LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Auditions « rapporteur »

Lundi 27 septembre 2021

- Table ronde des acteurs des colonies de vacances et des centres de loisirs avec :

• Vacances, Voyages Loisirs (VVL) : Mme Louise FÉNELON , directrice du projet éducatif,

• Union française des centres de vacances et de loisirs (UFCV) : M. Fabien QUINET , délégué régional Bourgogne-Franche-Comté.

- Jeunesse au plein air : M. Christian DOMINÉ , président, Mmes Anne CARAYON , directrice générale, et É lise ROINEL , responsable du plaidoyer.

Lundi 11 octobre 2021

- Ligue de l'Enseignement : Mme Ariane AZÉMA , déléguée générale, M. Gilles ÉPALE , trésorier général adjoint et en charge des vacances, séjours et loisirs éducatifs.

- Direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, déléguée interministérielle à la jeunesse : Mme Emmanuelle PÉRÈS , directrice, Mme Sylvie HEL-THELIER , sous-directrice des politiques interministérielles de jeunesse et de vie associative, M. Gilles NEDELEC , sous-directeur de l'éducation populaire, Mme Julie CHAMPRENAULT , adjointe du sous-directeur du Service National Universel (SNU).

Audition plénière

Mercredi 3 novembre 2021

M. Jean-Michel BLANQUER , ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, Mme Sarah EL HAÏRY , secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement.

ANNEXE

Audition de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, et Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement

MERCREDI 3 NOVEMBRE 2021

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M. Laurent Lafon , président . - Mes chers collègues, nous poursuivons notre cycle d'auditions sur le projet de loi de finances pour 2022, en accueillant M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, et Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement, que je remercie de s'être rendus disponibles cet après-midi.

Avant de commencer, monsieur le ministre, je souhaite souligner que vous êtes le ministre de l'éducation nationale qui est resté le plus longtemps à ce poste sous la V e République. Nous saluons votre longévité, d'autant qu'elle apporte une continuité à l'action de votre ministère depuis le début du quinquennat. Nous avons d'ailleurs mis en place, au sein de notre commission, une mission d'information visant à dresser le bilan des mesures prises en matière d'éducation durant ces cinq dernières années.

Avec plus de 77,7 milliards d'euros, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » sont en augmentation de 1,7 milliard d'euros en autorisations d'engagement par rapport à l'année dernière.

Pouvez-vous nous présenter les principaux axes et priorités de votre budget ? Nous sommes évidemment particulièrement intéressés par la transcription dans ce budget des annonces issues du Grenelle de l'éducation, ainsi que par le calendrier de leur déploiement. Je rappelle que la rémunération des personnels enseignants était au coeur de l'avis budgétaire présenté par Jacques Grosperrin, notre rapporteur pour avis, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020.

Madame la secrétaire d'État, nous souhaiterions que vous nous présentiez les grands axes de votre action dans le cadre du programme 163. Je pense notamment au service national universel (SNU), qui, cette année encore, a été perturbé par l'épidémie de la covid-19. Nous connaissons votre attachement au SNU : pouvez-vous nous présenter les difficultés rencontrées cette année et les perspectives pour l'année prochaine ? De manière générale, quelles sont les mesures prises en faveur de la jeunesse, qui, à la fois, a été frappée par les conséquences de la pandémie et a montré sa volonté de s'engager ?

Enfin, les associations ont été particulièrement touchées par la crise sanitaire. Les travaux de notre commission ont souligné leur fragilité, mais aussi leur rôle essentiel dans l'animation du lien social sur les territoires : que prévoit le budget 2022 pour les soutenir ?

Permettez-moi enfin, madame la secrétaire d'État, de saluer la clarté et la fermeté de votre position sur la campagne du Conseil de l'Europe célébrant « la liberté dans le hijab ».

Après votre intervention, je donnerai d'abord la parole à nos rapporteurs budgétaires pour l'enseignement scolaire - Jacques Grosperrin, la « jeunesse et vie associative » - Jacques-Bernard Magner - et l'enseignement agricole - Nathalie Delattre, puis aux orateurs des groupes, et enfin aux autres membres de la commission qui souhaitent vous interroger. Les questions seront certainement, comme chaque année, nombreuses.

Je rappelle que cette audition est captée et diffusée en direct sur le site du Sénat.

Monsieur le Ministre, je vous vous laisse à présent la parole !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports . - Je suis naturellement heureux d'être de nouveau devant vous cet après-midi.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à vous remercier, monsieur le président, d'avoir évoqué le record de longévité que je viens de battre dans mes actuelles fonctions. Il est essentiel de pouvoir travailler dans le temps long quand on s'occupe du système éducatif de notre pays. J'ai dit dès 2017 que c'était mon souhait de rester cinq ans dans cette fonction. Une partie des actions que nous avons menées sont des graines semées, dont nous voyons parfois apparaître les premiers bourgeons, mais qui nécessite le temps long - même si nous sommes tous impatients d'en voir les résultats.

J'ajoute que, de mon point de vue, et quoi qu'il arrive dans les décennies à venir, si la stabilité ministérielle au ministère de l'éducation nationale est souhaitable, les enjeux autour des questions éducatives doivent susciter le débat, ne serait-ce qu'en écho à leur importance, et ce à l'abri des querelles politiciennes dommageables. L'école a besoin de sens : chacun doit pouvoir s'exprimer, mais les positions des uns et des autres doivent être commandées par l'intérêt général, en plus de l'intérêt particulier des élèves.

Par ailleurs, vous venez à juste titre de signaler que Sarah El Haïry s'était prononcée très clairement ce matin sur la campagne du Conseil de l'Europe. Je m'associe publiquement à ses propos et considère inacceptable cette campagne du Conseil de l'Europe. Pour ma part, j'estime que l'incident n'est pas clos, car il révèle ce que j'ai déjà dénoncé par le passé, à savoir l'immixtion d'associations ou de structures qui ne respectent pas les valeurs de la République dans d'importantes institutions. Ce qui s'est passé n'est pas acceptable et ne peut pas être accepté.

J'en viens maintenant au budget de l'enseignement scolaire pour 2022.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous présente ce budget pour la cinquième année consécutive. C'est l'heure des premiers bilans, et c'est aussi pour moi le moment de vous indiquer à quel point ce budget d'investissement dans l'école a été l'une des priorités de ce quinquennat.

La Nation s'est donné les moyens de faire de l'école un levier de réussite pour tous les élèves, en agissant dès le plus jeune âge et en offrant à chacun d'entre eux la possibilité progressive de personnaliser son orientation pour réussir pleinement son intégration dans la vie professionnelle.

La création d'un secrétariat d'État chargé de l'éducation prioritaire il y a maintenant un an et demi est la preuve, s'il en faut, de la priorité sociale affichée par le Gouvernement, tout comme de la priorité accordée à la jeunesse, symbolisée par la présence de Sarah El Haïry à mes côtés. Avec l'arrivée au ministère des sports de Roxana Maracineanu, que vous avez auditionnée le 26 octobre dernier, nous disposons désormais d'un grand ministère. À ce sujet, je veux dire à quel point il me semble souhaitable que l'éducation nationale, la jeunesse et les sports soient pour longtemps fusionnés dans un seul et même ministère. Cette réunion permet de disposer d'une vision complète du temps de l'enfant, dans la grande ligne de certains de mes prédécesseurs comme Jean Zay, d'une approche de l'éducation dans le cadre du temps scolaire, mais aussi au-delà. Je suis heureux avec mes trois collègues de former une grande équipe de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

En 2022, le budget de la mission « Enseignement scolaire » s'établit à 55,2 milliards d'euros, hors cotisations de l'État, en augmentation de 3 %, soit 1,6 milliard d'euros, par rapport à l'année dernière. Cette hausse est considérable.

Nous poursuivons ainsi la transformation du système éducatif : l'école à trois ans, la priorité à l'école primaire, le dédoublement des classes dans les réseaux d'éducation prioritaire (REP et REP+), les devoirs faits au collège, la réforme du lycée général et technologique et du lycée professionnel, l'école inclusive, les cités éducatives, les internats d'excellence, qui sont autant d'actions prioritaires du Gouvernement. L'augmentation du budget n'est pas une fin en soi, mais ce sont les priorités qu'il sous-tend. Je le dis depuis 2017 : la priorité des priorités, c'est l'école primaire.

Le budget de l'éducation nationale a augmenté de 13 % en cinq ans. C'est la première fois qu'il y a une telle augmentation sur un quinquennat : en 2017, ce budget s'élevait à 48,8 milliards d'euros ; en 2022, il atteindra 55,2 milliards d'euros. Ces chiffres sont totalement irréfutables, malgré les propos que je peux entendre ici ou là sur le fait que l'éducation serait négligée ou que l'on porterait une attention insuffisante au service public de l'éducation. Bien entendu, on peut débattre de la manière dont nous affectons ces crédits, mais, avec ce budget, la hausse est incontestable : à titre de comparaison, de 2013 à 2017, le budget de l'enseignement scolaire a augmenté de 4,5 milliards d'euros, contre 6,4 milliards d'euros de 2018 à 2022.

Si l'on considère la seule masse salariale, la hausse des crédits atteint 5,4 milliards d'euros, contre 3,7 milliards d'euros durant le précédent quinquennat. Nous avons en parallèle stabilisé les effectifs, si bien que les rémunérations, donc le pouvoir d'achat des professeurs et des personnels, ont progressé davantage que dans les mandats précédents.

Nous voulons que cette hausse des crédits contribue prioritairement à la revalorisation financière du métier d'enseignant, donc à son attractivité, dans le prolongement du Grenelle de l'éducation. Ce mouvement a vocation, je l'espère, à se poursuivre au-delà de 2022.

Comme vous le savez, le Grenelle de l'éducation s'est articulé autour de trois axes, qui m'ont conduit à prendre douze engagements : une meilleure reconnaissance des métiers pour attirer, diversifier et conserver les talents, la promotion de l'esprit d'équipe et d'un esprit de coopération dans l'ensemble du système scolaire, ainsi que l'ouverture du champ des possibles, autrement dit la promotion des mobilités professionnelles, en plus de la reconnaissance professionnelle.

S'agissant de la reconnaissance de la profession, la revalorisation attendue est au rendez-vous. En 2021, 400 millions d'euros ont abondé le budget pour revaloriser les personnels ; en 2022, ce sont 700 millions d'euros qui s'y ajouteront.

Dans le même temps, l'agenda social a permis de dégager des lignes de force : d'abord, nous avons cherché à toucher toutes les catégories de personnel, tout en portant une attention particulière aux personnels en début de carrière, qui sont moins bien lotis lorsque l'on se compare avec les pays de l'OCDE. Une prime d'attractivité, créée en 2021 et versé pour la première fois en mai, sera revalorisée et étendue en février 2022. De mai 2021 à février 2022, les néotitulaires auront vu leur rémunération progresser de 157 euros nets mensuels.

Cette prime accompagne d'autres éléments de revalorisation : je pense notamment à la prime d'équipement informatique de 150 euros nets annuels, qui est reconduite. En 2022, 200 millions d'euros seront également consacrés à la protection sociale complémentaire, soit 15 euros par mois pour tous les agents du ministère de l'éducation nationale.

De manière générale, les crédits relatifs à la masse salariale font l'objet d'une augmentation nette de près de 1,2 milliard d'euros, au profit de l'ensemble des personnels pour la revalorisation de leurs carrières.

Notre priorité va également à l'école primaire, ce que chacun peut observer budget après budget. Nous approfondissons le sillon.

Comme vous le savez, la baisse démographique se poursuit - il faut le déplorer : on comptabilisera 80 000 élèves en moins à la rentrée 2022. Malgré cette tendance, nous maintiendrons les effectifs à l'école primaire. Depuis 2017, nous aurons même créé près de 9 000 postes dans le premier degré, alors que l'on dénombre 285 000 élèves en moins. Nous assumons cette politique, qui permet d'avoir un meilleur taux d'encadrement, rentrée après rentrée, dans chaque département de France.

Nous avons également pris des mesures plus ciblées, en premier lieu l'accueil d'élèves supplémentaires à l'école maternelle, via l'abaissement de la scolarité à trois ans. J'insiste sur l'importance de cette disposition, qui montre à quel point l'école maternelle est déterminante pour la réussite future des élèves à l'école élémentaire et dans la suite de leurs parcours scolaire, notamment si l'on veut compenser le plus tôt possible les inégalités sociales.

En second lieu, nous avons dédoublé les classes de CP et de CE1 en REP et en REP+, mesure qui, à elle seule, concerne 300 000 élèves par an. Cette disposition de la plus haute importance permet de réduire l'écart entre les élèves qui sont dans les réseaux d'éducation prioritaire et le reste du pays. Nous avons atteint ce que l'on pourrait appeler un « Graal éducatif » dans certains territoires, où les résultats des classes de certains établissements REP ou REP+ affichent déjà des taux de réussite comparables à ceux de classes situées dans des quartiers favorisés. J'ai coutume de prendre l'exemple des XVIII e et XIX e arrondissements de Paris, où certaines écoles ont des résultats comparables à celles du VII e arrondissement. C'est inédit et permet d'ouvrir la voie : si cela a été possible dans ces classes, tout le monde peut le faire.

Ce dédoublement des classes est une réussite et s'accompagne d'évolutions pédagogiques importantes. Je pense en particulier au « plan français » et au « plan mathématiques », qui sont des plans de formation continue des professeurs du premier degré, contribuant à fournir à ces enseignants tous les outils pédagogiques nécessaires. Grâce à cela, nos compétences en lecture et en mathématiques s'améliorent.

Grâce à ces efforts budgétaires, nous sommes en train de remonter la pente, alors que nous déplorons depuis des décennies une baisse du niveau des élèves à l'école primaire. Forcément, c'est un début. Il serait aberrant d'invoquer le classement PISA - programme for international student assessment ou, en français, programme international pour le suivi des acquis des élèves -de 2018 pour illustrer quoi que ce soit concernant le bilan du quinquennat : « PISA 2018 » est une photographie des élèves âgés de 15 ans en 2018. Par définition, il ne peut pas refléter les actions entreprises pour remonter le niveau des élèves à partir de l'école primaire depuis 2017.

Les résultats des évaluations en CP, en CE1 et en sixième seront disponibles la semaine prochaine. J'espère qu'ils confirmeront la tendance que l'on a enregistrée en février dernier dans les évaluations de mi-parcours au CP : une capacité à rebondir malgré la crise sanitaire, et alors que nous savons que dans de nombreux pays le niveau va baisser du fait de la fermeture des écoles.

Le dédoublement des classes est, de mon point de vue, la pointe avancée d'une politique plus générale concernant l'école primaire.

D'autres mesures sont en cours de déploiement. Je pense au plafonnement à 24 élèves des effectifs dans toutes les classes, partout en France, tous territoires confondus, en grande section de maternelle, au CP et au CE1, engagé à la rentrée 2020, poursuivi à la rentrée 2021. Au moment où je vous parle, cette mesure, qui s'applique depuis deux ans, concerne déjà 86 % des classes. Elle concernera 100 % des classes à la rentrée 2022.

J'ai également à l'esprit le dédoublement des classes de grande section de maternelle dans les réseaux d'éducation prioritaire. À terme, nous visons 150 000 élèves par an. C'est en voie d'achèvement.

La maîtrise des savoirs fondamentaux dès le plus jeune âge est une garantie essentielle pour l'avenir de notre pays et doit permettre d'atteindre les deux objectifs que je me suis fixés depuis ma prise de fonction, c'est-à-dire l'amélioration du niveau général et la réduction des inégalités sociales.

Quatrième point que je souhaite évoquer : avec ce budget, nous parachevons le grand service public de l'école inclusive. Vous le savez, le Président de la République avait fixé comme priorité la scolarisation des élèves en situation de handicap tout au long du quinquennat. Nous avons traduit cette ambition par la mise en place d'un service public de l'école inclusive. C'est un sujet difficile qui méritait des avancées quantitatives et qualitatives. Désormais, toutes les directions départementales des services de l'éducation nationale ont un service consacré à l'école inclusive, service unique et clairement identifiable par les familles et les professionnels. Nous avons également généralisé les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) depuis la dernière rentrée scolaire.

Le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés est en constante augmentation, avec plus de 400 000 élèves à la rentrée 2021, soit 100 000 de plus depuis le début du quinquennat. En 2022, nous consacrerons 3,5 milliards d'euros par an à l'école inclusive, ce qui représente 210 millions d'euros de plus que l'année dernière, et une hausse de 65 % des crédits consacrés à ce volet depuis le début du quinquennat. C'est de très loin le budget qui augmente le plus, tous secteurs de l'État confondus.

Concrètement, nous créerons 4 000 postes supplémentaires d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) à la rentrée prochaine. On dénombre 125 000 AESH dans le système scolaire français. Des évolutions qualitatives sont également nécessaires. Ils bénéficient désormais de 60 heures de formation par an, au travers des PIAL pour être au plus près des besoins des élèves et de leurs familles. Bien entendu, tout n'est pas parfait sur le terrain - j'en ai conscience, mais en l'espace de cinq ans, on est passé d'un système où 70 000 personnes travaillaient en contrat aidé auprès des élèves en situation de handicap à un système où travaillent 125 000 AESH en CDD, voire en CDI. Ces derniers bénéficient désormais de perspectives de carrière, puisqu'ils disposent d'une grille indiciaire et d'un avancement automatique en fonction de l'ancienneté. Il y a bien un nouveau statut des AESH, avec plus de pleins temps. Dans ce budget, 56 millions d'euros de crédits seront alloués aux AESH.

Enfin, je veux souligner la dimension sociale des mesures prises dans le cadre de cette mission budgétaire. Je citerai trois exemples importants.

Tout d'abord, je veux évoquer la hausse des bourses et des fonds sociaux, avec une enveloppe de 895 millions d'euros, en hausse de 35 millions d'euros en 2022, pour accompagner les familles les plus défavorisées. Ce montant inclut la revalorisation de 69 euros de la prime d'internat et l'extension de la bourse au mérite aux élèves boursiers qui s'engagent, à l'issue de la troisième, dans une formation conduisant au certificat d'aptitude professionnelle (CAP).

J'insiste sur la mise en oeuvre du pass Culture, à laquelle nous consacrons 47 millions d'euros dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022. Cela représente 25 euros par élève et par an, à partir de la classe de quatrième, pour les dépenses culturelles collectives, qui s'ajoutent aux dépenses individuelles. Concrètement, cela signifie que dans une classe de 32 élèves, cela représente 800 euros pour des sorties scolaires. Or, on sait que de nombreuses sorties scolaires ne peuvent pas se faire pour quelques dizaines ou centaines d'euros. Le pass Culture est un outil à la disposition des professeurs pour arriver à l'objectif de 100 % d'éducation artistique et culturelle : permettre à tous les élèves de France d'être concernés chaque année par cette éducation.

Enfin, je veux mentionner la relance de la politique des internats d'excellence, à laquelle je crois beaucoup, comme vous le savez. Pour moi, c'est la meilleure manière de s'attaquer aux facteurs extrascolaires entravant la réussite scolaire. C'est un outil permettant à des élèves d'origine modeste, souvent issus de milieux ruraux ou de quartiers de la politique de la ville, de bénéficier de bonnes conditions de travail et des ouvertures de vie sur le plan culturel et sportif. Dans le cadre du plan de relance, 54 internats d'excellence ont été sélectionnés et labellisés en 2021. Les conventions seront toutes engagées d'ici la fin de l'année. Des décaissements sont prévus tout au long de l'année 2022 pour permettre l'ouverture de 1 500 places d'ici la rentrée scolaire 2022. Cela se fait en partenariat avec les collectivités locales, cette politique étant l'occasion pour elle de revaloriser certains territoires.

Ce budget est à la hauteur de nos objectifs : il engage une dynamique et des perspectives pour notre jeunesse, témoigne d'une reconnaissance de la Nation envers ses professeurs et l'ensemble des personnels de l'éducation nationale, investit dans l'éducation de nos enfants, donc prépare la société de demain.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement . - Le programme « Jeunesse et vie associative » n'est que l'illustration partielle des politiques publiques en faveur de la jeunesse et du soutien à la vie associative, tant cet enjeu est transversal. La jeunesse demeure la priorité de tous. Elle représente notre avenir et chacun a envie qu'elle réussisse quels que soient sa diversité, ses bouts de vie. Le terme jeunesse regroupe à la fois des enfants, des adolescents, mais aussi ce moment où on entre dans la vie active.

Ce budget est le fruit d'un partenariat avec les services déconcentrés, l'ensemble des collectivités territoriales, ainsi que les acteurs du monde associatif et de l'éducation populaire.

Agir pour la jeunesse, c'est avant tout prendre en considération son extrême diversité : la jeunesse rurale n'est ni la jeunesse urbaine, ni péri-urbaine. Il faut s'intéresser à chacune d'entre elles, car chacune d'entre elles a des talents, des besoins différents et des opportunités à développer. C'est un point sur lequel, avec Jean-Michel Blanquer, nous avons souhaité apporter des réponses extrêmement variées pour que chaque jeunesse puisse avoir son propre parcours, celui qui lui permettra de se construire et d'être suffisamment forte à l'âge adulte.

Les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » s'élèveront à 772 millions d'euros en 2022, soit une progression de plus de 11 % par rapport à l'année dernière. Parmi les priorités, je veux insister sur l'accompagnement vers l'autonomie et, évidemment, la lutte contre le non-recours aux droits sociaux. Accompagner la reprise, c'est aussi encourager le soutien au monde associatif, qui a été ébranlé par la crise sanitaire, tant financièrement que sur le plan humain, puisque se pose aujourd'hui la question du retour des bénévoles dans les associations. Cela touche des associations de toute taille et de tout territoire.

Le programme « Jeunesse et vie associative » ne retrace qu'une fraction de l'effort de la Nation dans ce domaine. Il contribue à donner une impulsion, au travers de la nécessaire coordination interministérielle des politiques publiques.

Je citerai trois mesures emblématiques, qui me tiennent particulièrement à coeur : le service national universel, le développement du service civique et le soutien au mentorat.

Le SNU s'adresse aux jeunes de 15 à 17 ans. Il a vocation à favoriser le sentiment d'unité nationale, à promouvoir la notion d'engagement et à transmettre un certain nombre de valeurs communes. Il vise à vivre un temps de mixité sociale et d'unité nationale, créer ce goût de l'engagement et l'accompagner. Il comprend trois phases, celle du séjour de cohésion, qui est le plus connu et le plus visible. Mais il comprend surtout une mission d'intérêt général et, enfin, un engagement long - la fameuse phase 3.

Le SNU poursuit sa généralisation : cette année, le budget consacré au SNU s'élève à 110 millions d'euros : ce sont au moins 50 000 jeunes volontaires qui pourront y participer, alors même que, l'an dernier, compte tenu de la crise sanitaire, nous avons dû restreindre le nombre de jeunes accueillis. Je tiens à le souligner : les jeunes étaient au rendez-vous puisque plus de 30 000 s'étaient inscrits. Pour accompagner cette jeunesse, 80 postes de chef de projet SNU ont été créés et contribueront à gérer la montée en charge du dispositif au niveau des services déconcentrés, au plus proche des territoires. Nous souhaitons renforcer la maille départementale afin de prendre en compte la spécificité de chaque territoire.

Ce budget permet le renforcement du service civique. En effet, il représente l'une des formes d'engagement de la phase 3, aux côtés des volontariats de solidarité internationale, du volontariat européen ou les engagements dans la réserve de la gendarmerie. Cela me donne l'occasion de saluer la mobilisation particulièrement forte des cadets de la gendarmerie sur l'ensemble du territoire. Je sais qu'un certain nombre de sénateurs accompagnent ce développement.

Le service civique est ce projet majeur de citoyenneté qui offre à plus de 530 000 jeunes, depuis sa création, la possibilité de s'engager dans une perspective d'intérêt général et de développement de compétences. Cet engagement prend des formes très diverses. Cette année, ce sont plus de 200 000 jeunes qui ont vocation à participer à de telles missions. Des thématiques prioritaires ont été développées pour répondre aux aspirations de la jeunesse : la transition environnementale, la solidarité intergénérationnelle, absolument nécessaire à la cohésion de notre pays et à la réussite sur tous les territoires. Ce lien intergénérationnel est évidemment entre nos aînés et nos jeunes, mais aussi entre nos jeunes eux-mêmes. C'est la beauté de la préoccupation de l'autre que le service civique permet. Le budget consacré au service civique est stable par rapport à l'année dernière, à hauteur de 498 millions d'euros.

Je veux développer un dernier point : le « plan mentorat ». Dans le plan « 1 jeune, 1 solution » figure un dispositif spécifique destiné à accompagner les associations qui développent le mentorat dans les territoires, à destination des étudiants comme des professionnels. Nos aînés ont énormément de choses à transmettre : le goût de l'engagement, des parcours de vie, des formes d'engagement très divers. Près de 27 millions d'euros seront alloués au soutien aux associations pour accompagner, d'ici la fin de cette année, 100 000 jeunes et, d'ici la fin de l'année prochaine, 200 000 jeunes. L'ambition est importante, puisque nous sommes partis de 20 000 jeunes «tutorés ».

Le programme « Jeunesse et vie associative » comporte d'autres actions : le soutien aux loisirs éducatifs, l'accès de la jeunesse à l'information, qui est l'une des premières sources d'inégalité, le soutien aux accueils collectifs de mineurs, au travers de l'hébergement dans les centres de vacances, les colonies de vacances et les centres de scoutisme. Ces accueils transmettent le goût de l'engagement, valorisent la découverte de l'autre, la curiosité du départ. Ces accueils ont vécu un déclin ces dix dernières années et ont redémarré cette année : plus de 700 000 jeunes - hors mouvements scouts - ont pu partir grâce à l'un de ces dispositifs, avec une prise en charge de 25 000 séjours avec hébergement. En outre, plus de 1,7 million de places sont ouvertes dans plus de 31 000 centres d'accueil collectif sans hébergement.

Le ministère a également mis en place le « plan mercredi », cadre idéal d'un partenariat renouvelé entre les collectivités locales et les services de l'État pour que les enfants et les adolescents puissent bénéficier des actions des associations d'éducation populaire, pour apprendre tout au long de la journée et de la semaine. L'éducation populaire, agrément attribué aujourd'hui à 18 000 associations, est une démarche qui vise à assurer la formation tout au long de la vie, en complément de l'école.

La crise sanitaire a fragilisé le monde associatif. Même si les chiffres ne sont pas tout à fait stabilisés, on parle de 20 % de bénévoles en moins. Pour faire face au recul du nombre de bénévoles, nous avons lancé, en partenariat avec le mouvement associatif « Hexopé », la campagne « Mon association, je l'adore, j'y adhère ! ». Nous avons aussi apporté notre soutien aux têtes de réseau et aux coordinations nationales.

L'engagement de l'État en faveur du monde associatif reste au même niveau que l'année dernière. Nous avons souhaité renforcer la formation des bénévoles, car nous pensons qu'il s'agit d'un véritable levier de fidélisation et de reconnaissance de ce que ces hommes et ces femmes apportent à notre pays. En outre, le fonds pour le développement de la vie associative, doté de 8,1 millions d'euros en 2022, concourt au financement des plans de formation. Plus de 25 millions d'euros seront consacrés au soutien et au fonctionnement de l'innovation des associations locales, ces structures qui dessinent le visage de nos villes et nos territoires.

Nous renforçons le compte engagement citoyen, qui sera doté de 14,4 millions d'euros en 2022, à la couverture des droits à la formation, afin de reconnaître et valoriser l'engagement associatif.

Pour accompagner les associations, il faut encourager la reconnaissance d'un réel statut du bénévole. C'est, il me semble, plus que jamais nécessaire. Mais il faut aussi faciliter la vie, la gestion administrative des associations. On sait que la lourdeur administrative pèse sur les bénévoles. Nous travaillons à des solutions numériques pour que les associations n'aient plus qu'à nous le dire une fois : je pense à la transmission des documents d'identité ou des rapports. C'est le développement de « mon compte asso » et « Data subvention » : à l'État de trouver l'information là où elle est, en particulier au moment des demandes de subvention.

En conclusion je souhaite rappeler notre objectif : l'accompagnement humain de tous les jeunes, dans leurs diversités, chacun sur son territoire en transmettant des valeurs et des repères pour qu'ils puissent se construire et aller vers l'autonomie que nous souhaitons ; c'est un parcours de citoyenneté assumé.

M. Jacques Grosperrin , rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement scolaire . - Monsieur le Ministre, je tiens à vous rendre hommage pour le courage dont vous avez fait preuve en engageant un ensemble très impressionnant de réformes. Souvent, il était coutumier de dire, pour un ministre de l'éducation nationale, que moins on fait de choses, moins on risque d'être embêté. Les exemples sont nombreux parmi vos prédécesseurs ...

Permettez-moi de vous signaler, qu'en matière de longévité, vous êtes toujours battu par Victor Duruy, qui a été ministre de l'Instruction publique de 1863 à 1869. Sollicité par Napoléon III, il a terminé sa carrière en tant que sénateur des Landes et président de conseil départemental.

Georges Pompidou avait utilisé l'expression, lorsqu'il était Premier ministre d'un « train de réformes ». Pour votre part, vous avez un « TGV de réformes ». Même si l'on peut ne pas être d'accord sur tout, votre dynamisme est indéniable. Votre courage - ainsi que celui de Mme El Haïry - doivent être soulignés.

N'aurait-on pas pu faire un grand ministère de « l'intelligence » rassemblant éducation nationale, sport, enseignement supérieur, recherche ? Cela aurait pu avoir du sens.

J'ai noté avec intérêt vos annonces relatives à la revalorisation salariale des personnels de l'éducation nationale.

Vous avez évoqué l'inutilité de faire référence au classement PISA de 2018 pour juger de votre action : je vous rejoins sur ce point, et j'ajoute que les moyens ne suffisent pas pour obtenir de bons résultats. Le Grenelle de l'éducation aura, je l'espère, contribué à promouvoir un état d'esprit proche de celui que j'appelle de mes voeux, celui d'une « équipe de France de l'éducation nationale », réunissant l'ensemble de la communauté éducative. De ce point de vue, je crois beaucoup à la récente proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école, votée par le Sénat. Les chefs d'établissement ont besoin d'être rassurés. Il me semble également nécessaire de permettre à chacun d'assimiler l'ensemble des réformes réalisées.

Dans mon avis budgétaire de l'an dernier, j'ai abordé la question de la transmission des valeurs de la République par l'école. Vous avez mentionné la nécessité de renforcer la formation des enseignants aux valeurs de la République, dans le cadre de la formation continue comme dans celui de la formation initiale. Cependant, j'observe une sous-consommation chronique des crédits consacrés à la formation continue, et le regrette. Pourriez-vous nous détailler les mesures prises pour renforcer la formation des enseignants à la laïcité ?

Cette année, je m'intéresse plus particulièrement au sport à l'école. Il me semble que le contexte s'y prête, à en juger par le rattachement des services déconcentrés de la jeunesse et des sports aux rectorats depuis le 1 er janvier 2021 et dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

De manière rare et sans doute inédite, une circulaire globale relative au sport à l'école a été publiée le 1 er juillet 2021. Je regrette cependant que plusieurs acteurs de la pratique sportive n'aient pas été associés à sa rédaction. Je pense pour l'essentiel aux collectivités locales, que l'on a auditionnées, et aux associations sportives scolaires. Celles-ci dénoncent le non-respect des heures d'éducation physique et sportive (EPS), notamment à l'école primaire. En outre, la formation des enseignants comporte des lacunes : un certain nombre d'entre eux ne se sentent pas à l'aise pour enseigner le sport. Quelles mesures mettre en place face à ces deux freins ?

Enfin, pouvez-vous nous assurer que le dispositif des trente minutes d'activité physiques quotidiennes n'a pas vocation à se substituer aux heures d'EPS à l'école primaire ?

Mme Nathalie Delattre , rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement agricole . - Monsieur le ministre, dans le cadre du droit de tirage de mon groupe, le Sénat a mis en place une mission d'information sur l'enseignement agricole. Plusieurs collègues de notre commission en étaient membres et y ont activement participé. Malheureusement, votre agenda ne nous a pas permis de vous auditionner.

Le travail collectif de cette mission, qui a fédéré tous les groupes politiques de notre assemblée, a permis l'émergence de 45 propositions, dont un certain nombre concernent le ministre de l'agriculture. Je viens d'ailleurs de l'interpeller à l'occasion des questions au gouvernement en lui rappelant notamment notre souhait de maintenir le rattachement de l'enseignement agricole au ministère de l'agriculture. Mais plusieurs recommandations portent sur l'éducation nationale et rejoignent la problématique plus globale de l'information et de l'orientation des élèves.

Nous avons constaté que l'éducation nationale avait du mal à se séparer de ses élèves, en créant parfois des sections concurrentes ou bien en abandonnant simplement les élèves en échec scolaire. Nous avons auditionné plus de 80 personnes et visité une bonne vingtaine d'établissements, en complément de tous ceux visités par mes collègues. Les témoignages sont nombreux. Nous avons salué les parcours de ces enfants qui, malgré leur échec à l'école, ont aujourd'hui des carrières ou des trajectoires brillantes grâce à l'enseignement agricole.

Notre mission d'information préconise plusieurs mesures : le renforcement de l'information de tous les enseignants sur le contenu des métiers proposés par l'enseignement agricole ; la venue obligatoire, en quatrième et en troisième, dans le cadre des heures annuelles d'orientation, d'un proviseur de lycée agricole et d'un directeur de maison familiale rurale pour présenter l'enseignement agricole à tous les collégiens ; voire l'expérimentation d'une telle présentation, dès la cinquième, dans le cadre d'un partenariat entre le rectorat et une direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, puisque certains établissements de l'enseignement agricole accueillent les élèves dès la quatrième.

Pour cela, il faut une volonté forte de votre part, monsieur le ministre, et une commande expresse. Sinon, nous resterons confrontés aux mêmes problématiques. Je souhaiterais connaître votre avis sur ces recommandations.

Mme la secrétaire d'Etat, je souhaite vous signaler la proposition n°39 du rapport de notre mission d'information qui vise à encourager les apprenants et les établissements de l'enseignement agricole à s'engager dans le SNU.

M. Jacques-Bernard Magner , rapporteur pour avis des crédits de la jeunesse et de la vie associative . - Nous avons bien noté, madame la secrétaire d'État, que votre budget a augmenté de 11 %. Cependant, cette hausse est d'une part essentiellement captée par le service civique. Nous pouvons nous féliciter que 530 000 jeunes s'y soient engagés depuis sa création. 200 000 services civiques sont prévus en 2022. Vous avez poursuivi l'effort qui avait été engagé. Il faut le signaler. Pendant la période de la crise de la covid, il y a eu une volonté politique d'augmenter le nombre de jeunes en service civique. 100 000 missions supplémentaires ont été réparties sur les deux années 2021 et 2022.

D'autre part, cette augmentation des crédits est portée par le SNU, pour lequel j'ai cependant moins de satisfaction à voir son développement. J'ai toujours douté de ce dispositif. Il est nécessaire de transmettre des valeurs, mais je pense, comme beaucoup d'entre nous, que, entre 15 et 17 ans, il est déjà trop tard pour inculquer certaines valeurs républicaines et citoyennes. Par conséquent, consacrer entre 100 et 110 millions d'euros au SNU, pour 50 000 jeunes, me semble irréalisable. J'avais déjà formulé de tels avertissements pour les budgets 2020 et 2021, années pour lesquelles la cible de 25 000 jeunes n'a pas été atteinte, avec, certes, un contexte sanitaire difficile. Comment pouvez-vous continuer dans cette voie en doublant l'effectif recherché et le budget, alors que les crédits de 2021 n'ont pas été pleinement consommés ? Combien de jeunes y ont effectivement participé cette année ? Par ailleurs, seules 30 000 candidatures ont été reçues l'an dernier. Comment comptez-vous pourvoir 50 000 places, alors qu'un grand nombre de volontaires ont sans doute déjà participé au SNU en 2020 et en 2021 ? En outre, le principe d'un appel à volontaires, pour ce qui devra, à terme, relever de l'obligation, nous interpelle.

En parallèle, il faudrait mobiliser des sommes plus importantes sur les colonies de vacances. Les séjours collectifs de mineurs sont en diminution depuis 10 ans, soit 160 000 enfants de moins par an. Ils risquent de devenir réservés à une petite partie de la population, alors que les trois quarts des Français sont favorables aux colonies de vacances. Est-ce un problème d'adhésion au principe du séjour collectif de mineurs ou un problème financier ? Quelles sont vos solutions pour convaincre les parents du bien-fondé d'aller en colonies pour les enfants?

À l'instar de ce qui a été fait pour la culture et le sport, pourrait-on prévoir une aide financière, une sorte de « pass colo », non pas spécifiquement pour ceux qui sont déjà aidés par la Caisse d'allocations familiales (CAF), mais pour les classes moyennes qui se trouvent juste au-dessus du seuil pour bénéficier des aides ? Je vous soumettrai des propositions par voie d'amendement en séance. Quelles sont les vôtres pour inciter les enfants à participer aux colonies de vacances ? À mon avis, il est plus facile d'inculquer les valeurs de la République à des enfants de 9, 10 ou 11 ans.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Je remercie M. Grosperrin pour ses propos, et avoir désormais fixé la concurrence de longévité avec le Second Empire. Je préfère pour l'instant me situer dans la République ...

Le double enjeu de longévité et de spectre large de l'éducation que vous évoquez me semble aller au-delà du quinquennat.

La proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école est un pas important, pour lequel le Sénat a contribué. Nous arrivons à un consensus - ou un quasi-consensus - en faveur de l'intérêt général.

Vous avez également mentionné la sous-consommation chronique des crédits de formation continue et leur meilleure dépense, ainsi que les formations à la laïcité. Tout d'abord, nous avons voulu moderniser la formation continue des professeurs en mobilisant plus de crédits, qui devraient être intégralement consommés en 2022, en créant dans chaque rectorat des écoles académiques de formation continue, et en étant plus attentifs aux demandes du terrain. Ensuite, nous avons développé la formation à distance en y recentrant le réseau Canopé, ce qui a permis de toucher des dizaines de milliers de professeurs. Enfin, nous avons mis en place des programmes de formation volontaristes pour le premier degré, le « plan français » et le « plan mathématiques ». Ils sont organisés en « constellation », dans des systèmes horizontaux, permettant à des groupes de professeurs d'être formés ensemble en partant des besoins qu'ils identifient eux-mêmes. Ces plans ont commencé il y a un an et demi - le plan mathématiques a été inspiré par le rapport « Villani-Torossian ». D'après les premières enquêtes que nous avons menées, ces formations semblent donner satisfaction. Nous voulons que tous les professeurs des écoles puissent en bénéficier sur cinq ans. Cela participe à notre stratégie de rehaussement du niveau des enfants en français et en mathématiques.

Par ailleurs, nous faisons preuve de volontarisme sur la formation aux valeurs de la République, à la laïcité. Nous avons lancé un nouveau cycle, à la suite du rapport de Jean-Pierre Obin, pour former tous les personnels, soit un million de personnels, dont les 850 000 professeurs de France. Cette formation se fait grâce à 1 100 formateurs de formateurs, auxquels je me suis adressé il y a trois semaines. Cette thématique sera également au coeur de la formation continue en 2022.

Sur le sport à l'école, la circulaire du 1 er juillet est importante et plusieurs questions doivent être regardées en face. Nous donnons des consignes claires sur le respect du temps consacré à l'éducation physique et sportive à l'école et développons des collaborations entre l'école et le monde du sport. Le sujet se pose dans des termes différents entre le premier et le second degrés. Ainsi, avec Roxana Maracineanu, j'ai lancé l'opération « un club, une école », afin qu'il y ait un jumelage entre chaque école et un club. Être le ministère de l'école, de la jeunesse, mais aussi des sports nous donne, à cet égard, plus de force. Cela nous permet, en signant des conventions avec les fédérations, d'atteindre l'objectif de 30 minutes de sport par jour. Pour l'année scolaire 2021-2022, je souhaite que la moitié des écoles entrent dans ce dispositif, qui, je le précise, s'ajoute à l'EPS et a vocation à se généraliser à toute la France. C'est un enjeu de santé publique.

Madame Delattre, votre rapport a retenu toute notre attention et je suis complètement en phase avec l'esprit, et plutôt en phase avec ses propositions. La mise en oeuvre de certaines d'entre elles est d'ailleurs déjà amorcée. Vous nous avez reproché notre manque de capacité à nous séparer des élèves : j'ai signé une convention, avec Didier Guillaume puis Julien Denormandie, pour promouvoir l'enseignement agricole dans l'éducation nationale. En outre, nous nous sommes coordonnés avec le ministère de l'agriculture et de l'alimentation pour mettre en place la réforme du lycée, dans le cadre de laquelle nous avons d'ailleurs retenu une spécialité typique de l'enseignement agricole.

Nous ne voulons pas créer de compétition localement : n'hésitez pas à nous le signaler si vous remarquez un tel cas de figure. Nous recherchons plutôt la complémentarité. D'ailleurs, les données de la rentrée montrent que l'hémorragie a cessé, avec un rebond lié à la convention que j'ai mentionnée précédemment et notre politique d'orientation et d'information sur l'enseignement agricole dès la quatrième. Je suis en tout cas tout à fait ouvert à vos recommandations. Nous pourrons de nouveau évoquer le sujet dans l'hémicycle - Julien Denormandie et moi-même serons tous les deux présents en séance au moment de l'examen des crédits de la mission « enseignement scolaire ». Vous pourrez constater l'harmonie entre nos deux ministères.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État . - Comment envisageons-nous d'atteindre les 50 000 jeunes participant au SNU cette année ? Pour la première fois, trois sessions seront organisées - au bénéfice notamment des jeunes en lycée professionnel ou agricole qui n'ont pas y pu participer l'an dernier en raison de leurs obligations de stage - en février, en juin et en juillet, comme une répétition générale. Une grande diversité de jeunes pourra ainsi vivre ce temps de mixité sociale, qui fera l'objet d'une coopération plus avancée avec les lycées professionnels et agricoles. Nous inclurons aussi les associations qui accompagnent les jeunes de l'aide sociale à l'enfance (ASE) et ceux qui sont issus des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

La campagne de mobilisation commencera bien plus tôt - dès lundi prochain -, pour que les jeunes puissent s'inscrire au plus vite. Le ministre donnera des instructions aux recteurs pour organiser plus de présentations dans les établissements, dont les chefs d'établissements seront mobilisés, pour porter cette opportunité au plus près des jeunes. Les jeunes ambassadeurs, qui ont participé au SNU et sont aussi plus nombreux que l'année précédente, pourront davantage témoigner.

De plus, la période entre 15 et 17 ans correspond aux derniers moments de citoyenneté avant la majorité. Au regard de l'abstention des jeunes, le SNU peut donc être bienvenu. Il est aussi l'une des rares occasions, pour les jeunes en situation de handicap, de côtoyer les autres, et pour ceux en lycée professionnel de rencontrer ceux des filières générales. De plus, le SNU permet de corriger des inégalités, en identifiant des cas d'illettrisme ou de décrochage et en permettant aux jeunes qui n'ont jamais quitté leur territoire de le faire. C'est donc une opportunité républicaine et universaliste.

J'en viens aux aspects budgétaires. En effet, l'an dernier, seuls 15 000 jeunes ont participé à un séminaire, notamment à cause des protocoles sanitaires. C'était en deçà de nos objectifs, mais je suis optimiste sur la mobilisation, qui devrait être plus large cette année, grâce à l'étalement des périodes et à la fin - je l'espère - de la crise sanitaire. J'ai écrit à l'ensemble des élus locaux dont un jeune de leur territoire a participé au SNU. Les trois quarts des élus locaux m'ont dit vouloir que ce dispositif soit davantage déployé. J'espère d'ailleurs que la mise en oeuvre de la 39 e proposition du rapport de Mme Delattre permettra d'accroître encore cette mixité.

J'aborde maintenant le « pass colo », monsieur Magner : il faut redynamiser les départs en colonies de vacances, car l'accueil collectif de mineurs, quelle que soit sa forme, fait grandir les enfants. Ces temps doivent aussi retrouver une vraie mixité : nous ne voulons pas de « colonies CAF ». Nous avons étudié le « pass colo », proposition historiquement portée par la Jeunesse au plein air (JPA). Deux enjeux sont apparus. Au sortir de la crise, il est apparu essentiel au ministre et à moi-même de déployer le dispositif des « colonies apprenantes », sans règle d'âge : 46 millions d'euros ont ainsi permis 100 000 départs de jeunes. Nous sommes intéressés par votre idée, mais ne voulons pas qu'elle se fasse au détriment de la pérennisation des « Vacances apprenantes ». De plus, l'enjeu budgétaire n'est pas négligeable : les évaluations que j'ai demandées aboutissent à un financement du « pass colo » de 100 millions d'euros si l'on veut toucher toute une classe d'âge. Mon premier combat sera d'accompagner le renouveau des départs en colonies de vacances, par exemple par la revalorisation du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (BAFA). C'est un élément indispensable pour le renouveau des colonies et de l'éducation populaire. Nous devons, étape par étape, accompagner un maximum d'enfants. Les départs en vacances font grandir les jeunes et démultiplient leurs chances.

M. Max Brisson . - Monsieur le ministre, je relève votre annonce sur la présence du ministre chargé de l'agriculture à vos côtés lors de la discussion à venir sur l'enseignement agricole : c'est une très bonne chose !

Dans le cadre de la mission d'information sur le bilan des mesures éducatives, nous sommes, avec Annick Billon et Marie-Pierre Monier, en train de réfléchir au bilan de l'action du « ministère Blanquer ». Comment le dédoublement des classes de grande section de maternelle, de CP et de CE1 en REP+ a-t-il été réalisé en termes de moyens humains ? Quelles ont été ses conséquences sur les remplacements ?

Pour atteindre l'objectif d'un maximum de 24 élèves en grande section de maternelle, en CP et en CE1, combien de créations de postes seront nécessaires d'ici la rentrée 2022 ?

Nous avons bien noté que le service public de l'école inclusive pour les enfants en situation de handicap et leur famille s'était mis en place à la rentrée 2019. La mise en place des PIAL semble créer de la crispation sur le terrain. Quelles sont les difficultés à surmonter selon vous ?

Ensuite, y a-t-il un travail entre les ministères chargés de l'éducation et de l'enseignement supérieur pour faciliter le passage de l'école inclusive à l'université inclusive ?

Enfin, le manque de considération du métier de professeur est important : seuls 7 % des professeurs français estiment que leur métier est apprécié par la société, contre 27 % en moyenne dans les pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Quelle est l'évolution du nombre de démissions chaque année au sein de l'éducation nationale, surtout parmi les jeunes professeurs ?

Madame la secrétaire d'État, je partage votre condamnation et salue le courage des propos que vous avez prononcés hier sur LCI sur la promotion du hijab comme vecteur de liberté par le Conseil de l'Europe. Je me réjouis du retrait de ces éléments de communication.

Le 9 juillet 2021, sur Sud Radio, vous déclariez ne pas fermer la porte à un rétablissement de l'uniforme à l'école si l'établissement et les parents y étaient favorables, car il créerait « une certaine énergie, une certaine appartenance à un collectif ». L'envisagez-vous aujourd'hui ?

Mme Annick Billon . - Difficile de ne pas vous attribuer de bons points, monsieur le ministre. Depuis cinq ans, vous avez dit ce que vous alliez faire, et fait ce que vous aviez dit, tandis que, sur cette période, le budget de votre ministère aura augmenté de 13 %.

Si vous ne cachez pas votre enthousiasme sur les AESH, les retours du terrain sont, au mieux, en demi-teinte. Les AESH vivent parfois la mutualisation comme un éloignement des élèves, avec des temps coupés ; il en va de même concernant les PIAL. Il y a certes du mieux dans leur situation, mais cela ne semblerait pas suffisant en matière de revalorisation salariale et de perspectives. J'ai aussi une observation sur la pause méridienne, qui ne serait pas intégrée dans l'accompagnement et reste donc à la charge des collectivités, pouvant entraîner des inégalités territoriales.

La réforme du lycée sur l'orientation semble difficile à articuler avec les nouveaux temps scolaires, alors que les options et les spécialités remplacent les filières. De quels retours disposez-vous ? Qu'en est-il de la formation des enseignants à l'orientation des élèves ? Enfin, les attendus de l'enseignement supérieur ne semblent pas bien évalués ; pouvez-vous nous éclairer sur ce sujet ?

Par ailleurs, le Président de la République a annoncé, à Marseille, un « plan école », doté de 1,2 milliard d'euros, pour aider les 174 écoles de la ville. Pouvez-vous nous confirmer ce montant, alors que, pour l'heure, l'Assemblée nationale n'a voté qu'un premier financement de 254 millions d'euros ?

Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de la force de votre engagement et de votre capacité à incarner les valeurs de la diversité dans vos déplacements dans les départements. Je veux également saluer votre opposition à la campagne du Conseil de l'Europe.

Les associations ont beaucoup souffert durant la pandémie, et le retour des bénévoles est difficile. Le respect des consignes sanitaires n'est pas toujours aisé à suivre et les dirigeants sont difficiles à recruter. Comment envisagez-vous un retour à la normale sans devoir passer par des appels à projets, auxquels les petites structures ont du mal à répondre ?

De plus, le SNU devait concerner 25 000 jeunes, mais n'en a accueilli que 15 000. L'objectif de 50 000 en 2022 sera-t-il atteint ? L'augmentation du coût par jeune est-elle contenue ?

Enfin, les moyens déployés pour atteindre 245 000 services civiques sont importants. Quels sont, sur ce plan, vos objectifs futurs ? Les coûts sont-ils désormais contenus ?

M. Jacques-Bernard Magner . - Je m'exprime cette fois-ci au nom de mon groupe politique. Monsieur le ministre, un budget qui augmente n'est pas bon par nature : c'est aussi une affaire de choix. Vous pouvez, certes, arguer d'une hausse de 13 % avec le quinquennat précédent, mais je vous invite à une comparaison avec l'avant-dernier. On avait alors supprimé 80 000 postes d'enseignants. Je veux insister sur la désaffection des jeunes pour le beau métier d'enseignant, qui n'attire plus, notamment pour des questions de rémunération. Je ne dis pas forcément qu'il faut immédiatement doubler le salaire des enseignants, mais la rémunération reste un problème. Toutefois, il s'agit aussi et surtout de formation professionnelle. Vous aviez indiqué, au début de votre quinquennat être prêt à envisager un prérecrutement plus tôt des jeunes étudiants pour qu'ils viennent à ce métier. Cependant, alors qu'auparavant les écoles normales étaient un ascenseur social pour des jeunes de milieux populaires, aujourd'hui, un master n'est pas toujours facile à obtenir. On n'incite pas assez ces jeunes à choisir ce métier alors qu'ils sont encore en licence.

Les postes supplémentaires prévus seront-ils suffisants pour le dédoublement des classes en REP et en REP+ ? Ou bien faudra-t-il prendre, comme c'est trop souvent le cas, sur les moyens de remplacement ?

Ensuite, au début du quinquennat, vous avez dit ne pas vouloir mettre en péril le dispositif « plus de maîtres que de classes », qui donnait satisfaction. Cependant, l'expérience montre que beaucoup de moyens ont été prélevés sur ce dispositif. Qu'en reste-t-il ?

Enfin, dans le second degré, 7 500 postes d'enseignant ont été supprimés entre 2018 et 2021 et d'autres vont l'être alors que le nombre d'élèves augmente : est-ce bien adapté ? Les heures supplémentaires, proposées pour des raisons économiques, doivent, elles aussi, être financées : quel est leur coût ?

Madame la secrétaire d'État, vous avez parlé de trois sessions au lieu d'une. J'ai cependant une inquiétude sur la session de février, mois durant lequel les jeunes ont des obligations scolaires, même durant les vacances, pendant lesquelles ils doivent travailler, surtout ceux qui passent le baccalauréat. Il semble difficile de les décrocher de ces révisions.

Mme Céline Brulin . - J'ai entendu parler tout à l'heure d'un « Graal éducatif » : je ne suis pas sûre que l'ensemble de la communauté éducative le voie de cette manière, et je m'interroge sur la cohérence avec les discours de laïcité...

Monsieur le ministre, je ne suis pas surprise que vous soyez fier de votre bilan, mais ici, nous nous adressons à nos concitoyens. Or, dans la période actuelle, votre discours n'est pas audible.

On peut comparer les budgets des quinquennats successifs, mais il faut aussi se confronter aux enjeux du moment : nous sommes face à de réelles difficultés de recrutement et à la sortie - je l'espère - d'une grave crise sanitaire. Même si les écoles sont restées ouvertes le plus souvent possible, ce que j'approuve, cela n'a pas été sans conséquence. Vous affichez une priorité donnée au primaire, mais elle se fait au détriment du secondaire, comme nous venons de l'évoquer avec les heures supplémentaires compensant les postes supprimés. Chaque année, des heures supplémentaires ne sont pas effectuées, et ce sont autant d'heures de cours en moins pour les élèves bousculés par la crise.

J'observe aussi une baisse des crédits pédagogiques dans l'enseignement professionnel, alors que les besoins y sont particulièrement importants.

Par ailleurs, il a été beaucoup question de sport. Il n'y a pas que dans le primaire que l'enseignement en EPS n'est pas effectué. Ainsi, dans mon académie, les absences de plus de 15 jours ne font pas l'objet de remplacements. Des élèves sont restés sans cours d'EPS durant des mois. Avec la crise sanitaire, l'impact sur la condition physique des jeunes est important.

Enfin, la volonté de donner la priorité au primaire ne se traduit pas toujours dans les faits. Le dédoublement a entraîné des classes surchargées en dehors des zones REP et REP+ et dans les autres niveaux. Dans mon académie, on reste très loin des 24 élèves par classe, et je ne suis pas sûre que l'on y parvienne pour la prochaine année scolaire avec le budget présenté, surtout si l'on a besoin d'encore plus de remplacements à cause des formations. En outre, on entend de plus en plus de doutes quant à la pertinence des dédoublements, alors qu'ils étaient largement appréciés au début.

Vous n'avez pas évoqué la santé scolaire. C'est pourtant un enjeu particulièrement crucial, à l'heure où le projet de loi portant diverses dispositions de vigilance sanitaire renforce les responsabilités du chef d'établissement. Et quid d'un éventuel transfert de la santé scolaire vers les départements ?

Je partage les craintes de mes collègues sur l'école inclusive. Les PIAL ne reflètent pas toujours les besoins pédagogiques. Un AESH à 30 heures par semaine mettra plus de dix ans à dépasser le seuil de pauvreté ! Enfin, la prime d'attractivité pour les enseignants de 157 euros nets mensuels est bien loin de compenser le gel du point d'indice.

Tout cela n'est pas de nature à résoudre la grave crise de recrutement que nous connaissons.

M. Thomas Dossus . - Tout à l'heure, aux questions d'actualité au Gouvernement, Élisabeth Borne a clamé l'attachement du Gouvernement à ce que les Français vivent dignement de leur travail. Mais la réalité, c'est que l'État recrute des travailleurs pauvres. On nous annonce 4 000 postes - fort bien, mais les rémunérations restent inférieures au seuil de pauvreté. Le revenu mensuel moyen tourne autour de 760 à 800 euros, et seulement 17 % des AESH sont en CDI. Cela explique cet énorme turn over, qui laisse des familles sans solution du jour au lendemain, et des enfants qui ont besoin de repères changent brutalement d'accompagnants. À l'Assemblée nationale, des députés ont proposé d'octroyer les primes REP aux AESH : pourquoi avoir rejeté ces amendements ?

Tant que ces agents ne pourront vivre dignement de leur travail, le service public de l'école inclusive restera un vain mot.

Mme Samantha Cazebonne . - Monsieur le ministre, je salue votre engagement pour l'enseignement français à l'étranger.

Désormais, toutes les familles françaises, quel que soit leur niveau de revenu, bénéficient de bourses afin de financer les postes d'AESH pour leurs enfants en situation de handicap ou à besoins particuliers : nous vous le devons, monsieur le ministre, ainsi qu'à Jean-Yves Le Drian.

Le service national universel doit promouvoir l'engagement des jeunes Français autour de valeurs communes. Au 1 er janvier 2021, 1,7 million de Français résidaient à l'étranger, dont 35 % ont moins de 25 ans, soit 600 000 personnes. Quel SNU pour les jeunes Français de l'étranger ?

Le Pass Éducation permet de diversifier les parcours d'éducation. Les personnels de droit local n'y ont pas droit. Ils en ont pourtant autant besoin que leurs collègues pour préparer leurs projets éducatifs. Pourquoi ne pas l'étendre à tous les personnels du réseau homologué, y compris de droit local ?

M. Olivier Paccaud . - Ma première question concernait les démissions ; elle a été posée par Max Brisson.

La prime d'équipement informatique est renouvelée, mais sera-t-elle pérennisée ? (M. le ministre le confirme.) . L'enseignement est l'un des rares métiers où l'outil doit être acheté par l'employé. Avec la covid, on s'est rendu compte qu'un équipement informatique était plus qu'indispensable.

Cette prime de 150 euros est insuffisante, même si elle a le mérite d'exister. Envisagez-vous de la revaloriser ?

M. Pierre Ouzoulias . - Permettez-moi de vous rappeler le souvenir d'Alcuin qui dirigea l'école palatine, très lointain ancêtre de votre ministère, de 782 à 804, soit durant vingt-deux ans... Vous avez encore un peu de marge !

La laïcité est un outil de promotion sociale et d'émancipation humaine. Elle doit s'appliquer à l'ensemble du territoire de la République. J'avais proposé des amendements dans le cadre de la loi confortant le respect des principes de la République, mais ils n'ont malheureusement pas été adoptés.

Dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé), 60 % des étudiants ont préféré le stage de 12 semaines à l'alternance : des changements sont-ils envisagés ? L'abandon de l'année de M2 rémunérée a-t-elle eu des conséquences sur la diversité sociale du recrutement ?

Comme mon collègue Jacques-Bernard Magner, je suis un nostalgique des écoles normales d'instituteurs, qui ont formé une partie de ma famille. La diversité sociale des recrutements permet la mixité sociale des établissements. Le prérecrutement est certainement une solution d'avenir.

M. Stéphane Piednoir . - Vous, qui avez battu le record de longévité à la tête de ce ministère - si difficile - sous la V e République, soulignez que l'évolution positive du niveau des élèves n'est pas toujours aussi rapide et systématique que certains le souhaiteraient. Cela dédouane-t-il vos prédécesseurs, qui n'ont pas toujours eu le temps de voir leurs réformes porter leurs fruits ? Ou souhaitez-vous plus de temps pour prolonger votre mission ?

Je souscris volontiers à vos démonstrations mathématiques : les taux de réussite exceptionnels aux deux dernières sessions du baccalauréat sont-ils les gages d'une excellence retrouvée et d'une remontée du niveau des élèves ? L'augmentation des crédits a-t-elle un lien avec cette hausse du niveau des élèves ? Le renforcement des obligations scolaires, notamment à partir de trois ans, a-t-il des répercussions budgétaires ?

Je regrette profondément votre absence d'écoute lors de l'examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République, dont j'ai été le rapporteur au Sénat sur le volet éducatif. Quel est votre sentiment quelques mois après la promulgation de cette loi, notamment sur l'instruction en famille, que vous avez dénoncée comme l'un des principaux facteurs du séparatisme ? Pourquoi n'avoir pas fait confiance aux acteurs de terrain ?

M. Jean-Raymond Hugonet . - Je salue votre travail, votre implication totale et votre profond engagement. Le 19 octobre dernier, vous avez rappelé le cap, déclarant que les enseignants devaient « adhérer aux valeurs de la République et les transmettre », ou sinon « sortir de ce métier ». Cela vous a valu les foudres des syndicats, mais vous aviez raison.

Mais, par deux fois, vous avez fait une confusion, volontairement peut-être lorsque l'on connaît votre maîtrise de la langue française : vous parlez de la laïcité comme d'une valeur de la République, alors qu'il s'agit d'un principe républicain, comme l'indivisibilité, comme le caractère social et démocratique. C'est une confusion gravissime.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Monsieur Brisson, le dédoublement des grandes sections en 2022 représente 402 postes en REP+ et 887 en REP. Près de 90 % des grandes sections de REP+ sont d'ores et déjà dédoublées ; 50 % le sont en REP. Quant à la limitation à 24 élèves, elle représente 736 postes en CP et en CE1 pour le public et 147 pour le privé.

Je ne prétends pas que le service public de l'école inclusive soit parfait, mais regardons le chemin parcouru ! En quatre ans, nous sommes passés de 70 000 contrats aidés à 125 000 CDD ou CDI : c'est un progrès considérable. C'est certes imparfait, notamment sur les enjeux de rémunération des AESH, mais les contrats se sont bien améliorés, avec plus de pérennité, l'introduction de la notion de carrière et des passerelles à l'intérieur de l'éducation nationale. Rappelons-nous qu'il y a quatre ans, il était fréquent qu'un enfant change en cours d'année d'accompagnants en raison de la durée du contrat aidé. La formation continue a également progressé ; elle s'est enrichie, même si elle reste hétérogène.

La généralisation des PIAL est une excellente chose. Il y a de très belles réussites qui nous permettent, progressivement, de nous caler sur les meilleures pratiques. Notre vision est désormais beaucoup plus qualitative, bien loin du « premier arrivé, premier servi » qui avait cours auparavant. Il y a encore des insuffisances et des frustrations - je ne le conteste pas -, mais 100 000 élèves supplémentaires - on est passé de 300 000 à 400 000 élèves accompagnés - ont pu bénéficier de ces dispositifs au cours du quinquennat.

J'ai été sensible au fait qu'ATD Quart Monde m'ait alerté, au moment de ma prise de fonctions, sur le risque de considérer la pauvreté sociale comme un handicap. Cette dérive peut exister et entraîner une assignation à une catégorie ; nous devons être vigilants, car cela existe parfois.

Les AESH sont désormais plus nombreux et mieux rémunérés. Les 50 millions d'euros supplémentaires se verront sur la fiche de paie. La revalorisation passera aussi par plus de temps pleins, et, pour cela, nous devons travailler avec les collectivités territoriales, responsables des temps non scolaires. Cela créé un découpage qui ne permet pas de créer des pleins temps ou instaure des rémunérations différenciées.

Vous affirmez que les professeurs seraient déconsidérés. Sachez qu'à plus de 80 % la population générale a de la considération pour les professeurs : c'est plus que ce que l'on croit ! C'est un message d'optimisme. La considération passe par la rémunération, et c'est le sens de nos engagements dans le Grenelle de l'éducation, mais pas seulement. Cela prendra du temps, mais cela se voit déjà sur les rémunérations et dans les conditions de travail. Nous créons l'équivalent d'un comité d'entreprise pour l'éducation nationale, le Préau, avec des offres sociales, culturelles, sportives, de logement, etc. Je suis optimiste sur notre capacité à revaloriser complètement le professeur dans la société, non seulement au plan des rémunérations - sur ce quinquennat et le suivant -, mais aussi au plan de l'estime dans la société. Un bon indicateur sera la reprise des vocations enseignantes.

Nous avons comptabilisé 937 démissions l'an dernier dans le premier degré - soit 0,29 % des effectifs - et 617 dans le second degré - soit 0,17 % des effectifs -, sans augmentation notable depuis les deux dernières rentrées. Les ruptures conventionnelles augmentent, mais elles relèvent d'une autre logique, celle de la seconde carrière. Le métier d'enseignant conserve beaucoup de sens et nous travaillons également pour attirer des profils en seconde partie de carrière. Nous devons notamment améliorer la reconnaissance de l'expérience acquise lors de la première partie de carrière. C'est un engagement pris lors du Grenelle.

Je partage votre vision sur la question de la diversité et de la promotion sociales. Dans le cadre de notre politique de prérecrutement, nous avons embauché des assistants d'éducation qui se destinent à la fonction de professeur : 1 181 en 2020, 1 884 en 2021 et 3 000 en 2022, soit 6 069 aujourd'hui. Les retours sont très positifs. En outre, depuis cette rentrée 2021, des classes préparatoires au professorat des écoles dispensent dès la première année un enseignement sur les savoirs fondamentaux à des néobacheliers, principalement boursiers. Cela renoue avec ce que notre tradition scolaire a de meilleur, tout en le modernisant.

Madame Billon, le pouvoir d'achat des AESH est encore trop faible, mais il y aura de nouveaux progrès en 2022 et les années suivantes. Leur temps de travail est encore trop morcelé entre les collectivités territoriales et l'État.

La réforme du lycée et Parcoursup s'emboîtent parfaitement. Dès la seconde, les élèves doivent se poser les bonnes questions. Il faut en finir avec le système qui amenait les élèves à choisir en fin de terminale, par hasard ou par nécessité, une orientation qui aboutissait à un échec dans 60 % des cas dès la première année : c'était un scandale sans responsable, auquel on s'était habitué. Nous avons fait remonter la question en amont, dès la fin du collège, avec des heures d'orientation en classe de quatrième, avec la présentation des métiers, dans laquelle les régions sont impliquées en raison de leurs nouvelles compétences, et des filières d'enseignement supérieur. Les outils numériques ont été modernisés, avec « Horizons 2021 » : en fonction de ses goûts, de ses passions, de ses capacités, un jeune de 16 ans peut envisager un spectre de métiers. Les attendus de l'enseignement supérieur sont de plus en plus cohérents. Le conformisme des bons élèves qui s'orientaient en série S sans la moindre vocation scientifique a disparu : cette vraie-fausse hiérarchie n'existe plus. La moitié des élèves choisissent des combinaisons de spécialités non assimilables aux anciennes séries. Ces parcours représentent un gain de temps considérable pour les élèves. Et les enquêtes montrent que les lycéens sont majoritairement satisfaits de la réforme, en dépit de tous les discours négatifs entendus.

Monsieur Piednoir, j'entends bien le sous-entendu de votre question relative aux taux de réussite au baccalauréat. Mais ne confondons pas l'épidémie de la covid-19 et la réforme du baccalauréat et soyons tous de bonne foi. Nous avons traversé l'an dernier une crise exceptionnelle, qui a conduit la plupart des pays du monde à adopter le contrôle continu. Je me suis battu pour que cela ne soit pas un contrôle continu intégral : le grand oral, l'épreuve de philosophie, l'épreuve orale de français ont eu lieu. Mais il était également normal de ne pas pénaliser les élèves en cette année difficile. Le taux de réussite au baccalauréat est la résultante de différents paramètres. La réforme du lycée a vocation à rehausser le niveau d'exigence, avec une refonte des programmes. Le système, entre épreuves et contrôle continu, est équilibré. En ce moment, dans tous les établissements de France, les équipes réfléchissent au contrôle continu. L'année dernière a été spéciale. Je l'assume, mais la réforme du lycée a été bénéfique au cours de la crise sanitaire et je sais que les élèves ont été fiers de passer leur grand oral.

Madame Billon, les chiffres sur les écoles de Marseille ne sont pas encore stabilisés. L'effort sera très important et à la hauteur des enjeux. La collectivité territoriale a identifié 174 écoles à réhabiliter, à des degrés variables. Le Président de la République a souhaité un investissement massif aux côtés des collectivités. Nous ferons le point régulièrement. Il faut que cela soit un double progrès pour les élèves de Marseille : des locaux rénovés et de grande qualité, mais aussi une nouvelle dynamique pédagogique et éducative. Nous avons des projets, différents d'une école à l'autre.

Monsieur Magner, je n'ai aucune difficulté à comparer les quinquennats, voire les septennats. On peut remonter aussi loin que nécessaire : ce budget bat des records. Mais peut-être voulez-vous me faire dire que l'avant-dernier quinquennat avait dépensé plus que l'antépénultième ? Cela est vrai.

Les moyens de remplacement n'ont pas été sacrifiés ; ils ont même été renforcés en cette rentrée. Nous n'abandonnons pas non plus le dispositif « plus de maîtres que de classes », même si nous le diminuons, car le dédoublement des classes est plus efficace.

Madame Brulin, j'entends aussi des réactions positives sur le terrain, notamment sur notre politique de l'école ouverte, sur la réforme du lycée, sur la politique des savoirs fondamentaux à l'école primaire, etc. Les directeurs d'écoles REP+ constatent bien que les classes sont dédoublées, que les personnels bénéficient d'une prime annuelle, qu'ils ont une décharge supplémentaire : il ne s'est pas rien passé depuis quatre ans et demi ! Je n'affirme pas que tout va bien, mais nous allons dans la bonne direction, notamment sur le renforcement des savoirs fondamentaux. J'espère que cela sera visible dans les prochaines enquêtes nationales ou internationales. Notre politique de maintien des écoles ouvertes y contribuera probablement.

La priorité donnée au primaire ne s'est pas faite au détriment du secondaire. Certes, il y a eu des suppressions de postes, mais nous avons augmenté en contrepartie les heures supplémentaires, même si elles ne sont pas toutes consommées. La vague démographique négative va arriver dans le second degré. Nous avons à maintenir une qualité du niveau de recrutement des professeurs dans le second degré - ce que nous avons fait. Nous avons concentré les moyens dans le premier degré pour créer un surinvestissement, afin d'agir à la racine des difficultés. Dans le second degré, nous constaterons, dans les prochaines années, une amélioration mécanique du taux d'encadrement pour des raisons démographiques. Là où une politique inconsidérée aurait été de créer des postes dans le second degré, et éventuellement d'en supprimer dans le premier degré au nom de la baisse démographique - politique qui a prévalu à l'éducation nationale pendant des décennies - nous avons misé sur l'avenir : investir sur les compétences fondamentales des enfants. Nous avons créé une forme d'attente pour le second degré. Mais les élèves qui y arriveront seront mieux formés. C'est un vrai choix politique, que j'assume.

En Normandie, 98 % des classes ont un taux d'encadrement à 24 élèves. 100 % des CP et CE1 et 75 % des grandes sections sont dédoublés en REP+. Il est vrai que les chiffres sont moins bons en Seine-Maritime en raison de sa démographie particulière, mais cela s'est amélioré lors de cette rentrée : on compte 58,6 % de grandes sections dédoublées, 82,5 % de CP à 24 et 75,7 % de CE1 à 24 - on est passé entre septembre 2020 et 2021 de la moitié des classes concernées aux trois-quarts et nous passerons à 100 % à la prochaine rentrée.

Des progrès sont nécessaires en matière de santé scolaire. Le Grenelle de l'éducation a permis la revalorisation des salaires des médecins et des infirmiers scolaires, mais la coopération avec la médecine non scolaire doit encore être améliorée.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État . - Madame Cazebonne, notre mobilisation est totale pour intégrer les jeunes de l'enseignement français à l'étranger dans le SNU. Nous en avons accueilli l'an dernier pour la première fois. La seule règle est de disposer d'une adresse en France pour rattacher le jeune à un centre. Nous travaillons pour accompagner un maximum de jeunes.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Le Pass Éducation permet un accès libre aux musées et monuments nationaux, pour tous les personnels en activité devant élèves, y compris les enseignants titulaires détachés dans les établissements homologués à l'étranger. Je vais examiner la situation des enseignants de droit local, sur lesquels nous avons cependant moins de visibilité, car ils sont financés sur les ressources propres des établissements.

Monsieur Paccaud, je tiens à rappeler la logique budgétaire qui prévaut quand on parle de pérennisation des crédits : par exemple, quand nous indiquons que nous consacrons 400 millions d'euros à la revalorisation salariale des enseignants en 2021, il faut bien comprendre que ce montant est reconduit l'année suivante. Autrement dit, quand mon ministère consacre 700 millions d'euros supplémentaires à ce volet en 2022, ce sont 700 millions d'euros qui s'ajoutent aux 400 millions d'euros déjà versés en 2021 et aux 400 millions d'euros reconduits en 2022, soit 1,5 milliard d'euros au total.

Le montant de la prime informatique pourrait être revalorisé dans les années à venir, selon l'évolution du coût des matériels. Cette prime constitue en tout cas un véritable progrès.

Monsieur Piednoir, je tiens à nuancer certains de vos propos. Je n'ai jamais dit que l'instruction en famille était la principale cause du séparatisme : c'est l'un des éléments qui peut conduire au séparatisme islamiste, comme à d'autres phénomènes qui peuvent légitimement poser question. Ce faisant, je n'ai jamais fait le procès d'une instruction en famille bien conduite, au contraire. Il faut distinguer ce qui est bon ou pas pour l'enfant, et c'est précisément ce que nous sommes en train de faire : les rectorats étoffent leurs équipes pour veiller à ce que cette instruction en famille, quand elle est autorisée, se déroule dans de bonnes conditions, ce qui est, à mes yeux, la meilleure manière de garantir les droits de l'enfant.

Monsieur Hugonet, je vous donne raison sur la notion de laïcité. D'ailleurs, je vous invite à faire appel à moi moins en tant que linguiste qu'en tant que constitutionnaliste ... La laïcité est en effet l'un des quatre principes au fondement de notre République.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État . - Monsieur Brisson, vous m'interrogez sur le port de l'uniforme. Je vous répondrai que 88 % des volontaires du SNU ont estimé que l'uniforme contribuait à renforcer la cohésion du groupe et était important pour eux, taux qui s'élève même à 91 % chez les filles. Ces chiffres sont issus des études de l'Injep (institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire). Je crois fondamentalement que l'uniforme doit s'inscrire dans le projet de l'établissement et que les parents doivent être d'accord. En tout état de cause, il contribue au sentiment d'appartenance à l'école ou à la Nation dans le cadre du service national universel. Je pense qu'il permet aussi de réduire les inégalités ; en limitant l'importance de porter des vêtements de marque. En somme, l'uniforme peut être un facteur d'unité. Il est d'ailleurs porté dans certains mouvements de l'éducation populaire ou de jeunesse.

Monsieur Magner, vous m'interrogez sur la session du SNU de février. Nous attendons 4 000 jeunes volontaires. La diversité des jeunesses fait que tout le monde n'est pas en situation de scolarité générale. En 2021, les sessions auront lieu du 13 au 25 février, du 12 au 24 juin et du 3 au 15 juillet.

Madame Billon, je connais votre attachement à la question associative. Il faut bien entendu distinguer le soutien au monde associatif « employeur », qui est porté par les têtes de réseau, ces associations capables de répondre aux appels à projets, d'accéder à un certain nombre de dispositifs, comme les emplois Fonjep - Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire - ou la banque des territoires ; et le soutien aux plus petites associations. Ces dernières ont besoin d'un accompagnement plus ciblé et d'une simplification de leurs démarches au quotidien. Deux textes récemment promulgués, l'un sur l'engagement associatif, destiné à accompagner la mobilisation des bénévoles, et l'autre sur la trésorerie des associations, doivent permettre de les soutenir au plus près.

Je conclus en vous indiquant que le coût du service civique est stable, alors même que le dispositif a permis d'accueillir 32 % de jeunes supplémentaires entre 2019 et 2021. Il faut saluer la mobilisation des collectivités territoriales sur ce sujet. 500 collectivités se sont engagées pour accueillir des jeunes en service civique sur l'ensemble du territoire.

Le coût du service national universel a, en revanche, augmenté, notamment en 2021, à cause de la crise. Il ne devrait cependant pas évoluer en 2022, pour atteindre 2 200 euros par jeune concerné.

Le principal poste de dépenses lié au SNU tient à l'hébergement. La généralisation de ce dispositif nécessite donc que l'on se penche sur cette question. C'est pourquoi nous avons commandé un rapport sur l'immobilier de l'État, dont nous attendons les conclusions. Enfin, je profite de cette question pour dire que la généralisation du SNU ne se fera pas sans débat parlementaire.

M. Laurent Lafon , président . - Je vous remercie l'un et l'autre de la précision de vos réponses et du temps que vous avez consacré à cette audition, qui est évidemment importante pour nous, compte tenu du montant des crédits budgétaires, mais aussi et surtout parce qu'elle concerne l'école et la jeunesse.

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