II. L'ÉVOLUTION D'ENSEMBLE DES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT

A. LES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT : DOTATIONS, COMPENSATIONS ET DEGRÈVEMENTS

1. Les objectifs de la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales

Dans le cadre de la préparation du rapport de votre commission des finances sur le projet de loi portant règlement définitif du budget 2001, notre rapporteur général a relevé que, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2001, la Cour des comptes considérait que « la réduction de la marge de manoeuvre des collectivités locales pourrait déséquilibrer la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales » a demandé à la Cour quelles seraient, selon elle, les caractéristiques d'une régulation équilibrée des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales.

La réponse de la Cour est reproduite ci-dessous :

« Dans la synthèse ministérielle « collectivités locales » du rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour soulignait la complexité tant de l'architecture d'ensemble des différents concours financiers de l'Etat aux collectivités locales que des règles d'indexation des dotations, et, d'une manière générale, posait la question de la lisibilité des objectifs poursuivis.

« La régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales poursuit en effet trois objectifs :

« - Un objectif de visibilité par la programmation pluriannuelle de l'évolution des dotations de l'Etat, que le législateur a inscrit, dans un premier temps dans la loi de finances pour 1996 s'agissant du pacte de stabilité 1996-1998), puis dans la loi de finances pour 1999 s'agissant du contrat de croissance et de solidarité 1998-2001) prolongé par la loi de finances pour 2002 ;

« - Un objectif de compensation des mesures législatives affectant les ressources et les charges des collectivités territoriales : par exemple, compensation par l'Etat de la suppression de recettes fiscales des collectivités locales ainsi que du transfert de compétences et de charges de l'Etat aux collectivités locales ;

« - Un objectif de péréquation entre collectivités territoriales.

« La conciliation de ces trois objectifs rend l'équilibre de la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales complexe et fragile.

« Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour a commenté l'exécution du contrat de croissance et de solidarité en concluant que « le rôle de variable d'ajustement (du contrat de croissance et de solidarité) joué par la dotation de compensation de la taxe professionnelle donne lieu à la mise en oeuvre de mécanismes particulièrement sophistiqués, conséquence de l'amalgame d'objectifs difficilement conciliables, consistant à contraindre l'évolution globale d'une enveloppe de dotations tout en en préservant les règles d'évolution propres à ces dotations, qui diffèrent les unes des autres et dont aucune ne recoupe celle appliquée à l'enveloppe elle-même. »

« Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2001, la Cour a indiqué, s'agissant de l'objectif de visibilité, que « le respect apparent de l'évolution de l'enveloppe normée du contrat de croissance et solidarité ne reflète pas l'évolution réelle des concours de l'Etat aux collectivités locales du fait, d'une part des compensations fiscales, d'autre part des mécanismes de péréquation et d'abondements exceptionnels hors enveloppe mis en place » et « que la dotation de compensation de la taxe professionnelle, sur laquelle est reporté l'ajustement du contrat de croissance et de solidarité est une variable d'ajustement en cours de saturation ».

« En outre, la Cour a observé que la montée en charge de l'objectif de compensation signifie que « pour les concours de l'Etat, les dotations dites passives dépassent les dotations dites actives : en d'autres termes, une logique de compensation l'emporte sur une logique de péréquation » et que « dans un contexte où les transferts de compétences ne sont pas stabilisés (...), la limitation des ressources propres des collectivités locales pourrait à terme menacer la capacité de ces dernières à opérer des arbitrages impôt/ emprunt pour le financement de leurs investissements. »

« L'équilibre des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales dépend par conséquent du choix à effectuer entre les objectifs de visibilité, de compensation et de péréquation. Sur ce sujet qui appelle des considérations d'opportunité, il n'appartient pas à la Cour d'arbitrer entre les différents objectifs de la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, cet arbitrage relevant de la compétence et de la libre appréciation du législateur dans le respect de la Constitution et de la loi organique relative aux lois de finances . »

Visibilité, compensation des mesures législatives des ressources et des charges des collectivités locales, péréquation : les trois objectifs identifiés par la Cour des comptes sont loin d'être remplis par le système actuel des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales.

La visibilité est brouillée pour des raisons qui apparaîtront évidentes à ceux qui liront les pages suivantes du présent rapport.

L'objectif de péréquation est sur le point d'être consacré à l'article 72-2 de la Constitution.

La « compensation des mesures législatives affectant les ressources et les charges des collectivités locales » est une formulation intéressante car elle ne se limite pas à la compensation des transferts de compétence, mais de toutes les charges décidées par le législateur et payées par les collectivités locales. Elle revient à affirmer le principe cher à votre commission des finances selon lequel « qui commande paie ».

Pensant que le juge constitutionnel aurait pu appliquer ce principe de manière souple, votre rapporteur spécial avait présenté, à l'occasion de l'examen en première lecture par le Sénat du projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République, un amendement reprenant le principe d'une compensation par l'Etat « des mesures législatives affectant les ressources et les charges collectivités locales ». Le gouvernement n'y a pas été favorable.

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