II. LE PROJET DE LOI : RÉSORBER L'EMPLOI PRÉCAIRE, PRÉVENIR SA RECONSTITUTION ET IMPOSER LES 35 HEURES PAR DÉCRET DANS LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE

Le projet de loi prévoit trois séries de mesures :

- les conditions parfois très avantageuses en matière de résorption de l'emploi précaire ne garantissent pas l'attachement des agents concernés à la collectivité publique qui les emploie ;

- les mesures de modernisation du recrutement paraissent utiles mais ne constituent que les prémices d'une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ;

- quant à la réduction et à l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique territoriale, le projet de loi traduit une méfiance certaine envers la gestion de proximité assurée par les collectivités locales.

A. LA RÉSORPTION DE L'EMPLOI PRÉCAIRE : DES CONDITIONS TRÈS AVANTAGEUSES

1. Le protocole d'accord du 10 juillet 2000

Le 10 juillet 2000, le Gouvernement signait avec six des sept organisations syndicales représentatives des fonctionnaires le protocole d'accord sur la résorption de l'emploi précaire dans les trois fonctions publiques et sur une meilleure gestion de l'emploi public. La durée d'application de ce protocole est de cinq ans .

Le premier volet du protocole d'accord, consacré à la résorption de l'emploi précaire, tend à titulariser, en particulier par concours réservés, les agents non titulaires qui exercent depuis plusieurs années, par renouvellements successifs de leur contrat, des fonctions nomalement dévolues à des titulaires. Il se veut " fondé sur les principes définis par le statut général des fonctionnaires ". Il s'inscrit dans la ligne des orientations protectrices définies au niveau européen. En effet, la directive n° 1999/70 CE du Conseil du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée a pour but de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.

Le protocole d'accord fixe des dispositions communes aux trois fonctions publiques, notamment le champ d'application et les modalités de titularisation.

Champ d'application

Le protocole s'applique aux agents des trois fonctions publiques, français ou ressortissants d'un pays de l'Union européenne ou de l'espace économique européen, bénéficiaires d'un contrat de droit public à durée déterminée , quels que soient la dénomination sous laquelle ils ont été recrutés (contractuels, vacataires, temporaires, auxiliaires), le mode de financement de leur rémunération et la catégorie d'assimilation avec des fonctionnaires (A, B ou C), qui assurent des fonctions correspondant à des emplois qui devraient être occupés par des fonctionnaires titulaires .

Modalités de titularisation et conditions

Outre les voies ordinaires de recrutement, le protocole d'accord prévoit diverses modalités particulières : les concours réservés et examens professionnels réservés ; l'accès direct dans les grades classés en échelle 2 ou les examens professionnels, pour les agents relevant de la catégorie C ; la titularisation sur titres sans changement d'affectation (intégration directe) pour les agents de la fonction publique territoriale.

Les conditions pour bénéficier de ces modalités dérogatoires de recrutement sont une obligation de présence de deux mois au cours de l'année précédent la date de signature du protocole d'accord et une condition d'ancienneté de trois ans d'équivalent temps plein au cours des huit années précédant l'inscription aux opérations de recrutement. En revanche, aucune limite d'âge ne sera opposée aux candidats.

Corps et cadres d'emplois concernés

Tous les corps ou cadres d'emplois ouverts au recrutement externe pourront être ouverts au recrutement de ces agents non titulaires. Une procédure de reconnaissance des acquis professionnels sera mise en place ; elle est particulièrement utile lorsque les conditions ont changé depuis le recrutement des agents concernés.

S'agissant de la catégorie A, seront exclus les corps d'encadrement supérieur atteignant la hors échelle.

Support des emplois

Dans les fonctions publiques de l'État et hospitalière, selon le protocole d'accord, une partie significative des emplois nécessaires à ces recrutements sera créée par transformation des supports budgétaires affectés à la prise en charge des agents concernés. Les emplois vacants seraient utilisés en tant que de besoin.

Dans les établissements publics administratifs de l'État et les établissements publics locaux d'enseignement, des concertations interviendront avant le 10 janvier 2001 sur les modalités de créations d'emplois sur les ressources propres de ces établissements.

Dispositions propres à la fonction publique de l'État

Le protocole d'accord prévoyait que l'état des lieux permettant de mesurer les situations de réelle précarité dans la fonction publique de l'État serait effectué dès l'été 2000. Les résultats de cette enquête, menée dans chaque ministère, devraient être connus au plus tard à la fin de l'année 2000 et faire l'objet d'une concertation en comité technique paritaire.

Des mesures particulières s'appliqueront d'une part aux maîtres délégués des établissements d'enseignement privés sous contrat, d'autre part aux agents contractuels recrutés sur place par les services de l'État à l'étranger 20 ( * ) .

Dispositions propres à la fonction publique territoriale

Une titularisation sur titres sans changement d'affectation sera proposée d'une part aux agents non titulaires recrutés après le 27 janvier 1984 et avant l'organisation du premier concours d'accès au cadre d'emplois correspondant à leurs fonctions, d'autre part aux agents non titulaires exerçant des fonctions correspondant à des cadres d'emplois pour lesquels un seul concours a été organisé, recrutés postérieurement à ce concours et avant le 14 mai 1996 (date de signature du protocole d'accord préalable à la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996).

Une enquête permettant d'affiner la connaissance de la précarité dans la fonction publique territoriale sera conduite. Le protocole d'accord ne précise pas quelle autorité sera responsable de cette enquête ni le délai dans lequel elle sera réalisée.

Dispositions propres à la fonction publique hospitalière

Une enquête permettant d'affiner la connaissance et les causes de la précarité sera réalisée en concertation avec les organisations syndicales dans les établissements hospitaliers d'ici la fin de l'année 2000. Les comités techniques d'établissements et les comités techniques paritaires seront consultés.

Au premier trimestre 2001, un état des lieux de l'emploi précaire dans la fonction publique hospitalière sera présenté aux organisations syndicales. Il fera apparaître un bilan des concours réservés organisés en application de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 et un bilan de la première année d'application du décret n° 99-817 du 16 septembre 1999 relatif aux modalités de recrutement dans divers corps de fonctionnaires hospitaliers, qui modifie l'accès aux corps classés en échelle 2.

Par ailleurs, le protocole d'accord du 14 mars 2000 a prévu la suppression de l'échelle 1 dans la fonction publique hospitalière à compter du 1 er juillet 2000. Il devrait contribuer à résorber l'emploi précaire en échelle 2.

Les emplois aidés

Les agents recrutés par contrat emploi-solidarité (CES) ou par contrat emploi-consolidé (CEC) bénéficieront d'une formation destinée à leur permettre de se présenter aux concours d'accès à la fonction publique. Ils bénéficieront des mesures de recrutement direct en échelle 2 , expérimenté dans la fonction publique de l'État pendant les cinq années d'application du protocole d'accord.

La situation des personnels recrutés dans le cadre du dispositif emploi-jeune (loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes) n'entre pas dans le champ du plan de résorption de l'emploi précaire. Elle devra faire l'objet d'une concertation spécifique. Toutefois, un groupe de travail associant les organisations syndicales fera le point sur les fonctions exercées par les emplois-jeunes, sur leurs qualifications et leur professionnalisation.

* 20 En application de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le Gouvernement doit déposer un rapport au Parlement avant le 13 avril 2001.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page