Section 2
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Droit à l'information des représentants du personnel

Art. 32 A
(art. L. 321-3 du code du travail)
Articulation entre la phase de consultation prévue au livre IV du code du travail et celle spécifiquement prévue au livre III dudit code

Objet : Cet article vise à distinguer la consultation du comité d'entreprise sur un projet de restructuration de celle relative à un projet de licenciement.

En deuxième lecture, le Sénat avait supprimé cet article après avoir observé que la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation avait déjà défini des règles précises concernant la concomitance des procédures de consu ltation du comité d'entreprise, règles dont les partenaires sociaux ne demandaient pas la modification comme l'avait montré leur audition par votre commission.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a rétabli son texte sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Maxime Gremetz et des membres du groupe communiste. Lors du débat, le Gouvernement a estimé, que ce faisant, la majorité voulait « développer le dialogue social » 14 ( * ) .

Votre commission ne cesse de s'étonner que le Gouvernement justifie les modifications apportées au code du travail au nom du développement du dialogue social alors qu'il n'a pas pris la peine de consulter les partenaires sociaux sur l'opportunité de ces dispositions. En réalité, la justification de cet article doit sans doute être recherchée davantage dans les relations complexes qui caractérisent la majorité de l'Assemblée nationale que dans des nécessités impérieuses de clarification de notre droit.

Votre commission vous propose d'adopter, à nouveau, un amendement de suppression de cet article

Art. 32
(art. L. 431-5-1 nouveau du code du travail)
Information du comité d'entreprise à l'occasion d'une annonce
du chef d'entreprise ayant un impact
sur les conditions de travail et d'emploi

Objet : Cet article vise à étendre le droit d'information du comité d'entreprise aux annonces du chef d'entreprise au public en distinguant selon qu'elles concernent la stratégie ou des mesures pouvant avoir plus particulièrement des conséquences sur l'emploi et les conditions de travail.

En deuxième lecture, le Sénat a, sur proposition de votre commission, adopté cet article, après y avoir apporté de nombreuses et importantes modifications.

Dans sa rédaction adoptée par notre Haute Assemblée, cet article distinguait, en effet, strictement le régime des annonces au public selon que la décision concerne la stratégie de l'entreprise ou l'emploi. Dans le premier cas, l'information est postérieure et intervient dans les meilleurs délais et au plus tard à la réunion suivante du comité d'entreprise. Dans le second cas, le chef d'entreprise doit informer et consulter le comité d'entreprise immédiatement après l'annonce.

Par ailleurs, le Sénat avait prévu, à des fins d'efficacité, de privilégier l'information du comité de groupe et de clarifier le régime de la responsabilité pénale en cas de manquement à l'obligation d'informer le comité d'entreprise.

Cette rédaction, il faut le noter, constituait une position d'équilibre. Contrairement au texte adopté par l'Assemblée nationale, elle prévoyait une consultation et non une simple information du comité d'entreprise lorsque l'annonce concerne les conditions de travail et l'emploi. Certes, cette consultation était postérieure à l'annonce. Mais il est important de relever que le caractère préalable de l'information qu'a retenu l'Assemblée nationale n'est pas sans poser des problèmes essentiels quant à sa compatibilité avec la réglementation des marchés des valeurs mobilières. En effet, la Commission des opérations de bourse (COB) exige de tout émetteur qu'il porte à la connaissance du public tout fait important susceptible, s'il était connu, d'avoir une incidence sur le cours des actions de l'entreprise concernée. Dans ces conditions, l'information préalable du comité d'entreprise apparaît comme incompatible avec les exigences du fonctionnement des marchés financiers.

Cette incompatibilité n'a pas échappé au Gouvernement puisque celui-ci a, lors du débat au Sénat, cru bon de préciser par la voix de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité que :

« Cette rédaction n'impose pas strictement une réunion formelle du comité d'entreprise. On peut effectivement imaginer une information écrite, à condition que celle-ci soit substantielle, complète et effectivement préalable, c'est-à-dire que l'ensemble des membres du comité d'entreprise aient reçu cette information avant que l'annonce ne soit effectivement effectuée » 15 ( * ) .

Cette précision, qui selon la ministre, sera introduite dans les circulaires et les textes réglementaires d'application, constitue une source de confusion importante puisqu'elle pourrait avoir pour effet de vider cet article de sa substance. En effet, sauf à considérer que l'employeur serait obligé de s'assurer que chaque membre du comité d'entreprise a effectivement reçu la lettre contenant les informations mentionnées dans cet article 16 ( * ) , c'est le cachet de la Poste qui fera foi. De ce fait, l'information effective des membres du comité d'entreprise devrait être postérieure à l'annonce et non préalable, en contradiction avec la lettre de l'article.

Dans ces conditions, de deux choses l'une, soit c'est la lettre de l'article qui doit être retenue et l'on peut s'interroger sur la constitutionnalité de cette disposition qui contredit d'autres principes de droit applicables, soit c'est l'interprétation du ministre et donc des textes d'application et l'on pourra s'interroger alors sur la légalité de ces derniers.

En réalité, ce qui est clair aujourd'hui, c'est que cet article ne peut être appliqué en l'état. Le Gouvernement ne peut pas l'ignorer compte tenu des multiples avertissements et observations qui lui ont été prodigués. Pourtant il continue à soutenir que l'application de cet article ne posera pas de problème.

Votre rapporteur ne peut, dans ces conditions, feindre de ne pas comprendre que le Gouvernement s'en remet en fait à la sagesse des soixante députés ou sénateurs qui pourraient saisir le Conseil constitutionnel afin de rétablir, sur ce point comme sur d'autres, la cohérence de notre droit. Ce regrettable procédé, s'il devait se confirmer, ne jurerait pas avec l'esprit du présent projet de loi, un texte bâclé, de circonstance, qui n'a pas été présenté aux partenaires sociaux et dont le principal objectif est de satisfaire certaines composantes de la majorité.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a ainsi rétabli son texte de deuxième lecture, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Maxime Gremetz et des membres du groupe communiste.

Afin de préserver la cohérence de notre droit -qui ne peut vouloir une chose et son contraire- tout en permettant un progrès notable dans la légitime information des salariés à travers leur comité d'entreprise, votre commission vous propose de rétablir le texte adopté par le Sénat en deuxième lecture.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 32 bis
(art. L. 432-1 du code du travail)
Renforcement des pouvoirs du comité d'entreprise sur le projet de restructuration et de compression des effectifs

Objet : Cet article vise à permettre au comité d'entreprise de proposer des solutions alternatives au plan de restructuration présenté par le chef d'entreprise.

En deuxième lecture, le Sénat a, sur proposition de votre commission, adopté cet article, après y avoir apporté d'importantes et utiles modifications.

Il a, en effet, supprimé le troisième alinéa de cet article qui prévoyait l'ouverture pour le comité d'entreprise d'un droit d'opposition sur le projet de restructuration de l'entreprise ayant des effets sur l'emploi. Ce droit d'opposition avait pour effet de suspendre l'opération et de provoquer la saisine d'un médiateur.

A cette occasion, votre rapporteur avait pu observer 17 ( * ) que le texte adopté par le Sénat en première lecture, à l'initiative du Gouvernement, apparaissait dénaturé par l'ajout du recours à un médiateur prévu par l'Assemblée nationale lors d'une seconde délibération au cours de la deuxième lecture. Il avait également remarqué que les partenaires sociaux -auditionnés par votre commission les 27 et 28 juin derniers- n'avaient pas fait montre d'un grand enthousiasme devant ce nouveau dispositif sur lequel le Gouvernement ne les avait pas consultés et que certains ressentaient comme un dessaisissement.

Le Sénat avait, par ailleurs, adopté un amendement prévoyant que « seul » le comité central d'entreprise peut recourir à l'expert-comptable pour une mission concernant l'ensemble de l'entreprise. Il avait enfin adopté un amendement qui prévoyait que l'employeur ne pouvait mettre en oeuvre un plan social tant qu'il n'avait pas répondu aux propositions du comité d'entreprise, l'Assemblée nationale ayant retenu une rédaction plus restrictive qui empêchait même la présentation du plan social dans l'attente de la réponse du chef d'entreprise. Il semble en effet logique de laisser au chef d'entreprise la possibilité de présenter le plan social quitte à y inclure avant sa mise en oeuvre des modifications s'inspirant des propositions faites par le comité d'entreprise.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Maxime Gremetz et des membres du groupe communiste, rétabli son texte, avec plusieurs modifications rédactionnelles, en apportant toutefois une modification reprenant une préoccupation du Sénat. En effet, dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le deuxième alinéa de l'article L. 432-1 du code du travail, elle a prévu que, si le comité central d'entreprise n'use pas de son droit de désigner un expert-comptable, un comité d'établissement peut en user à la condition que la mission se cantonne aux activités de l'établissement concerné.

Cette nouvelle rédaction ne contredit pas la rédaction du Sénat qui souhaitait éviter qu'un comité d'établissement puisse décider en lieu et place du comité central de saisir l'expert-comptable pour l'ensemble de l'entreprise. Même si l'on peut s'interroger sur l'intérêt d'une étude qui ne pourra, par définition, qu'être partielle et donc incomplète, puisque les mesures envisagées -selon les termes mêmes de l'article- « visent plusieurs établissements simultanément » , il peut néanmoins être utile de laisser le comité d'entreprise apprécier l'opportunité d'en demander sa réalisation.

Dans ces conditions, votre commission vous proposera de rétablir son texte de deuxième lecture sur les deux points continuant à faire débat : le recours au médiateur sur lequel elle reste opposée et la possibilité pour le chef d'entreprise de présenter le plan social alors même qu'il n'a pas encore répondu aux propositions alternatives formulées par le comité d'entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 32 ter AA (nouveau)
(art. L. 435-3 et L. 439-2 du code du travail)
Coordination

Objet : Cet article, introduit par l'Assemblé nationale en nouvelle lecture, modifie la référence à certains alinéas dans deux articles du code du travail afin de tenir compte des modifications apparues par la loi relative aux nouvelles régulations économiques et par l'article 32 bis du présent projet de loi.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales à des fins de coordination.

Le premier paragraphe de cet article additionnel modifie l'article L. 435-3, relatif au comité central d'entreprise dans sa référence à l'article L. 432-1, compte tenu de la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale pour l'article 32 bis, afin de viser le neuvième, et non plus le quatrième, alinéa de cet article.

Le second paragraphe tient compte du second paragraphe de l'article 4 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques qui a remplacé le deuxième alinéa de l'article L. 439-2 par deux nouveaux alinéas.

La nouvelle rédaction du quatrième alinéa de l'article L. 439-2 prévoit ainsi que :

« En cas d'annonce d'offre publique d'achat ou d'offre publique d'échange portant sur l'entreprise dominante d'un groupe, le chef de cette entreprise en informe immédiatement le comité de groupe. Il est alors fait application au niveau du comité de groupe des dispositions prévues aux quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 432-1 pour le comité d'entreprise. »

Dans ces conditions, le second paragraphe du présent article additionnel coordonne la nouvelle rédaction du quatrième alinéa de l'article L. 439-2 avec la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale pour l'article 32 bis.

Votre commission vous ayant proposé lors de l'examen de l'article 32 bis de supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour se substituer au deuxième alinéa du texte de l'article L. 432-1 en vigueur, elle vous proposera en conséquence, et fort logiquement, de coordonner les références à l'article L. 432-1 dans les articles L. 435-3 et L. 439-2 par rapport à son propre texte.

Dans ces conditions, elle vous proposera d'adopter un amendement qui, dans le premier paragraphe de cet article, remplace le mot « neuvième » par le mot « huitième » et dans le second paragraphe, remplace les mots « neuvième et dixième » par les mots « huitième et neuvième » .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 32 ter
(art. L. 432-1-2 nouveau du code du travail)
Information des entreprises sous-traitantes des projets d'une entreprise de nature à affecter leur volume d'activité ou d'emploi

Objet : Cet article vise à obliger les entreprises donneuses d'ordre à prévenir les entreprises sous-traitantes des restructurations qu'elles engagent lorsque celles-ci sont de nature à affecter leur volume d'activité.

En deuxième lecture, le Sénat avait adopté cet article après y avoir apporté deux modifications ayant pour objet d'en préciser la rédaction et la portée.

Concernant le moment où l'entreprise sous-traitante doit être informée, il avait estimé que le terme « immédiatement » n'était pas suffisamment précis. En effet, l'obligation d'information de l'entreprise sous-traitante joue-t-elle dès la conception du projet de restructuration, lors de la saisine du comité d'entreprise ou à l'issue de son examen par celui-ci ? De toute évidence, il est souhaitable que l'information de l'entreprise sous-traitante ait lieu concomitamment à l'examen du projet par le comité d'entreprise de l'entreprise donneuse d'ordre.

Pareillement, l'information des salariés de l'entreprise sous-traitante doit se faire dans les meilleurs délais. Le terme « immédiatement » n'est pas suffisamment précis, ceci alors même qu'il n'est pas précisé qui a la charge d'informer le comité d'entreprise. Une interprétation littérale du terme « immédiatement » pourrait même revenir à faire peser la charge de cette information sur l'entreprise donneuse d'ordre, ce qui n'aurait pas de sens. C'est pourquoi le Sénat avait supprimé l'adverbe « immédiatement » dans la dernière phrase du texte proposé pour l'article L. 432-12.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Maxime Gremetz et des membres du groupe communiste, rétabli son texte de deuxième lecture.

Votre commission vous propose, en nouvelle lecture, de rétablir son texte de deuxième lecture en lui apportant encore quelques améliorations rédactionnelles. L'information de l'entreprise sous-traitante aurait lieu concomitamment à celle du comité d'entreprise de l'entreprise donneuse d'ordre. L'information du comité d'entreprise de l'entreprise sous-traitante serait alors effectuée par cette dernière.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. 32 quater
(art. L. 432-1-3 nouveau du code du travail)
Saisine d'un médiateur sur un projet de cessation totale ou partielle d'activité d'un établissement concernant au moins 100 salariés

Objet : Cet article vise à reconnaître la possibilité à l'employeur ou au comité d'entreprise d'avoir recours à un médiateur afin de rapprocher leurs points de vue concernant un projet de cessation totale ou partielle d'activité d'un établissement ou d'une entité autonome concernant au moins cent salariés.

En deuxième lecture, le Sénat avait supprimé cet article, sur proposition de votre commission. Celle-ci avait insisté sur le fait que les partenaires sociaux -qui n'avaient pas été consultés par le Gouvernement sur ce nouveau dispositif- étaient plus que réticents quant à son adoption. Elle avait également 18 ( * ) mis en évidence les graves incertitudes juridiques qui entouraient ce nouveau dispositif relatives notamment à la portée de la recommandation du médiateur et à l'articulation entre le recours au médiateur suite à l'exercice d'un droit d'opposition concernant les projets de restructuration et de compression des effectifs prévus par l'article 32 bis et le présent article.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Maxime Gremetz et des membres du groupe communiste, rétabli son texte de deuxième lecture sans modification.

Votre rapporteur ne peut que regretter que ni la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, ni le Gouvernement, n'aient entrepris de lever les incertitudes qui entourent cet article.

Votre commission vous propose par conséquent d'adopter, à nouveau, un amendement de suppression de cet article.

* 14 Compte rendu analytique officiel-Assemblée nationale, 2ème séance du jeudi 6 décembre 2001, p. 12.

* 15 JO débats Sénat - séance du mardi 9 octobre 2001, p. 3883.

* 16 Ce qui lors d'une grève de la Poste - événement heureusement purement hypothétique dans notre pays - pourrait présenter des complications encore plus importantes.

* 17 Rapport supplémentaire n° 424 (2000-2001) du Sénat fait au nom de la commission des Affaires sociales sur les articles 29 A à 34 bis du projet de loi de modernisation sociale, M. Alain Gournac, rapporteur, p 25.

* 18 Rapport supplémentaire n° 424 (2000-2001) du Sénat fait au nom de la commission des Affaires sociales sur les articles 29 A à 34 bis du projet de loi de modernisation sociale, M. Alain Gournac, rapporteur, p 30.

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