C. LA POLITIQUE AUDIOVISUELLE EXTÉRIEURE

La perspective d'un nouveau développement de la politique audiovisuelle extérieure de la France avec la création, sinon annoncée, du moins explicitement souhaitée par le Président de la République, a conduit votre rapporteur spécial à compléter les développements qu'il consacre à la situation d'une société particulière - l'année dernière RFI, cette année, TV5- par un résumé des principales observations contenues dans le rapport particulier de juillet 2002 consacré à la question.

1. Les observations de la Cour des comptes

Au début du mois de juillet 2002, le premier président de la Cour des compte a transmis au Premier ministre un rapport sur l'action audiovisuelle extérieure de la France.

La Cour note en tout premier lieu que les textes de l'article 79 de la loi de finances pour 1997 introduisant dans la loi du 30 septembre 1986 un article 53-1 demandant au Gouvernement de présenter en annexe de la loi de finances un rapport sur l'action audiovisuelle extérieure de la France et sur la situation et la gestion des organismes » qui en sont chargés, n'est pas respecté dans la mesure où il n'est pas procédé à l'analyse financière des opérateurs prévue par la loi.

La Cour constate d'abord que l'augmentation de 13 % des dotations publiques entre 1997 et 2000 s'explique par l'augmentation de la subvention à TV5 et par le soutien accru au bouquet numérique. En terme de budget exécuté, la subvention à TV5 passe à 35,4 millions d'euros à 56 millions d'euros en 2000, soit une augmentation de 70 % .

RFI connaît également une croissance très forte des concours publics.

Au total, la Cour estime qu'avec 210 millions d'euros de dotations publiques en 2000, l'effort public en faveur de l'audiovisuel extérieur est du même ordre de grandeur que celui de l'Allemagne deutschewelle (290 millions d'euros) ou de l'Angleterre (270 millions d'euros), à cette nuance près que dans ce dernier cas, la BBC TV est financée par des recettes commerciales.

La Cour note que toutes ces actions ne concernent que marginalement les grandes sociétés de programmes financées sur fonds publics et s'interroge implicitement sur la pertinence d'une stratégie consistant à faire « reposer l'essentiel de la présence des images françaises à l'extérieur sur des entreprises financées majoritairement par la France, ARTE-France et Satellimage-TV5, mais enserré de facto dans des contraintes et dans une structure internationale ou notre pays se trouve en permanence en situation de négociation ».

L'évolution à moyen terme des dotations du ministère des affaires étrangères se caractérise par une forte croissance à moyen terme. En budget exécuté, on est passé de 437 millions de francs en 1990, à 1.078 millions de francs en 11 ans ce qui correspond entre 1990 et 2000 à un doublement en francs constant des crédits du ministère des affaires étrangères.

La Cour avance un certain nombre d'éléments pour expliquer ces augmentations. Parmi les facteurs il y a la forte augmentation des frais de personnels, les coûts de diffusion élevés, des programmes de plus en plus chers, et la faiblesse des ressources propres.

On peut prendre quelques exemples des dérives en matière de frais de personnel. C'est ainsi qu'à RFI les charges de personnel ont augmenté de 50 % entre 1992 et 1999 par les faits notamment de la convention collective de l'audiovisuel.

Mais RFI n'est pas le seul organisme épinglé par la Cour des comptes.

C'est aussi le cas de la SOMERA, de TV5, pour laquelle le contrôle d'État a qualifié les augmentions de préoccupantes, mais aussi de Canal France international ou de la SOFIRAD, dont pour la petite histoire, elle note que les directeurs ont continué à être rémunéré pour un coût global de 1,5 million de francs pour les deux directeurs, alors même qu'il s'agissait d'une structure en voie d'extinction.

La Cour s'étonne en second lieu que l'audiovisuel extérieur de la France ne bénéficie nullement, bien au contraire de la baisse des coûts de diffusion. RFI n'a pas su tirer partie de la quasi suppression des émissions en onde courte.

A TV5, les frais techniques ont progressé de plus de 14 % entre 1994 et 1998. La Cour critique, à cet égard, la relative myopie de TV5 au motif que si celle-ci ne loue que 19 canaux satellitaires sur 39, la situation n'est que transitoire dans la mesure où sur le satellite, comme sur le câble, les opérateurs auront de plus en plus tendance à faire payer leurs services.

Enfin, RFI et TV5 ont mené d'ambitieuses politiques de rénovation de la grille des programmes.

A RFI, le coût moyen de l'heure de production originale s'est accru de près de 50 % entre 1994 et 1998, parce que le nouveau format dit « toute actualité » exige un nombre plus important de techniciens et de journalistes pour produire plus de modules d'informations, eux-même plus courts.

La Cour note également que la modernisation de la grille de TV5 a été beaucoup plus tardive compte tenu des contraintes multiples, qu'il s'agisse de la nécessité de faire une place équilibrée à chacune des télévisions partenaires, de l'insuffisance des moyens ou des limitations juridiques et morales propres.

L'organisation des programmes en modules de quatre heures rediffusés en boucle et entrecoupés de journaux diffusés à heures fixes et ondes, a permis une offre certes plus attractive, mais aussi plus coûteuse. C'est ainsi que la grille a augmenté d'un tiers entre 1994 et 1998, augmentation due notamment à la croissance des achats de droits et à l'information.

Enfin, la Cour souligne la faiblesse structurelle des ressources propres, qui représentent moins de 2,5 % des recettes de RFI et 4 % de celles de TV5.

Dans une optique d'évaluation, la Cour des comptes s'inquiète d'abord de l'inexistence des études d'audience. Elle rappelle qu'à la suite de son référé de 1992, le Conseil de l'action supérieure de la France de la même année avait donné mission à M. Guy Thomas d'élaborer des outils de mesure de l'impact des programmes français et étrangers.

Cette enquête n'a finalement été réalisée qu'en 1997 et n'a pas été finalisée depuis lors.

Les indicateurs d'activité, associés à la loi de finances, portent sur des volumes horaires et pas sur des audiences. En fait, ce sont les opérateurs qui procèdent à des études d'audience en vue d'adapter leurs programmes. RFI y consacre 0,38 million d'euros, deux fois moins que la BBC et quatre fois moins que la Voice America.

De son côté TV5 consacre 0,2 million d'euros à ses études d'audience.

Pendant la période sous revue, la société n'a pas mené d'étude récurrente, à l'exception de l'Allemagne, les Pays-Bas et la Norvège.

La Cour note que TV5 n'a pas pris soin d'élaborer une mesure d'audience adaptée à une chaîne transnationale.

Elle évoque aussi les sondages ponctuels de RFI sur l'impact de ses relais FM, 0,5 % d'audience à Prague, de 0,6 à 0,2 % à Berlin, entre 1,5 et 0,4 % à St-Petersbourg, entre 1,5 et 0,3 % à Sofia, selon que le programme est en Français ou dans la langue locale.

En ce qui concerne TV5, on fournit d'habitude des mesures d'audience potentielle, c'est-à-dire le nombre de foyer capables de recevoir le signal et en aucun cas de recevoir l'audience réelle.

En tout état de cause, même en France où son potentiel d'écoute est le plus fort, les sondages créditent la chaîne d'une part de marché de 0,5 %.

TV5, qui rappelle qu'en Allemagne ARTE a une part de marché comprise entre 0,3 et 0,4 %, fait état d'audiences cumulées : plus de 37 millions de foyers regarderaient TV5 chaque semaine, mais la Cour estime que ces données mériteraient d'être affinées et rapportées à la donnée d'écoute. Seule l'audience en Afrique de CFI-TV est substantielle. Elle représenterait de 5 à 12 % à la mi-1999 de l'audience dans 4 grandes villes d'Afrique francophone, soit presque autant que TV5, mais sensiblement moins que Canal Horizon, la chaîne à péage en français.

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