B. LES ÉCUEILS RESTENT TROP NOMBREUX

Outre la poursuite de la baisse des ETP, ce budget ne permet pas de répondre à des problématiques récurrentes de l'enseignement agricole : la requalification des agents de catégorie III des lycées agricoles privés, et l'existence d'un différentiel conséquent entre la rémunération annuelle d'un assistant d'éducation dans l'éducation nationale et dans les établissements d'enseignement agricole.

1. La difficile amélioration de la situation des agents de catégorie III pourtant promise en 2019 : de timides avancées obtenues aux forceps qui restent insuffisantes

La rapporteure pour avis rappelle l'engagement pris en juillet 2019, par Didier Guillaume, alors ministre de l'agriculture et de l'alimentation, visant à améliorer la situation des agents de catégorie III, personnels contractuels recrutés sur proposition du chef d'établissement pour une mission d'enseignement 15 ( * ) . Ce recrutement est indispensable pour faire vivre l'enseignement agricole privé et ces agents de catégorie III sont de plus en plus nombreux. Or, leur grille de rémunération est actuellement alignée sur la grille indiciaire des adjoints d'enseignement, qui appartiennent à un corps en voie d'extinction.

Cette amélioration de la situation des agents de catégorie III devait se faire par deux canaux :

- une requalification des nouveaux contrats en agents de catégorie II ou IV ;

- une revalorisation des contrats existants des agents de catégorie III.

Le groupe de travail de la commission sur les conséquences pour l'enseignement technique agricole de la crise sanitaire de la covid-19, animé par notre ancien collègue Antoine Karam, avait souligné en juin dernier que les mesures d'application n'avaient pas été prises.

Interrogé sur le sujet, Didier Guillaume, avait indiqué que la revalorisation des contrats existants nécessitait une modification de l'article L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime.

La rapporteure pour avis ne peut que se féliciter de l'amendement déposé sur le PLF 2021 par le Gouvernement le 28 octobre dernier visant à modifier cet article. Il s'agit du premier pas vers cette revalorisation. Toutefois, elle note que les 2,13 millions d'euros, introduits par amendement à l'Assemblée nationale lors de l'examen du PLF 2020 pour financer cette amélioration de la situation des agents de catégorie III n'ont pas été reconduits dans le PLF 2021. Dès lors, la rapporteure pour avis s'interroge sur les modalités de financement de cette mesure .

En outre, et de manière plus inquiétante, il a été rapporté, lors des auditions, des difficultés entre le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, le ministère de la fonction publique et le ministère des comptes publics, dans la rédaction du décret en Conseil d'État devant permettre la requalification des contrats en contrat de catégorie II et IV. Ces problèmes interministériels, traduisant sans doute une réticence de certains acteurs, bloquent l'avancement de ce dossier . La rapporteure pour avis ne peut que dénoncer ce blocage et appelle à une mise en oeuvre rapide de la requalification promise en juillet 2019.

2. La question du reste à charge des assistants d'éducation n'est toujours pas réglée

L'année dernière, notre ancien collègue Antoine Karam avait attiré l'attention du ministère de l'agriculture et de l'alimentation sur l'absence de revalorisation du salaire des assistants d'éducation, à la différence de leurs homologues de l'éducation nationale.

Certes, la rapporteure pour avis constate une augmentation de 0,31 million d'euros dans le PLF 2021 des crédits consacrés aux assistants d'éducation. Toutefois, comme le précisent les documents budgétaires, « par rapport à 2020, le nombre d'assistants d'éducation est en augmentation de 2,7 postes représentant l'extension en année pleine du recrutement de 4 assistants d'éducation suite à l'intégration d'un lycée privé professionnel dans l'enseignement agricole publique » . Au final, le montant versé par l'État aux établissements publics d'enseignement agricole 16 ( * ) par assistant d'éducation s'élève dans le PLF 2021 à 26 980 euros. Si ce dernier est en augmentation de 189 euros, le différentiel annuel entre assistants d'éducation relevant de l'enseignement agricole et ceux relevant de l'éducation nationale reste de 1 221 euros.

Jusqu'à présent, un certain nombre d'établissements faisait le choix de compenser ce différentiel sur leurs fonds propres, afin d'augmenter la quotité de travail des assistants d'éducation et ainsi renforcer l'accompagnement des élèves. Or, de nombreux établissements d'enseignement agricole ont subi des pertes financières importantes au premier semestre 2020 en raison de la crise de la covid, réduisant d'autant leurs fonds propres. La rapporteure pour avis craint que certains d'entre eux n'aient plus les moyens de compenser ce différentiel et se voient contraints de diminuer la quotité du temps de travail des assistants d'éducation pour correspondre aux sommes perçues avec pour incidence la réduction de l'encadrement des élèves.

* * *

L'ensemble de ces éléments ont conduit la commission à émettre, sur la proposition de la rapporteure pour avis, un avis défavorable aux crédits du programme 143 « enseignement technique agricole ». La commission souhaite alerter sur l'avenir plus qu'incertain de l'enseignement agricole, alors même que chacun reconnaît son excellent taux d'insertion professionnelle et sociale et qu'il répond à des problématiques sociétales actuelles : produire et transformer autrement, favoriser les circuits courts, renforcer la résilience et la sécurité alimentaires. Elle souligne également les financements qui manquent pour la revalorisation des agents de catégorie III et l'aide aux établissements classés P2 et P3.


* 15 Il s'agit d'enseignants contractuels devant justifier pour l'enseignement des disciplines générales d'un titre ou diplôme de niveau master, et pour l'enseignement des spécialités professionnelles, d'un diplôme de niveau Bac + 2 et d'une expérience professionnelle de 5 ans au minimum ou d'un diplôme de niveau baccalauréat et d'une expérience professionnelle de 7 ans au minimum.

* 16 Les assistants d'éducation sont recrutés et rémunérés par les établissements publics locaux d'enseignement, mais ceux-ci bénéficient d'une subvention de la part du ministère de l'agriculture et de l'alimentation pour couvrir leur rémunération.

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