EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 9 novembre 2004, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission des finances a procédé à l'examen des crédits de la communication audiovisuelle et de l'article 62 rattaché , sur le rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial .

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a tout d'abord relevé que le projet de loi de finances pour 2005 proposait une augmentation de 2,4 % des ressources publiques du secteur audiovisuel liées à la redevance, soit un rythme de progression analogue à celui prévu en loi de finances initiale pour 2004. Il a cependant observé que ce maintien des moyens intervenait dans le contexte de mutations importantes du secteur audiovisuel, s'agissant des choix techniques (et en particulier de la norme de diffusion de la télévision numérique terrestre, TNT), et de progression continue des abonnements au câble et au satellite, lesquels concernaient déjà un tiers des Français.

Ainsi, il a souligné que la télévision haut débit pourrait être reçue, à court terme, par le même canal que le téléphone et Internet, à un prix d'abonnement, en phase de lancement, fortement incitatif qui pourrait donc ne pas couvrir le coût réel de l'ensemble des prestations ainsi offertes aux abonnés. Sur ce point, il a estimé qu'il convenait de prévoir le lancement de la TNT en norme MPEG 4. Il a cependant observé que plusieurs questions n'étaient pas résolues, en particulier celle des adaptateurs que les Français devraient acquérir pour avoir accès à la TNT, ainsi que les difficultés pouvant résulter d'une situation où coexisteraient une diffusion en mode analogique et une diffusion numérique. S'agissant des normes, il a effectué une comparaison avec les débats qui avaient animé les milieux aéronautiques lors du choix opéré entre le turboréacteur, finalement retenu, et le turbopropulseur, pour illustrer les risques que comporterait le choix d'une norme inadaptée.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a ensuite souhaité apporter des précisions sur la nature et le montant de la redevance audiovisuelle. Il a rappelé que la détention d'un ordinateur, même si celui-ci permettait la réception de la télévision, n'entrait pas dans le champ d'assujettissement à la redevance audiovisuelle. Il a souligné les conséquences, dans un délai de deux à trois ans, de l'éclatement du paysage audiovisuel. D'une part, la démultiplication des modes de réception de la télévision entraînerait un émiettement des résultats d'audience des différentes chaînes, dans la mesure où les internautes, par exemple, ne regarderaient pas les seules chaînes hertziennes. D'autre part, la seule augmentation du nombre de chaînes accessibles par le câble, le satellite ou par ADSL conduirait à une diminution des scores d'audience des principales chaînes. D'un point de vue économique, il a observé que la baisse du nombre de téléspectateurs des chaînes hertziennes se traduirait par une diminution du coût des écrans publicitaires sur ces chaînes, et qu'elles seraient ainsi conduites à mettre l'accent sur la production et la vente de programmes, notamment aux autres chaînes, cette activité étant donc appelée à prendre une place croissante parmi leurs sources de financement.

Malgré ces bouleversements prévisibles à court terme, il a déploré que le montant de la redevance audiovisuelle en France n'atteigne toujours que les deux tiers de la moyenne européenne. Il a observé que l'arrondissement du montant de la redevance audiovisuelle de 116,50 euros à 116 euros, à laquelle il était procédé dans le projet de loi de finances pour 2005, représentait un différentiel de 22 millions d'euros par rapport à un ajustement à 117 euros. Il a souligné que, en concertation avec M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis des crédits des médias au nom de la commission des affaires culturelles, il entendait déposer un amendement en ce sens, en prenant en compte les différences de situations et de besoins entre les organismes de l'audiovisuel public. A cet égard, il a fait part de sa surprise quant à l'augmentation en 2003 de 28 % des dix plus hautes rémunérations à France 2, et de 12 % pour les cinquante plus hautes rémunérations, malgré les efforts de rigueur budgétaire que devait conduire France 2.

Concernant les résultats d'audience, il a relevé les évolutions favorables de France 5 et de Arte, ceux relativement satisfaisants de France 2 et le recul de l'audience de France 3, entre septembre 2003 et juin 2004, alors que sur la même période TF1 et M6 enregistraient des résultats quasi-stables.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , s'est félicité que le projet de loi de finances pour 2005 permette d'apporter des solutions concernant la conservation du patrimoine audiovisuel de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) d'une part, les travaux de rénovation et de mise aux normes de sécurité de la Maison de la Radio de Radio France, d'autre part. Il a observé que, sans les dotations supplémentaires affectées à ces opérations, les moyens accordés à Radio France n'augmentaient que de 1,3 % dans le projet de loi de finances pour 2005, alors que la progression moyenne pour les sociétés de l'audiovisuel public s'établissait à 2,4 %, malgré la qualité reconnue des programmes de certaines des stations de Radio France, telles que France Culture.

Il a ensuite présenté les enjeux résultant de la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Il a estimé que les objectifs et les indicateurs assignés aux organismes de l'audiovisuel public pouvaient encore être clarifiés, s'agissant notamment de la maîtrise des charges de personnel et de la diversité de la programmation. Il s'est toutefois interrogé sur les marges de manoeuvre dont disposerait le Parlement, dans la mesure où la redevance audiovisuelle était une taxe affectée.

Il a enfin souhaité insister sur la situation budgétaire de Radio France Internationale (RFI) et le projet de chaîne française d'information internationale. Il a, tout d'abord, déploré le décalage entre les difficultés de la mission exercée par RFI et la faible progression de ses moyens, lesquels étaient majoritairement issus d'une dotation du ministère des affaires étrangères dont la progression de 1 % s'avérait, à nouveau, nettement inférieure à celle de la redevance audiovisuelle (2,4 %). Concernant, d'autre part, la chaîne française d'information internationale, laquelle correspondait à une nécessité « pour faire entendre la voix de la France dans un monde multipolaire », il a vivement regretté l'absence de dotations budgétaires dans le projet de loi de finances pour 2005.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Jean Arthuis, président , a remercié M. Claude Belot, rapporteur spécial, pour la qualité de son exposé, et rappelé que l'article 24 du projet de loi de finances pour 2005 proposait de réformer la redevance audiovisuelle, en adossant son recouvrement à celui de la taxe d'habitation et en prévoyant le paiement d'une seule redevance audiovisuelle par foyer fiscal, quel que soit le nombre d'appareils détenus et le nombre de résidences. Il a jugé favorablement cette simplification et rappelé que l'examen par la commission des dispositions de l'article 24 du projet de loi de finances pour 2005 interviendrait le mercredi 17 novembre 2004, avec le reste des articles de la première partie.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a relevé, pour sa part, la nécessité d'une clarification entre la redevance audiovisuelle, laquelle présentait un caractère national, et la taxe d'habitation, qui était un impôt local. En outre, il a observé qu'il faudrait maintenir un contrôle relativement lourd du fait générateur de la redevance audiovisuelle, en estimant qu'un progrès substantiel avait déjà été effectué lorsque, à l'initiative du Sénat, l'utilisation du fichier de la taxe d'habitation avait été rendue possible pour lutter contre la fraude à la redevance audiovisuelle. Il a également noté que l'exonération des résidences secondaires se traduisait par des pertes de ressources au titre de la redevance audiovisuelle.

En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , sur les conséquences à tirer d'une éventuelle insuffisance des ressources inscrites au compte d'avances aux organismes de l'audiovisuel public, financé par la redevance audiovisuelle, M. Claude Belot, rapporteur spécial , a répondu que, suite à un amendement de l'Assemblée nationale à l'article 36 du projet de loi de finances pour 2005, il avait été prévu que, si le montant de recettes au compte d'avances prévu en loi de finances initiale n'était pas atteint, l'Etat s'engagerait à compenser la différence.

S'agissant du montant de ladite redevance, il a confirmé son intention de déposer un amendement portant le montant de la redevance audiovisuelle à 117 euros, alors que celui-ci était resté inchangé à 116,50 euros depuis le 1 er janvier 2002, et ne s'élevait à 116 euros dans le projet de loi de finances pour 2005 que pour les raisons liées « à l'arrondi », qu'il avait précédemment évoquées. Les ressources supplémentaires pourraient ainsi être affectées à RFI, Radio France et l'INA.

M. Philippe Adnot a fait référence à sa propre expérience pour souligner que la frontière entre la télévision et Internet devenait de plus en plus poreuse, tout en estimant que l'ensemble du territoire national devrait avoir accès à la télévision par ADSL. Il a proposé d'étudier une réforme du montant de la redevance en fonction du mode d'accès à la télévision et du niveau de débit.

M. Maurice Blin a fait référence aux rivalités traditionnelles entre TF1 et France 2 pour s'interroger sur la persistance, ou non, de ces oppositions et les revendications du personnel qu'elles pouvaient générer.

M. Claude Belot, rapporteur spécial , a déclaré qu'il partageait la vision de M. Philippe Adnot concernant les évolutions technologiques de l'audiovisuel. Il a précisé que l'ensemble du territoire national aurait bien accès à la télévision à haut débit, et qu'il n'y avait donc pas de risque de fracture numérique, même si les modes d'accès à la télévision haut débit ne seraient pas identiques dans les zones urbaines et rurales.

Concernant l'impact de la concurrence du secteur privé sur la programmation et les ressources de l'audiovisuel public, il a rappelé que le dynamisme du marché publicitaire permettait à TF1 de disposer d'un rythme de progression de ses ressources très supérieur à celui de France 2 et France 3. Il a, par ailleurs, relevé que France 3 serait confrontée à l'essor des télévisions locales, malgré le retard pris par la France en ce domaine et la nécessité de définir les acteurs qui impulseraient le développement de la télévision de proximité, qu'il s'agisse de la presse quotidienne régionale ou des collectivités territoriales.

Après avoir pris acte de l' avis favorable donné par M. Claude Belot, rapporteur spécial , à l'adoption des crédits de la communication audiovisuelle et de l'article 62 rattaché, la commission a alors décidé de réserver sa position sur ce budget jusqu'à l'adoption des crédits des services généraux du Premier ministre , prévue pour le mardi 23 novembre 2004, et sur l'article 62 rattaché , jusqu'à l'examen définitif du budget prévu pour le jeudi 25 novembre 2004 au matin.

Réunie le mardi 23 novembre 2004 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la communication audiovisuelle pour 2005 à l'occasion de l'adoption de l'ensemble des crédits des services généraux du Premier ministre .

Réunie le jeudi 25 novembre 2004 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale et elle a adopté les articles 62, 73 bis , 73 ter et 73 quater rattachés .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page