III. LES ARTICLES RATTACHÉS À LA MISSION

Les articles 79 à 81 ter du projet de loi de finances, rattachés à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », comportent un ensemble de dispositions qui concernent principalement la répartition des dotations de fonctionnement et d'investissement entre les collectivités territoriales, ainsi que la péréquation « horizontale » des ressources entre collectivités.

Le tableau ci-dessous en présente un aperçu.

Aperçu des dispositions des articles 79 à 81 ter du projet de loi de finances

Article 79

Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) - Réforme de la dotation d'intercommunalité.

Article 79 bis

Obligation pour le ministre chargé des collectivités territoriales de préciser les motifs des variations importantes d'attributions individuelles de dotation globale de fonctionnement, lors de leur constatation annuelle par arrêté.

Article 79 ter

Institution d'une garantie partielle et non renouvelable (« sortie lissée ») pour les communes perdant leur éligibilité à la troisième fraction de la dotation de solidarité rurale (DSR).

Article 79 quater

Relèvement de 13,5 % à 14 % des recettes fiscales agrégées du plafond de la contribution cumulée d'un ensemble intercommunal ou d'une commune isolée au titre du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France (FSRIF).

Article 79 quinquies

Non-application en 2019 des dispositions imposant à la métropole du Grand Paris de verser à ses établissements publics territoriaux (EPT) une dotation de soutien à l'investissement territorial.

Article 79 sexies

Prorogation en 2019 de la prise en compte de la dotation d'intercommunalité perçue par les EPCI à fiscalité propre préexistants pour le calcul de la dotation d'équilibre perçue ou versée par les EPT de la métropole du Grand Paris.

Article 79 octies

Création, par prélèvement sur la DGF du bloc communal, d'une dotation au bénéfice des communes de moins de 10 000 habitants dont le territoire terrestre est couvert à plus de 75 % par un site Natura 2000 et dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à 1,5 fois la moyenne des communes de la même strate démographique.

Article 79 nonies

Rapport au Parlement sur le coefficient logarithmique utilisé pour le calcul du potentiel financier agrégé par habitant des ensembles intercommunaux.

Article 79 decies

Rapport au Parlement sur le coefficient logarithmique utilisé pour le calcul du potentiel fiscal des communes pris en compte pour le calcul de leur dotation forfaitaire.

Article 80

Report de l'automatisation du FCTVA

Article 81

Répartition de la dotation d'équilibre des territoires ruraux (DETR), de la dotation politique de la ville (DPV) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) - Réforme de la dotation globale d'équipement (DGE) des départements.

Article 81 bis

Extension de l'éligibilité à la DETR aux EPCI à fiscalité propre formant un ensemble de plus de 75 000 habitants autour d'une ou de plusieurs communes centre de plus de 20 000 habitants, dès lors que leur densité de population est inférieure à 150 habitants par kilomètre carré.

Article 81 ter

Création d'un fonds de stabilisation de 115 millions d'euros par an à destination des départements connaissant une situation financière dégradée - Relèvement de 12 % à 15,3 % du produit des droits de mutation à titre onéreux perçus par un département du plafond de sa contribution cumulée au titre du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux et du fonds de solidarité des départements.

Votre rapporteur a choisi d'examiner plus particulièrement celles de ces dispositions financières qui soulèvent des questions institutionnelles, c'est-à-dire celles qui concernent la répartition de la dotation d'intercommunalité et des dotations d'investissement.

A. LA RÉFORME DE LA DOTATION D'INTERCOMMUNALITÉ (ARTICLES 79 À 79 TER ET ARTICLE 79 OCTIES)

Les articles 79 à 79 ter du projet de loi de finances pour 2019 traitent de la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. On peut y rattacher l'article 79 octies , qui crée une nouvelle dotation par prélèvement sur la dotation forfaitaire des communes.

Modifications de la répartition de la dotation globale de fonctionnement

Les principales innovations introduites par le projet de loi de finances pour 2019, dans sa version adoptée par l'Assemblée nationale, dans la répartition de la DGF sont les suivantes.

En ce qui concerne la DGF des départements , l'article 79 tend à modifier les règles de plafonnement de l'écrêtement de la dotation forfaitaire. En effet, les départements dont le potentiel financier par habitant est au moins égal à 0,95 fois la moyenne subissent aujourd'hui une minoration de leur dotation forfaitaire, destinée à financer la hausse du volume global théorique de cette même dotation forfaitaire (due à l'augmentation de la population), ainsi que l'augmentation des différentes composantes péréquatrices de la DGF départementale. Cette minoration ne serait plus plafonnée à 5 % de la dotation forfaitaire, mais à 1 % des recettes réelles de fonctionnement de chaque département concerné.

2° En ce qui concerna la DGF des communes et de leurs groupements à fiscalité propre :

a) les principales dotations de péréquation des communes (dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale [DSU] et dotation de solidarité rurale [DSR]) continueraient à progresser de 90 millions chacune, cette hausse étant financée par écrêtement de la dotation forfaitaire des communes et de la dotation de compensation des EPCI à fiscalité propre ;

b) les communes qui perdent leur éligibilité à la DSR continueraient à percevoir, pendant un an, une attribution égale à la moitié de celle perçue l'année précédente ;

c) la population communale prise en compte pour la répartition de la DGF comprendrait, non plus un habitant par résidence secondaire, mais 1,5 habitant, dans les communes de moins de 3 500 habitants dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur au potentiel fiscal moyen par habitant des communes appartenant à la même strate démographique et dont la part de la majoration au titre des résidences secondaires dans la population (avant application de la nouvelle disposition) est supérieure à 30 %. Cette mesure est destinée à mieux prendre en compte les charges supportées par les communes touristiques les moins riches ;

d) une nouvelle dotation serait instituée au bénéfice des communes de moins de 10 000 habitants dont le territoire est couvert à plus de 75 % par un site Natura 2000 . Elle serait financée par un prélèvement sur la DGF du bloc communal, lui-même obtenu par écrêtement de la dotation forfaitaire des communes et de la dotation de compensation des EPCI à fiscalité propre ;

e) enfin, la dotation d'intercommunalité versée aux EPCI à fiscalité propre serait profondément réformée (voir ci-dessous).

Chacune de ces dispositions mériterait un examen attentif.

Votre rapporteur doute, en particulier, qu'il soit opportun d'instituer de nouvelles dispositions spécifiques en faveur de certaines catégories de communes (touristiques ou situées dans un parc naturel), tant que l'on ne se sera pas attelé à une réforme d'ensemble de la DGF des communes afin d'en atténuer les iniquités.

Par ailleurs, il aurait fallu corriger préalablement les aberrations constatées en 2018 . En effet, contrairement aux engagements présidentiels, pas moins de 16 745 communes ont vu leur DGF baisser en 2018. Ces variations sont principalement dues :

- en premier lieu, à la hausse des dotations de péréquation, qui pèse sur la dotation forfaitaire des communes ;

- en second lieu, à la refonte de la carte intercommunale , qui a abouti à des fluctuations considérables et en partie artificielles du potentiel financier des communes, puisque celui-ci dépend en partie du potentiel fiscal des EPCI à fiscalité propre. Ainsi, des communes « pauvres » qui ont été intégrées à des EPCI « riches » ont vu leur potentiel financier augmenter et leurs dotations de péréquation baisser , alors même qu'elles ne percevaient pas les retombées financières de leur appartenance à ces établissements. L'Association des maires de France évalue à 3 600 communes environ (principalement des communes de moins de 1 000 habitants) le nombre de celles pour lesquelles la baisse des dotations de péréquation a dépassé 1 % de leurs recettes réelles de fonctionnement. Pour ces seules communes, elle demande la mise en place d'un fonds de lissage par prélèvement sur les recettes de l'État.

Cette question devra être abordée lors de l'examen en séance publique de la première partie du projet de loi de finances.

La réforme de la dotation d'intercommunalité appelle un examen plus attentif de la part de votre commission des lois, par son incidence sur l'architecture institutionnelle locale.

1. Une dotation hors normes par son impact sur l'architecture institutionnelle locale

Créée par la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale , dite « loi Chevènement », la dotation d'intercommunalité, attribuée aux EPCI à fiscalité propre, est une composante de la dotation d'aménagement des communes, qui comprend également les dotations de péréquation attribuées à celles-ci.

Alors que les autres composantes de la DGF ont pour seul objet d'assurer une participation de l'État au financement des dépenses de fonctionnement nécessaires à l'exercice, par les collectivités territoriales, des compétences décentralisées, la dotation d'intercommunalité, dans son principe même et par ses modalités de répartition, a également pour fonction d'inciter à l'intégration intercommunale .

En effet, l'exercice par les EPCI à fiscalité propre des compétences qui leur ont été transférées par leurs communes membres est, en principe, financé par les ressources fiscales qu'ils perçoivent en lieu et place desdites communes (il s'agit soit de taux additionnels aux impositions directes locales sur les ménages, soit de l'intégralité de la fiscalité professionnelle perçue sur le territoire de l'EPCI). En attribuant aux EPCI à fiscalité propre une dotation spécifique, l'État assure un surplus de moyens financiers aux territoires où les communes se sont regroupées dans de tels établissements (ce qui est désormais le cas de la quasi-intégralité du territoire national).

Par ailleurs, les règles de répartition de la dotation d'intercommunalité font la part belle aux territoires les plus intégrés .

En effet :

- la dotation d'intercommunalité est actuellement divisée en quatre enveloppes, destinées respectivement 1° aux communautés urbaines et aux métropoles, 2° aux communautés d'agglomération, 3° aux communautés de communes à fiscalité professionnelle unique, 4° aux communautés de communes à fiscalité additionnelle. Le montant de dotation par habitant diffère selon la catégorie juridique d'EPCI à fiscalité propre, au profit des catégories les plus intégrées 33 ( * ) ;

- au sein des trois dernières enveloppes, la répartition des deux parts de la dotation d'intercommunalité (une dotation forfaitaire et une dotation de péréquation) s'opère en fonction de la population de chaque établissement, de son potentiel fiscal (en ce qui concerne la dotation de péréquation) mais aussi de son coefficient d'intégration fiscale (CIF) , c'est-à-dire du rapport entre les ressources fiscales perçues par l'établissement et celles perçues par les communes. Le CIF est un indicateur du degré d'intégration des compétences au sein de l'ensemble intercommunal ;

- enfin, les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique les plus intégrées (celles qui exercent au moins six des onze blocs de compétences mentionnés à l'article L. 5214-23-1 du code général des collectivités territoriales et remplissent les conditions de population fixées au même article) bénéficient d'un montant par habitant plus élevé : c'est ce qu'on appelle la « DGF bonifiée » .

Les communes ont donc été fortement incitées, depuis 1999, à se regrouper en EPCI à fiscalité propre et à transférer à ces derniers un nombre croissant de compétences, avec les produits fiscaux afférents. Les établissements eux-mêmes ont été encouragés à changer de catégorie juridique pour entrer dans une catégorie plus intégrée, ce qui implique de nouveaux transferts obligatoires de compétences.

2. Une répartition inéquitable et extrêmement volatile

La répartition de la dotation d'intercommunalité fait l'objet de critiques récurrentes.

Les différences de montant par habitant entre les catégories juridiques d'EPCI à fiscalité propre sont de moins en moins compréhensibles . En effet, la catégorisation juridique ne reflète plus correctement le degré d'intégration des compétences, ni donc les charges assumées par l'EPCI : le coefficient d'intégration fiscale moyen des communautés d'agglomération et celui des communautés de communes à fiscalité professionnelle unique ou à fiscalité additionnelle est aujourd'hui quasiment identique. En outre, si les EPCI à fiscalité propre les plus urbanisés supportent des charges propres (charges de centralité, transport, logement...), c'est vrai aussi des communautés les plus rurales, qui ont à aménager un espace souvent plus vaste et moins équipé.

Coefficient d'intégration fiscale moyen des communautés de communes et d'agglomération

CIF 2017 moyen

CIF 2018 moyen

Communautés d'agglomération

0,352996

0,346562

Communautés de communes à fiscalité professionnelle unique

0,356669

0,366753

Communautés de communes à fiscalité additionnelle

0,334189

0,353265

Source : commission des finances de l'Assemblée nationale

En outre, l'évolution des attributions individuelles des communautés de communes et d'agglomération est enfermée dans un « tunnel » qui ne permet pas de tenir parfaitement compte de l'évolution de la population et des charges de chaque établissement : ces communautés ne peuvent percevoir moins de 95 % ni plus de 120 % (pour les communautés de communes) ou 130 % (pour les communautés d'agglomération) de l'attribution perçue l'année précédente. À cela s'ajoutent diverses garanties renforcées, notamment au profit des EPCI à fiscalité propre dont le CIF dépasse un certain seuil, qui ne peuvent voir leur dotation baisser.

En dépit de ces mécanismes stabilisateurs, les attributions ont été extrêmement volatiles au cours des dernières années . Cela tient au fait que le montant prélevé sur l'attribution de chaque établissement au titre de la contribution au redressement des finances publiques (CRFP) est calculé après le montant des enveloppes par catégorie et de l'attribution théorique de chaque établissement compte tenu des garanties.

Ces défauts sont aggravés par la répartition de la dotation en quatre enveloppes . En effet, lorsqu'un EPCI à fiscalité propre change de catégorie, il modifie à la fois le montant total et les paramètres de répartition de l'enveloppe dont il « sort » et de l'enveloppe où il « entre ». Dans le cas où cet établissement percevait une dotation élevée par rapport à la moyenne de sa nouvelle catégorie et où il a droit, par conséquent, à une dotation « garantie » également plus élevée, les autres établissements sont perdants. Cela peut d'ailleurs les conduire à atteindre le seuil de 95 % de la dotation perçue l'année précédente, ce qui fait jouer de nouvelles garanties. Or le montant de l'enveloppe est lui-même plafonné, puisqu'il est égal au produit du nombre d'habitants par le montant moyen par habitant fixé par la loi...

À terme, la répartition de la dotation d'intercommunalité risque de s'avérer impossible , les différentes règles qui la gouvernent ne pouvant être respectées simultanément.

3. Une réforme au milieu du gué

La réforme proposée par le Gouvernement permettra au moins de continuer à répartir la dotation d'intercommunalité au cours des prochaines années. Elle corrige également les aberrations les plus criantes du système actuel. Elle n'en maintient pas moins certaines iniquités et ne s'attaque pas aux défauts fondamentaux de cette dotation.

Il est d'abord prévu d' unifier les enveloppes de la dotation d'intercommunalité , ce qui est bienvenu. Le montant total de la dotation ne serait plus déterminé par un montant moyen par habitant, mais par l'application des différentes règles d'évolution applicables à chaque groupement à partir des montants attribués en 2018. Les attributions moyennes par habitant des différentes catégories d'EPCI à fiscalité propre devraient donc se rapprocher avec le temps, sauf à ce que l'application des mécanismes de garantie bloque ce mouvement.

Le « tunnel » d'évolution des attributions individuelles serait d'ailleurs resserré , ce qui ralentirait l'homogénéisation des montants par catégorie mais aurait l'avantage de garantir plus de stabilité aux établissements. Désormais, l'attribution d'un EPCI à fiscalité propre ne pourrait être ni inférieure à 95 %, ni supérieure à 110 % du montant perçu l'année précédente.

Les établissements à fort coefficient d'intégration fiscale continueraient à se voir garantir une attribution au moins égale à celle de l'année précédente . Sur ce point, l'inégalité demeure : cette garantie bénéficierait aux métropoles, communautés urbaines et communautés d'agglomération dont le CIF est supérieur à 0,35 (seuil initialement fixé à 0,4 et abaissé à l'Assemblée nationale, par amendement du Gouvernement), tandis que les communautés de communes devraient atteindre un CIF de 0,5. Cette disparité a d'autant moins de signification que le texte transmis par l'Assemblée nationale réduit à presque rien les différences de mode de calcul du CIF entre ces différentes catégories.

Par ailleurs, les métropoles bénéficieraient d'une majoration de leur CIF , qui serait pondéré par un coefficient d'1,1 (coefficient initialement fixé à 1,2 et abaissé à l'Assemblée nationale, par le même amendement gouvernemental).

Les retouches apportées à l'Assemblée nationale ont eu principalement pour objet d'atténuer l'impact négatif de la réforme sur les communautés d'agglomération, qui - selon des simulations auxquelles nos collègues députés ont eu accès - auraient été nombreuses à voir leur dotation baisser. Les communautés de communes y ont perdu, puisque l'écart s'est accru avec les autres catégories d'EPCI à fiscalité propre s'agissant des conditions pour bénéficier de la garantie de stabilité de leur dotation. C'est sur elles, principalement, que pèsera le poids des garanties - et ce poids sera lourd puisque, en ce qui concerne les communautés d'agglomération, le CIF requis pour bénéficier de la garantie de non-baisse serait désormais très proche du CIF moyen.

Le choix a donc été fait d'atténuer les effets redistributifs de la réforme. Le Gouvernement met cependant en avant les progrès accomplis par rapport à la situation actuelle, qui ne sont pas contestables 34 ( * ) .

Par ailleurs, un amendement de notre collègue députée Christine Pires Beaune et plusieurs de ses collègues, sous-amendé par le Gouvernement, prévoit d' intégrer dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale des communautés de communes le produit des redevances d'assainissement (comme c'est déjà le cas pour les autres catégories d'EPCI à fiscalité propre), mais aussi des redevances d'eau (ce qui serait spécifique à ces communautés), à compter du 1 er janvier 2020. Une telle disposition est effectivement de nature à augmenter le CIF, et donc la dotation d'intercommunalité des communautés de communes qui exercent cette compétence. Cependant, elle pénaliserait les communautés de communes qui ne l'exercent pas - ce qui restera possible, jusqu'en 2026, si les communes exercent le droit d'opposition qui leur a été reconnu par la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes . C'est pourquoi votre commission, sur proposition de son rapporteur, a adopté un amendement n° II-99 visant à reporter l'application de cette mesure au 1 er janvier 2026.

Enfin, la réforme du Gouvernement ne s'attaque pas aux effets pervers que le critère du coefficient d'intégration fiscale entraîne sur l'organisation institutionnelle du bloc communal . En effet, à la suite de la refonte de la carte intercommunale, de nombreux EPCI à fiscalité propre, devenus extrêmement vastes, ont été conduits à restituer des compétences de proximité à leurs communes membres, elles-mêmes parfois renforcées par leur regroupement en communes nouvelles. C'est le cas, par exemple, de la communauté d'agglomération du Grand Annecy, qui a restitué aux communes l'exercice des compétences relatives à la petite enfance, aux bâtiments scolaires et aux activités périscolaires, au sport, à la culture ou à l'action sociale (sauf la prise en charge des personnes âgées). La restitution de compétences s'étant naturellement accompagnée de celle des ressources nécessaires, ce choix, guidé par le principe de subsidiarité, a fait baisser le coefficient d'intégration fiscale de la communauté et, partant, sa dotation d'intercommunalité, sans que les communes bénéficient pour autant d'un surplus de dotations. En un mot, la restitution de compétences aux communes se traduit par une perte nette de recettes pour l'ensemble intercommunal formé par les communes et leur groupement .

Une solution à ce problème structurel serait de fusionner la dotation d'intercommunalité avec la dotation forfaitaire des communes, pour créer une dotation des ensembles intercommunaux qui pourrait, elle, être répartie entre les communes et leurs groupements à fiscalité propre en fonction des compétences exercées et des charges supportées par chaque échelon (le coefficient d'intégration fiscale pourrait ici servir d'indicateur sans inconvénient). Une telle solution est sans doute prématurée, et exigerait des simulations préalables et un paramétrage méticuleux pour éviter des variations intempestives dans les attributions individuelles.

Votre rapporteur recommande donc un aménagement plus limité. Sur sa proposition, votre commission a adopté un amendement n° II-98 visant à ce que, en cas de baisse du coefficient d'intégration fiscale d'un EPCI à fiscalité propre, la somme correspondant à la diminution de dotation d'intercommunalité qui en résulte vienne financer une dotation de consolidation répartie entre les communes membres au prorata de leur population .

Ainsi, les élus locaux pourront ajuster la répartition des compétences au niveau local en fonction des nécessités du terrain, au lieu de se déterminer selon des considérations purement financières.


* 33 Le montant moyen par habitant de la dotation d'intercommunalité est de 20,05 euros pour les communautés de communes à fiscalité additionnelle, de 24,48 euros pour les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique (voire de 34,06 euros pour celles qui bénéficient d'une « DGF bonifiée »), de 48,08 euros pour les communautés d'agglomération. Les communautés urbaines et métropoles bénéficient, quant à elles, d'un montant fixe de 60 euros par habitant, augmenté le cas échéant d'une garantie.

* 34 Dans l'ensemble, selon les chiffres avancés par le Gouvernement en audition, parmi les communautés de communes à fiscalité additionnelle, 171 verraient leur dotation augmenter, une seule la verrait baisser ; parmi les communautés de communes à fiscalité professionnelle unique, 667 verraient leur dotation augmenter, 76 la verraient baisser. Aucun chiffre n'a en revanche été communiqué à votre commission quant à l'impact du texte adopté à l'Assemblée nationale sur les communautés d'agglomération.

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