EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 19 novembre 2002, sous le présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a tout d'abord procédé à l'examen de l'exposé d'ensemble et des dépenses en capital du budget de la défense et de l'article 39 du projet de loi de finances pour 2003, sur le rapport de M. Maurice Blin, rapporteur spécial.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a tout d'abord retracé l'évolution des grandes masses de crédits : le budget de la défense atteint, hors pensions, 31,07 milliards d'euros, soit une augmentation de 7,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. Cette évolution recouvre, d'une part, la croissance des dépenses ordinaires de + 4,7 % et, d'autre part, celle des dépenses en capital de + 11,2 %.

Il a souligné qu'il s'agissait-là d'un changement d'orientation qui a permis de faire remonter la part que représente le budget de la défense dans le budget de l'Etat comme dans le produit intérieur brut. Il a indiqué que l'on se rapprochait, pour le ratio dépenses de défense sur PIB, à nouveau du taux de 2 %, mais que ce niveau restait largement inférieur à celui de la Grande-Bretagne, 2,3 % et des Etats-Unis, 2,8 %. Ce premier budget de la période qui va être couverte par la prochaine loi de programmation militaire 2003-2008 marque une réaction par rapport à la précédente loi de programmation 1997-2002, au cours de laquelle les dépenses exécutées se sont situées à un niveau inférieur de plus d'un milliard d'euros par an à ce qui avait été prévu.

Puis le rapporteur spécial a mis l'accent sur la question des crédits d'entretien, dont les dotations doivent s'accroître, en 2003, de 8 % : par suite d'un usage intensif, l'équipement de nos armées a, d'une façon générale, « tragiquement vieilli », tandis que certains matériels et, en particulier l'avion de transport C160 Transall, sont « à bout de souffle ».

Ensuite, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a passé rapidement en revue les matériels qui allaient pouvoir être commandés en 2003 ou qui devraient être livrés la même année. Parmi les commandes, il a cité les 59 avions Rafale ; en ce qui concerne les livraisons, il a fait mention du troisième avion de surveillance Hawkeye, de 45 chars Leclerc et de 10 hélicoptères Tigre. Il a évoqué, à ce sujet, la structure de nos industries d'armement qui est en pleine évolution. Tandis que la Direction des constructions navales (DCN) prend le statut de société commerciale, d'autres organes comme la Direction des centres d'essai (DCE) se restructurent profondément en procédant à des réductions d'effectifs drastiques.

Il a également souligné que les moyens supplémentaires dégagés dans le budget pour 2003 permettraient de relancer les opérations d'entretien et de rénovation des matériels : c'est ainsi qu'il est prévu d'y affecter 2,6 milliards d'euros, soit une annuité supérieure à celle prévue par la prochaine loi de programmation militaire. Il a signalé que, corrélativement, cet effort allait permettre de faire remonter les taux d'activité de nos forces. On atteint, en 2003, 100 jours d'activité pour l'armée de terre, 100 jours de mer pour la marine et 180 heures de vol pour les pilotes de combat.

Enfin, il a insisté sur le développement de la recherche qu'allait permettre le budget pour 2003, rappelant, à ce sujet, toute l'importance des nouvelles technologies dans les domaines-clés des combats de demain qu'étaient l'espace et le renseignement.

Le rapporteur spécial s'est également félicité de ce que, pour la première fois depuis longtemps, les opérations extérieures aient été financées par des ouvertures de crédits en loi de finances rectificative, sans que celles-ci aient été gagées par des annulations d'un même montant.

Abordant dans un deuxième temps ce qu'il a appelé les zones d'ombre du projet de budget, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, s'est d'abord inquiété d'éventuels gels de crédits de plusieurs centaines de millions d'euros qui pourraient venir affecter la crédibilité des engagements pris dans le cadre de la nouvelle loi de programmation militaire.

Il s'est aussi montré préoccupé par la réalisation d'un certain nombre de matériels, qu'il s'agisse de la frégate Horizon, du missile Météor et de l'avion A400M. A ce sujet, il a précisé que la perspective d'une diminution des commandes de l'Allemagne qui ne s'était engagée, pour l'instant, que sur 55 appareils, pourrait compromettre l'équilibre économique de l'opération qui se situait autour de 180 exemplaires commandés.

Mais M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a surtout insisté sur le déséquilibre croissant existant entre les Etats-Unis et l'Europe, citant à ce sujet une série de chiffres de nature à illustrer la disproportion des efforts de défense de part et d'autre de l'Atlantique : depuis le 11 septembre, l'accroissement de l'effort militaire des Etats-Unis équivaut à l'ensemble du budget militaire de la France, tandis que les dépenses de recherches américaines étaient supérieures, à elles seules, à quatre fois les crédits d'équipement des armées françaises.

Le plus grave, selon lui, est la main-mise discrète de l'industrie américaine d'armement sur certaines entreprises européennes, notamment dans les chantiers navals. A cet égard, le cas de l'avion F35 lui est apparu exemplaire dans la mesure où il va permettre à l'industrie américaine de faire financer ses recherches par un certain nombre de pays européens participant au projet.

Pour conclure, le rapporteur spécial a affirmé que la France s'efforçait de faire face en même temps à quatre défis : la mise en place d'une armée professionnelle, le renforcement de ses arsenaux classiques et nucléaires, la mobilisation d'une force de projection à l'échelle mondiale et un effort technologique, notamment pour la maîtrise des technologies de renseignement et de la communication. Il s'est interrogé sur la capacité de la France, puissance moyenne à relever simultanément l'ensemble de ces défis, tout en remarquant que notre pays était bien seul à vouloir une Europe autonome face à une Amérique surarmée.

Après que le rapporteur spécial eut répondu aux questions et aux observations de M. René Trégouët ainsi que de MM. Philippe Marini, rapporteur général, et Jean Arthuis, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la défense, titres V et VI.

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