TITRE II
-
CONTRACEPTION

Art. 16
(art. L. 2311-4 du code de la santé publique)
Délivrance des contraceptifs dans les centres de planification familiale

Cet article supprime l'obligation de prescription médicale pour la délivrance de contraceptifs dans les centres de planification familiale, en application des nouvelles règles de prescription des contraceptifs proposées à l'article 17.

I - Le dispositif proposé

L'article 17 du projet de loi supprime l'obligation de prescription médicale pour la délivrance de contraceptifs hormonaux.

Par coordination avec cette disposition, le présent article modifie l'article L. 2311-4 du code de la santé publique. Cet article prévoit que les centres de planification ou d'éducation familiale sont autorisés à délivrer, à titre gratuit, des médicaments, produits ou objets contraceptifs sur prescription médicale , aux mineurs désirant garder le secret ainsi qu'aux personnes ne bénéficiant pas de prestations maladie, assurées par un régime légal ou réglementaire.

L'article 16 supprime par conséquent dans l'article L. 2311-4 les mots : " sur prescription médicale ".

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

II - La position de votre commission

Pour les raisons qui sont développées dans le commentaire de l'article 17 et par coordination avec la position proposée sur ledit article, votre commission propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 16 bis
(art. L. 312-16 du code de l'éducation)
Education sexuelle dans les établissements scolaires

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale en première lecture prévoit l'organisation de séances d'information et d'éducation à la sexualité dans les collèges et lycées.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Cet article additionnel, qui résulte d'un amendement présenté par le Gouvernement, complète le chapitre II du titre premier du livre III du code de l'éducation par une section 9 consacrée à l'éducation à la santé et à la sexualité, composée d'un article unique, l'article L. 312-16.

L'article L. 312-16 prévoit qu'une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles. Ces séances pourront associer les personnels contribuant à la mission de santé scolaire et des personnels des établissements mentionnés au premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique, c'est-à-dire par exemple des centres de planification et d'éducation familiale ou des établissements d'information et de consultation, ainsi que d'autres intervenants extérieurs.

II - La position de votre commission

Votre commission est naturellement favorable à cette initiative. Elle a eu l'occasion, lors du commentaire de l'amendement qu'elle propose tendant à insérer un article additionnel avant le titre premier, de souligner qu'il était de la responsabilité du Gouvernement de définir une politique ambitieuse d'éducation à la sexualité et d'information sur la contraception, qui mobilise autant le corps enseignant que le corps médical et ouvre le dialogue au sein des familles.

Elle vous propose d'adopter un amendement augmentant de trois à cinq le nombre minimum de ces séances annuelles, étendant ces séances aux écoles primaires -l'information est d'autant plus utile qu'elle est délivrée de manière précoce- et ouvrant ces séances aux médecins libéraux. L'amendement prévoit en outre qu'une réunion annuelle est organisée à l'intention des parents d'élèves au cours de laquelle ces derniers sont informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances.

Il s'agit moins d'organiser un contrôle des parents sur ces séances d'information destinée à leurs enfants que de les informer et de leur fournir une information identique de sorte que les conditions soient réunies pour que s'ouvre un véritable dialogue au sein de la famille.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 17
(art. L. 5134-1 du code de la santé publique)
Délivrance et prescription des contraceptifs

Cet article supprime, d'une part, le consentement parental pour la prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux mineurs, d'autre part, l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux.

I - Le dispositif proposé

Cet article procède à une réécriture complète de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique.

Dans sa rédaction actuelle, cet article résulte de l'ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de la santé publique et a été complété par la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence.

Les deux premiers alinéas codifient l'article 3 de la loi Neuwirth du 28 décembre 1967 modifiée.

Le premier alinéa prévoit d'une part que, sous réserve des dispositions relatives aux centres de planification ou d'éducation familiale, la délivrance des contraceptifs est exclusivement faite en pharmacie. Il dispose d'autre part que les contraceptifs hormonaux et intra-utérins ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale.

Le deuxième alinéa précise que l'insertion des contraceptifs intra-utérins ne peut être pratiquée que par un médecin.

La loi du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence a complété cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

" Les médicaments ayant pour but la contraception d'urgence et non susceptibles de présenter un danger pour la santé dans les conditions normales d'emploi ne sont pas soumis à prescription obligatoire.

" Afin de prévenir une interruption volontaire de grossesse, ils peuvent être prescrits ou délivrés aux mineures désirant garder le secret. Leur délivrance aux mineures s'effectue à titre gratuit dans les pharmacies selon les conditions définies par décret.

" Dans les établissements d'enseignement du second degré, si un médecin ou un centre de planification ou d'éducation familiale n'est pas immédiatement accessible, les infirmières peuvent, à titre exceptionnel et en application d'un protocole national déterminé par décret, dans les cas d'urgence et de détresse caractérisée, administrer aux élèves mineures et majeures une contraception d'urgence. Elles s'assurent de l'accompagnement psychologique de l'élève et veillent à la mise en oeuvre d'un suivi médical. "

Le troisième alinéa de l'article L. 5134-1 introduit donc une dérogation aux dispositions de son premier alinéa puisqu'il supprime l'obligation d'une prescription médicale pour la délivrance de certains contraceptifs d'urgence : ceux qui ne présentent pas de danger pour la santé. A contrario , cette disposition signifie que la prescription médicale est maintenue pour les contraceptifs d'urgence susceptibles de présenter un danger pour la santé.

L'article 17 du projet de loi réécrit cet article du code de la santé publique, qui comporterait désormais un I et un II.

La suppression du consentement parental pour la prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux mineurs.

Le I de l'article L. 5134-1 prévoit, dans la rédaction résultant de l'article 17 du projet de loi, que le consentement des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal, n'est pas requis pour la prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux personnes mineures.

Cette disposition vise à régler le délicat problème de l'autorité parentale en matière de prescription et de délivrance de contraceptifs. En vertu des articles 371-1 et 371-2 du Code civil, les parents ont en effet jusqu'à la majorité ou l'émancipation de leur enfant, autorité sur lui pour le " protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité. Ils ont à son égard droit et devoir de garde, de surveillance et d'éducation " (art. 371-2).

Dès lors, c'est en principe aux parents qu'incombent, dans l'intérêt de l'enfant, les décisions qui ont trait à sa santé. Le code de déontologie médicale, tel qu'il résulte du décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995, prévoit d'ailleurs à son article 42, que, sauf cas d'urgence, " un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé doit s'efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d'obtenir leur consentement ".

Conscient de la difficulté, le législateur a pris soin, lorsqu'il a modifié en 1974 la loi Neuwirth, d'indiquer expressément, à l'article 4 de cette loi, que les centres de planification et d'éducation familiale étaient habilités à délivrer gratuitement des contraceptifs " aux mineurs désirant garder le secret ". Lors de la discussion devant l'Assemblée nationale, le ministre chargé de la santé de l'époque avait relevé que, dans les autres cas, l'accès à la contraception se ferait selon les règles de droit commun en matière médicale.

Dans ses conclusions sur le recours devant le Conseil d'Etat dirigé contre la circulaire du 29 décembre 1999 autorisant les infirmières scolaires à administrer du NorLevo aux élèves, le commissaire du Gouvernement avait ainsi estimé que les dispositions de ladite circulaire, en tant qu'elles concernaient des élèves mineures, se heurtaient à la règle posée par l'article 371-2 du code civil. Le Conseil d'Etat n'avait cependant pas suivi cette argumentation et s'était gardé de prendre position sur cette question complexe.

Le quatrième alinéa de l'article L. 5134-1, introduit par la loi du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence, levait toute ambiguïté s'agissant de la contraception d'urgence puisqu'elle autorisait les médecins à prescrire et les pharmaciens à délivrer ces contraceptifs d'urgence aux " mineures désirant garder le secret ". Le choix de la terminologie renvoyait explicitement à l'article 4 de cette loi de 1967, aujourd'hui codifié à l'article L. 2311-4 du nouveau code de la santé publique.

Elle donnait une base légale incontestable aux prescriptions susceptibles d'être établies par les médecins concernant des mineures. Pour leur part, les pharmaciens délivraient déjà le NorLevo aux mineures : cette pratique est ainsi validée législativement.

La rédaction du I de l'article L. 5134-1 prévue par l'article 17 du projet de loi supprime désormais toute nécessité de consentement parental et autorise les médecins à prescrire et les pharmaciens à délivrer tous les contraceptifs aux mineurs, qu'ils aient l'accord des parents ou non.

La suppression de l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux.

Outre qu'il supprime tout consentement parental, le I de l'article L. 5134-1 vient se substituer au premier alinéa de l'ancienne rédaction de cet article, dont une partie est transférée dans le II du nouvel article.

Le II reprend ainsi l'essentiel des dispositions qui figuraient dans les deux premiers alinéas de l'ancien article L. 5134-1. Il prévoit ainsi que les contraceptifs intra-utérins ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale et uniquement en pharmacie ou dans les centres de planification ou d'éducation familiale. Les sages-femmes sont habilitées à prescrire les diaphragmes, les capes, ainsi que les contraceptifs locaux. La première pose du diaphragme ou de la cape doit être faite par un médecin ou une sage-femme. L'insertion des contraceptifs intra-utérins ne peut être pratiquée que par un médecin. Elle est faite, soit au lieu d'exercice du médecin, soit dans un établissement de santé ou dans un centre de soins agréé.

Cette nouvelle rédaction a deux conséquences importantes.

Tout d'abord, elle supprime toute référence aux contraceptifs hormonaux qui ne sont plus mentionnés dans le II. Ces contraceptifs se verraient donc désormais appliquer le droit commun de la législation relative aux médicaments : ils pourraient être, selon les cas, soit soumis à prescription médicale, soit mis en vente libre selon qu'ils comportent ou non des risques pour la santé.

La prescription médicale d'un médicament :
rappel de certains aspects réglementaires

La prescription médicale d'un médicament est exigée lorsqu'une ou plusieurs des substances actives qui le composent sont inscrites sur une liste (Liste I ou Liste II) des substances vénéneuses.

L'inscription des principes actifs se fait sur arrêté du Ministre chargé de la Santé sur proposition de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).

Pour les principes actifs inscrits, il y a possibilité d'exonérer certains produits, notamment pour de faibles dosages et/ou une durée limitée de traitement. L'exonération est prise par arrêté du Ministre chargé de la Santé pris sur proposition de l'AFSSAPS et après avis de l'Académie de pharmacie.

Les conditions de prescription et de délivrance des médicaments sont mentionnées dans leur autorisation de mise sur le marché. Des mentions spécifiques doivent figurer sur l'emballage du médicament lorsque la prescription est obligatoire.

Autre conséquence -probablement involontaire- de cette rédaction : les dispositions issues de la loi du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence sont abrogées.

Or, cette loi a été définitivement adoptée par le Parlement le 30 novembre 2000, le jour même où cet article a été examiné par l'Assemblée nationale. La commission mixte paritaire s'était réunie le 20 novembre et était parvenue à un accord. Ses conclusions venaient d'être adoptées le 28 novembre par l'Assemblée nationale. On peut, dans ces conditions, s'interroger sur les raisons qui ont conduit les députés à voter un texte qui abrogeait ces dispositions.

En première lecture, l'Assemblée nationale n'a pas modifié l'article 17 du projet de loi.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'accepter le principe de la suppression du consentement parental pour l'obtention de contraceptifs par les mineures.

L'obligation du consentement parental peut être de nature, dans certains cas, à freiner la diffusion d'une contraception adaptée auprès des jeunes. Si elle considère qu'il est toujours préférable que le choix d'une contraception soit l'occasion d'un dialogue entre la mineure et ses parents, votre commission juge également qu'il est nécessaire de permettre aux médecins de répondre à la demande des adolescents qui ne souhaitent pas informer leurs parents de leur sexualité.

En refusant de lui prescrire un contraceptif au motif qu'elle n'a pas obtenu l'accord parental, le médecin prend aujourd'hui le risque d'inciter la mineure à adopter des moyens contraceptifs peu sûrs, qui conduiront peut-être à une grossesse non désirée et à une IVG.

En revanche, votre commission est opposée à la suppression de l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux.

Le Gouvernement fait valoir que la modification qu'il propose ne changera rien dans la pratique puisqu'aucun contraceptif hormonal, à l'exception du NorLevo, contraceptif d'urgence, ne remplit aujourd'hui les conditions pour être mis en vente libre.

La modification proposée vise donc à amender le droit actuel pour préparer un avenir hypothétique : celui où apparaîtraient sur le marché des contraceptifs hormonaux qui ne présenteraient absolument aucun danger pour la santé.

Favorable à tout ce qui peut développer la contraception, qui est le meilleur garant de la diminution des IVG, la commission s'oppose pourtant à cette disposition, en particulier en ce qui concerne la première prescription.

En effet, une information sur la contraception mieux développée, mieux comprise et mieux acceptée permettrait de diminuer sensiblement le nombre des IVG. Or, la diffusion d'une contraception bien comprise suppose un accompagnement médical. Comme l'a souligné l'Académie nationale de médecine : " A condition d'être l'objet d'un suivi médical, la contraception ne comporte que de très faibles risques pour la santé ".

L'obligation de prescription permet un bilan et un suivi médical de la femme et un dépistage précoce de certaines pathologies. Le dialogue entre le médecin et la femme est indispensable pour assurer une bonne compréhension et un bon usage d'une contraception efficace ; il assure en outre le choix d'une contraception adaptée à la situation de chaque femme.

Au regard des impératifs de santé publique, et quand bien même apparaîtraient des contraceptifs hormonaux sans danger pour la santé, il paraît nécessaire à votre commission de maintenir l'obligation de prescription médicale pour ces contraceptifs.

Elle vous propose par conséquent d'adopter un amendement :

- maintenant cette obligation ;

- rétablissant le texte de la loi du 13 décembre 2000 sur la contraception d'urgence, sous réserve des coordinations nécessaires.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 18
(art. L. 5434-2 du code de la santé publique)
Mise à jour de dispositions pénales relatives aux contraceptifs

Cet article met à jour les dispositions pénales correspondant à l'article L. 5134-1 du code de la santé publique, compte tenu des modifications apportées à cet article par l'article 17 du projet de loi.

I - Le dispositif proposé

Cet article de coordination procède à une réécriture de l'article L. 5434-2 du code de la santé publique.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 5434-2 punit de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 francs d'amende le fait, de quelque manière que ce soit, de vendre ou de faire vendre, de délivrer ou de faire délivrer des produits, médicaments ou objets contraceptifs, en infraction aux dispositions de l'article L. 5134-1 et du 1° de l'article L. 5134-3 (qui renvoie aux mesures d'application réglementaires de l'article L. 5134-1).

La nouvelle rédaction de l'article L. 5434-2 punit désormais de six mois d'emprisonnement et de 50.000 francs d'amende le fait de délivrer des contraceptifs mentionnés à l'article L. 5134-1 en infraction aux dispositions du premier alinéa du II dudit article et du 1° de l'article L. 5134-3.

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

II - La position de votre commission

Par coordination avec la position qu'elle a retenue à l'article 17, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 19 (nouveau)
(art. L. 2123-1 du code de la santé publique)
Stérilisation à visée contraceptive

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale donne un statut légal à la stérilisation à visée contraceptive.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Cet article additionnel résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par Mme Martine Lignières-Cassou, rapporteure de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, sous-amendé par le Gouvernement.

Il crée, dans le titre II du livre premier de la deuxième partie du code de la santé publique, un chapitre III intitulé " Stérilisation à visée contraceptive " , comprenant un article L. 2123-1 nouveau.

L'article L. 2123-1 prévoit que la ligature des trompes ou des canaux déférents ne peut être pratiquée que si la personne intéressée a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences. Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de santé et après une consultation auprès d'un médecin. Ce médecin doit au cours de la première consultation :

- informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt et des conséquences de l'intervention ;

- lui remettre un dossier d'information écrit.

Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de deux mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention.

Le dernier alinéa précise en outre qu'un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive mais qu'il doit alors informer l'intéressé de son refus dès la première consultation.

II - La position de votre commission

Votre commission regrette que l'Assemblée nationale ait cru bon d'introduire dans ce projet de loi, par voie d'amendement et de manière un peu précipitée, un important volet relatif à la stérilisation à visée contraceptive, comportant deux articles additionnels ( cf. article 20 ci-après ). La stérilisation constitue, à l'évidence, un acte grave qui méritait à tout le moins une réflexion préalable approfondie et un véritable débat.

Toutefois, votre commission reconnaît la nécessité de donner un cadre légal à la pratique de la stérilisation à visée contraceptive, qui est aujourd'hui largement pratiquée dans notre pays : on enregistre ainsi chaque année en France entre 25.000 et 30.000 actes de stérilisation volontaire à but contraceptif, concernant essentiellement des femmes.

Le statut légal de la stérilisation contraceptive demeure relativement flou.

L'article 16-3 du code civil qui prévoyait, dans sa rédaction antérieure à la loi du 27 juillet 1999, qu'il " ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité thérapeutique pour la personne " a longtemps prohibé en théorie cette acte médical.

Ainsi, dans sa séance du 6 juillet 1998, en réponse à une demande d'avis formulée par le juge des tutelles du tribunal d'instance de Nontron, dans une instance concernant la tutelle d'une incapable majeure, la Cour de cassation a considéré " qu'une atteinte à l'intégrité du corps humain, telle que la ligature des trompes de Fallope, pratiquée en dehors de toute nécessité thérapeutique, et à des fins strictement contraceptives, (était) prohibée par l'article 16-3 du code civil. "

A l'initiative de notre collègue François Autain, l'article 16-3 du code civil a été modifié par l'article 70 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle : à l'adjectif " thérapeutique ", qui pouvait prêter à interprétation restrictive, a été substitué l'adjectif " médical ". Dans sa nouvelle rédaction, cet article a donc désormais une portée plus générale.

Toutefois, même dans cette rédaction, il n'est pas certain qu'il permette la pratique d'une stérilisation à visée contraceptive.

Votre rapporteur considère qu'il est aujourd'hui nécessaire de donner un cadre légal à cette pratique. Toutefois, si la stérilisation a naturellement une fonction de contraception, elle ne saurait être présentée comme un moyen de contraception, équivalent par exemple à la pilule contraceptive ou le stérilet. Elle se différencie en effet par son caractère difficilement réversible.

Il partage à cet égard les réticences du Professeur Nisand qui déclarait, lors de son audition par la commission, le 20 décembre 2000, " la stérilisation est une forme de contraception, certes, mais qu'il faut réserver à des situations où, médicalement, il est difficile de réaliser la contraception. En tant que directeur d'un département de fécondation in vitro, je rencontre une fois par mois une demande de fécondation in vitro dont la cause n'est autre qu'une stérilisation volontaire de la femme dans les années précédentes. Les femmes ignorent quand elles se font stériliser que cela est irréversible et que tout peut changer dans leur vie. "

Votre rapporteur souhaite par conséquent que cette possibilité soit encadrée et que le cheminement soit le plus accompagné possible pour que cette décision lourde soit mûrement réfléchie. Il convient en effet de protéger la santé des personnes et d'éviter que des excès ne puissent être commis. Il serait en effet dommageable que la loi puisse par exemple autoriser une stérilisation sur une femme âgée de 25 ans, sans descendance et sans contre-indication à la contraception.

Votre commission vous propose par conséquent d'adopter un amendement comportant une nouvelle rédaction de l'article L. 2123-1 du code de la santé publique.

La rédaction proposée par cet amendement :

- n'autorise la stérilisation à visée contraceptive que dans deux cas : si la personne est âgée de trente ans au moins, ou lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement. Votre rapporteur a conscience du caractère nécessairement arbitraire du choix de l'âge de 30 ans : cette mention vise simplement à préserver les plus jeunes d'une décision qu'ils pourraient ultérieurement regretter ;

- n'autorise, dans tous les cas, la stérilisation que sur des personnes majeures ;

- prévoit que la personne concernée doit être informée du caractère généralement définitif de cette opération ;

- supprime le dernier alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale qui précise qu'un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive mais qu'il doit alors informer l'intéressé de son refus dès la première consultation. La première partie de la phrase est inutile -un médecin n'est jamais tenu d'effectuer un tel acte- et la seconde sans justification - on comprend mal en quoi cette disposition, démarquée de ce qui existe pour l'IVG, serait nécessaire dans le cas de la stérilisation volontaire : il y a rarement urgence à se faire stériliser.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 20 (nouveau)
(art. L. 2123-2 nouveau du code de la santé publique)
Stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables majeures

Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale encadre la pratique de la stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables majeures.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Cet article additionnel, qui résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par le Gouvernement, introduit dans le code de la santé publique à la suite de l'article L. 2123-1, inséré par l'article 19 du projet de loi, un article L. 2123-2 nouveau.

L'article L. 2123-2 prévoit que la ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne mineure. Elle ne peut être pratiquée sur une personne handicapée mentale, majeure sous tutelle, que lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement.

Si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision, son consentement doit être systématiquement recherché et pris en compte après que lui a été donnée une information adaptée à son degré de compréhension.

L'intervention est subordonnée à une décision du juge des tutelles qui se prononce après avoir entendu les parents ou le représentant légal de la personne concernée ainsi que toute personne dont l'audition lui paraît utile et après avoir recueilli l'avis d'un comité d'experts.

Ce comité, composé notamment de personnes qualifiées sur le plan médical et de représentants d'associations de handicapés, apprécie la justification médicale de l'intervention, ses risques ainsi que les conséquences normalement prévisibles sur les plans physique et psychologique.

II - La position de votre commission

Cet article additionnel traite du douloureux problème de la stérilisation des personnes handicapés.

A l'évidence, et ce serait une hypocrisie de le nier, cette pratique existe et se déroule hors de tout cadre légal et réglementaire. C'est la raison pour laquelle votre commission juge nécessaire d'élaborer un cadre législatif adapté qui permette de protéger efficacement les droits des personnes handicapées concernées.

Elle vous propose de reprendre la procédure prévue par l'Assemblée nationale en renforçant cependant la protection et les garanties dont bénéficient les majeures incapables.

Elle vous propose d'adopter un amendement :

- supprimant la référence à la personne " handicapée mentale ", qui ne fait l'objet d'aucune définition juridique ;

- prévoyant que la stérilisation ne peut être pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant légal de la personne concernée ; le texte adopté par l'Assemblée nationale ne mentionne paradoxalement pas qui est à l'origine de la demande de stérilisation ;

- précisant que si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté, son consentement doit être systématiquement recherché et qu'il ne peut être passé outre à son refus ou à la révocation de son consentement. Cette rédaction vise à offrir aux majeurs sous protection des garanties afin de s'assurer que leur volonté, s'ils peuvent l'exprimer, soit respectée et qu'à défaut, la décision puisse être prise en connaissance de cause. Elle est en cela conforme au principe 22-2 de la Recommandation du Conseil de l'Europe du 23 février 1999 qui exige, lorsque des textes autorisent une intervention médicale sur un majeur protégé sans bénéfice direct pour celui-ci, une protection accrue pour limiter les risques d'abus et d'irrégularités.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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