II. UNE PRATIQUE DÉSORDONNÉE ET CONTESTÉE

En 1996, tout comme en 1995, les conclusions du rapport du Conseil d'État intitulé « L'urbanisme pour un droit plus efficace » demeurent toujours d'actualité.

C'est pourquoi, il est souhaitable de rappeler, une fois encore, les conclusions de cet important document :

« Une fois la règle d'urbanisme clairement édictée et connue, elle doit être appliquée et respectée. Les autorités administratives, en particulier maires et préfets, détiennent un rôle essentiel qu' `elles ne doivent plus hésiter à remplir, pour veiller à l'intérêt général dont elles ont la garde. L'intervention des juges, et notamment le juge administratif n'est efficace que si elle est rapide. Il convient donc de leur donner les moyens d'intervenir plus efficacement ; ils contribueront ainsi à rendre plus effective la règle d'urbanisme, en sanctionnant les actes et les comportements illégaux.

Il y a va de la légitimité du droit de l'urbanisme, à l'application duquel les citoyens sont très sensibles, et de la crédibilité des acteurs de ce droit - maires, préfets, et juges - dont l'autorité pourrait souffrir d'un droit de l'urbanisme discrédité par une pratique désordonnée et contestée ».

Votre commission des Affaires économiques constate qu'hélas, le droit de l'urbanisme demeure mal connu et mal appliqué, comme en témoigne la multiplication des contentieux qu'il occasionne.

A. LE CONTENTIEUX DE L'URBANISME : L'AMPLIFICATION DANS L'INDIFFÉRENCE

L'analyse du contentieux de l'urbanisme nécessite une distinction entre, d'une part, le contentieux des décisions prises au nom de l'État, et, d'autre part, les instances qui concernent les décisions des collectivités locales.


• Le contentieux des décisions prises au nom de l'État

En 1993, dernière année pour laquelle existent des statistiques le contentieux de l'urbanisme a enregistré 823 recours en annulation dont 323 concernent les permis de construire et 137 les certificats d urbanisme. Sur ce total, 145 recours étaient assortis d'une demande de sursis à exécution.

La même année 687 décisions ont été rendues sur des demandes mettant en cause des décisions prises au nom de l'État. Sur ce total, 112 annulations, soit 23 % du total des décisions et 91 sursis à exécution ont été prononcés.

Ces chiffres montrent que même l'administration rencontre des difficultés pour appliquer la réglementation qu'elle contribue pour partie à mettre en place.


• Les recours des préfets dans le cadre du contrôle de légalité.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, les représentants de l'État ont déféré , en 1993, devant les tribunaux administratifs 209 actes des collectivités locales . 119 recours étant assortis d'une demande de sursis à exécution.

Sur 203 jugements rendus par les tribunaux , 72 soit 35 % concernent des désistements ou des non-lieux à statuer, la commune ayant retiré ou modifié l'acte religieux. 91 décisions ont été rendues sur le fond, dont 79 annulations (87 % ) et 40 sur des demandes de sursis à exécution, dont 29 sursis ordonnés (72 %).


• Le contentieux des décisions prises par les maires

Dans les communes dotées d'un POS, le maire attribue le permis de construire. Ce sont donc ses décisions, prises au nom de la commune qui sont le cas échéant, attaquées par les personnes aux droits desquels elles préjudicient. Il s'avère que l'administration ne dispose pas de statistiques sur ce contentieux.

Votre commission des Affaires économiques s'étonne qu'aucune statistique relative à ces contentieux ne soit actuellement tenue à jour.

Elle observe que, s'agissant de la durée des instances contentieuses, aucune statistique n'est disponible ni en ce qui concerne les décisions prises au nom de l'État, ni pour celles qui mettent en cause des décisions prises au nom de la commune.

C'est pourquoi, votre commission des Affaires économiques souhaite que les services compétents se dotent, au plus tôt, d'un outil statistique qui permette d'observer l'évolution des contentieux de l'urbanisme .

Il n'est en effet pas concevable que les services chargés de l'application du droit ne soient pas informés du volume du contentieux qui résulte pour partie des textes en vigueur.

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