N° 68

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

AGRICULTURE

Par M. Gérard CÉSAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1078 , 1111 à 1116 et T.A. 193 .

Sénat : 65 et 66 (annexe n° 3 ) (1998-1999).


Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L'examen des crédits inscrits au budget du ministère de l'agriculture revêt cette année une importance particulière. En effet, l'agriculture française vit aujourd'hui une double mutation.

En premier lieu, au niveau communautaire, avec une nouvelle réforme de la Politique agricole commune : cette réforme a été longuement analysée par votre commission des Affaires Economiques au printemps dernier 1( * ) . En poursuivant et en renforçant le dispositif adopté en 1992, la Commission européenne vise à améliorer la compétitivité des exploitations agricoles afin d'adapter l'agriculture européenne à l'ouverture des marchés.

Si le dernier sommet de Cardiff du mois de juin dernier a fixé l'échéance de mars 1999 pour aboutir à un accord sur cette réforme importante, la poursuite des négociations sous présidence autrichienne pourrait connaître quelque retard.

Au niveau national, en second lieu, notre agriculture doit faire l'objet d'une nouvelle loi d'orientation après celles de 1960, 1962 et de 1980. Le projet de loi d'orientation agricole préparé par M. Philippe Vasseur à la demande du Président de la République a été profondément remanié par M. Louis Le Pensec, Ministre de l'agriculture et de la Pêche.

L'esprit du texte actuel exprime une évolution significative par rapport à celui qui avait présidé à l'élaboration du premier projet et surtout par rapport aux objectifs des précédentes lois d'orientation de 1960 et 1962. Alors que celles-ci visaient à moderniser l'agriculture dans des structures agrandies, le projet actuel se donne comme objectif de redéfinir la place de l'agriculture dans la société. Certes, l'activité de production reste la fonction première des exploitations agricoles. Mais à cette fonction économique, insuffisamment prise en compte selon votre rapporteur, le texte de M. Louis Le Pensec consacre les fonctions sociales et environnementales. Notre collègue, M. Michel Souplet, rapporteur de ce projet de loi, devrait rendre son rapport dans les semaines à venir.

Cette double réforme de l'agriculture française doit permettre à ce secteur d'affronter, d'une part, la reprise des négociations agricoles dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et, d'autre part, l'intégration des pays d'Europe centrale et orientale (PECO), tout en préservant l'identité agricole française et européenne.

C'est dans ce contexte que s'inscrit l'avis de votre commission sur les crédits du ministère de l'agriculture. Traditionnellement, celui-ci est l'occasion non seulement de mesurer l'attention portée, budgétairement, à ce secteur, mais aussi de retracer les principaux événements ayant marqué son évolution au cours de l'année écoulée.

Il se félicite de ce que le nouveau Gouvernement ait pris conscience de la nécessité, pour notre agriculture comme pour l'ensemble de la société, d'établir un nouveau contrat entre la Nation et ses agriculteurs à travers un projet de loi d'orientation agricole.

En matière budgétaire, les crédits du ministère de l'agriculture dans le projet de loi de finances pour 1999 baissent de près de 6 % par rapport à 1998. Hors subvention d'équilibre au BAPSA, le montant des crédits progresse de 3 % par rapport à 98 pour s'établir à 28,2 milliards de francs.

La politique du Gouvernement traduit quatre priorités


Il s'agit en premier lieu de prévoir, dès à présent, dans le projet de loi de finances pour 1999, le financement des contrats territoriaux d'exploitation que devrait mettre en place la loi d'orientation agricole. Ces contrats sont destinés à orienter l'intervention économique dans la voie d'un rééquilibrage à la fois territorial et social de l'agriculture.

Ce fonds de financement des CTE est doté de 300 millions de francs financés par redéploiement, auxquels devraient s'ajouter, selon le ministre, des cofinancements européens : ainsi 450 millions de francs devraient pouvoir être mobilisés dès 1999 dans le cadre des CTE.

Cet effort de prévision budhétaire est sans doute louable ; mais il appelle deux interrogations.

• En premier lieu, le Gouvernement considère dès septembre 1998 comme acquise la mise en place du CTE. Celui-ci, s'il a fait l'objet de négociations avec les professionnels, n'est cependant pas, à notre connaissance adopté par le Sénat.

Or, soit le Gouvernement considère qu'il s'agit d'une simple mesure d'ordre administratif -comme cela semble être le cas puisque les expériences de CTE concernent actuellement 75 % des départements et 3 régions- et la légalisation d'un tel dispositif ne nous paraît guère utile. Soit il s'agit d'un dispositif d'ordre législatif qui nécessite un débat et une adoption par le Parlement.

Dans ce cas, c'est faire fi de la représentation nationale que de proposer de redéployer 300 millions de francs dès le mois de septembre 1998, six mois avant l'adoption définitive du texte d'orientation.

En second lieu, le Gouvernement considère qu'un tiers des crédits affectés aux CTE -si ceux-ci étaient mis en place- proviendrait des crédits communautaires. Une telle déclaration étonne votre rapporteur pour avis : certes, il est tout à fait judicieux d'élaborer le projet de loi d'orientation agricole à l'aune de la réforme de la PAC. Néanmoins, votre rapporteur pour avis avait cru comprendre que M. Louis Le Pensec s'opposait globalement au projet de la Commission. Les assurances que le Ministre de l'agriculture a obtenues de M. Fischler, Commissaire européen chargé de l'agriculture, en matière de financement du CTE, laissent elles présager un accord global sur les propositions de la Commission européenne ? Par ailleurs, les dernières propositions de la Commission relatives au financement du budget communautaire paraissent privilégier la " renationalisation " d'une part importante des aides agricoles. Est-ce à dire qu'à trop vouloir décentraliser les aides, le Gouvernement français a favorisé une telle inflexion ? Quid dès lors des 150 millions attendus pour la CTE ?

• La seconde priorité est constituée par la formation et l'installation afin " d'assurer l'avenir des jeunes " en agriculture. Les crédits de l'enseignement agricole, la formation et la recherche augmentent de 6 % avec 6,86 milliards de francs en dépenses ordinaires. En outre, les crédits consacrés à la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) sont reconduits en 1999 à 645 millions de francs : ils devraient permettre près de 10.000 installations avec les remboursements communautaires.

La troisième priorité du Ministère de l'agriculture concerne la sécurité et la qualité de l'alimentation avec une dotation en progression de 10,5 %, à la hauteur des nouveaux enjeux de protection des consommation.

Ainsi, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), créée par la loi du 1er juillet 1998 devrait être dotée des moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions d'évaluation, de veille et d'expertise. La dotation de 11,7 millions inscrite au projet de budget de l'agriculture pour 1999 sera complétée par des sommes équivalentes provenant des budgets des ministères chargés respectivement de la santé et de la consommation. Le budget prévisionnel de la nouvelle Agence s'élève ainsi à 35 millions ; elle sera dotée de 50 emplois nouveaux.

La quatrième et dernière priorité a trait aux retraites : il s'agit de la deuxième étape du plan pluriannuel de revalorisation. En 1998, une première étape a permis d'augmenter jusqu'à 500 francs par mois la retraite de 274.000 personnes.

En 1999, 1,2 milliard de francs devraient être consacrés, dans le BAPSA, à la revalorisation des petites retraites agricoles. La nouvelle mesure proposée par le Gouvernement devrait coûter 1,6 milliard de francs en année pleine et concerner 607.000 retraites agricoles. Ces mesures restent néanmoins globalement inférieures à celles adoptées de 1993 à 1995.

Votre rapporteur pour avis, tout en s'interrogeant sur le financement du CTE, approuve globalement les priorités retenues par le Gouvernement. Il souhaite néanmoins que le Sénat soit vigilant lors du futur examen du projet de loi d'orientation agricole.

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