B. DES CRÉDITS POUR L'ENTRETIEN DU RÉSEAU ROUTIER NATIONAL NON CONCÉDÉ QUI RESTENT INSUFFISANTS

1. L'état du réseau routier national non concédé continue de se dégrader malgré l'augmentation des crédits dédiés à son entretien

En 2021, les dépenses relatives à l'entretien courant et préventif et aux opérations de régénération du réseau routier national non concédé devraient atteindre 877 millions d'euros, dont 304 millions d'euros de crédits issus du budget général, 543 millions d'euros de crédits de l'Afitf et 30 millions d'euros de participations de collectivités territoriales ou de tiers privés. Parmi ces crédits, 83 millions d'euros seront dédiés à l'entretien des ouvrages d'art du réseau routier national.

Ce montant est conforme à la trajectoire prévue par la LOM, qui prévoit d'allouer à l'entretien, l'exploitation et à la modernisation du réseau routier national 850 millions d'euros par an en moyenne d'ici 2022, puis 930 millions d'euros par an sur la période 2023-2027.

Évolution des crédits consacrés à l'entretien réseau routier national non concédé

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Prévision 2021*

Crédits d'entretien du réseau routier national non concédé

642

696

776

708

813

824

872

877

dont crédits dédiés à l'entretien des ouvrages d'art

41

47

52

59

68

64

86

83

* Hors plan de relance.

Source : Ministère de la transition écologique

Comme cela a été rappelé à plusieurs reprises par la commission, ce montant reste cependant inférieur à celui préconisé par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) dans son rapport de janvier 2018 et par l'audit externe sur l'état du réseau routier national non concédé publié en avril 2018, qui avaient estimé qu' un milliard d'euros par an étaient nécessaires pour enrayer la dégradation du réseau.

Aussi, la dégradation de l'état des chaussées se poursuit malgré l'augmentation des moyens dédiés leur entretien. L'indicateur de l'état des chaussées 58 ( * ) montre une augmentation de la part des chaussées nécessitant un entretien de surface et de structure entre 2018 et 2019, ce qui confirme une tendance à l'oeuvre depuis de nombreuses années.

État des chaussées du réseau routier non concédé

22018

22019

Proportion des chaussées nécessitant un entretien de surface et de structure

46,10 %

48,9 %

dont proportion des chaussées nécessitant un entretien structurel

16,75 %

18,96 %

Source : Ministère de la transition écologique

Dans ces conditions, le rapporteur estime qu'un éventuel transfert de nouvelles portions du réseau routier national aux collectivités territoriales tel qu'envisagé dans le cadre du projet de loi « 3D » (décentralisation, différenciation et déconcentration) ne peut s'envisager sans le transfert concomitant de moyens techniques et financiers pérennes, permettant le maintien ou la remise en état des réseaux concernés. Une telle décentralisation des routes nationales ne doit par ailleurs être envisagée qu'« à la carte », en fonction des demandes des collectivités territoriales.

2. La trajectoire budgétaire n'intègre pas la prise en charge des ponts de rétablissement

S'agissant des ouvrages d'art , le plan de relance prévoit, en plus des 83 millions d'euros portés par la mission « Écologie, développement et mobilité durables », de consacrer 40 millions d'euros en trois ans à l'accélération des travaux sur les ouvrages importants , en particulier les ponts métalliques, dont l'état est préoccupant. C'est ce qu'avait d'ailleurs rappelé la commission dans son rapport « Sécurité des ponts : éviter un drame » du 26 juin 2019 : « la situation des ponts métalliques de l'État est ainsi relativement alarmante, puisqu'aucun ouvrage n'est en bon état et que deux tiers présentent des défauts de structures. » 59 ( * )

Le rapporteur se félicite que des crédits supplémentaires soient dégagés pour entretenir les ponts de l'État, bien que le montant qui y sera consacré l'année prochaine restera inférieur à celui estimé par le COI - de 120 millions d'euros par an - comme étant nécessaire pour non seulement enrayer la dégradation du patrimoine existant, mais également le remettre à niveau en une dizaine d'années.

Par ailleurs, la trajectoire budgétaire retenue n'intègre pas la charge financière relative à l'entretien des ponts de rétablissement 60 ( * ) que l'État devra assumer conformément à la loi du 7 juillet 2014, dite « loi Didier ». En application de cette loi, l'État a procédé à un recensement des ponts de rétablissement ne faisant pas l'objet d'une convention de gestion entre, d'une part, les collectivités propriétaires des ouvrages et, d'autre part l'État, SNCF Réseau ou Voies Navigables de France, gestionnaires des réseaux routiers, ferroviaires ou fluviaux franchis par ces ouvrages.

Ce recensement a permis d'identifier 9 480 ouvrages de rétablissement non conventionnés 61 ( * ) , dont 2417 surplombent une voie du réseau routier national non concédé, 4 168 une voie du réseau ferré national et 2 895 une voie navigable du domaine public fluvial. Des négociations doivent désormais s'engager entre les parties prenantes en vue de signer des conventions de gestion qui préciseront leur rôle respectif dans la gestion opérationnelle des ouvrages, ainsi que les modalités de répartition des charges financières liées à leur surveillance, leur entretien, leur réparation et leur renouvellement.

S'agissant du réseau routier national non concédé, ces conventions pourraient représenter un transfert de charges de l'ordre de 25 à 30 millions d'euros par an pour l'État , qui n'est aujourd'hui pas inclus dans sa trajectoire budgétaire. C'est pourquoi, afin que les conventions de gestion puissent être rapidement conclues, la commission a adopté un amendement n° II-92 du rapporteur visant à augmenter de 10 millions d'euros les crédits consacrés aux infrastructures routières au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

3. Un soutien à la surveillance et au diagnostic des ponts des collectivités territoriales à renforcer

Afin d'accompagner les collectivités territoriales à recenser et diagnostiquer leurs ponts, le plan de relance prévoit une enveloppe de 40 millions d'euros sur deux ans .

Le rapporteur se félicite de cette aide aux collectivités que la commission avait appelé de ses voeux dans son rapport d'information sur la sécurité des ponts. Ces crédits constituent une première étape importante pour aider les collectivités, en particulier les petites communes et intercommunalités, à connaître le patrimoine de ponts dont elles sont propriétaires ainsi que leur état.

Toutefois, si une aide au recensement et au diagnostic constitue un préalable indispensable, des moyens sont également nécessaires pour aider ces collectivités à procéder aux travaux de réparation de leurs ponts en mauvais état .

D'après le rapport d'information précité, environ 16 000 ponts gérés par les communes et les intercommunalités sont en mauvais état. Or, les petites collectivités peuvent rencontrer d'importantes difficultés, techniques et financières pour assurer l'entretien et la remise en état de ces ponts. C'est pourquoi, afin d'accompagner ces collectivités à procéder aux réparations de leurs ponts en mauvais état, la commission a adopté un amendement n° II-179 du rapporteur ouvrant 20 millions d'euros de crédits supplémentaires au titre de l'année 2021 .

4. Une accélération bienvenue des projets routiers des CPER 2015-2020

Un retard important a été pris dans l 'exécution des volets « mobilité » des contrats de plan État-région (CPER) 2015-2020 et donc des projets de transport qu'ils financent. Fin 2019, le taux national d'exécution en autorisation d'engagement n'était, tous projets confondus, que de 52,6 %, et de 46 % s'agissant des projets routiers. Ceci a conduit le Gouvernement à prolonger la durée des volets « mobilité » des CPER jusqu'en 2022.

Afin d'accélérer la mise en oeuvre des projets routiers prévus par ces contrats, le plan de relance prévoit de consacrer au cours des deux prochaines années 270 millions d'euros de crédits supplémentaires , l'objectif étant d'atteindre un taux d'exécution de 90 % à la fin de l'année 2022.

Le rapporteur se félicite que le plan de relance permette l'accélération de projets qui étaient prévus, mais pour lesquels aucun financement n'était encore programmé.


* 58 Cet indicateur a été modernisé en 2018 et ne peut donc pas être comparé avec données des années précédentes.

* 59 « Sécurité des ponts : éviter un drame », rapport d'information de MM. Patrick Chaize et Michel Dagbert, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, 26 juin 2019. Le rapport est consultable en ligne sur le site du Sénat.

* 60 Il s'agit des ponts dont sont propriétaires les collectivités territoriales qui ont été construits pour rétablir une voie de communication interrompue par une nouvelle infrastructure de transport (réseau routier, ferré ou fluvial).

* 61 La liste de ces ouvrages a été publiée par un arrêté du 22 juillet 2020.

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