D. 1.4. LES SYSTÈMES DE SANTÉ AUJOURD'HUI

Les différents systèmes qui coexistent en Europe révèlent des conceptions assez diverses des services publics de santé. Dans certains pays, le service public de santé concerne l'ensemble de la population (pays scandinaves), dans d'autres, il existe un filet de sécurité (CMU en France), la majorité de la population étant alors couverte par son statut professionnel. En ce qui concerne l'offre de soins, des pays où les services de santé sont réglementés en contrepartie d'un financement collectif côtoient des pays où le service est libre et financé individuellement. Il n'est donc pas aisé d'élaborer une typologie de pays en fonction de leur système de santé.

En reprenant la classification de l'OCDE 31 ( * ) , on peut distinguer trois modèles d'organisation du système de santé :

• le modèle « public intégré », représentatif du système existant dans les pays nordiques comme la Suède, au Royaume-Uni, enItalie et en Espagne. Il est caractérisé par un financement essentiellement public, une couverture universelle de la population, un service hospitalier public dont le personnel fait partie de l'emploi public salarié. Les praticiens sont soit salariés, soit rémunérés à la capitation (le praticien reçoit un paiement fixe pour chaque patient inscrit sur sa liste avec un ajustement pour l'âge et le sexe). En terme de maîtrise des coûts, ce système est le plus performant puisque le budget est fixé a priori . Cependant, comme l'offre de soins est fixée à une date donnée, l'ajustement se réalise par la demande et engendre, en particulier, des problèmes de files d'attentes.

• le modèle de « contrat public » concerne principalement l'Allemagne et les Pays-Bas. Les assureurs (le plus souvent publics) passent des contrats avec des fournisseurs de soins privés (organisation représentative de praticiens, clinique ou hôpital). L'assurance des individus est fonction de leurs revenus. Les revenus en dessous d'un certain seuil sont couverts par une assurance publique obligatoire, tandis que les plus hauts revenus s'affilient volontairement à une caisse privée. Le mode de rémunération des praticiens peut être soit à l'acte comme en Allemagne, soit à la capitation ou à l'acte comme aux Pays-Bas. Ce système est considéré comme plus efficace par les patients mais moins favorable à une bonne maîtrise des coûts (Docteur et Oxley (2003)).

• le modèle de « remboursement » est le modèle dominant en France pour les soins de ville et aux Etats-Unis. L'assurance peut être privée, comme aux Etats-Unis, ou publique, comme en France, et les producteurs de soins sont pour la plupart privés à but lucratif. Le mode de rémunération des praticiens est généralement à l'acte. Durant les années 1990, les assureurs privés américains ont mis en place des contrats pour mettre en concurrence les producteurs et restreindre le choix des patients. Certains praticiens américains sont désormais rémunérés à la capitation. L'efficacité du modèle en terme d'attente est meilleure que dans les deux autres systèmes mais le contrôle des coûts est plus difficile.

La différence principale du système américain par rapport aux systèmes européens concerne la couverture de la population. Elle est quasi-complète en Europe, même si aux Pays-Bas et en Allemagne, une petite partie (les revenus les plus élevés) est assurée de façon privée, et même si cette couverture peut exclure certains services et nécessiter une quote-part des ménages. Aux Etats-Unis, la couverture maladie repose en grande partie sur l'assurance privée. Selon une étude de la DREES (Chambaretaud et Lequet-Slama, 2001), les deux tiers des Américains de moins de 65 ans sont assurés par le biais de leur employeur. De plus, en 1999, plus de 42 millions d'américains ne disposaient d'aucune assurance maladie, soit 15% de la population.

En pratique, les pays ont un système de soins complexe qui combine plusieurs modèles. Par exemple, en France, l'hôpital est proche du modèle « public intégré » et côtoie un système de « contrat public » pour les cliniques, dont certaines sont à but lucratif. La médecine de ville est un système de remboursement. Pour illustrer la diversité de l'organisation des soins de santé en Europe, nous proposons une grille de lecture des systèmes de santé européens, inspirée du rapport Polton « Quel système de santé pour l'horizon 2020 ? ». Elle permet de schématiser les systèmes de protection sociale selon 2 axes (graphique 3) :

• Un axe de financement sur lequel s'opposent, à une extrémité, les systèmes de couverture universelle (en termes de population et de services), et à l'autre, les systèmes d'assurance individuelle (chaque assuré choisit son niveau de couverture et paie une prime que l'assureur calcule en fonction de son risque). La situation de la France sur cet axe est intermédiaire puisqu'à la couverture sociale obligatoire s'ajoutent des assurances privées volontaires.

• Un axe d'offre de soins qui oppose les systèmes à offre planifiée aux systèmes libéraux et concurrentiels. Sur cet axe, la France se situe aussi à un niveau intermédiaire avec un système hospitalier très planifié et une médecine de ville libérale.

Graphique 3 : Une grille de lecture pour les systèmes de santé européens

* 31 Cette classification s'inspire du document de travail de l'OCDE « Health care reform : controling spending and increasing efficiency », Oxley et Mc Farlan (1994), working papers n°149. Elle est différente de celle proposée dans « Health care systems : lessons from reform experience » Docteur et Oxley (2003), OCDE working papers n°374.

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