Rapport n° 385 (2001-2002) de M. Hubert DURAND-CHASTEL , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 31 juillet 2002

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N° 385

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 31 juillet 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, concernant les privilèges et immunités accordés à l' Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union européenne , ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel,

Par M. Hubert DURAND-CHASTEL,

Sénateur,

(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Michel Caldaguès, Guy Penne, Jean-Marie Poirier, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Robert Del Picchia, Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, André Ferrand, Philippe François, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Henri Torre, André Vallet, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.

Voir le numéro :

Sénat : 324 (2001-2002)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel, signée à Bruxelles le 15 octobre 2001.

Cette décision fait d'une part suite à la création de deux agences spécialisées, l'Institut d'études de sécurité et le Centre satellitaire de l'Union européenne d'autre part, dont le principe a été posé par les conclusions du Conseil européen de Nice, le 8 décembre 2000, dans le cadre de l'incorporation dans l'Union européenne des fonctions appropriées de l'Union de l'Europe occidentale (UEO).

Chacune dans son domaine de compétence, ces deux agences ont vocation à renforcer la politique européenne de sécurité et de défense en contribuant à l'émergence d'une expertise véritablement européenne. Elles contribuent également à une évolution du débat sur le devenir de la défense européenne, longtemps résumée à une alternative, une défense européenne, incarnée alors par l'UEO, comme « pilier européen » de l'Alliance atlantique ou « bras armé » de l'Union européenne, en dégageant une solution adaptée à la définition actuelle de la politique étrangère et de sécurité commune.

Après avoir rappelé les missions et le schéma d'organisation des deux agences, votre rapporteur procédera à l'examen des dispositions de la décision relative aux privilèges et immunités qui leur sont accordés.

I. L'INSTITUT D'ÉTUDES DE SÉCURITÉ ET LE CENTRE SATELLITAIRE DE L'UNION EUROPÉENNE : « PENSER EUROPÉEN » EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSE

A. LA REPRISE PAR L'UNION EUROPÉENNE DES « ACTIVITÉS APPROPRIÉES » DE L'UNION DE L'EUROPE OCCIDENTALE

1. Une alliance ouest européenne comme fondement de l'identité européenne de défense

Suite à l'échec de la ratification du traité instituant la Communauté européenne de défense, l'Union de l'Europe occidentale a été créée comme organisation par une modification du traité de Bruxelles du 23 octobre 1954 comme le « trait d'union » entre les Etats européens et l'Alliance atlantique.

L'article 8 du traité de Bruxelles modifié prévoyait la création du Conseil de l'UEO avec l'objectif « d'encourager l'intégration progressive de l'Europe ainsi qu'une coopération plus étroite entre les Parties contractantes et avec les autres organisations européennes ».

La constitution de « tous organes subsidiaires qui pourraient être jugés utiles » est rendue possible au même article, notamment une agence pour le contrôle des armements dont la création est prévue par le traité.

2. Les traités de Maastricht et d'Amsterdam : un rapprochement progressif avec les institutions européennes.

Le traité de Maastricht consacre la relance de l'Union de l'Europe occidentale en prévoyant dans son article J4 (deuxième pilier), que « l'Union demande à l'Union de l'Europe occidentale, qui fait partie intégrante du développement de l'Union européenne, d'élaborer et de mettre en oeuvre les décisions et les actions de l'Union qui ont des implications dans le domaine de la défense ».

L'Union de l'Europe occidentale est donc désignée comme le « bras armé » de l'Union européenne dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune nouvellement instituée.

Le sommet de l'OTAN de Bruxelles, en 1994, prend acte de cette évolution et se déclare en faveur de la construction d'un « identité européenne de sécurité et de défense ». Deux ans plus tard est décidée la création de GFIM (groupes de forces interarmées multinationales), séparables des forces de l'OTAN, disponibles pour des opérations de gestion des crises dirigées par les Européens.

L'intégration à venir de l'UEO dans l'Union est prévue par le traité d'Amsterdam qui lui confie un rôle renforcé en prévoyant que l'UEO donne à l'Union « l'accès à une capacité opérationnelle » et qu'elle « assiste l'Union dans la définition des aspects de la politique étrangère et de sécurité commune ayant trait à la défense » (article 14).

Le texte du traité reprend comme missions dévolues à la politique étrangère et de sécurité commune les missions dites de Petersberg 1 ( * ) définies par l'UEO le 19 juin 1992 et prévoit que « l'Union aura recours à l'UEO pour élaborer et mettre en oeuvre les décisions et les actions de l'Union qui ont une implication dans le domaine de la défense ». Un partage des rôles se dessine : la défense de la sécurité collective est clairement du ressort de l'Alliance atlantique, l'Union européenne souhaitant jouer un rôle accru dans la gestion des crises.

L'Alliance atlantique n'est d'ailleurs pas absente du dispositif, l'article 14 du traité contenant également une référence aux obligations des Etats dans le cadre de l'OTAN.

3. Le Conseil européen de Nice

Réuni à Marseille le 13 novembre 2000, le Conseil des ministres de l'UEO donne son accord à une reprise, par l'Union européenne des tâches précédemment dévolues à l'Union de l'Europe occidentale.

Une telle reprise est décidée lors du sommet de Nice, le 8 décembre 2000 où l'Union européenne confirme son intention de « reprendre à son compte la fonction de gestion de crise de l'UEO ». Outre la reprise des opérations en cours en Albanie et en Croatie, les conclusions du sommet de Nice prévoient «  la création sous forme d'agences d'un centre satellitaire et d'un Institut d'études de sécurité qui incorporent les éléments pertinents des structures de l'UEO. »

Cette création est effective le 20 juillet 2001 et prend la forme de deux actions communes « PESC » n°s 554 et 555.

4. Les structures « résiduelles » de l'UEO

L'UEO, dont le siège est transféré à Bruxelles avec une structure administrative allégée qui comprend 25 personnes et dispose d'un budget de 16 millions d'euros, demeure en place pour assurer certaines fonctions.

Le traité de Bruxelles instituant l'UEO est aussi un traité de sécurité collective 2 ( * ) qui met en place dans son article 5 un mécanisme d'assistance réciproque :

« Au cas où l'une des Hautes Parties Contractantes serait l'objet d'une agression armée en Europe, les autres lui porteront, conformément aux dispositions de l'article 51 de la Charte des Nations Unies, aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, militaires et autres. »

Les structures dites résiduelles de l'UEO restent en place pour assumer les fonctions qui lui sont dévolues par le traité de Bruxelles et qui ne peuvent être reprises par l'Union européenne dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, notamment ce mécanisme de sécurité collective prévu à l'article 5 et le compte rendu sous forme de rapport annuel sur la politique de défense devant l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale prévu par l'article 9.

La « fonction armement » de l'UEO est également conservée ; l'Organisation de l'armement de l'Europe occidentale ainsi que le Groupe Armement de l'Europe occidentale (GAEO) continuent à fonctionner comme forums de dialogue sur les questions d'armement.

Si le traité de Maastricht prévoit la création d'une agence européenne de l'armement, celle-ci n'a pas connu de traduction concrète, les avancées dans ce domaine ne concernent qu'un nombre d'Etat réduit dans le cadre de l'OCCAR 3 ( * ) , organisation en marge des institutions européennes.

B. L'INSTITUT EUROPÉEN DE SÉCURITÉ

La création d'un organe subsidiaire de l'UEO, chargé de contribuer au développement d'une identité européenne de sécurité, a été décidée le 13 novembre 1989 par le Conseil ministériel de UEO sous la forme d'un Institut d'études de sécurité qui a commencé à fonctionner en 1991.

Suite à la reprise de ses activités par l'Union européenne, décidée par l'action commune n° 254 PESC, les missions de l'institut d'études de sécurité ont peu varié. D'après les termes de M. Javier Solana, il lui revient de jouer le rôle d'un « fédérateur des cultures stratégiques » et d'un « centre de prospective indépendant » pour « nourrir les réflexions du Conseil et contribuer à l'émergence d'une vision européenne commune du monde et du rôle de l'Union dans le monde ».

Outre ces missions, l'Institut d'études de sécurité a repris les activités du forum atlantique de l'Union de l'Europe occidentale avec pour objectif le développement d'un dialogue transatlantique sur l'ensemble des questions de sécurité entre tous les pays européens, le Canada et les Etats-Unis. Ces activités s'organisent autour de deux conférences, organisées alternativement en Europe et en Amérique du Nord.

L'institut d'études de sécurité a le statut d'une agence autonome placée sous la double tutelle d'un conseil d'administration présidé par le Haut représentant et du Comité politique et de sécurité (COPS), interlocuteur politique de l'Institut.

Le budget de fonctionnement de l'Institut, qui s'établit pour l'année 2002 à 3.2 millions d'euros, provient des contributions des Etats membres, déterminées selon la clé PNB.

L'Institut d'études de sécurité, dont le siège a été maintenu à Paris, emploie 26 personnes, 10 sont de nationalité française dont le Directeur, actuellement Mme Nicole Gnesotto.

C. LE CENTRE SATELLITAIRE DE L'UNION EUROPÉENNE

1. Le centre satellitaire de l'UEO

Le centre satellitaire de l'UEO a été créé en 1991 par deux décisions du Conseil de l'UEO en application de l'article 8 du traité de Bruxelles modifié qui permet au Conseil de « constituer tous organismes subsidiaires ». Son siège est alors fixé à Torrejon de Ardoz , à proximité de Madrid, sur une ancienne base américaine.

Créé dans un premier temps à titre expérimental, le centre satellitaire est confirmé en 1995 par une décision ministérielle qui réaffirme la volonté des Parties de disposer d'un outil propre de renseignement pour aboutir à une certaine indépendance en matière d'informations dans un contexte où la culture du renseignement est avant tout nationale .

L'intérêt du centre est qu'il représente un outil de coopération européenne à caractère véritablement opérationnel. Le centre satellitaire reçoit comme mission principale de « former des analystes, experts dans l'interprétation des images satellitaires. (...) l'objectif recherché consiste à obtenir un certain degré d'intégration par la mise en commun des connaissances et la standardisation des méthodes de travail ».

Ses missions originelles comprennent également l'aide à la vérification de l'application des traités, l'aide à la maîtrise des armements et de la prolifération et la surveillance maritime en matière d'environnement.

Tout dossier réalisé par le Centre, même en réponse à la demande d'un Etat, ce qui constitue d'ailleurs la grande majorité des cas, est accessible et gratuit pour tous les Etats membres et membres associés.

2. La création du centre satellitaire de l'Union européenne

Aux termes de l'action commune 2001/255/PESC, le centre satellitaire de l'union européenne est conçu comme un outil au service de la politique étrangère et de sécurité commune.

Il est placé sous le contrôle politique du Comité politique et de sécurité et sous l'autorité du Haut représentant qui lui donne des instructions opérationnelles sans préjudice des compétences du conseil d'administration composé de 16 membres 4 ( * ) , il reçoit les demandes de la Commission et des Etats-membres. Le texte prévoit que des organisations internationales, notamment l'OTAN, peuvent également adresser des demandes au Haut représentant.

Les produits du centre sont mis à disposition des Etats membres et de la Commission et, dans les conditions définies par une annexe à l'action commune aux Etats tiers.

Le centre satellitaire fonctionne avec un budget de 9.3 M€ et une équipe de 68 personnes.

En l'absence de moyens propres, même si la réflexion sur le développement d'un système autonome d'observation satellitaire est engagée depuis plusieurs années, le centre satellitaire procède à des achats d'images, notamment auprès des fournisseurs suivants : Spot 1, 3 et 4 (France), Landsat 4, 5 et 7 ( Etats-unis), IRS 1 C et D (Inde), KVR et DK 1 (Russie), Ikonos et Quickbird (Etats-unis) et Eros (Israël). Des images radar sont également fournies par ERS 1 et 2 (Agence spatiale européenne) et Radarsat (Canada). Depuis mai 1996, le Centre a accès à des images du satellite non commercial Hélios (France, Italie et Espagne) dont la résolution est meilleure mais dont la diffusion est plus restrictive : seules les études, à l'exclusion des images, sont communiquées aux Parties.

Le centre satellitaire travaille donc peu en temps réel mais son temps de réaction, déjà rapide, devrait être amélioré par l'installation récente d'une antenne de réception. Ses capacités militaires demandent à être renforcées afin que l'ensemble des missions qui lui seront confiées dans le cadre de la politique européenne en matière de sécurité et de défense puissent être correctement remplies. A cet égard, le développement de capacités de renseignement figure dans l'objectif global d'Helsinki et le centre satellitaire pourrait servir de centre de traitement à un développement du projet GMES 5 ( * ) ( Global monitoring for environment and security ).

Ses missions se répartissent entre différentes catégories avec une dominante humanitaire et missions de Petersberg mais aussi gestion des crises, surveillance de l'environnement, contrôle des armements, surveillance générale et exercices OTAN.

3. Les relations avec les Etats tiers

La déclaration de Marseille prévoyait une participation appropriée des pays de l'UEO non-membres de l'Union européenne 6 ( * ) aux activités reprises par l'Union européenne.

Cette participation est organisée par une annexe à l'action commune n° 555 qui prévoit dans son article 21 que « les Etats européens membres de l'OTAN ne faisant pas partie de l'UE sont habilités à participer aux activités du centre ». Sur ce fondement, les Etats tiers sont habilités à présenter des demandes nationales d'analyse d'images et à accéder, le plus souvent sur décision de la partie requérante, aux produits demandés par les autres utilisateurs du centre satellitaire.

II. LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS ACCORDÉS À L'INSTITUT D'ÉTUDES DE SÉCURITÉ ET AU CENTRE SATELLITAIRE DE L'UNION EUROPÉENNE : UN ACCORD DE SIÈGE CLASSIQUE.

A. LES GARANTIES ACCORDÉES

Les privilèges et immunités accordés à l'Union de l'Europe occidentale et à ses agents sont placés sous le régime de la « convention sur le statut de l'UEO, des représentants nationaux et du personnel international », adoptée à Paris le 11 mai 1955.

Les actions communes du Conseil n°s 554 et 555 disposent que les nouvelles agences jouissent de la personnalité juridique nécessaire pour remplir leurs fonctions et réaliser leurs objectifs. Elles prévoient la reprise par les agences comme employeur du personnel en service au 31 décembre 2001, les obligations découlant des contrats d'engagement existants étant honorées par le nouvel employeur.

Elles disposent également que les privilèges et immunités nécessaires à l'accomplissement des tâches de chaque agence, de son directeur et de son personnel sont prévus dans un accord conclu entre les Etats membres.

La décision du 15 octobre 2001 se substitue à la Convention du 11 mai 1955 et offre des garanties similaires .

Ainsi l'article 1 er pose t-il le principe de l'immunité de juridiction et de l'exemption de perquisition, saisie, réquisition, confiscation et autre forme de contrainte s'agissant des locaux et des biens des agences.

Les articles 2 et 4 portent sur l'inviolabilité des archives et la liberté des communications. De la même façon, l'article 6 relatif aux privilèges et immunités des membres des organes et des membres du personnel des agences de l'Union européenne prévoit l'inviolabilité de tous leurs papiers, documents et autres matériels.

Le régime fiscal des agences et de leur personnel est déterminé par les articles 3, 6 et 8 de la décision. Les agences sont exonérées de tout impôt indirect ainsi que des droits indirects représentant des dépenses importantes. Les membres du personnel des agences bénéficient de l'exonération de l'impôt sur le revenu mais leur traitement est soumis à un prélèvement au profit des agences et peut être pris en compte pour le calcul de l'impôt portant sur d'autres sources de revenus.

La décision précise que l'article 14 du protocole sur les privilèges et immunités des communautés européennes signé le 8 avril 1965, relatif à la détermination du domicile fiscal, est applicable aux membres du personnel des agences. Les membres des agences seront donc considérés comme ayant conservé leur domicile fiscal dans leur pays d'origine si celui ci est membre des communautés.

S'agissant des privilèges et immunités accordés aux agents, la décision prévoit de façon classique, dans son article 5, que les Etats facilitent l'entrée, le séjour et le départ des personnes à des fins officielles. Les membres des agences jouissent de l'immunité de juridiction pour « toutes les paroles prononcées ou écrites et pour les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions officielles ». Comme c'est l'usage, cette immunité ne s'étend pas aux « actions civiles engagées par un tiers en cas de dommages corporels ou autres ou d'homicides survenus lors d'un accident de la circulation causé par ces personnes ».

La levée des immunités est opérée par les directeurs des agences dans les hypothèses où elle entrave l'action de la justice et lorsqu'ils peuvent le faire sans nuire aux intérêts des agences. Les conseils d'administration ont une obligation similaire à l'égard des directeurs et des contrôleurs financiers. S'agissant des membres du conseil d'administration, la levée d'immunité revient à la Commission ou aux Etats membres.

La décision fait mention de la collaboration des agences avec les autorités compétentes des états membres ; elles doivent notamment veiller à « empêcher tout abus des privilèges et immunités ».

Une procédure de règlement des différends est définie à l'article 11 qui prévoit que leur examen est confié au Conseil qui statue à l'unanimité.

B. L'ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA DÉCISION

L'entrée en vigueur de la décision est fixée par son article 12 au 1 er janvier 2002. A cette date, seuls trois pays avaient notifié au secrétariat général du Conseil leur procédure d'approbation. Concernées au premier chef la France et l'Espagne ont mis en oeuvre par anticipation les dispositions fiscales définies par la décision du 15 octobre 2001. Comme prévu par les deux décisions communes, les agences sont opérationnelles depuis le 1er janvier 2002 et ont repris à leur compte les contrats qui liaient jusqu `à présent les agents à l'Union de l'Europe occidentale qui a procédé à un plan social en juillet 2001.

L'approbation de cette décision est donc nécessaire pour substituer au régime des privilèges et immunités accordés aux agents de l'Union de l'Europe occidentale, le nouveau cadre juridique qui fait défaut depuis le 1 er janvier 2002.

CONCLUSION

La décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil, concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel, adoptée à Bruxelles le 15 octobre 2001 se substitue, pour les agences concernées, à la convention sur le statut de l'Union de l'Europe occidentale en apportant des garanties similaires.

Cette décision s'apparente à un accord de siège classique avec des garanties strictement subordonnées à la nécessité de la mission des agents ; elle est sur ce point conforme aux dispositions des actions communes.

Nécessaire au bon fonctionnement de l'Institut d'études de sécurité et du centre satellitaire qui contribuent au développement d'une réflexion européenne en matière de sécurité, cette décision de nature technique ne concerne sur notre territoire qu'un nombre limité de personnes, une équipe de chercheurs que notre pays a tenu à maintenir sur son territoire.

C'est pourquoi votre commission vous demande de bien vouloir adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du mercredi 31 juillet 2002.

A la suite de l'exposé du rapporteur, un débat s'est instauré entre les commissaires.

M. Christian de la Malène s'est interrogé sur l'utilité, pour l'Union européenne, de reprendre à son compte des organes dont l'efficacité ne lui paraissait pas garantie. Il a indiqué qu'à titre personnel, il s'abstiendrait sur le projet de loi.

M. Xavier de Villepin a partagé les réserves exprimées par M. Christian de la Malène et s'est interrogé sur la multiplication des organisations de sécurité en Europe, indiquant que les missions dévolues à l'Alliance atlantique lui paraissaient prépondérantes.

M. Jean-Pierre Masseret a rappelé que des représentants du Sénat siégeaient à l'Assemblée de l'UEO et qu'il était lui même, à ce titre, l'auteur d'un rapport relatif à la place des Etats tiers dans le processus d'intégration de certaines des activités de l'UEO par l'Union européenne.

Il a estimé que l'importance du Centre satellitaire ne devait pas être négligée et qu'il pouvait constituer un outil au service de l'Union européenne. Evoquant le bilan de l'UEO, il a jugé que le rôle de l'assemblée parlementaire, seul forum européen sur les questions de défense, présentait l'intérêt d'informer les parlementaires sur des sujets sur lesquels ils sont en général peu consultés, information qu'il conviendrait de préserver au niveau européen. S'agissant de l'OTAN, il a souligné que cette dernière organisation s'orientait vers une posture de sécurité, laissant au second plan la dimension militaire. Il a évoqué la proposition récente avancée par M. Guy Verhofstadt d'intégrer, dans l'Union européenne, une dimension de sécurité collective.

M. André Dulait, président, a souligné l'importance d'une réflexion européenne en matière satellitaire, indiquant qu'elle permettait d'assurer la cohérence et l'indépendance nécessaire aux européens.

Apportant une précision à M. Xavier de Villepin au sujet du systéme Galileo, M. André Dulait, président, a précisé que la décision européenne était définitive mais que le financement n'était pas arrêté.

Mme Maryse Bergé Lavigne a souligné l'importance de cette décision dans un contexte où les Etats unis exerçaient une forte pression à l'encontre de ce projet.

M. Robert Del Picchia a ajouté que les Américains, qui disposaient de la faculté de suspendre à tout moment la disponibilité du système GPS, pourraient être dorénavant tentés de rendre ce service à titre onéreux.

Sur les conclusions du rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil, concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au centre satellitaire de l'Union européenne, ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel, signée à Bruxelles le 15 octobre 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi. 7 ( * )

ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT8 ( * )

Projet de loi autorisant l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité
et au centre satellitaire de l'Union européenne

- Etat de droit et situation de faits existants et leurs insuffisances.

Le régime des privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union de l'Europe occidentale (UEO) ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel relevait de la convention sur le statut de l'UEO, des représentants nationaux et du personnel international adoptée à Paris le 11 mai 1955.

L'Union européenne (UE) ayant décidé la création de deux agences incorporant les structures correspondantes de l'UEO, il convenait de redéfinir un régime de privilèges et immunités applicables à ces agences de l'UE, leurs organes et les membres de leur personnel.

Le régime applicable aux agences de l'UE devait s'inspirer de celui qui s'appliquait aux organes subsidiaires de l'UEO.

- Bénéfices escomptés en matière :

* d'emploi

L'entrée en vigueur de la décision concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union européenne ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel n'aura pas d'impact sur les effectifs actuels. Le Centre satellitaire emploie 60 personnes, dont 13 Français et l'Institut 30 personnes dont 17 Français (le directeur est de nationalité française jusqu'en décembre 2003).

* d'intérêt général

La décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne confortera le statut actuel de l'Institut et du Centre satellitaire, de leurs organes et des membres de leur personnel, qui concourront au développement de la politique européenne de sécurité et de défense. Elle évite que l'Institut quitte Paris pour être relocalisé à Bruxelles.

*financière

La reprise dans le régime UE d'exonérations d'impôts et de droits pour les agences et les membres de leur personnel relativement proches de celles dont ils bénéficiaient sous le régime UEO n'emportera pas de conséquence financière notable, si ce n'est une très légère économie pour les finances de l'Etat.

* de complexité de l'ordonnancement juridique

Le régime relatif aux protocoles et immunités des agences de l'UE, de leurs organes et des membres de leur personnel n'apportera aucun changement à l'ordonnancement juridique, en ce qu'il se substitue à un régime UEO ayant le même objet.

* de simplification des formalités administratives

La décision du 15 octobre 2001 ne crée ni ne supprime formellement de démarche administrative par rapport au régime antérieur.

* 1 Missions humanitaires et d'évacuation, missions de maintien de la paix et missions de forces de combat pour la gestion des crises et missions de rétablissement de la paix.

* 2 Son intitulé exact est « Traité de collaboration en matière économique, sociale et culturelle et de légitime défense collective »

* 3 Organisation conjointe de coopération en matière d'armement, issue d'une convention signée le 9 septembre 1998 entre la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni.

* 4 Un membre par Etat et un représentant de la Commission.

* 5 L'initiative du GMES a été présentée par la Commission le 27 septembre 2000 comme un projet d'intérêt européen. Il vise à fournir des informations environnementales afin de servir les politiques communautaires en matière de développement, de changement climatique, de protection civile, d'aide humanitaire, de sécurité. Pour le moment, les applications sécuritaires ne visent que les risques environnementaux et la gestion des crises environnementales.

* 6 Outre les membres (Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg, Espagne, Portugal et Grèce), l'UEO comprend aussi des observateurs (Autriche, Finlande, Irlande et Suède, membres neutres de l'Union européenne, ainsi que le Danemark, par ailleurs membre de l'OTAN) des membres associés (Islande, Norvège et Turquie, Pologne, Hongrie, République tchèque, membres de l'OTAN mais non de l'Union européenne) et des associés partenaires (Estonie, Lettonie, Lituanie, Bulgarie, Slovénie, Slovaquie, Roumanie).

* 7 Voir le texte annexé au document Sénat n° 324 (2001-2002)

* 8 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

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