2. La place de l'accord dans les relations multilatérales de l'Union européenne et de l'Afrique du Sud

L'encadré ci-après dresse une typologie des accords conclus par l'Union européenne en matière commerciale. On constate ainsi que l'accord euro-sud-africain est le premier de ce type conclu avec des pays qui n'appartiennent pas au « premier cercle » (pays candidats à l'adhésion, pays méditerranéens), bien qu'il ne soit pas éloigné, dans sa logique, des accords conclus avec les pays ACP.

En ce qui concerne l'Afrique du Sud, elle appartient à deux organisations régionales : la SACU 1 ( * ) , la plus ancienne union douanière d'Afrique, créée en 1910, et la SADC 2 ( * )

Dans ces deux intégrations l'Afrique du Sud joue le rôle du « poids lourd ». Si ces deux intégrations rencontrent les difficultés habituelles des intégrations régionales africaines, la SACU est certainement une des intégrations les plus efficaces. Les Etats membres ont en particulier mis en place un mécanisme de répartition des droits de douane perçus par les Etats membres aux frontières de l'Union. 85 % des droits collectés seront partagés en fonction du PIB, les 15 % restants seront distribués selon une logique d'aide au développement, le pays à revenu le plus bas recevant la part la plus importante.

Le relatif bon fonctionnement de la SACU a amené les Etats-Unis à lui proposer l'ouverture de discussions en vue de la négociation d'un accord de libre-échange. Des discussions pour une zone de libre-échange sont aussi envisagées avec l'Inde.

Actuellement, l'accord avec l'Union européenne est le seul de ce type passé par l'Afrique du Sud, tant avec d'autres pays africains qu'avec des pays développés.

LES ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX DE L'UNION EUROPÉENNE

La moitié du commerce mondial s'effectue désormais dans le cadre d'accords commerciaux régionaux, contre 18 % seulement en 1970. L'Union européenne a développé un réseau dense d'accords de cette nature, dont la Direction des relations économiques extérieures a récemment établi une typologie 3 ( * ) .

1. La logique d'intégration : les accords européens

L'Union européenne est liée aux dix pays d'Europe centrale et orientale par des accords de libre-échange signés dans les années 1990, ainsi qu'à Chypre et Malte depuis 1998. Les produits industriels circulent librement entre les signataires et l'Union européenne depuis début 2001. Des dispositions régissent la libre circulation des services, des paiements et des capitaux liés au commerce et à l'investissement. Dans le cadre du processus de stabilisation et d'association avec les Balkans , l'Union a mis en place des accords de stabilisation et d'association qui visent à l'établissement progressif du libre-échange. Deux d'entre eux sont déjà signés avec la Macédoine (avril 2001) et la Croatie (octobre 2001).

Par ailleurs, chaque pays de l' Association Européenne de Libre-Echange (Islande, Norvège, Suisse, Liechtenstein) créée en 1960, a signé en 1972 des accords de libre-échange avec la CEE. L'accord sur l' Espace Economique Européen , signé en 1992 et entré en vigueur au 1 er janvier 1994, élargit le marché unique de l'Union européenne à trois membres de l'AELE, la Suisse ayant voté contre son adhésion en 1992.

Enfin, l'Union européenne et la Turquie ont signé en 1995, dans le prolongement de l'accord d'association de 1963, un accord d'union douanière qui prévoit un désarmement tarifaire total sur les produits industriels et sur la part industrielle des produits agricoles transformés. De nouvelles négociations ont été engagées en 2000 en vue de libéraliser le commerce des services et les marchés publics. La Turquie a repris le tarif extérieur commun appliqué par l'Union aux produits industriels des pays tiers.

2. La logique de stabilisation régionale : les accords euroméditerranéens et le processus de Barcelone

Cette démarche, qui vise des pays n'ayant pas vocation à adhérer à l'Union, découle notamment des relations historiques de l'Union avec ses partenaires méditerranéens et d'une volonté de stabiliser les relations politiques et économiques à ses frontières.

Les relations de l'Union européenne avec les pays tiers méditerranéens sont encadrées depuis l'automne 1995 par le processus de Barcelone, qui prévoit la constitution d'une « zone euro-méditerranéenne de prospérité partagée » et l'instauration progressive du libre-échange régional à l'horizon 2010 , au travers notamment de la mise en oeuvre d'accords d'association succédant aux accords asymétriques de coopération conclus à la fin des années 1970 avec chaque pays de la zone. Formellement, neuf pays arabes sont déjà concernés par ces accords, qui prévoient l'instauration progressive, dans un délai de douze ans à compter de l'entrée en vigueur, d'un régime de libre-échange des produits industriels et d'une plus grande libéralisation des échanges réciproques de produits agricoles et de la pêche . Le rythme de mise en oeuvre actuel et la faiblesse des échanges Sud-Sud rendent cependant difficile à atteindre l'objectif affiché de 2010 pour une zone de libre-échange régionale.

3. La logique d'influence : les accords « stratégiques »

L'Union a récemment développé des relations commerciales préférentielles avec des pays tiers plus lointains géographiquement mais dont le potentiel économique, l'intérêt géopolitique ou les liens historiques avec l'Europe revêtent une importance particulière.

• La politique commerciale envers l' Amérique latine est ainsi récemment devenue une priorité européenne, en réponse au projet américain de Zone de libre-échange des Amériques.

L'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Mexique , entré en vigueur au l er juillet 2000, a contribué au renforcement du commerce bilatéral en libéralisant immédiatement 93 % des échanges industriels et 7 % des échanges agricoles ; d'ici 2007, plus de 90 % du commerce bilatéral sera entièrement libéralisé.

L'accord de libre-échange récemment conclu avec le Chili prévoit également une libéralisation importante au delà d'une période transitoire de sept ans. Cet accord constitue une référence pour l'Union, qui a réussi à faire valoir auprès d'un pays, alors engagé dans une négociation bilatérale avec les Etats-Unis, des principes et méthodes de négociation qu'elle défend à l'OMC (listes positives d'engagements sur les services et l'investissement, protection additionnelle des appellations d'origine notamment).

Des négociations sont en cours avec le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay), en vue d'une « libéralisation progressive et réciproque de l'ensemble des échanges de biens et de services, dans la perspective de l'instauration du libre-échange, compte tenu de la sensibilité de certains produits et secteurs de services, conformément aux règles de l'OMC » (directives de négociations données par le Conseil des Ministres de l'Union à la Commission en septembre 1999).

• Les négociations en cours en vue d'un accord de libre-échange avec le Conseil de coopération du Golfe témoignent par ailleurs de la volonté du Conseil de l'Union européenne d'envoyer un signal politique fort dans cette région.

Ces négociations se fondent sur le nouveau mandat adopté par le Conseil en juillet 2001 (un premier mandat avait été donné à la Commission en 1991, au moment de la guerre du Golfe). Celui-ci étend notamment les questions traitées aux normes, à la propriété intellectuelle, aux marchés publics et aux services, permettant d'engager une « nouvelle phase » de relations entre l'Union et le Conseil de Coopération du Golfe. Ce mandat, qui maintient la condition de mise en oeuvre d'une union douanière entre les six monarchies du Golfe, ne contient plus de restrictions quantitatives. Le processus de libéralisation s'effectuera donc conformément aux règle multilatérales applicables à tout accord de libre-échange. Relancées lors du sommet ministériel de Grenade en février 2002, les négociations ont depuis fait l'objet de cinq sessions formelles entre les parties.

4. La logique de développement : les accords Nord-Sud

Les accords commerciaux régionaux, facteurs d'insertion des pays du Sud dans l'économie mondiale, contribuent à la constitution d'un cadre favorable à l'« ancrage » et à l'aboutissement de réformes institutionnelles et structurelles entreprises avec l'aide de l'Union européenne et favorisent la mobilisation des investisseurs étrangers.

L'accord de commerce et de coopération entre l'Union européenne et l'Afrique du Sud , signé en octobre 1999 et entré en vigueur à titre provisoire au l er janvier 2000, offre ainsi l'opportunité d'une stimulation importante de l'économie sud-africaine et invite à une coopération économique et financière consolidée entre les parties. Le démantèlement tarifaire prévu par l'accord est substantiel : au terme d'une période transitoire de douze ans, la libéralisation portera sur 95 % des exportations actuelle de l'Afrique du Sud vers l'Union (contre 68 % aujourd'hui) et sur 86 % des exportations actuelles de l'Union vers l'Afrique du Sud (contre 53 % aujourd'hui).

Les négociations d'accords de partenariat économique entre l'Union et les pays ACP ont par ailleurs débuté, conformément à l'accord de partenariat signé à Cotonou (Bénin) le 23 juin 2000. Cet accord maintient le niveau des préférences tarifaires accordées par la convention de Lomé mais reconnaît l'intégration régionale comme l'instrument clé de l'intégration des pays ACP dans l'économie mondiale. Il prévoit ainsi la négociation, dès septembre 2002, d'accords de partenariat économique qui se substitueraient, à partir du l er janvier 2008, à l'actuel régime de préférences unilatérales ; compatibles avec les disciplines de l'OMC, ces accords instaureront des relations commerciales contractuelles entre l'Union et les pays ACP.

* 1 « Southern African Customs Union » : Afrique du Sud, Botswana, Lesotho, Namibie, Swaziland.

* 2 « Southern African Development Community » fondée en 1980 : Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Swaziland, Tanzanie, Zimbabwe, Namibie (depuis 1990), Afrique du Sud (depuis 1994), Maurice (depuis 1998), RDC et Seychelles (depuis 1998).

* 3 Direction des relations économiques extérieures - Revue « Politiques commerciales » n° 4 - Janvier 2003.

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