EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UN PROGRAMME 204 EN VOIE DE DISPARITION

A. UN PROGRAMME CONDAMNÉ À ÊTRE DÉPOUILLÉ DE L'ENSEMBLE DE SES OPÉRATEURS

1. L'absence d'une véritable doctrine dans la répartition du financement des opérateurs sanitaires entre l'État et l'assurance maladie

Conformément aux recommandations de la Cour des comptes, un mouvement de décroisement du financement des opérateurs sanitaires a été engagé dans la période récente. Ce décroisement a très majoritairement consisté en un transfert des parts de financement de ces opérateurs de l'État à l'assurance maladie. Depuis 2015, ce sont ainsi près de 299,8 millions d'euros qui ont été transférés de l'État vers l'assurance maladie pour le financement de cinq opérateurs 2 ( * ) , de la politique de la formation médicale 3 ( * ) et du fonds d'intervention régional (FIR) 4 ( * ) , soit 43,4 % des crédits de paiement accordés au programme 204 en loi de finances initiale pour 2014.

En sens inverse, le seul décroisement de financement opéré de l'assurance maladie vers l'État a concerné l' agence nationale de santé publique , plus connue sous le nom de « Santé publique France ». Ce décroisement était justifié par la volonté du Gouvernement de renforcer le pilotage national de cet opérateur central dans l'animation et la mise en oeuvre de notre politique de prévention et de gestion des crises sanitaires, aux côtés de l' agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS).

Or l'article 34 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020 procède au mouvement inverse, en prévoyant, cette fois-ci, le financement intégral de Santé publique France par l'assurance maladie . Lors de son audition par votre commission sur le PLFSS pour 2020, la ministre des solidarités et de la santé a justifié ce transfert par sa volonté de rendre plus visible l'effort budgétaire consenti à notre politique de prévention et de promotion de la santé, à laquelle participe l'agence nationale de santé publique.

Votre commission regrette le manque de cohérence des choix du Gouvernement dans le financement de Santé publique France. Son financement intégral par l'État semblait légitime au regard du rôle pivot que cet opérateur occupe dans notre système de veille épidémiologique et de sécurité sanitaire . À l'heure où il s'emploie à renforcer la coordination des différents acteurs intervenant dans la gestion des crises sanitaires à travers la mise en place d'un comité d'animation du système d'agences (CASA), il paraît surprenant que l'État veuille se dessaisir du pilotage financier de Santé publique France.

Par ailleurs, votre commission insiste sur la nécessité pour Santé publique France de compter sur des moyens stabilisés, après avoir participé par des économies de l'ordre de 10 % depuis 2010 au redressement des finances publiques. Dans le cadre budgétaire contraint que connaît aujourd'hui l'assurance maladie, il est peu probable que les moyens de Santé publique France puissent un jour rivaliser avec ceux consentis à son agence homologue au Royaume-Uni, Public Health England , dont les crédits annuels dépassent les 5 milliards d'euros.

2. La probable sortie prochaine de l'institut national du cancer du périmètre du programme 204

Le projet annuel de performances de la mission « Santé » annexé au projet de loi de finances pour 2020 ne décrit désormais plus, dans sa partie « Opérateurs », que les crédits et effectifs de l' institut national du cancer (INCa). D'un montant de 41,3 millions d'euros en crédits de paiement en 2020, la subvention pour charges de service public de l'institut est en diminution de 2,1 % par rapport à 2019.

La question du transfert du financement de l'INCa du budget de l'État vers l'assurance maladie se posera nécessairement, et sans doute dans un avenir très proche. Ses missions étant étroitement liées à l'organisation des soins en oncologie, son financement par l'assurance maladie apparaît plus légitime que dans le cas de Santé publique France. Dans ses réponses adressées au questionnaire de votre commission, le ministère des solidarités et de la santé reconnaît examiner les modalités d'un tel transfert, qui reste, pour l'heure, compliqué par le statut de groupement d'intérêt public de l'INCa, dont sont membres l'État, la caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) mais également des établissements publics de recherche comme l'institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et le centre national de la recherche scientifique (CNRS), des associations et des fédérations hospitalières.

La subvention pour charges de service public de l'ANSéS est éclatée, pour sa part, entre six programmes et ne figure donc pas à titre principal dans le programme 204. La part du ministère des solidarités et de la santé dans son financement augmente néanmoins dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020 : sa subvention au titre du programme 204 s'établira ainsi à 21,9 millions d'euros en crédits de paiement en 2020, en progression de plus de 51 % par rapport à 2019. Le poids du ministère dans le financement de l'ANSéS s'élèvera ainsi à 20,8 %, contre 14,2 % en 2019. Le financement de l'agence reste néanmoins principalement assuré par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation au travers du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », à hauteur de 64,5 millions d'euros en crédits de paiement en 2020.


* 2 En loi de finances initiale pour 2015 : l'agence technique de l'information et de l'hospitalisation (ATIH), le centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG) et la Haute Autorité de santé (HAS) ; en loi de finances initiale pour 2017 : le fonds d'intervention régional ; en loi de finances initiale pour 2018 : l'Agence de la biomédecine (ABM) et l'École des hautes études en santé publique (EHESP).

* 3 En loi de finances initiale pour 2015.

* 4 En loi de finances initiale pour 2017.

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