II. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE

ARTICLE 10

Dépenses des comptes d'avances. Ouverture

Commentaire : le présent article propose d'ouvrir, au titre des dépenses du compte d'avance n° 903-54 « Avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes » un crédit de 1.486.000.000 euros.

L'ouverture de crédit sur le compte d'avances aux collectivités locales résulte de la prise en compte des taux effectivement votés par les collectivités et des bases déclarées. Celle-ci induit mécaniquement des dépenses supplémentaires de 1.486 millions d'euros sur le compte d'avances précité. En contrepartie, les recouvrements attendus par l'Etat en 2002 ne seraient que de 1.300 millions d'euros. L'excédent du compte serait donc diminué de 186 millions d'euros dans le présent projet de collectif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11

Dépenses des comptes de prêts. Ouverture

Commentaire : le présent article a pour objet d'ouvrir sur le compte de prêt n° 903-17 un crédit de 594,74 millions d'euros destiné à permettre le refinancement de la dette du Nigéria, et à compléter l'ouverture de crédit du projet de loi de finances pour 2003 au titre du refinancement de la dette de la République Démocratique du Congo.

Il a également pour objet d'ouvrir sur le compte de prêt n° 903-05 un crédit de 5 millions d'euros en faveur de la société Air Littoral (nouvel alinéa II introduit par le gouvernement).

I. LES DISPOSITIONS DES PRETS AU NIGERIA ET A LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

A. UN ACCROISSEMENT DE LA CHARGE NETTE DE 437 MILLIONS D'EUROS

Le crédit ouvert par le présent article induit un accroissement de la charge nette du compte spécial du Trésor n° 903-17 « Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de leurs dettes envers la France » de 437 millions d'euros . Cette charge nette résulte de la différence entre :

- d'une part, des dépenses correspondant au capital des prêts accordés par le Trésor à des pays étrangers pour la consolidation de leurs dettes envers la France . Ces prêts refinancent les sommes rééchelonnées en Club de Paris (réunion des créanciers publics multilatéraux) dans le cadre d'accords dits de flux ou de stocks. Dans les accords de flux sont rééchelonnés tout ou partie des arriérés dus à la date de l'accord, ainsi que les échéances en capital et en intérêts qui sont dues pendant la période couverte par l'accord, alors que seuls tout ou partie des encours dus à la date de l'accord, y compris les arriérés, sont rééchelonnés dans les accords de stocks ;

- d'autre part, des recettes correspondant aux remboursements en capital effectués par les pays débiteurs sur ces prêts .

L'évolution de la charge nette de ce CST dépend en grande partie des accords conclus en Club de Paris et de la nature des créances refinancées (créances primaires ou créances déjà consolidées). Cette charge nette est compensée par des ressources susceptibles d'être inscrites en recettes non fiscales sur la ligne 409 (intérêts des prêts refinancés dans l'année) ou en recettes du compte de prêts n° 903-07 (capital) « Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française du développement en vue de favoriser le développement économique et social ».

B. UNE CERTAINE ASYMETRIE DE TRAITEMENT POUR LES DEUX OPERATIONS DE REFINANCEMENT

Le présent accroissement de charge nette enregistrée sur le CST n° 903-17 dans le projet de loi de finances rectificative résulte de deux opérations, l'une avec la République Démocratique du Congo qui figure dans la zone de solidarité prioritaire, l'autre avec le Nigéria qui n'en fait pas partie, selon la ventilation suivante : (en millions d'euros)

NIGERIA

RDC

TOTAL

Dépenses

310,2

284,54

594,64

Recettes

157,96

0

157,96

Charge nette

152,24

284,54

436,78

L'ouverture de crédits au titre du refinancement de la dette du Nigéria est justifiée par l'accord bilatéral trouvé avec ce pays au début du second semestre de cette année en application de l'accord du Club de Paris du 13 décembre 2000. La compensation en est intégrale puisque l'augmentation des recettes non fiscales sur la ligne 409 du budget général se fait à due concurrence.

L'ouverture de crédits au titre du refinancement de la dette de la République Démocratique du Congo vise à compléter celle effectuée dans le projet de loi de finances pour 2003, les termes de l'accord conclu le 13 septembre 2001 dans le cadre du Club de Paris appelant un niveau de refinancement dans le cadre de l'accord bilatéral d'application supérieur à celui prévu initialement. L'accroissement de dépenses de 284,54 millions d'euros comprend un refinancement minoritaire « pré-date butoir » d'environ 35 millions d'euros sur 30 ans, et un refinancement « post-date butoir » sur 7 à 8 ans pour le solde, faisant l'objet d'échéances de paiement semestrielles et progressives. La fraction minoritaire pourrait à moyen terme faire l'objet d'une annulation dans le cadre de l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), si la République Démocratique du Congo, qui est inscrite dans le processus, venait à passer le point d'achèvement. L'ensemble constitue le refinancement d'un stock ancien de créances impayées détenues par l'Agence française de développement (AFD), qui ont été en grande partie provisionnées par l'Agence (100 % pour les intérêts et 85 % pour le capital). Le montant global du refinancement pourrait toutefois être élargi si la créance de l'AFD sur la société minière GECAMIN, d'environ 40 millions d'euros, venait à être intégrée 7 ( * ) .

L'opération de refinancement au profit de la République Démocratique du Congo est en grande partie compensée par le reversement en recettes non fiscales de la provision constituée par l'AFD sur cette créance , soit 270 millions d'euros représentant une provision globale à hauteur de 94,9 %.

Il convient toutefois de considérer que la République Démocratique du Congo constitue un risque-pays majeur, de telle sorte que la probabilité que la nouvelle dette, bien que rééchelonnée, ne soit pas ou partiellement remboursée est loin d'être négligeable. On peut de ce fait estimer que l'Etat a opportunément préempté une recette non fiscale en intégrant la provision de l'AFD, en contrepartie d'une dépense nette incertaine mais qui pourrait se concrétiser si la République Démocratique du Congo venait à faire à nouveau défaut.

II. LE CONTEXTE DU PRÊT À LA SOCIETE AIR LITTORAL

Un nouvel alinéa, tendant à a ouvrir un crédit de 5 millions d'euros dans le cadre d'un prêt à Air Littoral, par l'intermédiaire du compte de prêt n° 903-05 « Prêts du Fonds de développement économique et social », a été inséré par le gouvernement à l'occasion de l'examen par l'Assemblée nationale.

Air Littoral est une société anonyme dont le capital de 15 millions d'euros est intégralement détenu par M. Marc Dufour. Elle connaît de graves difficultés commerciales (forte diminution de douze points du coefficient de remplissage) et financières, ces dernières ayant été amplifiées par la défaillance fin 2001 de Swissair , qui en était l'actionnaire principal avec 49 % du capital. L'exercice 2001 s'est ainsi soldé par un résultat d'exploitation négatif de - 64,8 millions d'euros, qui a toutefois été compensé par un résultat exceptionnel positif de 80,3 millions d'euros, lié à l'abandon de créances et contributions volontaires de Swissair et à la reprise d'une provision pour restructuration, devenue sans objet.

En 2002, Air Littoral a mis en place un plan de redressement comportant divers volets : cessions d'actifs, action en justice contre le groupe Swissair en vue de récupérer 30 millions d'euros de créances, réduction de sa flotte de cinq appareils et fermeture des lignes les moins rentables, plan social portant sur 185 salariés, et sollicitation, à titre d'aide « implicite » de l'Etat, d'un moratoire de longue durée sur ses dettes fiscales et sociales de 2002, accordé par la Commission des chefs des services financiers (COCHEF), a l'instar de ce qui avait déjà été prévu pour Air Lib. Une réflexion est également en cours sur la stratégie et le positionnement d'Air Littoral.

Le prêt accordé par l'Etat, d'un montant global réel de 7,5 millions d'euros et dont les modalités (taux et échéance en particulier) ne sont pas encore arrêtées, doit permettre de remédier à la crise de trésorerie de la compagnie et de prolonger sa survie. Il s'agit également de soutenir le bassin d'emploi languedocien où Air Littoral est particulièrement implanté, dans un contexte de chômage déjà élevé (14 %) dans l'agglomération de Montpellier. La société bénéficie à ce titre d'aides des collectivités locales et chambres de commerce, sous forme de garanties d'un montant équivalent à celui du prêt de l'Etat. Il conviendra toutefois de demeurer vigilant sur la capacité de remboursement d'Air Littoral, ainsi que sur l'avis de la Commission européenne sur cette aide publique , selon les orientations qu'elle a définies en 1994. L'examen de la Commission s'effectue ainsi en deux étapes :

- la Commission examine en premier lieu si l'aide publique (apport de capital, prêt ou garantie) constitue une aide d'Etat au sens des articles 87 et 88 du Traité, ou si elle peut être assimilée à une opération commerciale normale d'un actionnaire privé ;

- si l'aide publique est reconnue comme aide d'Etat, son approbation par la Commission est soumise à cinq conditions cumulatives : l'aide doit faire partie d'un programme global de restructuration et être limitée dans le temps, elle ne doit être accordée qu'une fois, le programme doit prévoir des réductions de capacités si cela se révèle nécessaire au rétablissement de la rentabilité de l'entreprise, le programme ne doit pas viser l'expansion, et enfin le gouvernement ne doit pas intervenir dans la gestion de la compagnie.

Considérant la situation dégradée d'Air Littoral, on peut estimer probable une validation de la Commission, sous réserve cependant que le moratoire sur les dettes fiscales et sociales ne soit pas considéré comme une première aide publique (mais ce moratoire n'a pas été notifié à Bruxelles). Il convient également de rappeler que si l'aide accordée à Air Lib a reçu l'assentiment de la Commission, cette dernière n'autorise désormais l'octroi de ces aides qu'en tant que mesures d'exception. La Commission a ainsi récemment invalidé l'aide accordée par l'Etat grec à la compagnie Olympic Airways, qui doit par conséquent rembourser 194 millions d'euros, de même qu'une partie du régime d'aide d'urgence octroyé en France aux compagnies nationales pour compenser les pertes subies par les interruptions de trafic aérien du 11 au 14 septembre 2001.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 7 Cette créance n'est pas souveraine mais s'inscrit dans la « zone grise » du périmètre de rééchelonnement du Club de Paris, dans la mesure où la GECAMIN est un établissement public.

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