III. LA TRAJECTOIRE ASCENDANTE DE LA LPM LAISSE ENCORE SUBSISTER DES VESTIGES DES LOGIQUES DE DÉCROISSANCE

a) La situation anachronique de l'ONERA

Il semble qu'après plusieurs exercices où le Sénat n'a cessé de dénoncer l'aberration du sous-financement de l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA), la raison ait fini par l'emporter sur la volonté d'exécution sans modification d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) 2017-2021 complètement anachronique, car marqué par la logique de décroissance des moyens des LPM précédentes.

En 2021, l'ONERA verra sa subvention pour charges de service public passer de 106 M€ à 110 M€. Il s'agit là d'un revirement bienvenu, quoique tardif et limité :

- tardif, car il n'intervient qu'après plusieurs années de mobilisation des parlementaires, dans un contexte où ni nos partenaires ni nos adversaires ne ménagent leurs efforts dans ces domaines d'excellence ;

- limité, car l'étude de l'Agence de l'innovation de défense (AID) que nous citions l'an passé avait évalué à 5 M€ l'écart de rémunération cumulé entre les ingénieurs de l'ONERA et ceux de la DGA, à situation égale. L'accroissement de la subvention ne servira donc qu'à combler (imparfaitement) cet écart.

De même, le plafond d'emploi de l'Office est enfin revu à la hausse, avec une progression de 11 ETP.

Il importe désormais que l'effort soit poursuivi en ce sens, et que le prochain COP donne enfin à l'ONERA les perspectives de développement que ses résultats scientifiques remarquables imposent. Notre commission y sera très attentive.

b) L'incohérente décroissance du réseau des missions militaires à l'étranger

Au titre de la réforme « Action publique » 2022 sur les réseaux de l'Etat à l'étranger, le MINARM s'est engagé sur une économie de masse salariale de 3,2 M€ sur la période 2018-2022, soit environ 5 % d'économie. Le ministère cherche à atteindre cette cible par une déflation nette de 16 ETP sur la période, ce qui l'amène à reconnaître que « l'impact de ces mesures en année pleine sera particulièrement net en 2021 et 2022 » .

Les conséquences de ces orientations, dans un contexte où les crédits du MINARM augmentent, globalement, de 1,6 milliard d'euros, sont pour le moins déconcertantes , surtout lorsque l'on songe à la situation géopolitique dans un certain nombre des missions qui voient leur format réduit :

- Londres (si elle reste une des missions les plus importantes, on s'interroge sur l'opportunité d'une telle réduction dans le contexte du Brexit, alors que l'enjeu d'un maintien de notre haut niveau de coopération militaire avec le Royaume-Uni est si fondamental) ;

- Moscou, Kiev et Tbilissi ;

- Alger et Tunis ;

- Amman, alors que notre commission soulignait encore dans un rapport récent 5 ( * ) le caractère stratégique de la Jordanie pour la sécurité du Moyen-Orient ;

- Mascate, dans un contexte de tensions extrêmes entre les voisins du sultanat d'Oma (Iran, Arabie saoudite), par ailleurs frontalier du Yémen et contrôlant le Golfe, et au moment où un nouveau souverain accède au trône ;

- Islamabad ;

- Les représentations auprès des organisations internationales, à travers les missions de Bruxelles (OTAN et UE), New-York (ONU) et Vienne (OSCE).

Ces personnels des missions militaires contribuent à une connaissance fine des pays dans lesquels elles sont implantées et facilitent les liens avec les autorités locales.

Les réductions d'effectifs, dans le contexte actuel de montée des tensions internationales, sont un contresens , surtout qu'elles viennent s'ajouter à une réduction de 34 % du format depuis 2008. Elles reflètent l'imposition d'une toise de déflation qui n'a plus lieu d'être. La conséquence en est un réseau de missions militaires à l'os :

- sur les 166 pays actuellement couverts par ce réseau, près de la moitié le sont en non-résidence ;

- Les deux tiers de nos missions de défense sont au format minimal d'un officier assisté d'un sous-officier.


* 5 Rapport 656 (2018-2019) La Jordanie, clef de voute d'un Moyen-Orient en crise . Rapport de MM. Olivier CIGOLOTTI, Gilbert ROGER, Mme Isabelle RAYMOND-PAVERO et M. Jean-Pierre VIAL.

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