II. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Dans sa rédaction initiale, la proposition de loi déposée par votre rapporteur avait pour objet de faciliter la création d'établissements publics culturels nationaux ou locaux, et qui pouvaient être créés à l'initiative soit de l'Etat, soit d'une ou plusieurs collectivités locales.

A la suite des nombreuses auditions auxquelles il a procédé, et en tenant compte des réflexions menées par le ministère de la culture à la suite du rapport de l'inspection générale des affaires culturelles, votre rapporteur a jugé nécessaire d'en cibler le dispositif sur le partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales, tout en proposant un modèle transposable à l'échelon local.

Le texte adopté par votre commission a donc pour objet de définir une nouvelle catégorie d'établissement public, « l'établissement public de coopération culturelle », adapté à la gestion des équipements culturels structurants, c'est-à-dire de ceux qui, indépendamment d'ailleurs de leur taille, jouent un rôle important, en raison de leur qualité et du rayonnement de leur activité, dans le « maillage » culturel du territoire.

Le dispositif retenu, et dont l'analyse détaillée figure dans l'examen des articles, procède de trois préoccupations principales :

- offrir un cadre d'organisation adapté aux spécificités des services culturels :

- répondre aux nécessités de la gestion des différentes catégories d'établissements ;

- permettre un partenariat équilibré, sur la base du volontariat, entre les collectivités publiques associées à la création de l'EPCC.

1. Un statut adapté à la spécificité des services culturels

• Pour votre commission, le choix du statut d'établissement public, qui est par définition doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, entend permettre de répondre au besoin ressenti par chaque institution culturelle d'affirmer son identité, d'individualiser son activité.

Il y a parfaitement réussi pour les établissements publics nationaux, qui, tout en étant placés sous la tutelle de l'Etat, jouissent d'une réelle autonomie et ont chacun leur « personnalité », leur image, leur influence.

Certes, cette forte « individualité » des établissements publics nationaux est, souvent, le fruit d'une longue histoire. Mais l'exemple du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou démontre aussi que de « jeunes » établissements publics peuvent rapidement conquérir une place originale et importante dans la vie culturelle nationale.

• Votre commission a aussi eu le souci que les règles générales d'organisation du futur EPCC, inspirées elles aussi de celles des établissements publics nationaux, permettent de garantir l'indépendance de leurs gestionnaires dans les choix artistiques ou culturels. C'est à cet objectif que doivent concourir :

- la composition du conseil d'administration, qui certes comportera une majorité de représentants des collectivités publiques, mais qui fera aussi une large place aux personnalités qualifiées, aux représentants élus du personnel et, pour les établissements d'enseignement supérieur, des étudiants ;

- le « libre choix » du président, qui sera élu par le conseil et ne sera pas obligatoirement choisi parmi les représentants des personnes publiques ;

- les modalités de désignation du directeur, qui sera lui aussi désigné par la majorité du conseil d'administration, sur une liste de candidats établie en commun par les personnes publiques représentées au conseil ;

- la faculté de prévoir l'institution, auprès du directeur, d'un « conseil consultatif d'orientation » qui pourra être une structure de concertation et de dialogue avec des partenaires extérieurs comme avec les usagers du service.

La création des EPCC devrait ainsi non seulement permettre de renforcer l'identité du service public de la culture, mais aussi faciliter l'exercice de leurs responsabilités par les différents acteurs de la politique culturelle.

2. Un statut adapté à la diversité des services publics culturels

Schématiquement, trois catégories d'entreprises culturelles peuvent avoir vocation à être érigés en EPCC : des musées, des établissements d'enseignement supérieur, des structures de production et de diffusion (orchestres, théâtres lyriques, dramatiques ou chorégraphiques).

Il paraît donc indispensable, pour répondre à la diversité de leurs missions, et de leurs modes de gestion et de fonctionnement, de permettre que l'EPCC puisse être soit un établissement public à caractère administratif -quand il gérera un musée ou un établissement d'enseignement- soit un établissement public à caractère industriel et commercial -quand il gérera une entreprise de spectacles.

Là encore, cette proposition de votre commission tend à offrir aux EPCC les mêmes opportunités qu'aux établissements nationaux : les établissements d'enseignement supérieur et les musées nationaux érigés en établissements publics (Musée du Louvre, Musées Gustave-Moreau, Henner et Rodin, musée et domaine de Versailles) sont des EPA ; les théâtres dramatiques, lyriques et chorégraphiques sont des EPIC.

Cette possibilité de choix est en particulier essentielle pour garantir que le statut du personnel sera adapté à chaque établissement, et facilitera au surplus la transformation des structures existantes en EPCC, notamment en ce qui concerne les institutions exerçant leur activité dans le domaine du spectacle vivant, qui ont fréquemment un statut privé.

Deux éléments de souplesse supplémentaires sont prévus :

- les établissements publics administratifs pourront recruter sur des contrats à durée indéterminée les personnels occupant des emplois permanents auxquels ne correspondent pas de cadre d'emploi de la fonction publique territoriale. Cette possibilité, inspirée de celle donnée par la loi sur l'innovation et la recherche aux universités et aux instituts de recherche créant des « services d'activités industrielles et commerciales », pourra notamment faciliter l'organisation par les musées de leur politique de communication et de diffusion.

- Dans les cas de transformation d'un organisme privé en EPCC administratif, qui seront exceptionnels -ils ne pourraient en effet concerner que quelques établissements d'enseignement fonctionnant actuellement sous un statut associatif- une mesure transitoire prévoit que les personnels de ces établissements recrutés par l'EPCC conserveront le bénéfice des stipulations de leur contrat de travail antérieur, dont, en particulier, la durée ne sera pas modifiée.

Enfin, les EPCC, en tant qu'établissements publics locaux, pourront naturellement bénéficier de détachements ou de mises à disposition de fonctionnaires territoriaux. Une disposition expresse prévoit qu'ils puissent également recevoir le concours de fonctionnaires de l'Etat détachés ou mis à disposition auprès d'eux.

3. Un statut adapté à un partenariat équilibré entre les collectivités territoriales et l'Etat.

La formule d'un établissement public associant collectivités territoriales et Etat n'est pas inédite. Même dans un secteur -l'éducation nationale- où l'Etat exerce les compétences liées à l'organisation d'un service public national, la création des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) a permis d'associer l'Etat et les collectivités territoriales pour la gestion et l'organisation de la vie des établissements scolaires que les collectivités territoriales ont désormais la responsabilité de construire et d'entretenir.

Elle paraît donc a fortiori justifiée dans un domaine où l'Etat et les collectivités territoriales exercent des compétences concurrentes.

Encore faut-il que le statut et l'organisation de cet établissement public traduise un véritable partenariat et ne porte aucune atteinte à l'autonomie des collectivités territoriales.

La proposition de loi prévoit à cet égard un certain nombre de garanties :

- l'initiative de la création d'un EPCC ne pourra appartenir qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements, l'Etat étant en revanche libre d'accepter ou de refuser sa création : aucune des collectivités publiques partenaires ne pourra donc être « contrainte » de participer à un EPCC ;

- le nombre de sièges attribués à l'Etat au sein du conseil d'administration ne pourra en aucun cas excéder le tiers des sièges attribués à l'ensemble des personnes physiques : ce « plafond » pourra trouver à s'appliquer dans le cas, au demeurant improbable, où l'EPCC n'associerait que deux personnes publiques, l'Etat et une collectivité ou un groupement. Et il est de toute façon prévu que le nombre et la répartition des sièges au conseil d'administration seront, pour chaque établissement, fixés d'un commun accord par les personnes publiques concernées.

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