6. Tableau 9 : Consommation moyenne des personnes décédées entre 1996 et 2002 au cours de leur dernière année de vie en fonction de l'âge au décès (base de remboursement en euro par bénéficiaire)

De 40 à 49 ans

De 50 à 59 ans

De 60 à 69 ans

De 70 à 79 ans

80 ans et plus

18000

16500

14200

14000

12 000

Source : Cnamts, Point de conjoncture n°15, Juillet 2003

Plusieurs explications peuvent être proposées : le traitement des pathologies chez les personnes relativement jeunes implique des techniques médicales plus coûteuses, ou bien on dépense plus pour essayer de sauver la vie de personnes relativement jeunes. Cette relation entre l'âge du décès et les dépenses de la dernière année de vie n'est pas prise en compte dans les projections présentées ci-dessus, mais son effet est aussi de minorer l'impact du vieillissement de la population sur les dépenses de santé.

Au total, on peut donc conclure que le vieillissement de la population à lui seul conduit à une augmentation des dépenses de santé en part de PIB significative mais pas explosive.

7. b. Projection des tendances des dépenses à moyen terme

Les facteurs démographiques apportent les tendances de long terme. Ils doivent être combinés avec les facteurs passés en revue en section 2.1 pour fournir des projections à moyen terme. Il faut alors reconstruire un modèle explicatif des dépenses de santé par habitant corrigées de l'effet de la structure par âge de la population. On peut alors, dans un second temps, empiler ce modèle avec les effets démographiques décrits plus haut.

a) Un modèle explicatif des dépenses de santé par tête corrigées de la déformation de la pyramide des âges

On estime ici un modèle expliquant les dépenses de santé pour une structure démographique stable. Pour cela, l'indice I v calculé dans la sous-partie précédente est construit sur le passé. Il est utilisé pour corriger les séries des dépenses de santé par tête des modifications de structure de la pyramide des âges liées au vieillissement. On obtient alors, pour chaque pays, une série de dépenses de santé par tête « fictive », à structure démographique stable. Tout facteur démographique est de ce fait éliminé.

Le modèle retenu relie cette dépense de santé par tête corrigée au PIB par tête, au prix relatif du secteur de la santé par rapport à celui du PIB et à une tendance temporelle. Ce modèle est estimé sur le passé en empilant les données relatives à chaque pays. La démarche retenue s'inspire des travaux de Gerdtham et alii (1995) et de Mahieu (2000).

Le modèle est estimé en panel avec des élasticités prix et PIB identiques dans tous les pays, mais des tendances temporelles spécifiques à chaque pays, qui combinent l'impact commun du progrès technique et l'impact spécifique de l'organisation du système de santé.

Ce modèle est une mise à jour des estimations de Bac et Cornilleau (2002). Les résultats obtenus sont donc proches (encadré 4). Une hausse de 1% du prix relatif des soins réduit de 0,76% les dépenses par habitant, tandis qu'une hausse du PIB par habitant de 1% élève les dépenses par habitant de 0,86% 41 ( * ) ..

Les estimations des tendances temporelles, spécifiques à chaque pays, sur le passé permettent de distinguer deux groupes de pays : les pays à tendance élevée comme les Etats-Unis ou la France, les pays à plus faible tendance comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas. En utilisant ce modèle, les tendances de l'évolution des dépenses dans chaque pays ainsi que le ratio des dépenses de santé dans le PIB sont déterminées.

(1) Projection des dépenses à moyen terme

Pour projeter les dépenses de santé corrigées de la déformation de la pyramide des âges, il faut faire des hypothèses sur l'évolution des deux variables explicatives du modèle : le PIB par habitant et le prix relatif des soins. Deux hypothèses alternatives sur le taux de croissance du PIB sont retenues : 1% et 3%, ce qui correspond à des taux de croissance du PIB par habitant différents selon la croissance démographique de chaque pays. Pour les prix relatifs, on calcule une tendance non-linéaire sur le passé à l'aide du filtre d'Hoddrick-Prescot, et on retient la tendance moyenne des 5 dernières années : +0,4% par an pour l'Allemagne, -0,4% pour l'Espagne, +1,6% pour les Etats-Unis, -0,4% pour la France, +0,2% pour l'Italie, +0,5% pour les Pays-Bas et +1,6% pour le Royaume-Uni. Enfin, pour les évolutions démographiques (croissance de la population et modification de la structure), les taux de croissance sont ceux calculés à partir des indices I P (taille) et I v (structure) de la section consacrée aux projections démographiques. Enfin, les écarts constatés sur la période récente entre les valeurs observées et celles estimées par le modèle sont maintenus en projection. La méthode est détaillée dans l'encadré 5. Les résultats sont reproduits dans les tableaux 11 (croissance du PIB à 1% par an) et 12 (croissance du PIB à 3% par an).

Les résultats sont proches de ceux obtenus dans Bac et Cornilleau (2002). Les différences s'expliquent par l'utilisation des projections Cepii pour la démographie et par la période d'estimation du modèle qui n'est plus la même, en particulier pour l'Italie.

Au total, pour l'ensemble des pays sauf l'Italie et le Royaume-Uni, la croissance des dépenses de santé est plus rapide que celle du PIB. La France se situe parmi les pays à croissance forte, avec une croissance annuelle de 2,5% (pour un Pib croissant au rythme de 1% par an) ou 4.3% (si le PIB augmente de 3% par an).

Encadré 4 : un modèle explicatif des dépenses de santé par habitant corrigées de l'influence de la structure par âges de la population

Le modèle estimé est :

désigne les dépenses de santé par habitant du pays i l'année t corrigées de l'effet de la déformation de la pyramide des âges entre l'année de base et l'année t . y it désigne le PIB par habitant, p it le prix relatif des soins et T t le temps. Les effets fixes sont notés i . Les variables du modèle sont issues de la base Eco-santé 2003 (voir l'encadré 2). Les résultats sont reportés dans le tableau 10 ci-dessous.

Tableau 10 : un modèle des dépenses de santé par habitant corrigées de l'effet pyramide des âges

Variable dépendante : LOG(dépenses par tête corrigées)

Méthode: Pooled Least Squares

Période d'estimation : 1972-2001

Nombre observations : 30

Nombre de pays : 7

Nombre total d'observations : 167

Variable

Coefficient

Std. Error

t-Statistic

Prob.

LOG(Prix relatif)

-0,785336

0,131859

-5,955867

0,0000

LOG(PIB par hab)

0,861850

0,144328

5,971456

0,0000

Tendance_Allemagne

0,006394

0,003740

1,709543

0,0894

Tendance_Espagne

0,018553

0,003008

6,167829

0,0000

Tendance_France

0,017083

0,002679

6,376854

0,0000

Tendance_Italie

-0,008409

0,003969

-2,118390

0,0358

Tendance_Pays-Bas

0,004323

0,003055

1,414892

0,1592

Tendance_Royaume-Uni

0,011973

0,003605

3,321352

0,0011

Tendance_Etats-Unis

0,018743

0,004513

4,153204

0,0001

Effets fixes

Allemagne

2,486721

Espagne

1,844867

France

2,163182

Italie

2,605645

Pays-Bas

2,380532

Royaume-Uni

1,997010

Etats-Unis

2,491925

R-squared

0,991862

Mean dependent var

7,284246

Adjusted R-squared

0,991054

S.D. dependent var

0,489561

S.E. of regression

0,046306

Sum squared resid

0,323775

Log likelihood

284,5531

F-statistic

2300,469

Durbin-Watson stat

0,387712

Prob(F-statistic)

0,000000

Encadré 5 : La méthode de projection des dépenses de santé à moyen terme

On utilise le modèle de l'encadré 4 pour projeter le logarithme des dépenses de santé par habitant corrigées de la déformation attendue de la pyramide des âges :

On utilise alors les deux identités suivantes :

• dépenses de santé par habitant à structure par âge constante :

• PIB par habitant : N it désigne la taille de la population.

En notant S i , t les dépenses de santé en volume à la date t ( ), on a donc :

Le taux de croissance des dépenses de santé s'obtient à partir de la déformation de la structure par âges, de la croissance de la population, du taux de croissance du PIB par habitant, du taux de croissance des prix relatifs et de la tendance autonome. L'écart statistique entre la croissance des dépenses observée et simulée (sur le passé), qui correspond aux éléments non pris en comte par le modèle, est supposée se maintenir constant sur les cinq années de la projection. Enfin, la tendance autonome i T t est décomposée en une tendance commune (« progrès technique ») et une tendance spécifique (« organisation du système »).

Tableau 11 : Evolution des dépenses de santé en volume sous l'hypothèse d'une croissance du PIB de 1% par an

(% moyen annuel)

Allemagne

Espagne

France

Italie

Pays-Bas

Royaume-Uni

Etats-Unis

Taux de croissance

2,0%

2,7%

2,5%

0,9%

1,4%

1,1%

2,0%

Dont effet :

PIB par tête

0,8%

0,7%

0,5%

0,7%

0,4%

0,6%

0,1%

croissance de la population

0,1%

0,2%

0,4%

0,1%

0,6%

0,3%

0,9%

vieillissement

0,8%

0,7%

0,6%

0,5%

0,4%

0,3%

0,4%

prix relatifs

-0,3%

0,3%

0,3%

-0,2%

-0,4%

-1,4%

-1,3%

« progrès technique »

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1%

« facteurs  institutionnels »

-0,4%

0,9%

0,7%

-1,8%

-0,6%

0,2%

0,9%

écart statistique

0,0%

-1,0%

-1,0%

0,5%

0,0%

0,0%

0,0%

Lecture du tableau : d'après le modèle et les hypothèses, sur une période de moyen terme (5 ans), la croissance des dépenses de santé en volume serait de 1,95% par an en Allemagne. La croissance du PIB par tête contribue pour 0,9% à cette hausse et les facteurs démographiques contribuent à hauteur de 0,89%, essentiellement par l'effet vieillissement. La croissance plus rapide des prix de la santé par rapport à ceux du PIB limite la croissance en volume pour 0,3%. Enfin, on ne suppose pas d'écart entre les valeurs prévues et le modèle.

Tableau 12 : Evolution des dépenses de santé en volume sous l'hypothèse d'une croissance du PIB de 3% par an

(% moyen annuel)

Allemagne

Espagne

France

Italie

Pays-Bas

Royaume-Uni

Etats-Unis

Taux de croissance

3,6%

4,5%

4,26%

2,66%

3,1%

2,81%

3,73%

Dont effet :

PIB par tête

2,5%

2,4%

2,2%

2,5%

2,1%

2,3%

1,8%

croissance de la population

0,1%

0,2%

0,4%

0,1%

0,6%

0,3%

0,9%

vieillissement

0,8%

0,7%

0,6%

0,5%

0,4%

0,3%

0,4%

prix relatifs

-0,3%

0,3%

0,3%

-0,2%

-0,4%

-1,4%

-1,3%

« progrès technique »

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1,0%

1%

« facteurs  institutionnels »

-0,4%

0,9%

0,7%

-1,8%

-0,6%

0,2%

0,9%

écart statistique

0,0%

-1,0%

-1,0%

0,5%

0,0%

0,0%

0,0%

La décomposition de la croissance des dépenses est illustrée par le graphique 7 pour un taux de croissance du PIB de 1% par an. On retrouve les différences de partage prix-volume décrits dans la première partie : aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, la dérive des prix relatifs des biens de la santé par rapport au prix du PIB est forte. En France et en Espagne, cet effet prix relatifs est très faible mais la croissance des volumes est par contre plus importante. Par ailleurs, on observe que le système du remboursement (France, Etats-Unis) entraîne une hausse tendancielle des dépenses plus forte que les autres systèmes (contrat, intégré).

* 41 Ce dernier résultat est en retrait par rapport à Bac et Cornilleau (2002), qui obtiennent une élasticité au PIB par tête de 0,98. Cette différence peut résulter de la modification de la base de données utilisée pour l'estimation. La base Eco-santé 2003 comprend des points plus récents, mais certaines séries ont été révisées et ne sont plus disponibles. Pour la France, nous avons reconstitué une série à partir des données disponibles des comptes de la santé. En revanche, pour l'Italie, les données maintenant disponibles débutent seulement en 1988. Cette explication vaut aussi pour les tendances temporelles qui reflètent les caractéristiques des différents pays. La tendance pour l'Italie est négative. En revanche la tendance élevée pour l'Espagne peut être attribuée au manque de données sur la fin de la période. En effet, pour ce pays, le dernier point disponible date de 1996. Il est raisonnable de penser que la fin de la période de rattrapage ainsi que les réformes mises en oeuvre ont infléchi cette tendance.

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