J'ajoute que la création de la future Agence nationale du sport suscite aujourd'hui peut-être plus de craintes que d'espoirs, certains experts mettant en évidence le risque de privatisation de la politique en faveur du sport et le fait que l'État pourrait renoncer à exercer une mission essentielle qui lui incombe. Sans reprendre nécessairement cette analyse à mon compte, je considère que les incertitudes qui demeurent sont incompatibles avec le droit d'information du Parlement.

Je vous propose donc de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits, en réaffirmant la nécessité pour le Gouvernement de prendre la réelle mesure de l'effort à produire pour atteindre nos objectifs pour 2024.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis des crédits de la jeunesse et de la vie associative. - Deux éléments caractérisent les crédits consacrés au programme 163 « jeunesse et vie associative » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019 : la poursuite de l'effort en matière de service civique et la reconduction des crédits en faveur des actions 1 et 2.

Je commencerai par l'aspect le plus positif, à savoir la poursuite du développement du service civique. 50 millions d'euros supplémentaires sont accordés dans le projet de loi de finances pour 2019, ce qui devrait permettre de financer le service civique de 140 000 volontaires. L'objectif affiché du gouvernement est d'atteindre 150 000 « services civiques », ce qui correspond à une dépense annuelle de 530 millions d'euros. En revanche, le gouvernement poursuit sa fausse bonne idée du service national universel (SNU). À sa décharge, il peut difficilement faire autrement puisque que c'était une promesse de campagne du président et que personne n'a encore réussi à le convaincre que le coût de ce dispositif était disproportionné par rapport aux effets attendus! Comme nous entendons dans deux semaines le général Ménaouine sur ce sujet, je ne vais pas en parler longtemps. Je vous rappelle juste que le SNU devrait comporter deux phases : la phase I, obligatoire, interviendrait après la classe de la troisième, entre 15 et 18 ans et comprendrait un temps de cohésion - 15 jours en hébergement, centrés sur les valeurs, les savoir-faire et les savoir-être - et un temps de projet collectif - 15 jours également, mais sans hébergement -, et la phase II, non obligatoire, reposerait sur l'engagement volontaire, pour une durée de trois à six mois, avant 25 ans.

La seconde caractéristique de ce budget est la stricte reconduction des crédits en faveur de la vie associative et de la jeunesse portées par les actions 1 et 2 du programme 163, à l'exception de l'augmentation de deux millions d'euros des crédits accordés à l'Office franco-allemand pour la jeunesse et de la diminution de 2,8 millions d'euros des crédits finançant le compte d'engagement citoyen, afin d'ajuster la dotation à la consommation réelle de crédits.

Cette stagnation des crédits correspond de facto à une baisse si on tient compte de l'inflation. Certes, elle n'est pas nouvelle : ainsi, les crédits du fonds de développement pour la vie associative (FDVA) destinés à former les bénévoles n'ont pas été réévalués depuis 2001 ! Moins de 29 % des demandes de formation sont satisfaites, et ce pour seulement la moitié du montant des demandes, permettant la formation de 1,2 % des bénévoles uniquement ! Par rapport aux législatures précédentes, cette baisse des crédits a été accentuée par la suppression de la réserve parlementaire intervenue l'année dernière, soit 52 millions d'euros en moins pour les associations, qui n'a été compensée que partiellement à travers l'octroi de 25 millions d'euros au FDVA. Les exemples suivants illustrent le manque à gagner pour le monde associatif.

Dans le Val d'Oise, département qui compte plus d'un million et demi d'habitants, sur 248 dossiers de demandes de subvention déposés, 43 ont été retenus. Dans le Val de Marne, 340 402 euros ont été attribués en 2018, contre 2,9 millions d'euros par les parlementaires en 2016. Dans l'Oise enfin, 234 900 euros ont été attribués en 2018, contre plus d'un million d'euros par les parlementaires les années précédentes.

Je regrette donc que le gouvernement n'ait pas augmenté cette année la contribution au FDVA. À défaut de pouvoir profiter de crédits budgétaires supplémentaires, le FDVA pourrait néanmoins voir son budget augmenter s'il pouvait bénéficier des fonds et avoirs issus des comptes inactifs des associations en déshérence, estimés à 80 millions d'euros. Je vous proposerai donc un amendement qui reprend une disposition qui avait été adoptée par le Parlement à l'occasion de l'examen du projet de loi « égalité et citoyenneté » mais qui avait été malheureusement sanctionnée par le conseil constitutionnel pour des raisons de procédure. Elle vise à obliger les établissements de crédits à distinguer les comptes des personnes physiques des comptes des personnes morales et, parmi ces derniers, ceux des associations. L'objectif, à l'issue de la prescription légale qui est de trente ans, est de verser les sommes qui figurent sur les comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale destiné à financer le fonds de développement de la vie associative. Malheureusement, proposer la création de ce compte d'affectation spéciale est irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, car le fléchage de recettes vers un fonds est interprété comme une incitation à la dépense supplémentaire. C'est la raison pour laquelle la seconde partie de mon amendement demande au gouvernement d'étudier cette question et de remettre à la représentation nationale un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative. Il s'agit de sensibiliser le gouvernement à cette question afin qu'il prenne rapidement les mesures qui s'imposent. D'ailleurs, la Secrétaire d'État ne semble guère hostile à l'examen de cette proposition.

La politique du gouvernement en direction de la vie associative et de la jeunesse ne se réduit pas aux crédits du programme 163. Comme aime le faire remarquer chaque gouvernement, près de 90 milliards d'euros sont consacrés à cette politique, notamment si on inclut les dépenses de l'Éducation nationale ! Plus sérieusement, les dépenses fiscales, à travers les réductions d'impôt accordées sur les dons aux organismes à but non lucratif, représentent plus de 2,4 milliards d'euros. De même, la transformation du crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS) en baisse des cotisations devrait représenter une économie de 900 millions d'euros pour les associations au volume d'emplois important.

Toutefois, ces avantages fiscaux et sociaux doivent être mis en regard de la forte baisse des crédits finançant les contrats aidés : entre 2016 et 2019, ils seront passés en crédits de paiement de 4,2 milliards à 600 millions d'euros. Cela constitue pour les associations, qui emploient 38 % des emplois aidés, une perte d'1,6 milliard d'euros de subventions indirectes !

Certes, la politique de l'emploi n'a pas à financer les missions d'intérêt général. Mais, et c'était l'une des conclusions à laquelle Alain Dufaut et moi-même étions parvenus dans notre rapport d'information sur les contrats aidés, il est regrettable qu'aucune initiative ne soit prise afin d'introduire un soutien direct aux emplois associatifs au regard de leur utilité sociale, ce qui met en péril de nombreuses associations, notamment dans le domaine du sport et de la culture, et entraîne de graves répercussions en matière de cohésion sociale et de réponse à des besoins non couverts par les pouvoirs publics.

Plusieurs pistes sont envisageables : créer un fonds qui s'inspirerait du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) et qui permettrait de financer du personnel associatif auprès des associations ou encore créer une ligne budgétaire spécifique dans le fonds d'inclusion dans l'emploi permettant le financement de 38 000 emplois utiles socialement afin de soutenir la professionnalisation des projets associatifs, tout particulièrement dans les petites et moyennes associations.

Si le Gouvernement ne souhaite pas aggraver le déficit pour financer cette politique, nous avions proposé, avec notre collègue Alain Dufaut, de financer ces emplois socialement utiles via un transfert d'une partie des exonérations générales des cotisations patronales et des dépenses fiscales qui relèvent de la politique des « services à la personne ».

Je rappelle que la fragilisation du monde associatif par la réforme des contrats aidés est accentuée par l'impact négatif des dispositions fiscales mises en oeuvre par la loi de finances pour 2018 que le rapport sur le mécénat culturel présenté par notre collègue Alain Schmitz avait déjà soulevé. Ainsi, le remplacement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) se traduit par une baisse moyenne d'au moins 50 % des dons par rapport à 2017. Cela représenterait pour l'année 2018 une perte de l'ordre de 130 à 150 millions d'euros.

Cette baisse de la collecte auprès des particuliers fortunés doit être replacée dans le contexte d'une baisse générale de la collecte grand public en raison de la réévaluation du taux de contribution sociale généralisée (CSG) - qui touche également les retraités, donateurs traditionnels - et les inquiétudes soulevées par la mise en oeuvre du prélèvement à la source à partir de 2019. Pourtant, qu'il s'agisse de la mise en place du service national universel, de la lutte contre la pauvreté, ou encore du développement du sport pour tous pour ne prendre que ces trois exemples, les associations sont censées être au coeur du dispositif gouvernemental. On demande beaucoup au secteur associatif qui reçoit peu en échange.

Il est donc urgent que le gouvernement donne un signal positif en direction des associations et les soutienne dans le financement des missions d'intérêt général qu'elles remplissent. Pour ces raisons, et en dépit d'une hausse des crédits du programme 163 liée toutefois essentiellement à la poursuite de la politique initiée sous le quinquennat précédent en matière de service civique, je vous propose de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de la jeunesse et de la vie associative.

M. Michel Savin. - Je partage en totalité l'avis de nos rapporteurs sur le budget. Alors que la France accueillera, dans six, ans les Jeux olympiques et paralympiques, ce budget, pour la deuxième année consécutive, est en baisse. Dans le même temps, une nouvelle gouvernance a été pensée, avec notamment la création d'une agence nationale. La direction prise par le Gouvernement manque de clarté. Le désengagement de l'État est dramatique ! L'État appelle au sursaut du milieu économique, mais oublie que celui-ci est déjà appelé à soutenir les Jeux olympiques et paralympiques. Aussi, je souhaite présenter des propositions que nous ferons sur le financement du sport dans ce budget. Nos amendements portent, d'une part, sur le déplafonnement de la taxe Buffet qui visait initialement à faire financer le sport amateur par le sport professionnel. Tel n'est plus le cas aujourd'hui, et nous souhaitons rendre à cette taxe son objectif initial.

Pour renforcer le mécénat dans le sport, auquel il ne contribue qu'à hauteur de 2 %, nous proposons de simplifier les dispositifs de soutien au sport adapté et au handisport. Après la loi dite « loi Braillard », nous souhaitons étendre le pacte de performance à l'accompagnement des sportifs de haut niveau, inciter le mécénat à soutenir le sport féminin et ouvrir le 1 % artistique aux collectivités pour le financement de leur équipement sportif. Enfin, nous souhaitons la suppression du prélèvement additionnel, créé pour le financement des stades de l'Euro de 2016, ainsi que la candidature de Paris pour 2024 ; le fruit de cette contribution, pourtant inscrite au budget, ne bénéficie plus au sport, mais est désormais affecté au budget général. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains soutient l'avis défavorable exprimé sur le budget 2019.

M. Claude Kern. - Je partage les différents points soulevés par nos collègues. Ce budget voté à l'Assemblée nationale fait la part belle aux élites sportives au détriment du sport amateur. Pourtant, ce dernier est une étape obligée pour devenir un sportif de haut niveau! Quelle sera l'utilité du ministère des sports si la nouvelle agence assume toutes ses missions à partir de mars prochain ? Les associations sportives sont en grande souffrance financière, notamment en raison de la disparition de la réserve parlementaire. Le fonctionnement du FDVA est opaque et les collectivités territoriales doivent faire face à des difficultés budgétaires. Enfin, les politiques publiques de jeunesse et de vie associative doivent être transférées aux collectivités territoriales dans le cadre du programme action publique 2022. Le transfert de ces nouvelles charges est inacceptable ! La vie associative est menacée, alors qu'elle joue un rôle sociétal de premier ordre. De ce fait, le Groupe Union centriste suivra l'avis défavorable de nos deux rapporteurs.

Mme Sylvie Robert. - Le Groupe Socialiste et Républicain suivra lui aussi l'avis défavorable de nos rapporteurs. Ce budget est symptomatique de l'incohérence gouvernementale. Pourtant, l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques ouvre également des perspectives pour l'insertion des jeunes de filières actuellement en tension, comme les sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS). Or, pour la seconde année consécutive, le programme 219 est en baisse. Le sport de haut niveau sera privilégié au détriment du sport amateur. Cette baisse brisera également les dynamiques du secteur sportif et, au niveau des collectivités territoriales, des fédérations et des associations. La portée symbolique et politique de notre refus commun pour le Gouvernement est réelle !

M. Pierre Ouzoulias. - Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste (CRCE) vous accompagne dans ce vote négatif. Nous déposerons également un amendement sur la taxe Buffet. Notre cohésion peut, à bon droit, s'inspirer du rugby : lorsque le pack est dans l'en-but, l'essai est collectif !

Mme Françoise Laborde. - Le groupe Rassemblement démocratique, social et européen (RDSE) soutiendra votre avis négatif. Le mécénat n'est pas la panacée pour pallier les faiblesses du FDVA et les coupes budgétaires ! Les modalités du choix d'affectation du 1 % culturel, qui vient d'être évoqué, me semblent cependant devoir être débattues, afin que la culture ne soit pas pénalisée en rapport au sport.

M. Antoine Karam. - Je vais m'exprimer à titre personnel et ne pas engager le groupe La République en marche. Personnellement, je donnerai un avis défavorable à l'adoption des crédits. Né dans le milieu associatif, je me suis engagé, depuis près de cinquante ans, en faveur du sport. Je suis tout particulièrement fier d'avoir reçu la médaille d'or de la mission de la jeunesse et des sports. Cependant, le sport a toujours été le parent pauvre des gouvernements successifs. En 1977, comme jeune président de la ligue guyanaise d'athlétisme, j'ai fait descendre 2 000 personnes dans les rues de Cayenne pour obtenir une piste synthétique ! À chaque fois qu'il faut arracher des équipements, c'est le parcours du combattant, tandis que les Ultramarins, notamment les Guyanais dans les disciplines les plus réputées, récoltent souvent de très belles médailles olympiques pour la France ! Les Outremer sont encore plus oubliés, parce que lointains. Madame la présidente, je vais vous remettre le rapport de la délégation sénatoriale pour l'Outremer qui porte sur le sport à la croisée des défis majeurs des territoires. Les crédits ne sont pas au rendez-vous, et on ne peut, dans le contexte de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques, réclamer la performance de nos territoires tout en réduisant leurs crédits.

M. Jean-Raymond Hugonet. - Nous sommes tous des élus locaux et connaissons l'importance du milieu associatif. Les crédits ne sont qu'apparemment stabilisés, du fait de la reconduction du FDVA. À l'inverse, la fragilisation du mouvement associatif est manifeste et la diminution des contrats aidés, amplifiée en 2018, menacent nos clubs locaux. L'actualisation tardive du décret relatif au FDVA n'a pas permis de compenser la réduction brutale de nos moyens au premier semestre 2018. Certes, comme à son habitude, le Gouvernement promeut la concertation en créant de nouvelles structures. En réalité, les moyens affectés au sport baissent. Personnellement, je souhaite que soit mise en valeur cette unanimité sur ce sujet central. Je ne voudrais pas que la culture continue à être opposée au sport, toujours choisi comme une variable d'ajustement budgétaire. D'ailleurs, l'intitulé de notre propre commission devrait inclure expressément le sport parmi ses compétences. Enfin, il est dangereux d'opposer sport professionnel et sport amateur. Tout grand sportif de haut niveau est passé, à un moment de sa carrière, dans un club local. Aussi, m'inspirant de la stratégie du football, je rappellerai qu'en jouant haut collectivement, la pression est mise sur l'adversaire, et le bloc a une chance de gagner.

Mme Maryvonne Blondin. - Le sport est trop souvent utilisé comme une variable d'ajustement. Les élus locaux que nous sommes connaissent les difficultés des clubs et centres sportifs implantés dans nos collectivités. Or, le vivier des sportifs des prochains Jeux olympiques et paralympiques s'y constitue. Un tel budget va ainsi à l'encontre des attentes de la société et de la diffusion des activités sportives qui contribuent à la santé publique. En outre, le budget consacré aux activités culturelles et sportives des étudiants est désormais reversé au budget général de l'État. Ces pratiques sportives doivent être maintenues dans nos universités. S'agissant du mécénat, le club de handball de ma ville, de niveau national, reçoit des dons de plus de deux cents entreprises locales. Qu'adviendra-t-il si les dons continuent à baisser ? Enfin, que sont devenus les postes FONJEP (fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) ?

M. Alain Dufaut. - La situation du milieu associatif et sportif est catastrophique. Il est inadmissible d'ignorer quels seront les représentants du monde économique dans la nouvelle agence du sport ! Il faudrait également auditionner Jean Castex sur la préparation des Jeux olympiques et paralympiques qui suscite de nombreuses inquiétudes. Le choix du lieu d'implantation du futur laboratoire de l'agence française de lutte contre le dopage (AFLD) n'est pas non plus connu. Le pire serait d'aborder les Jeux olympiques avec une agence non opérationnelle. Enfin, le déplafonnement de la taxe Buffet me semble impératif. Ce sont là des moyens financiers détournés du sport à un moment crucial. Le changement de ministre ne facilite pas les choses.

M. Jacques Grosperrin. - Nous en venons à regretter Marie-Georges Buffet comme ministre des sports. Le discours de l'actuelle titulaire de ce poste est loin d'être cohérent et semble parfois soufflé par le ministre en charge du budget. D'ailleurs, la jeunesse ne relève officiellement plus des compétences du ministère des sports. Ce budget est une vraie catastrophe pour le sport français, avec une baisse de 45 % des financements alloués au développement du sport pour tous. Les programmes de détection et de formation semblent avoir disparu. Comment allons-nous trouver le milliard d'euros promis pour l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques ? La nouvelle agence proposée ne repose sur aucun modèle économique viable. Ce budget des sports va nourrir la crise de confiance durable des Français vis-à-vis du Gouvernement. Comment se déroulera la suppression des 1 600 postes du ministère ? Comment la gestion des CTS va-t-elle évoluer ? Le Sénat doit faire bloc contre de telles dérives.

M. Olivier Paccaud. - Nous regrettons tous cette fragilisation du maillage des associations sportives qui semblent exclues du FDVA. Le nombre d'associations déboutées de leur demande de crédits évoqué par notre collègue rapporteur illustre les conséquences du processus de recentralisation à l'opacité totale. Ne pourrions-nous pas, par un amendement, exiger la transmission d'un rapport retraçant annuellement les choix des commissions préfectorales ? L'argument selon lequel le mécénat peut suppléer la baisse des financements n'est guère valable dans les petites communes où les artisans et les entreprises, déjà amplement sollicités, n'ont plus les moyens ni d'augmenter ni de pérenniser leur soutien. Le sport de proximité en zone rural est en train de s'éteindre. Non, à ce budget !

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Notre commission entendra prochainement Tony Estanguet et Jean Castex, dans le cadre du suivi de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Je rappellerai un point concernant la vie associative en danger. Outre la suppression des emplois aidés et la fin de la réserve parlementaire, la baisse des dotations aux collectivités territoriales, amorcée lors du dernier quinquennat, a provoqué la diminution des subventions à la fois pour le sport et la culture. En outre, l'obligation du plafonnement des dépenses des collectivités - dite du « 1,2 % » - conduit à de nouvelles économies qui frappent, de nouveau, le milieu associatif.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » . - Je salue l'unanimité de nos collègues, ainsi que l'attitude courageuse de notre collègue Antoine Karam. Quelques chiffres démontrent ce hiatus entre l'importance du mouvement sportif, pourtant présenté par le président du comité national olympique et sportif français, Denis Masséglia, comme « le premier mouvement social de France », et le budget qui lui est réservé. Rassemblant 300 000 associations, 17 millions de licenciés et 300 000 bénévoles, ce secteur emploie 200 000 personnes et représente 2 % du PIB. Or, son budget se limite à 0,13 % de celui de l'État ! Si le budget du sport était à la hauteur de ses enjeux économiques, il devrait en avoisiner les 2 %. Le déplafonnement des trois taxes affectées au CNDS - la taxe Buffet, la taxe sur les paris sportifs et celle sur la Française des Jeux - aurait procuré, cette année, 240 millions d'euros de recettes supplémentaires pour le sport, ce qui aurait permis d'atteindre un montant global de dotations de 385 millions d'euros, plus proche des 400 millions d'euros demandés par l'Agence nationale du sport. Malgré la tribune cosignée par les députés de La République en Marche dans le Journal du dimanche en faveur de ce déplafonnement, à la veille du débat budgétaire, les amendements proposés en ce sens ont tous été rejetés, ce qui témoigne des contradictions de l'actuelle majorité à l'Assemblée Nationale.

Que deviendra le ministère des sports à partir de 2020, après la création de l'Agence nationale du sport ? Il faudra bien que l'État intervienne sur la légalité des règlements fédéraux, la sécurité des événements, mais aussi à l'international et sur la transversalité des politiques publiques, à l'instar du plan vélo lancé dans le cadre de la loi d'orientation sur les mobilités.

Une réelle solidarité entre le sport de haut niveau et le sport pour tous doit également être insufflée.

J'attire l'attention de nos collègues de la région Île-de-France sur le financement de la SOLIDEO, qui va porter les grands équipements sportifs des Jeux olympiques et paralympiques. Son budget ne s'élève qu'à 113 millions d'euros, alors que l'engagement de l'État auprès du Comité international olympique porte sur 1,1 milliard d'euros d'ici 2022 !

La meilleure porte d'entrée pour le développement de la pratique sportive reste le sport santé.

Si les petites et moyennes entreprises contribuent, localement, au financement des associations sportives, le mécénat sportif, à l'échelle nationale, connaît un échec retentissant, comme en témoignent les maigres recettes de l'actif de la Fondation nationale du sport.

Le titulaire du ministère en charge des sports a changé neuf fois en dix ans. D'ailleurs, l'expérience de champion de haut niveau ne présage pas de qualités ministérielles ! En revanche, Jean Castex, en raison de ses fonctions actuelles et à venir, me semble devoir être auditionné prochainement.

S'agissant de l'AFLD, l'inquiétude porte sur la réduction, d'année en année, du nombre des contrôles passés sous la barre des 8 000. Désormais, conformément aux exigences internationales, 70 % des contrôles devront être réalisés sur les sportifs de haut niveau. Enfin, vos réactions unanimes, mes chers collègues, prouvent que le sport permet de dépasser les clivages, parfois artificiels, entre nous.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis des crédits de la jeunesse et de la vie associative. - Si le FDVA devrait bénéficier aux associations sportives, dans les faits, les plus petites devraient pâtir de la baisse générale des moyens induite par la fin de la réserve parlementaire. Dans mon rapport écrit, je démontre la réalité des pertes pour les clubs sportifs : les montants de la réserve parlementaire n'ont donc pas été réalloués sous d'autres formes comme cela nous avait pourtant été annoncé. Les collectivités, confrontées à la baisse de leurs moyens, ne peuvent soutenir comme auparavant les associations sportives. On compte 3 600 emplois FONJEP pour 3 000 associations bénéficiaires. Leur nombre est en diminution. Chacun de ces emplois représente une subvention de 7 000 euros. Leur attribution relève des préfets. Au-delà des chiffres, ce budget traduit une perte de puissance du monde associatif sur laquelle je souhaitais vous alerter.

La commission émet unanimement un avis défavorable à l'adoption des crédits 2019 de la mission « sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances 2019.

M. Jacques-Bernard Magner, - rapporteur pour avis des crédits de la jeunesse et de la vie associative. - Comme je l'ai précédemment évoqué, cet amendement propose d'adapter le dispositif de la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence au monde associatif. Il vise ainsi à permettre aux fonds pour le développement de la vie associative de récupérer les dépôts et avoirs des associations en déshérence. Dans ce but, il est indispensable de distinguer les comptes inactifs des associations. C'est pourquoi, nous proposons d'obliger les établissements de crédit à distinguer les comptes des personnes physiques des comptes des personnes morales et, parmi ces derniers, ceux des associations. L'objectif à rechercher, à l'issue de la prescription légale, serait de verser les sommes qui figurent sur les comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale destiné à financer le fonds de développement de la vie associative. Malheureusement, en tant que tel, un tel dispositif serait irrecevable au titre de l'article 40 de la constitution, car le fléchage de recettes vers un fonds est interprété comme une incitation à la dépense supplémentaire. C'est la raison pour laquelle le présent amendement propose que le gouvernement étudie cette question et remette à la Représentation nationale un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d'affectation spéciale au bénéfice du fonds pour le développement de la vie associative. Il serait temps que l'argent des associations en déshérence profite aux associations, par le biais du FDVA !

La commission adopte l'amendement.

ANNEXES

Audition de Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports,
sur le projet de loi de finances pour 2019

MARDI 23 OCTOBRE 2018

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Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Mes chers collègues, je souhaite la bienvenue, en notre nom à tous, à la nouvelle ministre des sports, Mme Roxana Maracineanu.

Vous avez été une grande championne de natation, médaillée olympique à Sydney en 2000, ce qui vous prédispose à travailler sur l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Vous avez également travaillé dans de grands médias, pour Europe 1 et France Télévisions. Or notre commission est aussi compétente en matière de communication comme elle l'est en matière d'éducation. Vous ne serez donc pas surprise que notre intérêt pour le sport porte autant sur la pratique sportive que sur l'éducation physique, la diffusion des épreuves sportives, et bien sûr les équipements des collectivités territoriales.

Vous prenez vos fonctions à un moment tout à fait particulier puisqu'une réorganisation d'ampleur est en cours avec le projet de création d'une agence nationale du sport. Par ailleurs, les annonces budgétaires ont suscité des craintes importantes quant à l'avenir du sport, notamment dans les territoires carencés.

Je vous proposerai, dans un propos liminaire, de présenter les grandes lignes de votre budget, compte tenu des modifications apportées à l'Assemblée nationale lundi dernier, et cette réorganisation.

J'indique que le groupe d'études sur les pratiques sportives et grands événements sportifs, présidé par Michel Savin, est extrêmement actif.

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. - Merci de me recevoir ce jour pour échanger avec vous autour des questions budgétaires. Je détaillerai également devant vous ma vision en qualité de ministre des sports et aborderai les grandes lignes de la réforme que j'envisage de porter avec l'ensemble des acteurs.

En accord avec le Premier ministre, je m'appuierai notamment sur le rapport relatif à la gouvernance du sport qui m'a été remis mardi dernier. Celui-ci, établi après huit mois de concertation, comporte 57 mesures. Je souhaite enrichir ces propositions de mon expérience de sportive de haut niveau et d'éducatrice de natation, métier que j'ai pratiqué pendant dix ans au bénéfice de la petite enfance et, plus particulièrement des femmes, puisque j'ai créé, en 2010, une association s'adressant aux femmes venant d'accoucher ou ménopausées et aux enfants entre trois mois et six ans. Je souhaite également m'appuyer sur mon expérience de bénévole, puis de dirigeante d'association et d'élue à la région d'Île-de-France, où je me suis occupée du sport et de la formation.

Je mettrai aussi en avant ma qualité de mère de quatre enfants, âgés de 2 ans et demi à 12 ans, qui m'a permis de mesurer l'évolution de l'accueil au sein des associations sportives.

À court terme, l'un des outils majeurs de cette réforme sera la création, au cours du premier trimestre de 2019, de l'agence nationale du sport, qui sera chargée de la haute performance et du développement des pratiques. J'en ai esquissé les contours, le mode de fonctionnement et la structuration à l'Assemblée nationale, lors du débat budgétaire.

Il s'agit d'une réforme ambitieuse associant, aux côtés de l'État, l'ensemble des acteurs concernés par le sport.

D'abord, les acteurs incontournables que sont les collectivités territoriales - départements, régions, communes -, au regard de leur poids dans le financement du sport, et les acteurs des territoires - associations et parlementaires.

Les acteurs traditionnels du monde sportif ont été associés à cette concertation et auront un rôle prépondérant dans cette agence du sport, tant au niveau national, avec le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et le Comité paralympique et sportif français (CPSF), qu'au niveau local, avec les fédérations territoriales.

Le monde de l'entreprise est un nouvel entrant dans cette gouvernance du sport. Jusqu'à ce jour, il n'était présent que par le biais du sponsoring, alors qu'il s'impliquait dans le sport en mettant en place des actions de structuration et de développement des fédérations et des associations.

Bien évidemment, le Comité d'organisation des Jeux Olympiques (COJO), qui porte aujourd'hui l'engouement suscité par les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, est lui aussi associé.

Cette réforme sera fidèle à mes expériences et aux deux grands objectifs que nous avons définis avec le Président de la République et le Premier ministre : réussir les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 et accroître le nombre de pratiquants de trois millions.

La réussite des Jeux Olympiques se mesurera d'abord au nombre de médailles. Ce sera la tâche des médias de dresser ce bilan. La mienne sera d'évaluer ce qu'on aura réellement mis en place autour de l'athlète et de son entraîneur, qui sont au coeur des préoccupations de la partie « haute performance » de cette agence, d'écouter leur projet, de les accompagner jusqu'à la médaille, mais aussi après.

Ma prédécesseure Laura Flessel s'était exprimée sur cet aspect « haute performance » de l'agence, préfiguré par Claude Onesta. Même si elle n'existe pas encore, son équipe est en cours de constitution et des contacts ont déjà été pris avec les différentes fédérations pour aborder cet aspect de son action.

À travers le message du Président de la République, j'entends qu'il faut aussi favoriser la réussite subjective de chaque personne qui aura tenté, grâce à nous, l'expérience du sport, cette expérience qui permet à l'individu de se connaître et souvent aussi d'être reconnu, cette expérience du lien qu'il va créer avec l'autre, son partenaire d'efforts, son partenaire de jeu, son entraîneur, son éducateur, cette relation qui nous permet aussi de trouver notre place.

Porter ce message de réussite, c'est aussi porter le message auprès de nos concitoyens du progrès sensible que chacun peut vivre dans sa chair grâce au sport, grâce au retour bienveillant d'un éducateur, d'un coach, d'un ami qui pratique avec vous et qui vous regarde vraiment. Dans ce monde où l'avis qualitatif sur ce que vous êtes et votre marge de progression finissent toujours par être exprimés plus ou moins en chiffres, ce regard et cette sensation du progrès sur soi-même sont plus que jamais importants pour les individus.

Le second objectif que le Président de la République nous propose, c'est de parvenir à trois millions de pratiquants supplémentaires. Je l'interprète comme une injonction à transformer le modèle en changeant de point de vue : passer du ministère de ceux qui font le sport à ceux qui font du sport ; mettre au centre de nos préoccupations communes non plus uniquement les acteurs du sport - les fédérations via les contrats d'objectifs nationaux et les associations fédérales via le Centre national pour le développement du sport (CNDS) -, mais aussi le pratiquant.

Nos préoccupations communes - ministère, fédérations, associations, territoires -, c'est de s'occuper davantage du pratiquant pour englober plus largement et coller à la réalité sportive d'aujourd'hui. Le sport est une politique publique. Celle-ci doit être tournée vers les citoyens, questionner le rapport de chacun au sport, et, plus que toute autre, se mettre au service des autres politiques publiques. Une politique sportive doit être évaluée en fonction de son impact sur la vie quotidienne des Français.

Il faut considérer le sport comme un bien commun, un bien social de notre pays, qui appartient à tous : État, collectivités, mouvement sportif, monde économique et pratiquants de tous âges et de toutes origines culturelles ou sociales.

On peut parvenir à trois millions de pratiquants supplémentaires en démocratisant les primoapprentissages, en donnant la clé aux familles, aux parents, aux grands-parents, aux professionnels en crèche, en maternelle et dans le primaire. C'est ce que j'avais proposé, dans le domaine de la natation, au Premier ministre en juillet dernier, mais bien d'autres activités peuvent être concernées. Il nous faut aller là où le « savoir flotter » est essentiel pour la sécurité des enfants, là où lancer un ballon a une place pour créer un groupe et socialiser le petit enfant, là aussi où apprendre ce qu'on fait avec un bâton dans la main conditionne sa relation à l'autre et à l'adulte.

J'en viens aux aspects budgétaires.

Le budget du ministère des sports pour 2019 est un moyen pour accompagner cette réforme. Ce budget est préservé par rapport à 2018 et comporte même des mesures nouvelles.

L'ensemble des financements apportés par l'État au titre des sports est évalué à 515 millions d'euros. La diminution de 2,4 % par rapport à 2018 - 12 millions d'euros - est principalement liée à un ajustement technique qui prend en compte une surévaluation, en 2018, des crédits destinés à la compensation des exonérations de charges sociales pour les arbitres et juges sportifs.

Par ailleurs, un exercice d'optimisation a été mené lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2019, afin notamment de dégager des moyens nouveaux en faveur de la future agence du sport, qui sera créée en 2019.

Ainsi, une enveloppe supplémentaire de plus de 40 millions d'euros est intégrée dans le budget qui vous est présenté.

Sur ces moyens nouveaux, 25 millions d'euros seront consacrés à la haute performance pour renforcer les moyens alloués aux fédérations et aux mouvements sportifs. Le budget de la haute performance progressera ainsi de 40 % par rapport à 2018 au bénéfice des athlètes, puisque l'agence, à cet égard, sera centrée non plus sur les différentes fédérations, mais bien sur le sportif et son entraîneur. Les 15 autres millions d'euros seront consacrés au développement des pratiques afin de réduire les inégalités d'accès à la pratique sportive, en particulier dans les territoires carencés. En outre, pour donner une nouvelle impulsion au financement du développement des pratiques, j'ai défendu, lundi soir, lors du débat à l'Assemblée nationale, un amendement augmentant de 15 millions d'euros le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite « taxe Buffet ». Cet amendement a été adopté et permettra donc de porter à 55 millions d'euros les nouveaux crédits destinés à accompagner cette réforme et à financer la création de la future agence. Ces 15 millions d'euros supplémentaires seront consacrés au développement des pratiques afin de financer des mesures concrètes en faveur de la lutte contre les inégalités d'accès à la pratique sportive ou encore le programme « savoir nager ».

Au total, le budget du sport pour 2019, hors crédits de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), sera donc supérieur de plus de 11 millions d'euros aux moyens d'intervention obtenus en 2017.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis des crédits « sport » . - Madame la ministre, je voudrais commencer par vous souhaiter bonne chance, alors que vous prenez vos fonctions dans un moment très particulier, avec une actualité assez chargée : remaniement ministériel, présentation du budget, programme « Action publique 2022 », suppression annoncée de 1 600 postes de conseiller technique sportif (CTS), qui vient s'ajouter à une réduction drastique du nombre de contrats aidés, débat relatif au nouveau modèle de gouvernance du sport, etc.

Je n'entends pas me lancer dans une bataille de chiffres aujourd'hui. Les choses ont bougé depuis quelques heures. Le budget s'élève sans doute à 465,6 millions d'euros. Ne serait-il pas souhaitable tout d'abord, pour clarifier la présentation et éviter toute confusion, d'isoler le programme 350 concernant la Solideo ? Ce programme concerne la construction de l'héritage olympique. Celui-ci doit être achevé avant 2024. Comme d'autres, j'aurais souhaité une loi de programmation budgétaire concernant la préparation de ces Jeux Olympiques. L'État va devoir trouver un milliard d'euros supplémentaires pour les équipements. Or il n'en prévoit que 65 millions en 2019.

J'ai aussi deux éléments d'inquiétude. N'est-il pas inquiétant de voir le budget de l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep) baisser ? L'Insep est un élément essentiel de la préparation olympique. Si le nombre de médailles aux JO de Tokyo en 2020 est trop bas, il sera difficile de remonter la pente en 2024.

Mon autre sujet d'inquiétude concerne les grands événements sportifs, hors JO, puisque les crédits passent de 20 à 4 millions d'euros. Vous avez confirmé les ambitions exprimées par Laura Flessel, aussi bien en ce qui concerne l'objectif de 80 médailles que celui de 3 millions de pratiquants supplémentaires.

Vous avez confirmé récemment dans la presse le principe du transfert de 1 600 postes de CTS soit aux collectivités territoriales, soit aux fédérations sportives. Comment cela va-t-il se passer ? Ces personnels ont le statut de la fonction publique d'État et ont une qualification très précise. La masse salariale concernée s'élève à environ 200 millions d'euros.

La réforme de la gouvernance du sport sera le grand chantier de l'année 2019. Il était temps en effet que le système français évolue : les collectivités territoriales montent en puissance ; nous sommes en retard en ce qui concerne le sport en entreprise, aussi bien pour le financement du sport par les entreprises que pour la pratique du sport dans les entreprises ; on assiste à une montée en puissance du sport business, etc. Il était nécessaire de donner davantage d'autonomie au mouvement sportif. La nouvelle agence nationale du sport va être mise en place. Mais quelles seront alors les compétences du ministère, au-delà de sa mission traditionnelle de contrôle ? Quelles seront les compétences du législateur après cette « révolution du modèle sportif français », selon l'expression de Denis Masseglia ?

Enfin, que pensez-vous de la réforme annoncée de la Coupe Davis, à laquelle les Français sont très attachés depuis l'époque des « Mousquetaires » ? On s'achemine vers une privatisation de cette compétition, ce qui suscite d'ailleurs quelques mouvements de contestation, y compris de la part des tennismen ou de la Fédération française de tennis.

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - Vous évoquez un climat d'inquiétude. Je pense qu'il est aussi dû au fait que cette nouvelle gouvernance a permis à beaucoup d'acteurs de s'exprimer. C'était bien notre volonté lorsque nous avons lancé cette concertation de neuf mois. Tous les acteurs, qu'il s'agisse du CNOSF, des différentes fédérations ou des sportifs ont pu prendre la parole. Il me paraît aussi normal qu'au moment du vote du budget chacun s'exprime, quitte à ce que le message soit parfois un peu brouillé avec des pétitions, des tribunes dans la presse, etc. On ne savait d'ailleurs plus parfois très bien qui parlait et au nom de qui... L'enjeu est de changer notre mode de fonctionnement, de passer d'un modèle centré sur les fédérations vers un modèle où l'on met au coeur les sportifs et les entraîneurs pour la haute performance, d'un côté, et les pratiquants, de l'autre côté. C'est un vrai changement ! Cela suscite des inquiétudes, c'est normal.

S'agissant du budget, vous ne voulez pas vous lancer dans une bataille de chiffres, mais force est de constater que nous n'avons pas gagné cette bataille des chiffres dans les médias. Ceux-ci relaient davantage ceux qui parlent le plus, ceux dont les médailles sont récentes plutôt que ceux qui ont été médaillés dans les années 2000... En réalité, le budget n'a pas diminué ; 55 millions d'euros nouveaux ont été dégagés. Je pense honnêtement que nous avons les moyens de travailler correctement. Évidemment, j'aimerais disposer d'un budget trois fois supérieur pour le sport en France. Si nous étions une grande nation sportive depuis des années, cela se saurait. Hélas ! ce n'est pas le cas aujourd'hui. Nous voulons améliorer les choses en abordant la situation avec lucidité.

Ce budget s'élève à 465 millions d'euros, sans compter la Solideo. Pour plus de lisibilité et de clarté sur l'évolution des moyens d'intervention du ministère, nous souhaitons séparer les lignes budgétaires. Le budget de Solideo va nécessairement monter en puissance à un moment donné. Il ne doit pas masquer le reste du budget du ministère. La création de la nouvelle agence du sport va s'accompagner de l'arrivée de nouveaux moyens privés. Il conviendra de sécuriser tout cela. Nous sommes en train de réfléchir, dans le cadre de la planification trisannuelle qui interviendra l'année prochaine pour le budget des sports, aux moyens de bien séparer les choses et de donner une visibilité au budget du ministère.

Le budget de l'Insep augmente légèrement de 1,3 %, passant de 22,2 millions d'euros en 2018 à 22,5 millions d'euros. La rénovation des locaux est terminée. Le plafond d'emplois de l'établissement est stabilisé à 288 équivalents temps plein. Ces chiffres ne tiennent pas compte des transferts de compétences et des moyens humains et financiers de l'Insep vers l'agence nationale du sport en cours de création. L'Insep a su développer des ressources propres, à hauteur de 10 millions d'euros par an en moyenne depuis quatre ans. Celles-ci lui permettent de poursuivre la mise en oeuvre du plan pluriannuel d'investissement. L'Insep consacre ainsi chaque année 5 millions d'euros à l'entretien de ses équipements sportifs et à ses dépenses d'investissement. Les sportifs qui y sont accueillis n'ont donc pas de souci à se faire, ils continueront à l'être dans d'aussi bonnes conditions.

Nous réfléchissons à la manière d'assurer les meilleures concertations et coordination possibles entre les dirigeants de l'Insep et ceux de la future agence. Mais l'Insep ne fonctionne pas tout seul. Il faut prendre en compte le grand Insep, qui réunit des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (Creps) ou des écoles de formation dans nos territoires. Il s'agit, en lien avec les autres ministères, d'assurer un mapping territorial équilibré en matière de formation et d'éducation. Il faut aussi que les sportifs qui s'engagent dans une carrière sportive puissent poursuivre en même temps les études pertinentes qu'ils souhaitent. Le ministère des sports a vocation à s'insérer dans ce mapping général, qui verra naître prochainement des campus scolaires, universitaires et sportifs.

Quatre jours après ma prise de fonctions, la crise concernant les CTS a éclaté et a cristallisé aussi beaucoup d'inquiétudes. Je rappelle qu'il ne s'agissait que d'un document de travail qui n'était pas destiné à la presse ni à être lu comme il l'a été. Aussitôt, j'ai rencontré le Premier ministre. Cette lettre de cadrage mentionne effectivement la suppression d'équivalents temps plein au sein des fédérations ; elle ne vise pas exclusivement les CTS, ne vise aucun corps, mais mentionne des missions qui doivent être revisitées dans la mesure où l'objectif est d'installer une nouvelle agence. Nous devons développer la transversalité, travailler avec tous les acteurs, pas uniquement les fédérations, mais aussi avec les têtes de réseau qui s'impliquent dans l'éducation par le sport ou dans les quartiers prioritaires de la ville. Évidemment, tous nos agents, les CTS, les personnes présentes dans les directions régionales ou départementales, les conseillers d'animation sportive devront trouver leur place au sein de ce nouveau modèle et réorienter leurs missions. Nous sommes en discussion avec les fédérations. Les CTS ne sont pas toujours d'accord. Il s'agit de personnes très compétentes en matière de formation, d'encadrement, d'entraînement. Mais nous aurons à déterminer si ces compétences doivent relever de l'État ou des fédérations. Par exemple, le rôle de l'État est-il de contribuer à prendre en charge le salaire des entraîneurs des champions de haut niveau, qui ont des sponsors, des revenus variés, et pour qui, finalement, l'aide de l'État apparaît minime au regard de leurs autres sources de revenus ? N'est-ce pas plutôt aux fédérations - voire aux athlètes eux-mêmes, pour les plus fortunés - de le faire ? Certaines fédérations suivent ce mouvement. Ce n'est pas pour l'État une question budgétaire et financière. Il s'agit de garder le statut de fonctionnaire de ces personnels et de recentrer notre action sur les missions indispensables.

Il nous paraît essentiel de maintenir à la tête des fédérations les directeurs techniques nationaux (DTN) et les DTN adjoints, sous le même statut. C'est important pour des raisons d'éthique et de bonne application de la politique de l'État au sein du mouvement sportif.

Ces personnels ne perdront donc pas leur emploi et seront chargés des missions pour lesquelles ils se sentent les plus compétents. Nous réfléchissons aussi à une réaffectation de ces postes sur des missions qui nous paraissent pertinentes, en accord avec l'action de l'agence dans les territoires.

Par ailleurs, nous soumettrons au Parlement dans le courant de l'année prochaine un projet de loi qui modifiera, dans le sens d'une simplification, le code du sport, pour le mettre en conformité avec la réforme proposée.

Je conçois la nouvelle agence, initialement préconisée par le Comité d'action publique (CAP) 2022, comme un opérateur du ministère des sports. La concertation, qui a duré neuf mois, a été menée par ma directrice de cabinet Laurence Lefèvre, lorsqu'elle était directrice des sports, car elle était convaincue de l'utilité de ce changement de gouvernance et du rapprochement au plus près des territoires et des pratiquants. J'ai souhaité une continuité avec ce qui avait été entrepris.

L'agence absorbera les personnels du CNDS, qui apporteront leur expertise et nous feront un retour pertinent des bonnes pratiques associatives sur le terrain.

Nous avons aussi besoin de l'expertise de la direction des sports pour élargir notre champ de vision. Il y aura donc un travail collaboratif entre les personnels de l'agence chargés du développement des pratiques, les animateurs de terrain, les fédérations et les services du ministère, ainsi que des missions interfédérales transversales. Je compte enfin sur l'implication des parlementaires et, dans les régions, de nos inspecteurs de la jeunesse et des sports. Nous saurons ainsi quelles actions de terrain il est pertinent de financer et lesquelles sont les plus en phase avec nos axes stratégiques.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis . - La nouvelle formule de la Coupe Davis sème le trouble. Va-t-on assister à un bouleversement, voire à une privatisation de cette compétition ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - Ce changement a été décidé par la Fédération internationale de tennis à la suite d'un vote favorable - 71 % de voix pour - et la concertation a été menée démocratiquement. La compétition, dont la phase finale se déroulera sur une semaine, réunira 18 équipes nationales en clôture de la saison sur un terrain neutre. Certains acteurs concernés sont en effet inquiets, mais il nous est difficile d'interférer sur les décisions d'une organisation sportive internationale qui est autonome vis-à-vis de l'État et qui a ses propres enjeux d'attractivité.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances . -Le 17 octobre dernier, la commission des finances du Sénat a adopté les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » - la première que nous ayons examinée -, tout en formulant une réserve.

J'avais en effet proposé un amendement d'appel, qui a été adopté, car nous avions constaté un écart de 20 millions d'euros sur la trajectoire 2018-2022. Prévoyant un mouvement de 20 millions d'euros du programme 350 relatif à la Solideo vers le programme 219, il répondait aux inquiétudes du monde sportif, partagées par la commission des finances, qui craignait que le sport de proximité ne finance les Jeux Olympiques en 2019 et les années suivantes.

Vous nous dites que vous avez déposé la semaine dernière un amendement prévoyant un abondement de 15 millions d'euros, destiné aux actions de proximité, ce qui est rassurant pour le mouvement sportif. Nous retirerons donc notre amendement d'appel, car nous ne voulons pas nous lancer dans une bataille de chiffres.

La mise en place de l'agence nationale du sport suscite des inquiétudes importantes sur le plan budgétaire. Initialement prévue pour le 1 er janvier 2019, elle aura plutôt lieu au cours du premier trimestre de 2019. Quels mécanismes budgétaires prévoyez-vous pour l'intégrer dans la loi de finances ? S'agira-t-il d'une subvention ?

Une autre inquiétude porte sur l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), qui nécessite un investissement important. Comment le financera-t-on ?

La commission des finances souhaite que la trajectoire de la Solideo soit soumise à des procédures de contrôle co-construites, car elle craint les dérapages liés aux Jeux Olympiques. Il semble finalement que les crédits soient plutôt bien consommés. Après une première phase d'études, il y aura une montée en puissance en 2022 et 2023.

Même si le spectre du financement de l'Olympiade par le mouvement sportif n'a pas tout à fait disparu, notre commission a adopté les crédits proposés.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Madame la ministre, soutiendrez-vous la création d'un nouveau laboratoire pour l'AFLD en cette veille des Jeux Olympiques et Paralympiques ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - L'AFLD devra se conformer à une longue liste de critères dans la perspective de l'accueil des Jeux Olympiques à Paris. Il importe d'abord qu'elle déménage de Châtenay-Malabry, où elle occupe des bureaux au sein d'un Creps. Deux possibilités sont à l'étude pour son accueil, l'une à Évry, l'autre sur le plateau de Saclay. Dans un cas, l'État ferait des économies ; dans l'autre, plus coûteux, l'AFLD serait adossée à une cellule de recherche proche du campus universitaire de Saclay. Nous pourrions retenir cette dernière solution si l'agence décidait d'avoir une politique ambitieuse en termes d'éthique et de prévention contre le dopage. À cinq ans des jeux, ce serait un signal : nous voulons des médailles, certes, mais pas à tout prix.

Des audits sont en cours concernant le futur laboratoire. J'espère donc annoncer bientôt au Premier ministre la bonne nouvelle du renouveau de l'AFLD et de son retour dans les premiers rangs des classements internationaux.

M. Michel Savin, président du groupe d'études sur les pratiques sportives et le suivi des grands évènements sportifs . -La démarche du Sénat est constructive : nous connaissons les pressions exercées par Bercy mais nous souhaitons continuer à soutenir le sport.

Je suis de l'avis de Jean-Jacques Lozach : il faut une lisibilité des crédits destinés aux infrastructures des Jeux Olympiques.

Le budget est préservé, dites-vous, madame la ministre. Or les crédits initiaux, qui avaient diminué de 30 millions d'euros, connaissent désormais une baisse de 12 millions à la suite de l'augmentation du plafond de la taxe Buffet décidée la semaine dernière à l'Assemblée nationale.

Nous nous engageons dans une bataille, non de chiffres, mais de moyens. Serez-vous prête à nous soutenir pour redonner à vos crédits leur niveau de 2017 ? On est loin d'une augmentation déraisonnable !

Comment sera financée l'agence nationale du sport ? De quelle façon atteindre les 350 millions d'euros annoncés et comment ces crédits seront-ils répartis ?

Selon le rapporteur du budget du sport à l'Assemblée nationale, le CNDS ne pourra pas engager d'argent en début d'année, car il va disparaître. L'agence ne commencera donc pas son activité avant le milieu de l'année prochaine et ne pourra pas monter les projets pour lesquels un financement a été demandé par les collectivités. Ces allégations sont inquiétantes ! Où est le soutien au sport pour tous et au sport de proximité ?

À la fin 2018, le CNDS aura une dette de 159 millions d'euros. Sera-t-elle reportée sur la future agence ?

Vous annoncez un plan national de lutte contre le dopage et une formation des professionnels intervenant auprès des sportifs. Quels moyens y seront affectés ? Il semblerait qu'on demande à l'AFLD d'assumer des missions nouvelles avec des moyens identiques.

Sur les primes versées aux médaillés olympiques, j'ai pris bonne note de l'amendement voté à l'Assemblée nationale, mais je regrette que la permanence de cette exonération n'ait pas été adoptée en séance publique. Vous voulez revaloriser ces primes, pourquoi pas ? Mais cette revalorisation sera-t-elle supérieure au montant de la fiscalité qui sera due ? Il ne faudrait pas pénaliser ces sportifs... Et pourquoi vouloir que ces montants soient différents selon la situation sociale des athlètes ?

M. Claude Kern . - Je m'associe aux voeux de bienvenue et aux félicitations de mes collègues. Je me réjouis que votre ministère bénéficie d'une rallonge budgétaire de 55 millions d'euros, mais est-ce suffisant au regard des inquiétudes du milieu sportif et des collectivités territoriales ? En cette période de préparation des Jeux Olympiques de 2024, espérons que ce sentiment de découragement n'atteindra pas les sportifs.

Avant d'obtenir l'exemption fiscale des primes qu'ils ont perçues aux Jeux Olympiques, les sportifs de haut niveau se sont engagés, souvent depuis l'enfance, dans la pratique intensive d'un sport jusqu'à devenir des athlètes d'élite. Comment comptez-vous soutenir le parcours des sportifs en devenir, afin qu'ils puissent pratiquer leur sport jusqu'à être médaillés et contribuer ainsi au rayonnement de la France ?

J'aimerais également aborder la situation alarmante des structures associatives, pourtant essentielles à l'équilibre du lien social et à la construction d'une grande nation sportive dans la perspective des Jeux Olympiques. Prenons garde d'affaiblir le rôle sociétal que joue le sport en raison de ses fonctions éducatives et sociales. Des milliers de bénévoles s'investissent au quotidien dans cette mission. Comment comptez-vous oeuvrer en faveur du sport pour tous ?

Je terminerai par le « plan piscines ». Nous manquons, hélas, d'équipements, tandis que l'entretien des piscines existantes laisse à désirer. Des moyens financiers seront-ils affectés à cet objectif ? Un effort paraît également nécessaire en matière de formation, complexe, des maîtres-nageurs sauveteurs. Pensez que 5 000 postes ne sont pas pourvus, alors que la profession pourrait constituer un formidable vivier d'emplois !

Mme Françoise Laborde. - Je vous félicite à mon tour pour votre parcours de femme, de sportive, d'élue et de mère. Votre prédécesseur Thierry Braillard avait énergiquement oeuvré en faveur de l'apprentissage de la natation, mais, sans piscine, l'objectif apparaît difficile à atteindre. Faudra-t-il ressortir les tabourets ? J'aimerais, lors d'une prochaine audition, vous entretenir de l'article 50 de la Charte olympique relatif à la laïcité.

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - Je me permets d'insister, monsieur Savin, sur le fait que le budget consacré au sport ne diminue pas. La différence de 40 millions d'euros constatée entre 2018 et 2019 correspond à des charges surévaluées par le ministère, crédits qu'il n'a, de ce fait, pas consommés. J'assume d'appartenir à un gouvernement qui présente un budget sincère avec des moyens d'intervention au plus près des besoins et qui considère le sport, au même titre que l'éducation et l'emploi, comme un outil interministériel. D'ailleurs, sur les 40 millions d'euros précités, 10 ont été conservés par le ministère des sports. Nous avons pu dégager 40 millions d'euros pour le financement de mesures nouvelles au bénéfice du sport de haut niveau comme du développement des pratiques, somme à laquelle s'ajoutent désormais 15 millions d'euros.

Il me semble effectivement inadmissible, monsieur Kern, de souffrir à la fois d'un taux de chômage élevé et d'un nombre important de postes non pourvus. Des piscines, notamment en Île-de-France, ne peuvent ouvrir, car la surveillance, faute de maîtres-nageurs et en raison de règles peut-être trop drastiques, ne peut être assurée. Je crois, pour ma part, à l'utilité de la mesure que je propose, et dont la mise en oeuvre débute, en faveur de l'apprentissage précoce - entre quatre et six ans - de la natation dans le cadre de l'école. Des maîtres-nageurs s'engagent dans les premières expérimentations.

Mme Françoise Laborde . - Sans piscine, comme en Haute-Garonne, votre plan peinera à s'appliquer...

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - Effectivement, des territoires manquent d'équipements. Nous envisageons d'y faire circuler des piscines itinérantes, des camions piscine. En lieu et place de courtes sessions de natation quelques jours dans l'année, je propose de mettre en place des classes piscine d'une ou deux semaines. Il ne s'agit pas d'apprendre à un jeune enfant les quatre nages, mais de lui permettre de traverser une piscine sans aide et en sécurité. Nous manquons effectivement de maîtres-nageurs, car les filières d'accès sont réduites et le métier dévalorisé. Pourtant, loin de rester sur une chaise pour surveiller une piscine, le maître-nageur sauveteur est un véritable éducateur sportif avec un rôle privilégié auprès des enfants et des familles. Je peux en témoigner.

Vous évoquiez, s'agissant du CNDS, la question du reste à payer, qui explique la différence entre le budget de 2017 et celui de cette année. Son montant de 165 millions d'euros sera intégré en fin d'année au budget rectificatif pour l'année 2017. L'agence sera chaque année abondée à cet effet dans le cadre du budget rectificatif. La part prévue pour 2019 s'élève à 42,8 millions d'euros. S'agissant du financement de l'agence, un amendement voté à l'Assemblée nationale lui affecte trois taxes pour un montant de 146 millions d'euros. Le reste de l'abondement proviendra du programme 119 à hauteur de 189 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter la subvention du CNOSF. L'agence bénéficiera au total de 350 millions d'euros. Le ministère des sports conservera, pour sa part, une enveloppe supérieure à 100 millions d'euros pour développer des dispositifs nouveaux. Nous espérons, en faisant entrer des partenaires privés dans l'agence, qu'ils pourront avoir un effet de levier sur les autres financements.

Je connais bien, vous l'imaginez, le sujet de la fiscalisation des primes pour les médaillés des Jeux Olympiques. Lorsque j'étais nageuse, elles étaient défiscalisées depuis 1992. Depuis 2010, elles sont soumises à l'impôt, donc fiscalisées en cohérence avec le statut fiscal de leurs bénéficiaires. Une défiscalisation ponctuelle a néanmoins été accordée sous la précédente législature pour les athlètes des jeux de Rio, dont les athlètes des jeux d'hiver n'ont pas bénéficié. Il y a donc eu une volonté de la part des députés d'adopter une mesure identique à leur endroit. Je crois, pour ma part, que les athlètes doivent être responsabilisés comme n'importe quel citoyen qui, gagnant de l'argent, participe à la vie de la cité. Largement assistés au cours de leur carrière sportive, ils doivent ensuite s'intégrer dans la vraie vie. Ce peut être difficile, je vous l'assure ! D'ailleurs, Martin Fourcade et Marie Bochet ne portaient pas un message différent : ils ne réclamaient pas une défiscalisation des primes en tant que telle, mais une mesure d'équité entre athlètes.

Nous avons obtenu une défiscalisation exceptionnelle qui permet effectivement de rétablir l'équité entre les sports d'hiver et les sports d'été. La mesure me semble utile dans la perspective des jeux de 2024, qui mettront en avant ces derniers, mais il ne faut pas oublier que les sports d'hiver sont les plus gros pourvoyeurs de médailles pour la France. Je suis surtout satisfaite de la promesse d'une revalorisation des primes en 2019, qui n'avaient pas évolué depuis 2008. Elle ne dépendra pas, monsieur Savin, du niveau de revenu des athlètes, mais, de fait, les moins aisés, moins fiscalisés, en profiteront davantage. Nos sportifs, potentiels futurs médaillés, doivent être bien traités. Il existe un régime fiscal propre aux sportifs, qui prévoyait initialement un étalement de la fiscalisation des primes sur six ans. Depuis 2006, cette durée est limitée à quatre ans.

Les athlètes en lice pour les jeux de Paris seront reçus par la nouvelle agence qui aura en charge la haute performance afin de présenter leur projet sportif et de vie. Avec Claude Onesta, nous travaillerons sur l'accompagnement social, sur la préparation sportive et la reconversion. Il y a trop d'inégalités de traitement en la matière dans les fédérations. Selon Claude Onesta, un sportif ne peut s'entraîner correctement pour les Jeux Olympiques s'il ne perçoit pas 3 000 euros par mois. L'entraînement demande du temps, de l'engagement et de l'énergie.

M. Olivier Paccaud . - J'ai découvert, dans votre présentation, la notion de réussite subjective. Je vous souhaite, pour ma part, une réussite objective à la tête de votre ministère. J'ai entendu votre optimisme et votre assurance concernant les problématiques budgétaires, mais je ne suis pas totalement convaincu par la rhétorique relative au transfert des CTS aux territoires tant transfert rime souvent avec désengagement de l'État. J'aimerais, comme Claude Kern, insister sur l'importance du tissu associatif sportif dans les banlieues comme dans les campagnes les plus reculées. Les petits clubs ont souffert de la suppression des contrats aidés autant que de la disparition de la réserve parlementaire. Certes, cette dernière a, en partie, été intégrée à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et les parlementaires, qui connaissent très bien leur territoire, ont pu être associés à la redistribution de ces fonds.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Ce n'est pas le cas partout ! Dans ma région, nous n'avons pas même été consultés.

M. Olivier Paccaud. - Je me trouve alors chanceux, car, dans l'Oise, quatre parlementaires siègent à la commission DETR et le préfet se montre attentif à nos observations. L'opacité paraît, en revanche, totale s'agissant de la ventilation du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), qui bénéficie également des crédits de l'ancienne réserve parlementaire. Il conviendrait, madame la ministre, d'associer davantage les parlementaires à cette instance. Il y va de la survie d'associations dont le rôle en matière de cohésion et de mixité sociales est essentiel. Leur disparition serait en outre dramatique pour le sport, car y débutent souvent les médaillés, défiscalisés ou non, de demain.

M. Laurent Lafon . - Je suis, en tant que voisin, particulièrement attaché à l'Insep, où l'État a beaucoup investi, et à l'articulation de ses missions avec celles de la future agence en charge de la haute performance. Il me semble indispensable de conserver cet outil et de le maintenir dans ses objectifs. Vous souhaitez voir croître de trois millions le nombre d'adhérents à un club sportif d'ici à 2024. Cette ambition pose la question des équipements qui souvent, notamment en milieu urbain, se trouvent déjà saturés. Quelle incitation envisagez-vous pour engager les collectivités territoriales, maîtres d'ouvrage de la quasi-totalité des équipements sportifs, en faveur d'une augmentation des capacités d'accueil ?

Mme Laure Darcos . - Je suis élue de l'Essonne et, à ce titre, ai été sollicitée sur le sujet de l'AFLD, dont le collège apparaît très largement favorable à une installation sur le plateau de Saclay. Je comprendrais la déception d'Évry si son projet n'était pas retenu, d'autant que je suis également membre du conseil administration du Genopole. Mais il est question d'un laboratoire avec des plateaux techniques de chimie et il se trouve que, sur le plateau de Saclay, le bâtiment envisagé jouxte la prochaine installation de l'université de pharmacie et un site du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) avec lesquels l'agence travaille depuis longtemps. Par ailleurs, le cluster du sport annoncé à Évry n'existe que sur le papier. Je pense enfin que, symboliquement, installer l'AFLD dans le cluster ne donnerait pas à l'agence l'image d'indépendance qu'elle doit conserver au niveau international. J'aimerais enfin, madame la ministre, connaître votre opinion sur la demande de l'association nationale des élus en charge du sport relative au déplafonnement des taxes affectées au sport sur les jeux de la Française des jeux, les paris en ligne et la fameuse « taxe Buffet » sur les droits de diffusion des manifestations sportives.

Mme Maryvonne Blondin . - Ma question concerne les quelque 200 médecins et infirmiers qui effectuent des prélèvements pour le compte de l'AFLD. Ils verront le coût de leurs prestations baisser de 25 % et s'inquiètent de ne plus pouvoir, dans ces conditions, poursuivre leurs prélèvements, qui doivent être réalisés dans des conditions particulièrement strictes et contraignantes.

Mme Annick Billon . - Je m'associe aux compliments et aux félicitations qui vous ont été adressés par mes collègues. Je souhaite, pour ma part, revenir sur le CNDS s'agissant de la disparition des contrats aidés, du transfert de 1 600 CTS aux collectivités territoriales et, surtout, de ses sources de financement. Il bénéficie de trois sources essentielles de financement : 1,8 % des sommes issues de la Française des jeux, 1,8 % des paris sportifs en ligne et 5 % des droits télévisuels. En 2006, ces sommes ont été plafonnées à respectivement 173 millions d'euros, 31 millions d'euros et 41 millions d'euros. Au lieu d'un déplafonnement partiel, pourquoi ne pas imaginer un déplafonnement total compte tenu des objectifs fixés ? Une telle mesure permettrait de dégager un budget de 400 millions d'euros. Elle semble en outre plus logique que la taxation des vêtements sportifs imaginée par un député... Avant l'agence du sport, nous avons connu l'Agence française de la biodiversité, imposante entité où il n'était pas possible de vérifier le fléchage des dépenses. Je partage enfin, madame la ministre, votre ambition du sport pour tous, notamment pour les femmes. Nous allons d'ailleurs travailler, au sein de la délégation aux droits des femmes, sur la coupe du monde féminine de football.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Nous vous remercions, madame la ministre, pour les précisions que vous nous avez apportées. Comme plusieurs collègues, je déplore la réduction des moyens dédiés aux associations sportives de nos territoires dans un contexte d'attrition des dotations aux collectivités territoriales. L'État nous impose un cadre très strict. Nous sommes pris en tenaille entre l'envie d'assumer la décentralisation et l'obligation de se plier aux contraintes budgétaires.

Mme Roxana Maracineanu, ministre . - Si la réforme de la gouvernance a été engagée, c'est justement parce que, dans le sport plus que dans d'autres secteurs, tout le monde a envie de bien faire. Effectivement, ce n'était pas une compétence obligatoire des régions, des départements et des communes, mais tous ont envie de s'y investir en raison du rôle social du sport.

Cette réforme a pour objectif de rationaliser et d'optimiser les financements. Aujourd'hui, certaines associations postulent, pour financer un même projet, auprès du CNDS, auprès de la région, auprès du département et peut-être même auprès de l'État. D'autres associations, souvent celles qui n'ont pas de structure fédérale, iront plutôt voir les élus pour solliciter des financements prévus pour la vie associative et la jeunesse. Il n'y a pas vraiment de cohérence d'ensemble.

Ce qui est bon aujourd'hui pour le sport n'est pas ce qui était bon pour lui hier et ce qui sera bon pour lui demain. Je ne peux pas juste subventionner telle association parce qu'elle fait un bon travail. L'expérience du sport, pour un enfant comme pour un adulte, est très vertueuse ; elle permet de trouver des réponses à des questions personnelles et ce n'est pas à nous, aux régions, au CNDS de viser telle ou telle cible. Je veux encourager la pratique du sport en général.

Monsieur Lafon, le but est d'augmenter le nombre des pratiquants et non celui des adhérents. Comment une personne qui court seule le dimanche pourrait-elle entraîner un groupe d'amis à courir avec elle et s'inscrire éventuellement dans un cursus fédéral ? Le sport, c'est aussi un facteur de lien social.

Telle fédération peut compter 120 000 licenciés pour un sport regroupant trois millions de pratiquants qui ignorent tout de celle-ci. L'idée, avec cette agence du sport, c'est de former des parlements du sport, qui existent déjà dans certaines régions et qui fonctionnent bien, en y adossant la conférence des financeurs que mettra en place la loi, de manière à permettre à chaque acteur de trouver sa place.

Entre la disparition du CNDS et la mise en place de l'agence, il y aura une période de transition au cours de laquelle le modèle ne changera pas : les engagements pris par le CNDS seront honorés et cette transformation se fera je l'espère assez rapidement. Chacun doit trouver sa place, mais cette place ne sera pas la même selon les territoires. L'État se propose d'être ce coordinateur en essayant de donner une cohérence à l'investissement public des collectivités et de supprimer des doublons pour faire en sorte que le sport soit mieux financé.

S'agissant des missions de prévention attribuées à l'AFLD, celles-ci existent toujours au sein de la direction des sports. L'une et l'autre travailleront en collaboration sur ces missions de prévention, l'AFLD se consacrant au champ de la haute performance. Les missions plus générales de prévention continueront à être mises en oeuvre par les services de la direction des sports. Ce sera un travail commun.

Les préleveurs sont rémunérés par l'AFLD sur la base d'une grille tarifaire, laquelle évolue pour une plus grande professionnalisation en vue de la coupe du monde de rugby de 2023 et des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Nous interviendrons en cas de tensions.

Le nombre des emplois aidés dans leur ancien format baisse. J'ai rencontré Mme Pénicaud pour lui demander que les parcours emploi compétences (PEC), qu'elle a mis en place, concernent également le sport. La cible initiale des emplois aidés au sein du mouvement sportif n'était pas celle qui était visée au départ par ce type de dispositif. Nous voyons une opportunité avec ces PEC de faire sortir les associations de la logique dans laquelle elles s'inscrivent aujourd'hui. Nous voulons leur faire comprendre qu'elles peuvent se professionnaliser. Nous allons encourager et valoriser les bénévoles dans leur implication auprès des jeunes, mais nous voulons profiter de ces PEC pour mettre en place de vrais développeurs au sein des associations. Ces personnes devront monter eux-mêmes en compétence et faire monter l'association en compétence.

En 2010, j'ai créé une association qui a vécu sans aucune subvention pendant cinq ans ; j'y ai travaillé bénévolement. Nous avons pu constituer un fonds de roulement qui nous a permis de dégager un mi-temps, puis un plein temps. Nous nous sommes adressés à des publics auxquels les associations ne s'adressent pas habituellement, en accueillant des personnes qui ne se destinent pas forcément à la compétition. À cet égard, je trouve qu'il est dommage qu'on ne puisse pas emmener des enfants dans une association sportive pour leur seul plaisir. En proposant uniquement des activités orientées vers la compétition, on occupe trop de créneaux au détriment d'autres personnes et on se prive de rentrées financières. Peut-être des parents souhaiteraient-ils inscrire leur enfant uniquement sur une période trimestrielle pour lui permettre d'exercer plusieurs sports, car parfois les cotisations annuelles atteignent des montants très élevés. Il faut parvenir à changer les modèles économiques pour accroître le nombre de pratiquants.

S'agissant des créneaux dans les installations sportives, en matière de financement, nous voulons encourager les projets collaboratifs entre associations sur des temps qu'elles n'investissent pas - par exemple le samedi et le dimanche, alors que c'est à ces moments que les familles peuvent venir pratiquer.

Pendant les vacances scolaires, par exemple, des éducateurs pourraient mutualiser leurs interventions pour contribuer à développer la pratique du sport chez les enfants. On pourrait en faire autant au profit des employés des entreprises pendant la pause de midi. Nous sommes aussi en relation avec des groupements d'employeurs, comme Profession Sport et Loisirs, pour faciliter la mise à disposition d'éducateurs auprès de plusieurs associations ou pour assurer des fonctions transverses nécessaires à la vie des associations, comme la comptabilité. L'idée est de mutualiser les efforts sur les territoires. Mais il est impossible de faire tout cela depuis le ministère, à Paris, car il faut discuter avec tous les partenaires pour identifier les besoins de chaque territoire. C'est pourquoi il est important d'être à l'écoute des pratiquants ou des collectivités territoriales.

Les parlementaires constituent à cet égard un relai formidable pour faire remonter la réalité du terrain, les initiatives innovantes et les besoins des territoires. Jusque-là, on ne disposait que des remontées des fédérations.

Nous voulons aussi élargir le spectre de nos financements et faciliter l'interaction des associations, des têtes de réseau, qui présentent souvent des projets bien construits. Lorsque je suis arrivée au ministère, j'avais une assez mauvaise impression des fédérations parce que je trouvais que la fédération française de natation ne s'investissait pas assez sur un dossier important, la sécurité des enfants dans l'eau. J'ai rencontré déjà une dizaine de fédérations et je constate qu'elles font beaucoup de choses dans le cadre des plans sportifs territoriaux. C'est cet exemple que nous voulons suivre, tout en associant davantage d'acteurs.

Lorsque l'on vient déposer un dossier de financement, il ne faut pas qu'il concerne uniquement son association, mais il faut qu'il s'inscrive dans un projet territorial, monté avec d'autres associations locales, pas uniquement sportives. Le sport doit aussi être un moyen de répondre aux attentes des familles et des utilisateurs. Il peut ainsi, par exemple, répondre aux besoins de mode de garde des parents, aux questionnements sur les temps de vie des enfants. Les parents ont souvent, en effet, à faire rentrer au forceps une activité sportive dans l'emploi du temps de l'enfant qui finit sa journée à 20 heures 30 et qui rentre trop fatigué pour aller dîner...

L'Insep sera associé à l'agence en charge de la haute performance. C'est un lieu de pratique pour les meilleurs sportifs, même s'il n'accueille pas toutes les disciplines. L'Insep mélange études et sport de manière très pertinente. Certaines de ses cellules, comme la cellule relations internationales, seront reprises par l'agence. Elles fonctionneront aux côtés d'autres initiatives, comme, par exemple, Science 2024, initiée par l'École polytechnique et qui réunit une quinzaine de grandes écoles avec comme objectif d'inciter les étudiants à travailler sur des projets de recherche suggérés par les fédérations, les sportifs et les entraîneurs. Alors que l'Insep propose essentiellement des équipements de biomécanique, nous voulons mettre aussi l'accent sur des matériels utilisés dans tous les sports - comme le canoë, l'aviron, le vélo, etc. -, et dans le sport paralympique pour adapter le matériel à la spécificité de chaque handicap.

S'agissant des taxes, M. Darmanin a répondu lundi soir. Effectivement les taxes, telles qu'elles avaient été conçues, ne sont pas intégralement affectées au sport. C'est un choix politique, car il s'agit de l'argent de tous les Français et cet argent doit servir à tous les Français. Si l'on déplafonnait toutes les taxes affectées au sport, on obtiendrait un produit de 365 millions d'euros au lieu de 146 millions d'euros. Mais si l'on donnait cet argent au ministère, tous les crédits ne pourraient être utilisés. Il s'agit de l'argent des Français, on ne peut pas faire n'importe quoi avec. L'argent doit financer des dispositifs ou des projets utiles à la nation. Il faut reconnaître que nous n'avons pas de dispositifs à proposer pour utiliser l'intégralité des 365 millions d'euros. Nous allons travailler dans ce sens, faire le plus de choses possible et puis l'on négociera sur cette base le prochain budget triennal.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Merci madame la ministre, pour cet échange nourri, franc et sincère. Si la question des taxes a été soulevée, c'est qu'elle est d'importance à l'heure où se prépare aussi le budget de la culture et du patrimoine, avec des débats autour de l'affectation du produit du Loto du patrimoine. La propension de l'État à créer des taxes et d'en détourner l'affectation au bout de quelques années est notoire. Ainsi, en 2009, nous avons créé la taxe sur les opérateurs de communications électroniques, dite « TOCE », pour financer l'audiovisuel public et compenser la suppression de la publicité après 20 heures. Or, aujourd'hui, le produit de cette taxe n'est plus du tout affecté à l'audiovisuel public ! C'est problématique, notamment en l'absence d'une réforme de la contribution à l'audiovisuel public. Une taxe peut-elle continuer à être prélevée sans être affectée à ce pour quoi elle a été créée ? C'est un sujet important qui mérite que l'on s'interroge.

En conclusion, je voudrais, encore une fois, vous remercier, madame la ministre. Vous avez été élue locale, conseillère régionale, et cela se voit ! Vous connaissez les territoires et leur fonctionnement. Le mot « territoire » est d'ailleurs revenu souvent dans votre propos. Il y a donc des réalités que l'on peut partager. Je ne doute pas que nous pourrons avancer ensemble.

Audition de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et de M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

MERCREDI 7 NOVEMBRE 2018

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Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous vous recevons aujourd'hui en vue de l'examen, par le Sénat, des crédits consacrés, dans le projet de loi de finances pour 2019, à l'enseignement scolaire ainsi qu'à la jeunesse et à la vie associative, MM. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, et Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Je vous proposerai, dans votre propos liminaire, de présenter les grandes lignes de votre budget.

Puis je céderai la parole à nos rapporteurs pour avis des crédits de votre ministère, Jacques Grosperrin et Jacques-Bernard Magner, puis à l'ensemble des collègues qui souhaiteront vous interroger.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Le remaniement a permis de clarifier les compétences de mon ministère en y incluant la jeunesse. Derrière ces mots transparaît notre engagement et le projet de service national universel (SNU).

Ce budget traduit la priorité accordée à l'éducation par le gouvernement. Je tiens à souligner la notion de puissance éducative que le Président de la République a évoquée lors de sa dernière intervention télévisée, ce qui souligne l'importance de l'éducation pour le rayonnement international de notre pays et au niveau intérieur. La France peut être une puissance éducative du XXI e siècle.

Ce budget approfondit le sillon de la politique initiée l'année dernière et dont l'objectif est clair : l'élévation générale du niveau et la justice sociale. Ces deux points sont corrélés. C'est parce que nous sommes ambitieux et exigeants avec les élèves que l'école est à la hauteur de sa mission républicaine de progrès social.

Le budget qui vous est proposé pour 2019 s'établit à 51,7 milliards d'euros - hors cotisations aux pensions de l'État -, avec une augmentation de 1,7 %, soit 861 millions d'euros supplémentaires.

Avec 811 millions d'euros supplémentaires sur le périmètre de l'enseignement scolaire, nous continuons la transformation profonde du système éducatif que les Français demandent. Cette augmentation nous donne les moyens d'être à la hauteur des principes républicains que nous défendons et d'atteindre ainsi nos objectifs :

- donner plus à ceux qui ont besoin de plus, conformément au principe de fraternité ;

- transmettre les savoirs fondamentaux à tous les élèves, en personnalisant davantage nos pédagogies, conformément au principe de justice et d'égalité ;

- mieux les accompagner dans la conception de leur projet de poursuite d'étude ou d'insertion professionnelle, conformément au principe de liberté.

Cette transformation sera possible grâce à l'unité de la société autour de son école et de ses professeurs, pour lesquels il nous faut davantage investir dans la formation, et mieux les accompagner tout au long de leur carrière grâce à une politique de ressources humaines innovante allant de pair avec une politique de rémunération.

Le budget que nous présentons répond à des choix budgétaires en parfaite cohérence avec le projet politique qui vise à permettre à chacun d'avoir la maîtrise de son avenir.

À l'école primaire, l'objectif prioritaire porte sur les savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter et respecter autrui. Rien de solide ni de durable ne peut se faire si tous les élèves ne les maîtrisent pas. Sinon, il leur est impossible de se projeter dans la culture et de se saisir de leur vie. Les 20 % des enfants qui quittent l'école primaire sans maitriser ces savoirs fondamentaux, sont, en grande partie, les plus défavorisés socialement. Nous devons corriger cette injustice.

Cette priorité accordée à l'école primaire se justifie plus encore par le niveau de nos dépenses, puisque la France dépense moins pour son école primaire et plus pour son enseignement secondaire que la moyenne des pays de l'OCDE. Alors que moins d'élèves sont attendus dans l'école primaire, nous faisons de cette dernière une priorité.

Ainsi, la rentrée prochaine verra la création de 2 325 postes devant élèves, alors même que nous accueillerons 60 000 élèves en moins. Dans chaque département de France, à chaque rentrée scolaire, le taux d'encadrement de l'école primaire va s'améliorer. Les moyens de remplacement seront préservés et l'école rurale sera consolidée.

Ce volontarisme budgétaire nous permet aussi de donner sa pleine dimension à l'une des mesures de justice sociale les plus importantes du gouvernement : le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseaux d'éducation renforcés (REP et REP+). Après 60 000 élèves à la rentrée 2017 et 190 000 cette année, ce seront 300 000 élèves qui bénéficieront de la mesure de dédoublement des classes à la rentrée 2019. Un écart s'avère parfaitement mesurable entre les REP et REP+ et le reste du pays en termes de maîtrise de la lecture et de l'écriture.

Les élèves de CE1, qui ont bénéficié du dispositif de REP+, savent presque tous lire et écrire de manière fluide. Cette démarche va à la racine des inégalités. La France est pionnière en la matière.

Cette priorité s'accompagnera de l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire à trois ans, qui constitue une autre grande mesure sociale. 20 000 élèves supplémentaires, dont certains seraient voués à la marginalisation, seront concernés et la France sera le pays qui scolarisera le plus tôt dans son école maternelle, qui fait sa fierté depuis son invention en 1848.

La seconde priorité est d'accompagner les élèves vers la réussite au travers de son second degré. Le volume d'enseignement y sera maintenu en 2019. En effet, la diminution de 2 450 moyens d'enseignement sera compensée par une augmentation du volume des heures supplémentaires. Cette mesure permet d'apporter une réponse plus souple aux besoins des établissements et garantit aux professeurs une rémunération complémentaire.

Au collège, nous accompagnons plus et mieux tous les élèves vers la réussite. C'est tout le sens de la mesure « devoirs faits ». Mis en oeuvre à l'automne 2017 dans tous les collèges de France, ce dispositif poursuit sa montée en charge, avec une augmentation de 27 millions d'euros, pour atteindre 247 millions d'euros en 2019. Cette mesure est décisive pour les collèges et fait évoluer notamment les relations avec les parents d'élèves ainsi qu'entre les enseignants et leurs élèves.

Le soutien aux élèves les plus fragiles passe aussi par l'aide directe dans le cadre scolaire. La fragilité sociale est prise en compte dans ce budget avec une augmentation de 4 % des moyens alloués en faveur des bourses de collège et de lycée. Cela représente 739 millions d'euros en 2019. En complément, une enveloppe de 65 millions d'euros de fonds sociaux permet de répondre ponctuellement aux difficultés de certaines familles qui peuvent survenir en cours d'année. Je crois beaucoup au rôle du chef d'établissement et de son équipe éducative en matière sociale, ce qui motive l'importance accordée aux fonds sociaux dans la composition de ce budget et les initiatives que nous prenons, à l'instar des cités éducatives que nous avons annoncées avec Julien Denormandie, dans la continuité du rapport de Jean-Louis Borloo et des annonces du Président de la République sur la politique de la ville. Certains établissements devraient être dotés de moyens supplémentaires pour devenir des acteurs de la politique sociale, en lien avec les collectivités locales et les administrations.

Venir en soutien des élèves les plus fragiles conduit à garantir une éducation pleinement inclusive pour les élèves en situation de handicap. En 2019, le ministère consacrera 2,7 milliards d'euros à l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Notre détermination est sans faille sur cette question. Il s'agit d'offrir aux élèves un accompagnement de qualité par des personnels formés et disposant d'un emploi stable. Pour la première fois, à la rentrée 2018, le nombre d'accompagnants ayant le statut d'accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) dépasse celui des emplois aidés, majoritaires jusqu'à alors. Ce mouvement se poursuivra en 2019, avec le financement de 12 400 nouveaux emplois d'AESH, dont 6 400 accompagnants supplémentaires au titre de la poursuite de transformation des contrats aidés en AESH, ainsi que de 6 000 AESH supplémentaires par recrutements directs. Ces accompagnants bénéficieront également de 60 heures de formation annuelle. En outre, le programme de création d'Unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) se poursuivra en 2019.

La troisième priorité de ce budget est de renforcer l'attractivité du métier de professeur. C'est un enjeu à la fois national et mondial. Dans le cadre de l'agenda social du ministère, nous échangeons en continu avec les organisations syndicales sur les mesures nécessaires afin d'y parvenir. Plusieurs mesures qualitatives sont prises ou vont l'être prochainement : le développement du pré-recrutement présente une dimension sociale, en aidant les étudiants se destinant au professorat et en renforçant notre système éducatif grâce à l'élargissement du vivier de leur recrutement. La transformation des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, les ÉSPÉ, tout en maintenant leur cadre universitaire, permettra d'améliorer le niveau général des formations qui y sont dispensées et sur lesquelles le ministère de l'éducation nationale doit exercer une certaine maîtrise. Il n'est pas normal que certains futurs professeurs reçoivent moins de vingt heures de formation sur les enjeux de la lecture, alors qu'il en faudrait cent ! Nous aborderons ce point lors de la discussion prochaine du projet de loi relatif à l'école de la confiance.

La gestion des ressources humaines de proximité, au plus près du terrain, sera généralisée, après avoir commencé à titre expérimental. Il s'agit d'un enjeu pour la gestion des carrières et la formation de nos professeurs.

Dès à présent, deux mesures essentielles sont prises : la valorisation de l'engagement des professeurs, en poursuivant la montée en charge de l'engagement présidentiel de relever de 3 000 euros par an les rémunérations des personnels en réseaux d'éducation renforcés (REP+). Cette mesure significative se traduit, dès cette rentrée, par une prime de mille euros et, à la rentrée 2019, par une prime de deux mille euros. J'ai confié une mission à Mme Ariane Azéma et M. Pierre Mathiot sur la dimension territoriale de la politique éducative. Ils ont notamment la charge de réfléchir aux moyens de moderniser nos outils de l'éducation prioritaire pour donner des résultats plus efficaces, dans un but de justice sociale. Il s'agit de concilier la revalorisation du statut de nos professeurs avec la réussite des élèves des zones d'éducation prioritaire.

Nous poursuivons également la relance de la mise en oeuvre du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR). Cette démarche se traduira par la poursuite du soutien aux jeunes professeurs, avec une revalorisation progressive des débuts de carrière. À titre d'exemple, le traitement des jeunes professeurs certifiés aura augmenté de plus de 1 000 euros sur la durée du quinquennat. Enfin, les parcours de carrière seront dynamisés et revalorisés pour près de 900 000 agents entre 2017 et 2022. Cette revalorisation devrait représenter un milliard d'euros. Elle permettra d'améliorer la situation matérielle des professeurs, ainsi que de revaloriser la considération dont ils bénéficient au sein de la société française.

Ce budget de l'année 2019 traduit les priorités que je viens d'indiquer et se veut cohérent avec les valeurs d'engagement et l'importance conférée à la jeunesse. Le renfort de Gabriel Attal contribuera au succès de cette démarche, dont le service national universel fournira le jalon. Nous voulons un collège où l'on s'engage et réalise les valeurs de la République en les pratiquant. J'ai signé un accord avec la Croix-Rouge afin qu'il y ait davantage de classes Croix-Rouge dans les établissements. Ce sera également vrai en aval du SNU, avec le développement du service civique et de toutes les formes positives d'engagement que nous pouvons souhaiter pour notre jeunesse et auxquelles notre système scolaire doit donner l'impulsion décisive. Je laisse, à présent, Gabriel Attal le soin de vous présenter la dimension jeunesse et vie associative de ce budget.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Le budget « jeunesse et vie associative » illustre la cohérence d'un portefeuille ministériel tourné vers l'avenir et destiné à donner des bases solides aux jeunes de ce pays pour se projeter en confiance vers leur avenir. Avec une augmentation de 50 millions d'euros, il traduit la priorité que nous accordons à la jeunesse ; le périmètre jeunesse et vie associative s'établit ainsi à 614 millions d'euros. Ce programme articule le temps des apprentissages, que porte l'enseignement scolaire, et le temps de l'accès à l'autonomie et à l'engagement, que soutient le présent programme budgétaire. Il se décline en quatre axes.

Premier axe : développer l'engagement au service des autres. Avec un budget de 497 millions d'euros inscrits au PLF 2019, le service civique poursuivra sa croissance pour offrir, à terme, à 150 000 jeunes la possibilité d'effectuer une mission d'intérêt général. Cette dotation est augmentée de 49 millions d'euros. Ce dispositif est plébiscité par les jeunes : l'immense majorité d'entre eux en ont une bonne image et neuf anciens volontaires sur dix se déclarent satisfaits de leur expérience. Reflet de la diversité de notre jeunesse, il s'inscrit pleinement dans la continuité de la politique éducative avec un quart de volontaires peu ou pas diplômés. Il représente une école de l'engagement, de la détermination, de la persévérance, de la découverte et de l'estime de soi. C'est donc une école de la vie. Cette dynamique sera portée par une diversification grandissante des employeurs et, s'agissant du ministère de l'éducation nationale, par une participation au dispositif « devoirs faits » à hauteur de 10 000 volontaires supplémentaires. Fort de sa réussite, le service civique trouvera tout son sens en articulation avec le service national universel (SNU).

Second axe : la mobilité internationale des jeunes. Le ministère consacrera 16 millions d'euros aux dispositifs d'échanges internationaux. Plus de deux millions d'euros seront consacrés en 2019 aux programmes portés par l'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) et l'Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ). Notre politique de mobilité pour les jeunes permet donc de soutenir le projet européen en faisant se rencontrer les jeunesses, par-delà ses statuts scolaires.

Troisième axe : le développement de l'accès des jeunes à l'information dans tous les domaines, afin de favoriser leur autonomie. Le service national universel nous permettra de progresser en termes d'emplois, de logement et de culture. Les jeunes se heurtent trop souvent au trop plein d'informations qui leur sont soumises. Pour résorber ces difficultés, le ministère entend repositionner le réseau Information jeunesse, fort de 1 300 points d'accueil répartis sur l'ensemble du territoire, et capable de délivrer une information généraliste et précise. C'est là un outil qu'il nous faut conforter. Par ailleurs, le ministère a décidé de développer un outil numérique, la « boussole des jeunes », qui vient d'être expérimentée dans plusieurs territoires et vous sera prochainement présentée. Le jeune est ainsi considéré comme un usager et y bénéficie d'une information lisible.

Quatrième axe : le développement de la vie associative. Les associations sont une école de la démocratie notamment pour nos jeunes. Avec 20 millions d'adhérents, 15 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés les associations occupent une place sociale et économique irremplaçable dans la vie de la nation. Elles sont au coeur de la société de la confiance, de l'engagement et de l'entraide, qui constitue le fondement du projet présidentiel. Le Gouvernement entend répondre aux besoins spécifiques de toutes les associations : autant les grandes associations nationales, employant plusieurs dizaines, voire des centaines de salariés - celles-ci vont bénéficier de la baisse du niveau des charges en 2019 à hauteur de 1,4 milliard d'euros - que les plus petites, qui jouent souvent un rôle décisif dans la vie économique et sociale locale. Ces dernières seront confortées par la création du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), qui sera doté de 25 millions d'euros et accompagnera leurs différents projets. Des commissions ont été organisées dans les départements et les informations dont nous disposons laissent augurer que le FDVA a réussi dans sa mission d'assistance aux petites associations de terrain. Je veux ici rendre hommage aux conseillers d'éducation populaire et aux inspecteurs qui ont travaillé à la mise en place de ce fonds, dont l'instauration s'est avérée complexe pour les agents de l'administration déconcentrée ainsi que pour les parlementaires qui n'ont pas toujours eu le temps de le promouvoir, au coeur de l'été dernier, localement. Nous veillerons, l'an prochain, à ce que le calendrier soit plus adapté.

En 2019, le ministère consacrera près de 90 millions d'euros, hors dépenses fiscales, au développement de la vie associative et l'effort cumulé de l'État en faveur des associations s'élève à plus de 5,3 milliards d'euros.

Nous travaillons également, avec Jean-Michel Blanquer, à une feuille de route sur la vie associative qui fait suite au rapport remis par le mouvement associatif en juin dernier et au lancement, par le premier ministre, du programme de développement de la vie associative, aux Grands Voisins, en novembre 2017.

Ce budget traduit donc le plein engagement du gouvernement en faveur de la jeunesse et de la vie associative. Il fait, plus que jamais, du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse le ministère de l'avenir. Cette action déterminée sera complétée et renforcée par l'engagement du Président de la République de mettre en place un service national universel, dont les modalités sont en cours d'élaboration.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Le ministère de l'éducation nationale se veut un ministère d'avenir. Vous n'avez pas mentionné de plan d'action sur la formation au numérique ni le financement jusqu'à présent assuré par les programmes d'investissement d'avenir (PIA) et les collectivités territoriales. Hier, nous avons d'ailleurs abordé ce sujet de prime importance avec Frédérique Vidal lors de son audition budgétaire.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Le numérique est en effet un sujet d'importance pour 2019. La rentrée 2019 sera l'occasion de mettre en oeuvre des innovations pédagogiques dont les élèves de seconde ont d'ores et déjà été informés grâce au fascicule sur l'orientation en classe de première. La création d'une nouvelle filière sciences informatiques et numérique, dans certains lycées, est une démarche inédite aux plans national et mondial. Son programme, disponible sur internet, n'est pas encore arrêté et il est encore possible d'y apporter des modifications jusqu'à décembre prochain. Conformément à vos préconisations, la généralisation de l'apprentissage de la programmation devrait être assurée à l'école primaire et au collège. Les enjeux d'une telle démarche sont non seulement budgétaires mais relèvent aussi de la gestion des ressources humaines. C'est pourquoi un plan volontariste de formation continue en informatique destiné principalement aux professeurs de mathématiques et de sciences a été lancé, ainsi qu'une étude sur les ressources humaines en informatique dans le système scolaire français.

L'équipement en informatique est un autre sujet d'importance : 240 millions d'euros sont consacrés, par le PIA3, à la dotation en équipement informatique de l'enseignement secondaire et supérieur. L'objectif est de mettre en oeuvre des politiques ciblées, plutôt qu'un financement indifférencié, notamment pour la dotation numérique des écoles en milieu rural qui impliquera des appels à projet à hauteur de 25 millions d'euros.

M. Jacques Grosperrin , rapporteur pour avis des crédits de la mission enseignement scolaire . - Notre commission aurait souhaité obtenir plus rapidement les réponses au questionnaire budgétaire.

L'effort consacré à l'enseignement scolaire, surtout dans le secteur primaire, permettra, sans doute, de combler les lacunes mises au jour par le classement PISA. Vous avez parlé de justice sociale. Or, celle-ci me paraît impliquer l'égalité de tous nos territoires, y compris ruraux et très ruraux, dans le domaine de l'éducation. En outre, dans les REP+, certains chefs d'établissements se sentent parfois très isolés.

Le budget 2019 prévoit la suppression de 1 800 postes, qui cache une poursuite des créations de postes dans le primaire compensée par des suppressions dans le second degré. Si ces suppressions de postes demeurent relativement limitées, leur annonce et l'absence de visibilité peuvent décourager les futurs candidats. Comme mon prédécesseur, Jean-Claude Carle, je ne peux que regretter l'absence d'une programmation pluriannuelle des emplois du ministère ; celle-ci assurant la visibilité des candidats au début de leur formation. Nous souhaiterions donc connaître, monsieur le ministre, l'évolution des emplois jusqu'en 2022, telle que fixée par la lettre-plafond du Premier ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Les 800 chefs d'établissement, à l'instar des 45 000 personnels de l'éducation nationale et des 3 800 IATOS affectés en REP+, bénéficient d'une prime spécifique.

En effet, la programmation pluriannuelle n'est pas actuellement établie. Je tiens à souligner qu'il n'y aura pas d'effet de zigzags sur la création de postes par discipline. D'autres facteurs que ceux de la création ou de la suppression de postes, comme le nombre de départs à la retraite ou l'évolution des disciplines, doivent être pris en compte. Quelle que soit la programmation budgétaire pluriannuelle, il serait impossible d'assurer une programmation des concours sur une durée de quatre années.

Le nombre de recrutements de professeurs des écoles va se stabiliser, avec un peu plus de 10 000 postes ouverts par an, tandis que le nombre de postes ouverts dans l'enseignement secondaire évoluera, sans diminution drastique, en fonction des disciplines. Ainsi, en philosophie, discipline qui sort renforcée de la réforme du baccalauréat, le nombre de postes ouverts est appelé à augmenter, en raison de l'extension de son enseignement à quatre heures hebdomadaires et de la création d'une spécialité « littérature, philosophie et humanités » destinée aux élèves de première et de terminale.

M. Jacques Grosperrin , rapporteur pour avis . - La rentrée 2019 verra l'achèvement du dédoublement des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire, pour un coût total de 11 000 postes. Une partie de ces postes provient du redéploiement d'enseignants affectés au remplacement, au dispositif « plus de maîtres que de classes » ou dans des classes à faibles effectifs, notamment en zone rurale. Et ce, alors même que le Président de la République s'était engagé, à l'été 2017, à mettre fin aux fermetures de classes dans les communes rurales qui posent des difficultés d'acheminement aux élèves concernés. Pourriez-vous nous communiquer le nombre de classes ayant fermé en milieu rural à la rentrée 2018 ? En outre, disposez-vous des résultats de l'évaluation scientifique du dédoublement des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire et, en parallèle, du dispositif « plus de maîtres que de classes » annoncée l'année dernière ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Notre vision n'est pas purement comptable. Pour preuve, 2 325 postes à l'école primaire vont être créés, tandis que le nombre des élèves, en diminution de 60 000, aurait dû normalement générer une baisse de 3 000 postes. Les dédoublements des enseignants en classe de CP et de CE1 vont ainsi être assurés.

Nous avons les moyens de compenser, en partie, la baisse de la démographie dans la ruralité. La question de l'école en milieu rural est avant tout démographique : comment l'école, combinée à d'autres stratégies comme le numérique, peut-elle contribuer au rebond démographique en milieu rural ?

Suite à notre travail avec Alain Duran et certains d'entre vous, nous sommes en mesure de proposer aux départements une stratégie pluriannuelle des écoles rurales reposant sur des enjeux qualitatifs. Comment renforcer l'attractivité des territoires ruraux au point d'inciter des familles à s'y réinstaller ? Le plan internat, prochainement annoncé, pourrait notamment y contribuer. La dimension quantitative de ce problème doit être prise en compte. Dans les 45 départements les plus ruraux, 400 postes ont été créés en deux ans. En Lozère, les écoles accueillent 14 élèves par classe en moyenne - 15 en Vendée et 17 dans le Cantal - de la petite section au CM2. C'est sans doute la raison pour laquelle l'école primaire en milieu rural est celle de la réussite. Nous voulons un rebond de l'école rurale au cours des prochaines années dans un contexte marqué par des tendances démographiques défavorables et le besoin d'instiller l'espoir au sein de la population. Cet espoir alimentera un cercle vertueux. L'éducation nationale fait preuve de bienveillance vis-à-vis de la réalité rurale, comme l'indique encore la création, dans notre département du Doubs, monsieur le rapporteur, de 14 postes tandis qu'une baisse de 327 élèves est constatée. Les dédoublements en REP et REP+ ne concernent pas que les zones urbaines. Dans le département de l'Aine, 40 % des dédoublements concernent le milieu rural. Cette démarche suscite un effet de halo : favoriser, dans des petites classes, le déploiement de techniques pédagogiques, hors REP et REP+, permet d'éviter les fermetures d'école ou de classe. L'académie de Reims, où les sections de CP accueillent une douzaine d'élèves, est pionnière en la matière.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis . - Ma dernière question porte sur le grand absent de ce budget, le Service national universel (SNU), dont le décret d'attribution vous a donné la responsabilité. Alors qu'il devrait débuter à l'été prochain, pas un euro ne se trouve dans le budget de votre ministère, ni dans les autres. Où trouvera-t-on l'argent ? Dans quelle mesure l'éducation nationale sera-t-elle mise à contribution ?

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État . - 2019 sera l'année de préfiguration du SNU. Conformément aux recommandations du groupe de travail piloté par le général Menaouine, une cohorte de quelques centaines, voire milliers de jeunes, sera appelée. C'est la raison pour laquelle l'inscription d'un budget dédié au service national dans le PLF 2019 n'était pas opportune, puisque les coûts minimes de cette faible incorporation seront notamment pris en charge par des redéploiements interministériels. En revanche, nous travaillons sur l'évaluation de son coût global, en fonction des arbitrages opérationnels, pour le budget 2020 où seront présentées une ligne dédiée et une trajectoire pluriannuelle.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis des crédits de la jeunesse et vie associative . - Initialement, sous le quinquennat de François Hollande, le nombre de volontaires du service civique devait atteindre 150 000 en 2017, voire même 350 000 à la fin de 2018. Or, depuis près de trois ans, on constate une réelle difficulté à atteindre l'objectif des 150 000 volontaires par an, alors que les candidats ne manquent pas. Comment expliquez-vous cette situation ? Le service civique sera-t-il intégré dans le service universel ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Ce n'est pas la seule projection ambitieuse du gouvernement précédent. Il est d'ailleurs toujours aisé d'être très ambitieux sur un programme dont on n'assume pas la charge ! Notre progression est cependant réelle : avec 497 millions d'euros, le ministère assume la principale part de l'effort consacré à la vie associative et à la jeunesse. Le chiffre de 150 000 volontaires nous paraît réaliste. Ce volontarisme, quantitatif sur le plan budgétaire, est aussi qualitatif : il s'agit d'assurer la cohérence entre le SNU et le service civique.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État . - Cette année, l'objectif est d'accueillir 138 000 jeunes et ce n'est qu'en 2020 que le nombre de 150 000 sera atteint. Depuis ces deux dernières années, nous sommes attentifs à la qualité des missions dans les organismes d'accueil afin d'éviter les substitutions à l'emploi et d'assurer la formation des tuteurs. L'objectif du SNU est de favoriser l'engagement et sa phase obligatoire de deux fois deux semaines permettra aux jeunes de remplir une mission d'intérêt général. Il permettra à certains, qui réalisent actuellement un service civique à l'issue d'un parcours scolaire en échec, de développer, plus tôt, un réel goût pour l'engagement.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis . - Depuis des années, les crédits accordés par l'État au fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) sont en diminution constante : en 2018, ils s'élevaient à 15,7 millions d'euros avant l'amendement gouvernemental visant à compenser en partie la disparition de la réserve parlementaire. Ces crédits sont très insuffisants si on compare le nombre d'associations - 1,5 million - et le nombre potentiel de volontaires à former - entre 15 et 17 millions de personnes. À l'occasion de l'examen du projet de loi égalité et citoyenneté, l'idée avait déjà avancée de récupérer l'argent figurant sur les comptes inactifs des associations pour le verser au FDVA, soit au total près de 80 millions d'euros. Malheureusement, cette mesure a été écartée par le Conseil constitutionnel. Je vais néanmoins proposer à la commission un amendement d'appel dans le projet de finances, afin que le Gouvernement consigne, dans un rapport, les montants susceptibles d'abonder le FDVA. Je souhaiterais connaître votre position sur ce sujet.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État . - L'année passée, les crédits de l'État affectés à la vie associative ont, de fait, augmenté de 25 millions d'euros, suite à la suppression de la réserve parlementaire. La feuille de route relative à la vie associative, à laquelle nous travaillons avec Jean-Michel Blanquer, comprend plusieurs axes : la formation des bénévoles, l'organisation territoriale, le dégagement d'économies d'échelle lié à leur regroupement et le financement. Nous travaillons actuellement afin de résoudre la question des comptes inactifs. A priori , la disposition que vous proposez nous paraît intéressante, puisqu'elle conduirait les banques à transmettre les informations nécessaires à l'avancement de ce dossier.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis . - Le 9 novembre dernier, soit il y a près d'un an jour pour jour, vous aviez lancé le plan de développement pour la vie associative du gouvernement. En mai dernier, le travail collectif des associations a été publié dans le rapport intitulé « Pour une politique de vie associative ambitieuse et le développement d'une société de l'engagement ». Un accent particulier a été mis sur la nécessité d'une politique de soutien à l'emploi associatif au regard de la réduction drastique des contrats aidés dont bénéficiaient les associations et de l'inadaptation du dispositif Parcours Emploi Compétences pour les associations. Or, il n'y a eu aucune réaction de la part du gouvernement. Je souhaite donc vous interroger sur la stratégie du gouvernement en direction des associations : alors qu'elles sont toujours plus sollicitées comme partenaires des pouvoirs publics, comme en témoigne l'implication qui est attendue de leur part dans le futur service national universel, elles sont fragilisées dans leur existence et dans leurs structures par les mêmes pouvoirs publics.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - La mise en oeuvre de notre politique de transformation revendique plus de clarté et de cohérence. Elle a conduit à la diminution des contrats aidés dont les deux-tiers étaient consommés lors de notre entrée en fonction. J'insiste sur ce point. La baisse des contrats aidés est totalement assumée. Nous souhaitons éviter l'enfermement des personnes, notamment handicapées, dans des contrats précaires, et la mise en oeuvre de notre politique peut rencontrer, sur le terrain, les difficultés propres à toute transition. Néanmoins, ses mesures commencent à porter leurs fruits et nous travaillons, en partenariat avec la ministre du travail, pour que l'arrivée des contrats parcours emploi compétence (CPEC), destinés à acquérir de réelles compétences et à s'orienter vers des emplois durables, soit intégrée par le milieu associatif. Les moyennes et les grandes associations vont ainsi bénéficier pleinement de la baisse de 1,6 milliard d'euros des cotisations sociales prévue dans le PLF 2019.

Les associations plus petites bénéficient, quant à elles, du dispositif qui a remplacé la réserve parlementaire, ainsi que d'autres mesures qualitatives - comme la reconnaissance des bénévoles et la formation des personnels travaillant dans les associations - prises par Christophe Itier, haut-commissaire à l'économie sociale et solidaire et à l'innovation. S'il reste à faire beaucoup pour ces associations, notamment en milieu rural, les mesures contenues par le PLF 2019 leur sont favorables, comme le plan mercredi qui, via les caisses d'allocation familiales (CAF), implique le doublement des aides destinées à aider les municipalités en difficulté dans l'organisation, le mercredi, d'activités pour les enfants. Si ces associations ont pu se plaindre, en 2018, des changements opérés, elles vont retrouver de nouveaux moyens à ce titre. En outre, l'instauration des cités éducatives, conçues avec Julien Denormandie, va permettre à certains établissements d'obtenir de 200 000 à 300 000 euros pour favoriser le développement de la vie associative dans un sens social cohérent avec les objectifs éducatifs. Il ne s'agit pas de faire pleuvoir de l'argent de manière indistincte, mais plutôt d'accorder des financements en cohérence avec notre projet éducatif. Si l'aide aux devoirs a pu impliquer, par le passé, des associations tantôt excellentes tantôt discutables, la nouvelle manière de concevoir ce dispositif va renforcer la capacité du maire et du chef d'établissement de choisir ses partenaires. Le quantitatif et le qualitatif doivent ainsi se rejoindre.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État . - L'essentiel de l'emploi associatif est non-aidé et seuls 8 % des emplois associatifs, principalement dans les secteurs de la culture et du sport, étaient des emplois aidés. Peu d'associations sont conscientes des 1,4 milliard d'euros d'allègements de charges dont elles vont bénéficier. Il s'agit bel et bien d'un soutien massif au monde associatif.

Mme Annick Billon . - Le double rattachement de l'enseignement agricole au ministère de l'agriculture et au ministère de l'éducation nationale freine les mobilités des personnels enseignants et 452 directeurs d'établissement sont dans l'attente d'une décision sur leur affiliation. Quelles sont les mesures que le Gouvernement compte prendre en faveur de l'enseignement agricole ?

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Nous entendons prochainement Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, sur cette question.

Mme Annick Billon . - Les conventions ruralité, qui promeuvent une organisation nouvelle afin d'éviter les fermetures d'établissement, devaient bénéficier à certains territoires. En Vendée, initialement retenue, on constate une chute des naissances depuis dix ans. Comment comptez-vous maintenir les conventions actuelles ?

Vous avez également évoqué la reconnaissance des enseignants sur laquelle ont travaillé nos deux collègues Max Brisson et Françoise Laborde. Comment comptez-vous assurer une meilleure reconnaissance des AESH et des auxiliaires de vie scolaire (AVS), impliquant moins de précarité et une meilleure rémunération ? En outre, il semble que les effectifs des classes ULIS ne soient pas pris en compte dans les calculs d'effectifs, ce qui peut conduire à la fermeture d'établissements dans des départements où la natalité est en régression.

Mme Céline Brulin . - Je voudrais, après notre collègue rapporteur, revenir sur les dédoublements des CP et de CE1 en REP et en REP+ qui ont entraîné, dans certains territoires, des retraits de postes. La définition de la ruralité doit évoluer ; certaines villes se dépeuplent au profit de communes périurbaines, comme en Seine Maritime. Comme je l'ai fait par écrit, je vous interpelle sur l'absence de suivi par vos services des décisions du tribunal administratif. Vous avez assumé cette priorité sur l'école primaire et les suppressions de postes dans le secondaire qui devrait accueillir pourtant près de 40 000 élèves supplémentaires. Quel va être le taux d'encadrement ? Avec 19 élèves par enseignant dans le secondaire, la France est loin de la moyenne de 15 élèves définie par l'OCDE. Vous avez évoqué, à juste titre, les événements récents qui plaident en faveur de l'amélioration de cet encadrement. Par ailleurs, vous mettez en avant les augmentations budgétaires de votre ministère, mais son périmètre a changé et il vous faut financer de nouvelles mesures, comme la transformation des emplois d'AVS en AESH. Enfin, pourquoi la préfiguration du service national universel, dont la mise en oeuvre effective impliquera un budget très conséquent, n'est- elle aucunement mentionnée dans les éléments budgétaires ?

M. Antoine Karam . - Je suis le rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement agricole et la semaine prochaine, nous allons entendre le ministre de l'agriculture sur cet enseignement trop souvent considéré comme une voie de garage, alors qu'il constitue un formidable outil d'insertion et qu'il peut conduire ses élèves à devenir ingénieurs. J'ai pu constater, avec mon collègue Pierre Ouzoulias, la déception des partenaires de l'enseignement agricole sur ce point. J'ai également eu l'occasion, la semaine passée, d'intervenir au sujet des enfants handicapés en milieu scolaire, suite à l'incident survenu au lycée Damas de Rémire-Montjoly, en Guyane. Enfin, on ne peut que se réjouir de l'abaissement de la scolarisation obligatoire à trois ans ! Cette réforme fera de l'école maternelle un formidable outil d'insertion et de progrès social. Cependant, si en France hexagonale 90 % des enfants âgés de trois ans sont scolarisés, c'est loin d'être le cas dans les outre- mer, et tout particulièrement en Guyane et à Mayotte, seul département où la double-vacation a été instaurée. Dans ces territoires, la scolarisation à trois ans induit des défis tant sur le plan des infrastructures que des ressources humaines. Quel est votre sentiment sur cette problématique et comment comptez-vous préparer la rentrée de 2019, en garantissant à tous les enfants de France hexagonale et des outre-mer le droit à l'instruction ? Alors que le manque d'établissement est patent à chaque rentrée, ne faudrait-il pas construire de nouveaux établissements selon un modèle plus souple ?

Mme Mireille Jouve . - Ma première question concerne l'abaissement de l'âge de la scolarisation obligatoire dès la rentrée 2019. Cette réforme aura des effets significatifs sur les collectivités locales qui n'étaient pas jusqu'alors tenues de participer au financement des activités des maternelles des établissements privés sous contrat. Même si cette question ne sera pas prise en compte en 2019, pourriez-vous nous indiquer comment vous comptez éviter de pénaliser les collectivités locales ?

Ma seconde question portera sur les heures supplémentaires dans le secondaire. La baisse des effectifs budgétaires doit y être compensée par un recours aux heures supplémentaires. 65 millions d'euros y sont destinés. Initialement tenus d'accepter une heure supplémentaire par semaine, les professeurs ne seront plus en mesure d'en refuser deux, si leur établissement leur en fait la demande. Or, la moitié des professeurs assument déjà au moins deux heures supplémentaires par semaine. Ne craignez-vous pas que la marge d'augmentation d'heures de cours dispensés ne soit trop réduite pour pallier la baisse des effectifs budgétaires dans le second degré ?

M. Max Brisson . - Mes questions porteront sur l'attractivité du métier d'enseignant. Vous vous présentez comme le ministre des professeurs. Il n'y a pas d'école de la confiance sans professeurs en confiance. Le concours me paraît la clef pour une bonne formation pratique et théorique. Le ministère de l'éducation nationale sera-t-il en mesure de préciser la maquette des formations dispensées en ÉSPÉ ? Je vous rejoins sur le pré-recrutement, tant il est essentiel de corriger les fausses représentations des postulants au métier d'enseignant. En revanche, je suis plus dubitatif sur la rémunération des professeurs. S'il vaut mieux rémunérer les enseignants affectés en REP+, votre confirmation du PPCR provoquera le retard de la rémunération des jeunes enseignants, au bénéfice de leurs aînés dans la carrière. N'oublions pas que les jeunes professeurs dans les grandes métropoles sont des travailleurs pauvres et l'augmentation de 1 000 euros sur une année n'améliorera pas leur sort !

Nous sommes d'accord avec vous sur la nécessaire gestion des ressources humaines individualisées et de proximité. Le principe de l'indifférenciation des profils des professeurs et des postes ne doit-il pas être remis en cause ? Rassurez les professeurs de l'enseignement professionnel sur la voie générale quant à la part d'enseignement des disciplines de culture générale dans la voie professionnelle rénovée. Enfin, je salue la qualité du travail effectué par la présidente du Conseil supérieur des programmes.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis . - Votre budget demeure en-deçà des objectifs de la loi de programmation de 2013. La création d'un observatoire du pouvoir d'achat des professeurs est certes louable. Où sont inscrits les crédits affectés à l'augmentation annuelle de 1 000 euros dans les bleus budgétaires ? Je vous donne cependant acte de la préservation réussie des moyens pour l'enseignement scolaire, avec la poursuite des dédoublements des classes de CP et de CE1 en REP+, ainsi que de votre engagement d'améliorer l'encadrement dans les milieux urbain et rural les plus difficiles. Mais il faut constater que le second degré paie un lourd tribut, avec la perte de 2 650 emplois, alors que les effectifs augmentent d'année en année. Pensez-vous que le recours massif aux heures supplémentaires permettra de suppléer à cette diminution de postes ? Vous êtes dans l'optique du « travaillez plus pour gagner plus », mais où sont les crédits correspondants ?

On constate une baisse des crédits affectés à la formation des enseignants et à l'orientation. Comment appliquer les nouvelles exigences qui découlent de la réforme du baccalauréat, comme l'instauration de deux professeurs référents par classe, du contrôle continu et d'une orientation des élèves plus approfondie ? Enfin, je rappellerai que la transformation des contrats aidés en contrats d'accompagnateurs des élèves en situation de handicap (AESH) avait déjà débuté sous le gouvernement précédent.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Nous avons été choqués par la transformation des relations entre les élus et l'inspection académique en bataille juridique. Plusieurs de nos collègues ont gagné des recours formés devant le tribunal administratif à l'encontre de fermeture de classes en milieu rural. Je souhaitais vous alerter sur cette situation totalement anormale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - J'ai beaucoup de considération pour l'enseignement agricole qui entretient d'excellentes relations avec l'enseignement général. Facteur de réussite pour les élèves, il est un partenaire essentiel de l'éducation nationale. En pratique, lorsque la réforme du baccalauréat a été conduite, nous avons instauré une nouvelle spécialité « écologie, agronomie et territoire » qui peut également s'adresser aux élèves des lycées généraux. Sa visibilité va devenir plus forte pour un thème important pour les élèves, à l'instar de la révolution numérique.

Les conventions de ruralité ne devraient pas être modifiées ; l'objectif étant de couvrir l'ensemble des 66 départements considérés comme ruraux. Avec le sénateur Alain Duran, nous avons ajouté dix départements au dispositif existant et chaque contrat a été rediscuté, afin d'aboutir à une vision stratégique qualitative. Je souhaite que la Vendée soit bénéficiaire d'un contrat de ruralité.

Les AESH sont un sujet important. Avec Sophie Cluzel, nous avons entamé un cycle de discussions avec l'ensemble des acteurs qui doit se terminer en février. Puisque les contrats aidés sont voués à disparaître, nous souhaitons que les AESH soient mieux rémunérés et bien formés. Certes, tous les AESH n'exercent pas à temps plein, ce qui obère leur rémunération. Cette réflexion nous conduit à envisager le temps de l'enfant et à préconiser un lien plus fort entre le scolaire et le périscolaire. L'État et les collectivités locales doivent concevoir ce temps ensemble, afin d'améliorer l'accompagnement de l'enfant et la rémunération des AESH qui doivent également bénéficier de soixante heures de formation annuelle.

Les professeurs doivent également être formés à l'accueil des 340 000 enfants handicapés dans l'école désormais inclusive et bénéficier d'une formation favorisant, dans la durée, la personnalisation des parcours.

La Seine-Maritime est en effet un cas particulier et je ne vous détaillerai pas la manière avec laquelle je compte parvenir à un résultat. La vie de l'éducation nationale ne saurait être contentieuse et la judiciarisation de la vie scolaire, déjà présente, n'a pas à être accentuée. Ce département doit également bénéficier d'une convention de qualité.

Avec 850 000 enseignants pour 12 millions d'élèves, le taux d'encadrement n'est pas, en soi, un problème, puisqu'il faut y ajouter d'autres paramètres comme le nombre d'heures et la répartition territoriale. Nous devons assumer l'ensemble des conséquences de notre modèle éducatif. Ce sujet est plutôt qualitatif : le taux d'encadrement variera peu ou pas avec la mise en oeuvre de nos mesures, parmi lesquelles la seconde heure supplémentaire obligatoire. Quand bien même ces heures supplémentaires, à l'échelle d'un établissement, s'avéreraient insuffisantes, leur impact devrait se limiter à un élève pour trois classes.

La priorité pour le premier degré est clairement assumée et le second degré va connaître une baisse démographique à la suite de celle enregistrée dans l'enseignement primaire. C'est là un cap à passer. Valoriser la fonction de professeur et avoir une école primaire qui parvient à envoyer dans le secondaire des élèves aux compétences consolidées sont des enjeux qualitatifs auxquels nous tenons.

Les recteurs sont attentifs, au cas par cas, aux situations de handicap, à l'instar des épisodes qui viennent de se dérouler en Guyane et en Seine Maritime et relèvent avant tout des ressources humaines.

Je vous remercie de souligner l'importance de la scolarisation à l'âge de trois ans pour l'outre-mer. Cette démarche se traduit par des créations de postes en Guyane et à Mayotte où la faible scolarisation des enfants en bas âge explique, pour partie, les difficultés scolaires qu'ils éprouvent une fois à l'école élémentaire. Le PLF 2019, avec 80 millions d'euros en autorisations d'engagement et 50 millions d'euros en crédits de paiement, permet de financer un plan volontariste inédit pour Mayotte. Conformément aux attentes, l'État s'y engage budgétairement dans la durée et travaille activement avec les Comores pour limiter le flux migratoire. Il est désormais possible d'être optimiste pour Mayotte, même si de nombreux obstacles restent à franchir. La création d'un rectorat, comme l'y invite le projet de loi qui vous sera soumis début 2019, est à cet égard significative. Dans le domaine éducatif, nos engagements du plan Guyane seront également tenus.

C'est la première fois qu'est véritablement instaurée cette mesure, annoncée pourtant par le passé, de l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire. L'acquis que représente l'instruction obligatoire à trois ans est plus important que le problème posé. Il s'agit bel et bien d'une avancée.

Les collectivités seront accompagnées financièrement par l'État pour couvrir les frais générés par l'instruction obligatoire à trois ans, dans le respect de la constitution et avec le soutien de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur. L'évaluation financière se fera progressivement, puisque les 25 000 élèves supplémentaires que nous allons accueillir en maternelle doivent être rapportés à la baisse globale du nombre de 60 000 élèves. Les frais supplémentaires, qui seront, à cette occasion, engagés par les communes, seront compensés par l'État.

Les préconisations du rapport présenté par la sénatrice Laborde et le sénateur Brisson, tout comme celles du rapport sur le numérique de la présidente Morin-Desailly, auront une influence sur le contenu de la prochaine loi.

Une mission, conduite par l'ancien recteur Bernard Saint-Girons, sur la place du concours, devrait bientôt rendre ses conclusions. Il s'agit de faire évoluer la situation actuelle, avec une vision différente pour les premier et second degrés. L'exigence du niveau master demeurera inchangée, mais nos professeurs entreront dans la carrière de manière progressive, soit dans le cadre du pré-recrutement, soit suite au positionnement du concours lui- même. Il est nécessaire que le ministère de l'éducation nationale contribue, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur, à la définition des formations dispensées en ÉSPÉ. Il faut susciter des vocations de professeur, dès le collège et le lycée, en octroyant par la suite des bourses spécifiques et en favorisant la mixité sociale au sein de notre corps enseignants.

Si le PPCR peut renforcer le système à l'ancienneté, des mesures en faveur des jeunes professeurs sont prises. Nous faisons évoluer le système. La hausse de 1 000 euros annuel, qui vient s'ajouter à la désocialisation des heures supplémentaires qu'il sera plus aisé d'obtenir, représente un acquis à la fin du quinquennat au profit des jeunes certifiés et des jeunes professeurs des écoles. C'est pourquoi, la création d'un observatoire de la rémunération des professeurs, sous l'égide du directeur des ressources humaines du ministère, nous permettra d'évaluer concrètement les conséquences de ces mesures.

La gestion des ressources humaines (GRH) de proximité va permettre d'accompagner le développement des postes à profil, afin de tenir compte des particularités des territoires et des établissements ; le dédoublement des classes de CP et de CE1, ouvert aux enseignants volontaires, a permis le profilage des postes.

Nous devons renforcer l'enseignement général dans l'enseignement professionnel, car la culture générale et les savoirs fondamentaux de nos élèves doivent être consolidés. Cette démarche doit être avant tout qualitative. L'élève de l'enseignement professionnel reçoit déjà 34 heures d'enseignement par semaine. Dans la lignée du rapport de Régis Marcon et de Céline Calvez, la co-intervention, c'est-à-dire un enseignement général mieux articulé avec l'enseignement professionnel, est privilégiée pour favoriser la progression des élèves.

Je vous remercie de vos propos sur le conseil supérieur des programmes. Les professeurs sont d'ailleurs particulièrement invités à améliorer le contenu des programmes disponibles sur internet ; l'objectif ultime étant d'élever le niveau général des élèves.

Enfin, nos choix budgétaires se traduisent en dépenses salariales : 810 millions d'euros seront consacrés à l'augmentation du salaire des professeurs.

Merci également d'avoir souligné que l'engagement en faveur de l'école primaire, à travers notamment la création de postes, transparaît dans le budget. La baisse des crédits de la formation des professeurs n'est que le produit de la sincérisation des moyens que nous y consacrons. Cela n'exclut pas du tout de futures augmentations budgétaires en faveur de la formation des professeurs, à la condition de les articuler à des fins.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente.- Nous souhaitons qu'à l'avenir, du fait de l'existence des deux missions budgétaires, nous ayons, avec chacun d'entre vous, une audition distincte.

M. Claude Kern . - L'augmentation du budget consacré aux échanges internationaux et destiné à favoriser la mobilité européenne de nos jeunes concernera-t-elle les stages pour les baccalauréats professionnels et les brevets de technicien supérieur (BTS) ? Qu'en est-il de l'intégration de l'apprentissage au dispositif Erasmus ?

Ensuite, dans le cadre du programme Action publique 2022, les politiques destinées à la jeunesse et à la vie associative sont transférées aux collectivités qui devront assumer de nouvelles charges. C'est inacceptable. Ce transfert se fera au détriment des services de proximité dédiés et impliquera une meilleure mise en réseau des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) sur la totalité des territoires. Les régions ont-elles les moyens de récupérer la compétence jeunesse et sport, sans aucun transfert de moyens financiers supplémentaires ?

Enfin, je ne peux passer sous silence le bilinguisme, en liaison avec le projet de création de la collectivité européenne Alsace. Ce chapitre bilinguisme peut-il être mis en oeuvre avant le 1 er janvier 2028 et sera-t-il bénéficiaire de moyens financiers spécifiques ?

M. Laurent Lafon . - Quels sont les moyens consacrés à la mise en oeuvre des nouvelles filières d'enseignement ? Où en est la création d'un CAPES ou d'une agrégation d'informatique que préconisait le rapport présenté par Pierre Mathiot ?

En outre, le rapport de la Cour des comptes sur l'éducation prioritaire met au jour les écarts significatifs entre académies, en matière de coûts spécifiques et d'allocations budgétaires. Pour preuve, l'allocation de l'Académie de Créteil s'avère inférieure de 22 % à la moyenne nationale, sans parler de l'écart avec l'Académie de Dijon où l'allocation atteint 2 200 euros. Comment expliquer de telles différences ? Enfin, que pensez-vous du nouveau mécanisme d'allocation des moyens, destinés à restreindre les effets de seuil, dont la création est préconisée par la Cour des comptes ?

Mme Françoise Laborde . - Les membres de la réserve citoyenne pourraient-ils participer au service national universel comme tuteurs ?

L'abaissement du nombre des rectorats à 13 vous paraît-elle de nature à favoriser la proximité qu'attendent, notamment, les habitants et les élus des zones rurales ?

Mme Maryvonne Blondin . - Les contractuels sont désormais recrutés dans le premier degré. Allons-nous vers une contractualisation accrue au détriment du recrutement de fonctionnaires ? Les lauréats des concours, inscrits sur des listes complémentaires, ne pourraient-ils pas être affectés à des remplacements, pour répondre aux besoins dans des secteurs où sont employés des contractuels ? L'évolution du service de santé scolaire demeure préoccupante. En outre, l'enseignement public bilingue est inclus dans le pacte girondin qu'appelle de ses voeux le Président de la République.

M. Olivier Paccaud . - En 2016, du temps de la réserve parlementaire, 4 000 associations se partageaient 50 millions d'euros. Le fonctionnement du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) s'avère opaque pour les élus et le monde associatif. Ne pourrait-on pas s'inspirer du fonctionnement des commissions instaurées par la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) en instaurant une commission, à laquelle participeraient les élus et les parlementaires, pour la gestion du FDVA ?

M. Christian Manable . - Quels seront les formateurs, l'encadrement et les lieux d'accueil du service national universel ?

Mme Sonia de la Provôté . - Il faudrait, dès ce budget, annoncer des mesures pour le collège, dont les élèves vont être confrontés à la réforme des lycées. Il faut qu'ils soient accompagnés, au même titre que leurs successeurs.

Les classes passerelles, destinées aux enfants de moins de trois ans, permettent d'assurer leur scolarisation. Quel regard portez-vous sur ce dispositif ?

Enfin, les enfants sourds sont peu, voire mal accompagnés par l'éducation nationale. Ainsi à Caen, des parents ont porté plainte contre le rectorat qui a dû ouvrir une classe destinée aux enfants sourds. La surdité doit être considérée comme un handicap à part entière.

M. Pierre Ouzoulias . - La place de la philosophie va être valorisée dans le nouveau baccalauréat. La note finale de l'examen de philosophie va- t-elle être intégrée dans Parcoursup ?

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Le numérique participe de la nécessaire réforme des ÉSPÉ qui se trouvent, dans ce domaine, dans une position indigente.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Le volet international du budget fait partie de nos priorités, comme l'a souligné le Président de la République dans son discours de la Sorbonne en promouvant l'apprentissage de deux langues vivantes par tous les élèves. C'est là un très vaste sujet qui inclut les élèves de l'enseignement professionnel et des filières BTS.

Le soutien au bilinguisme apporté par la création d'une collectivité européenne en Alsace contribuera au dynamisme de l'apprentissage de l'allemand au niveau national, qui a dépassé le seuil des 500 000 élèves.

S'agissant des moyens budgétaires spécifiques pour les nouveaux enseignements de lycée, notre système se finance de la même façon que précédemment. La disparition des séries, à partir de la classe de première, induira celle des disparités d'effectifs selon les sections. Rien n'interdit désormais à un proviseur d'avoir quatre classes de terminales à 27 élèves et d'organiser le système de spécialités. Ce dispositif permettra ainsi d'assumer certains surcoûts susceptibles d'être générés par les spécialités.

Le rapport de la Cour des comptes est positif pour ce que nous avons commencé à faire dans l'éducation prioritaire. Il souligne les avancées et préconise les mesures que nous comptons prendre. Les préconisations de la mission Azéma-Mathiot visent à porter un terme aux effets de seuil pour améliorer l'éducation prioritaire.

La réserve citoyenne représente effectivement un capital de bonne volonté civique qui pourrait bénéficier au tutorat dans le cadre du SNU. Nous allons oeuvrer, avec Gabriel Attal, pour faire évoluer les choses. D'autres bonnes volontés, au sein des fédérations des délégués départementaux de l'éducation nationale (DDEN) ou de l'association des membres de l'ordre des palmes académiques (AMOPA), s'expriment autour de l'éducation nationale et gagneraient à être employées à l'occasion de la mise en oeuvre du SNU.

Il faut être créatif dans le monde rural en s'inspirant des bonnes pratiques. L'ouverture de nouvelles classes peut également être la conséquence de regroupements territoriaux.

L'instauration de la GRH de proximité, qui va de pair avec une gestion plus personnalisée, est une priorité. La contractualisation, qui concerne 4 % des enseignants du second degré et 0,5 % du premier degré, n'est pas vouée à être accrue, mais contribue à la souplesse du fonctionnement de notre dispositif. Même si ces contrats diffèrent de ceux évoqués par le ministre des comptes publics, la réflexion actuellement conduite par Bercy peut aboutir à un meilleur compromis entre l'actuelle instabilité et le statut de fonctionnaire.

Nous allons de l'avant dans la continuité du rapport de Chantal Manès et d'Alex Taylor qui préconise notamment le bilinguisme dès l'école primaire et l'amélioration de l'apprentissage des langues étrangères sur laquelle je m'exprimerai prochainement.

Le FDVA, dont le fonctionnement peut être amélioré, accorde déjà une place aux élus locaux.

La formation et la diversité des profils d'encadrement seront essentielles au fonctionnement du SNU qui représente également une opportunité pour la revitalisation des territoires ruraux.

L'orientation au collège et au lycée est essentielle. Dans le cadre du plan étudiant, que nous avons en partage avec le ministère de l'enseignement supérieur, les filières seront présentées aux élèves jusqu'à la classe de sixième, en commençant dès cette année par les élèves en seconde, à raison de 54 heures par an. Cette démarche sera conduite en partenariat avec les régions compétentes en matière d'information et d'orientation.

J'ai bien entendu votre intervention sur le handicap.

Enfin, l'importance de la philosophie fait consensus. La spécialité « littérature, philosophie et humanités » représente une opportunité de débuter son enseignement dès la classe de première. Les enseignements relevant du bloc général sont complémentaires de ceux donnés en spécialité. L'intégration de la note de philosophie dans Parcoursup présente une difficulté technique, puisque les dossiers seront adressés avant qu'elle ne soit délivrée. La philosophie est la seule discipline commune à tous que l'on passe à la fin du parcours secondaire.

Je suis persuadé de l'importance de la place du numérique dans la formation des professeurs. Ce thème sera d'ailleurs abordé lors de l'examen du projet de loi.

Enfin, s'agissant de la santé scolaire, 687 millions d'euros au titre des dépenses de personnels, et 3,8 millions d'euros pour les frais de déplacement des personnels itinérants sont prévus. Les services de santé scolaire des collectivités locales et les comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté bénéficieront respectivement de 2,79 millions et de un million d'euros. Au-delà de ces augmentations, ces sujets sont avant tout d'ordre qualitatif. Confrontés au manque de recrutement, nous sommes engagés à l'effectivité de la visite médicale des élèves de trois à six ans, en mobilisant, le cas échéant, la médecine civile. Un début de progrès a été amorcé, comme en témoigne l'évolution de nos relations avec le ministère de la santé.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Le volume de nos questions s'explique par le caractère contraint du débat en séance publique. Les questions doivent ainsi être posées en amont et nous vous remercions d'y avoir répondu.


* 1 Avant l'adoption d'un amendement prévoyant d'ajouter 15 millions d'euros au programme 219.

* 2 Note de présentation de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du rapporteur spécial Éric Jeansannetas, PLF 2019, p. 16.

* 3 La contribution de l'État au financement de la SOLIDEO doit passer de 120 millions d'euros en 2020 à 200 millions d'euros en 2021, 235 millions d'euros en 2022 et 260 millions d'euros en 2023.

* 4 Cinq fédérations sont considérées comme étant en situation financière fragile (Athlétisme, Danse, Ski nautique, Maccabi, Taekwondo) tandis que 4 autres fédérations unisport connaissent une situation dégradée (Baseball, Hockey, Cyclisme et Échecs).

* 5 Nos collègues, Alain Dufaut et Jacques-Bernard Magner, ont mis en évidence les difficultés engendrées par la baisse des contrats dans leur rapport d'information n° 321 (2017-2018) « Réduction des contrats aidés : offrir une alternative crédible au secteur associatif »

* 6 L'accréditation du laboratoire de Chatenay-Malabry avait été suspendue par l'AMA le 26 septembre 2017 à la suite d'un signalement direct par le laboratoire de dysfonctionnements intervenus au cours du processus d'analyse. La levée de la suspension a été notifiée à l'AFLD le 21 décembre 2017.

* 7 Rapport relatif à la création d'un service national universel établi par le général de division Daniel Menaouine, Juliette Méadel, Kleber Arhoul, Marion Chapulut, Thierry Tuot, Emmanuelle Pérès, Guy Lavocat, 26 avril 2018.

* 8 Audition du 25 octobre 2018

* 9 Auxquels il faut ajouter 30 000 PEC dédiés à l'accompagnement des élèves en situation de handicap sont le financement est transféré directement au ministère de l'éducation nationale.

* 10 Salaire minimum interprofessionnel de croissance.

* 11 L'article 3 du projet de loi de finances pour 2019 prévoit une avance égale à 60 % de la réduction d'impôt accordée l'année précédente qui devra être remboursée si les dons prévus ne sont pas effectués.

* 12 Direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.

* 13 Créé au 1 er janvier 2018, il regroupe les contrats aidés et les dispositifs d'insertion par l'activité économique.

* 14 Contrats aidés : offrir une alternative crédible au secteur associatif ; rapport d'information n° 321 (2017-2018) du 21 février 2018.

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