B. UN BUDGET GLOBALEMENT PEU LISIBLE

1. La nécessaire amélioration de la nomenclature budgétaire

La lecture de l'annexe « Services votés Mesures nouvelles » au projet de loi de finances pour 2003 consacrée au budget de l'écologie et de l'environnement durable est indéniablement déconcertante, en raison du manque objectif de lisibilité des documents budgétaires .

La nomenclature retenue, en effet, ne permet pas - ou mal -d'identifier la plupart des mesures financées par ce budget.

L'intitulé de la plupart des chapitres et articles budgétaires reste extrêmement général, voire ambigu, et il est rare que l'intégralité d'un chapitre soit consacrée au financement d'une seule action.

De surcroît, de nombreux chapitres, qu'il s'agisse de dépenses ordinaires ou de dépenses en capital, portent le même intitulé, notamment « Protection de la nature et de l'environnement », ou « Prévention des pollutions et des risques » - soit le même intitulé que l'agrégat 23 lui-même -, ce qui, s'agissant de ce budget, n'apporte que peu d'éclaircissements sur l'objet et le champ des politiques publiques mises en oeuvre.

Or, la même annexe comporte des informations écrites relatives aux politiques conduites, qui sont très difficilement rapprochables des informations chiffrées fournies par la nomenclature budgétaire .

Par exemple, l'agrégat 21 « Protection de la nature, sites et paysages » comporte 7 chapitres budgétaires et 18 articles effectivement dotés. Or, sur la base de cette nomenclature, ce ne sont pas moins de 14 dispositifs, répartis en deux actions, qui sont financés. Dans ces conditions, il est quasiment impossible d'identifier, à la lecture, le coût de chacun de ces 14 dispositifs.

Dès lors, votre rapporteur spécial, notamment en vue de l'entrée en vigueur définitive de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances et de l'établissement de programmes, ne peut qu'encourager le ministère à engager le plus rapidement possible une amélioration de la lisibilité de la nomenclature budgétaire, celle-ci n'étant pas qu'un outil technique à l'usage des bureaux ministériels. La légitimité d'une politique publique est d'autant plus grande qu'elle est comprise, et donc présentée de façon claire et accessible au plus grand nombre.

2. Des indicateurs de résultats peu significatifs

Afin d'améliorer l'information du Parlement, les « bleus » budgétaires comportent, depuis maintenant plusieurs années, des indicateurs d'activités et de résultats associés à des objectifs.

Or, le budget de l'écologie et du développement durable présente des indicateurs d'une qualité très inégale, mais globalement médiocre, voire franchement mauvaise. Surtout, ils ne permettent pas d'apprécier véritablement les résultats des politiques publiques environnementales ni, a fortiori , leurs performances. Ici encore, votre rapporteur spécial ne peut qu'exprimer son inquiétude devant cette situation, que la politique conduite au cours de la précédente législature n'a pas contribué à améliorer.

Cette observation lui a malheureusement été confirmée par l'ancien contrôleur financier central du ministère , en fonction jusqu'au début du mois d'octobre dernier, qui lui a indiqué « ne pas avoir eu l'impression que les efforts financiers [réalisés en faveur de l'environnement] aboutissait à des résultats tangibles », et a estimé que « les objectifs quantitatifs n'étaient pas la traduction de véritables besoins ». Il a eu par ailleurs à déplorer l'absence de tableaux de bord et d'indicateurs de résultats socio-économiques pertinents.

Le « bleu » fournit de très nombreuses illustrations de ce manque de pertinence des indicateurs, voire des objectifs eux-mêmes.

• Certains objectifs et résultats suscitent le scepticisme.

Ainsi en est-il de celui consistant à réaliser dans chaque département un « atlas de la composante des paysages ». À l'aune des chiffres qui suivent, il convient de s'interroger sur la prévision retenue pour 2001, tant elle apparaît peu cohérente avec la progression régulière retenue sur la période 2000 à 2005 :

• Des résultats affichés peuvent ne pas sembler crédibles eu égard aux évolutions passées.

Par exemple, le nombre d'hectares protégés dans les zones centrales des parcs nationaux n'a pas évolué entre 2000 et 2003, mais serait multiplié par 10 entre 2003 et 2005. Cet objectif, même si le gouvernement estime qu'il serait atteint grâce à la création de trois nouveaux parcs en 2004 (Iroise, Guyane et Réunion), semble peu crédible.

• L'aspect purement quantitatif de certains objectifs ne laisse pas de s'interroger sur la pertinence de ceux-ci.

Ainsi, envoyer, sur la base de l'inventaire français de Natura 2000, « en nombre suffisant à la Commission européenne », des sites susceptibles d'être reconnus d'importance communautaire, ne dit rien de la qualité des sites retenus 4( * ) et s'apparente plutôt à une volonté de « faire du chiffre » :

• L'affichage d'objectifs peut ne tirer aucune conséquence du fait que plusieurs d'entre eux ne sont purement et simplement pas atteints.

Ainsi en est-il de l'objectif consistant à atteindre un taux de conformité de qualité des eaux de baignade égal à 100 %. Alors que l'objectif fixé en 2001 de 95 % n'a pas été réalisé (moins de 88 %), le ministère n'en continue pas moins d'afficher des résultats en progression pour les années suivantes.

• D'autres indicateurs de résultats sont renseignés avec une évidente fantaisie.

Par exemple, le nombre d'autorisations délivrées et de déclarations traitées, au titre de la police de l'eau, est prévu en augmentation constante d'ici 2005. Pourtant, le résultat de l'année 2001, par rapport à la prévision, n'est pas connu.

À l'inverse, il peut arriver, comme pour la collecte des déchets ménagers, que le résultat soit connu, mais pas la prévision !

Il arrive également qu'un objectif associé à des résultats soient fixés à moyen terme, sans que les résultats intermédiaires soient précisés.

Par exemple, en ce qui concerne l'amélioration de la qualité de l'air, notamment les plans régionaux de la qualité de l'air (PRQA), les plans de protection de l'atmosphère (PPA) et les plans de déplacements urbains (PDU), le ministère connaît les résultats pour 2002 et a fixé des objectifs à atteindre en 2005, mais ne connaît vraisemblablement pas les résultats qu'il escompte pour 2003 ou 2004.

Enfin, le ministère n'est pas capable de fournir la moindre information, ni pour le passé ni pour l'avenir, en matière de taux de conformité des eaux brutes destinées à fabriquer de l'eau potable, précisant que cette information est « non disponible depuis 1998, en raison d'un mouvement social au sein des directions départementales de l'action sanitaire et sociale »...

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