II. UNE ACCENTUATION DE L'EFFORT EN FAVEUR DES JEUNES DÉLINQUANTS

A. LA RECHERCHE D'UNE MEILLEURE RÉPONSE PÉNALE A LA DÉLINQUANCE DES MINEURS

Le registre éducatif apparaît sous-utilisé par le Tribunal pour Enfants : une mesure éducative seulement est ordonnée pour cinq peines d'emprisonnement ferme ou avec sursis prononcées. Or la prison ne semble pas jouer un rôle de coup d'arrêt puisque le risque de retour en prison dépasse les 50 % pour les mineurs ayant subi une première incarcération.

Face à un tel constat, la politique pénale conduite à l'égard des mineurs a fait l'objet, depuis deux ans, de plusieurs adaptations, notamment d'ordre législatif.

L'action des pouvoirs publics a notamment porté sur trois points.

1. Une amélioration du régime de la garde à vue

La loi du 1er février 1994, tout en consacrant le principe de l'interdiction de la garde à vue pour les mineurs de 13 ans, a introduit dans l'ordonnance du 2 février 1945 une disposition permettant, à titre exceptionnel et selon des modalités très protectrices, la retenue, pour les nécessités de l'enquête, des mineurs âgés de 10 à 13 ans.

S'agissant des mineurs de 13 à 18 ans, les garanties dont ils bénéficient ont été renforcées par la loi du 24 août, adoptée à la suite d'une proposition de loi déposée par M. le Président Jacques Larché : présentation à un magistrat du parquet au moment de la prolongation de la garde à vue, examen médical du mineur, entretien avec un avocat, avis aux parents.

2. La recherche d'une réponse plus rapide à la délinquance des mineurs

La loi du 8 février 1995 a rendu possible à l'égard des mineurs la procédure de convocation par officier de police judiciaire qui existait précédemment pour les majeurs et que la pratique avait parfois initiée en matière d'enfance délinquante.

Cette procédure a pour objectif de garantir un véritable traitement en temps réel des procédures pénales ouvertes à rencontre de mineurs. L'adolescent poursuivi se voit ainsi remettre par l'officier de police judiciaire une convocation d'avoir à comparaître devant le juge des enfants saisi des faits dans un délai relativement bref. Après avoir été entendu par les services de police ou de gendarmerie, il sait donc immédiatement quand il rencontrera le juge des enfants.

Tout en visant à réduire le sentiment d'impunité qui peut résulter d'une convocation tardive devant le juge des enfants, ce texte permet également d'apprécier le plus rapidement possible la situation du mineur afin de mettre en place un suivi éducatif si ce dernier s'avère indispensable.

3. L'encouragement au prononcé de mesures éducatives

a) La médiation -réparation

Afin d'assurer aux victimes la réparation des dommages causés par un mineur et de mieux faire prendre conscience à celui-ci des conséquences de ses actes, la loi du 4 janvier 1993 a prévu la faculté de lui proposer une mesure de réparation (article 12-1 de l'ordonnance du 2 février 1945).

Cette proposition peut être faite par le procureur de la République, par la juridiction d'instruction ou par la juridiction de jugement.

Depuis la promulgation du texte, le nombre de jeunes concernés a considérablement augmenté. En effet, si 1 096 jeunes ont effectué une mesure de réparation en 1993, ils ont été 3 740 en 1994.

Le nombre de juridictions qui appliquent cette disposition est lui aussi en augmentation puisqu'en 1993, 58 tribunaux pour enfants l'ont utilisée alors qu'ils ont été 94 en 1994.

La répartition de ces mesures par catégorie de magistrats est elle aussi intéressante. Si le parquet reste largement majoritaire dans son utilisation, la place qu'il occupe dans le prononcé de cette mesure tend à se restreindre (94,4 % en 1993 ; 84,4 % en 1994) alors que les juges des enfants et les tribunaux pour enfants y recourent de plus en plus souvent. Le nombre de mesures de réparation prononcées par un juge des enfants au stade de l'information passe de 4,1 % en 1993 à 8,7 % en 1994 et celui des mesures prononcées au stade du jugement passe de 1,5 % à 5,9% dans le même temps.

Il convient de noter que, dans le cadre du programme pluriannuel pour la justice, le nombre de 9 000 mesures de réparation devra être atteint en 1999.

b) Les innovations de la loi du 8 février 1995

La loi du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative a diversifié les mesures éducatives que peut décider le juge des enfants en audience de cabinet. Elle lui a notamment permis de prononcer des mesures de placement ou de mise sous protection judiciaire. Elle a conservé à ce magistrat sa compétence jusqu'à la comparution du mineur devant le tribunal pour enfants. En donnant ainsi plus de souplesse dans le suivi de ces mesures, elle garantit une intervention judiciaire plus précoce et plus efficace à l'égard du mineur délinquant.

Le même texte a également ouvert au juge des enfants une faculté de nature à réduire le nombre de mineurs placés en détention provisoire : le prononcé, avant de statuer sur le fond, d'une mesure de liberté surveillée à titre provisoire en vue de statuer après une ou plusieurs périodes d'épreuve dont le juge fixe la durée.

Afin de percevoir plus précisément les effets de la loi du 8 février 1995, le ministère de la Justice envisage d'effectuer, dans les prochains mois, une évaluation globale de l'application de ce texte.

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