II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE LA CONVENTION

A. L'HISTORIQUE DE LA CONVENTION FRANCO-AZERBAÏDJANAISE

La convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République azerbaïdjanaise, signée à Paris le 20 décembre 2001, et dont le présent projet de loi nous propose l'approbation, est destinée à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Ce texte vient combler un vide juridique potentiel, l'Azerbaïdjan ayant refusé, en mai 1997, de signer un échange de lettres portant sur le maintien de l'applicabilité de la convention fiscale franco-soviétique du 4 octobre 1985 dans le cadre des relations franco-azerbaïdjanaises.

Des négociations se sont engagées en mai 1998 et ont abouti au paraphe d'un projet d'accord en juillet 1998, à l'issue de deux tours de négociation. Néanmoins, avant de pouvoir envisager une signature, il a été nécessaire de résoudre un désaccord portant notamment sur la définition du territoire de l'Azerbaïdjan et de dissiper les discordances de traduction entre les textes en langue française et azerbaïdjanaise de l'accord. La signature est finalement intervenue le 20 décembre 2001.

La convention a été ratifiée par le Parlement azerbaïdjanais le 19 février 2002.

B. UNE CONVENTION GLOBALEMENT CONFORME AU MODÈLE DE L'OCDE

Le texte de la convention est conforme, dans ses grandes lignes, au modèle de convention de l'OCDE, et comporte les aménagements habituellement retenus dans les conventions fiscales conclues par la France.

Selon le ministère des affaires étrangères, la France a obtenu de nombreuses concessions de la partie azerbaïdjanaise par rapport aux demandes initiales de celle-ci.

Ainsi, des précisions ont été introduites dans le projet de convention en ce qui concerne l'imposition des revenus immobiliers, l'imposition des plus-values de cession de parts ou autres droits dans des sociétés à prépondérance immobilière et l'imposition de la fortune, afin que la convention ne fasse pas obstacle à l'application de la législation fiscale française en la matière.

1. Définitions

La définition du terme « personne » ( article 3 ) comprend, à la demande de l'Azerbaïdjan, les entités transparentes (« partnerships ») et les entreprises communes (« joint-ventures »), constituées conformément à la loi azerbaïdjanaise et traitées comme des personnes imposables selon la loi de cet Etat. Cette demande de l'Azerbaïdjan a été acceptée par la France, dès lors que l'Azerbaïdjan avait donné son accord sur la clause proposée par la France relative aux sociétés de personnes françaises (cf. paragraphe 4 de l'article 4).

S'agissant de la « résidence » ( article 4 ), l'Azerbaïdjan a demandé que soit inclus dans la définition le critère du lieu de constitution des sociétés, sa législation interne ne distinguant pas entre les sociétés résidentes et les sociétés non résidentes. Pour la France, la notion de résidence a été étendue aux sociétés de personnes.

Les règles de définition de l'« établissement stable » ( article 5 ) ont fait l'objet d'un accord global après acceptation de plusieurs demandes azerbaïdjanaises. Ces règles sont, en grande partie, tirées des principes posés par le modèle de convention fiscale de l'ONU et figurent pour la plupart dans les conventions conclues par la France avec les autres Etats de la zone.

Ainsi, une installation ou une structure utilisée pour l'exploration de ressources naturelles sera constitutive d'un établissement stable, et donc imposable dans l'Etat où elle se situe, si sa durée dépasse six mois. La fourniture de services par une entreprise d'un Etat contractant est également constitutive d'un établissement stable dans l'autre Etat, lorsque ces activités se poursuivent sur le territoire de cet Etat pendant plus de six mois au cours d'une période de douze mois.

Par ailleurs, la partie azerbaïdjanaise souhaitait faire référence à sa législation interne pour déterminer la déductibilité des charges d'un établissement stable. Cette demande risquait de limiter fortement les possibilités de déduction des frais de siège du bénéfice des établissements stables de sociétés françaises. La partie française a obtenu la déductibilité des charges, en conformité avec les principes conventionnels de détermination du bénéfice des entreprises.

2. Revenus immobiliers

L'article 6 se rapporte aux revenus immobiliers. Ces revenus font l'objet d'une imposition dans l'Etat où les biens sont situés, conformément au modèle OCDE. Toutefois, une disposition précise que les parts ou actions conférant à leur détenteur la jouissance de biens immobiliers situés dans un Etat contractant sont imposables dans cet Etat. Cette précision permet à la France d'appliquer sa législation fiscale afférente aux revenus des sociétés immobilières.

3. Bénéfices des entreprises

L'article 7 fixe les règles d'attribution et de détermination des bénéfices industriels et commerciaux des entreprises. Ces règles sont conformes au modèle de l'OCDE. Toutefois, en ce qui concerne la détermination des bénéfices imputables aux établissements stables, la convention ne permet pas la déduction des dépenses qui ne seraient pas déductibles si l'établissement stable constituait une entreprise séparée.

4. Dividendes

En ce qui concerne les dividendes, qui font l'objet de l'article 10 , le taux de retenue à la source prévu par le projet de convention est de 10 %, quelle que soit la qualité du bénéficiaire effectif. Ce taux est plus élevé que celui qui est préconisé par le modèle de convention de l'OCDE (limité à 5 % lorsque le bénéficiaire des dividendes est une société de capitaux détenant au moins 25 % du capital de la société qui paie les dividendes).

Comparé à celui des clauses obtenues par la France avec la plupart des Etats de la région (taux réduit à 5 % dans les conventions avec l'Arménie, le Kazakhstan, l'Ouzbékistan et l'Ukraine en cas de détention d'au moins 10 % du capital), le taux est moins favorable. Cependant, cette clause est meilleure que celles qui figurent dans les conventions signées par l'Azerbaïdjan avec le Royaume-Uni et la Norvège, qui prévoient un taux de droit commun de 15 %, le taux réduit fixé à 10 % ne s'appliquant que si des conditions de participation et d'investissement direct sont remplies (Royaume-Uni : 30 % de participation ou 500.000 dollars d'investissement ; Norvège : 30 % de participation et 500.000 dollars d'investissement).

5. Intérêts

L'article 11 traite des intérêts. A l'instar du modèle de l'OCDE, le taux de retenue à la source applicable aux intérêts est fixé à 10 %. La France a, par ailleurs, pu obtenir l'exonération des intérêts versés à raison des prêts garantis par la COFACE ainsi que l'exonération des intérêts relatifs à des ventes à crédit dans la limite des taux pratiqués dans l'Etat dans lequel le crédit a été accordé. Cette clause se situe dans la moyenne par rapport aux autres conventions conclues avec des Etats de la région (elle est moins favorable que l'Arménie et l'Ouzbékistan, mais plus favorable que le Kazakhstan et l'Ukraine). Elle est également plus favorable que celle obtenue pour les autres Etats de l'OCDE qui ont conclu une convention avec l'Azerbaïdjan (Royaume-Uni, Norvège).

Ces dispositions sont donc plutôt favorables aux investisseurs français. Par ailleurs, on notera qu'une disposition du paragraphe 8 de l'article 11 est destinée à prévenir les utilisations abusives des avantages conventionnels.

6. Redevances

A la différence du modèle de l'OCDE qui préconise l'imposition exclusive des redevances dans l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif, l'article 12 relatif aux redevances prévoit un taux de retenue à la source applicable à cette catégorie de revenus de 5 % pour les paiements afférents à des droits d'auteur en matière littéraire ou artistique et de 10 % pour les autres redevances. Ces taux sont comparables à ceux obtenus par la France dans les conventions avec l'Arménie, le Kazakhstan et l'Ukraine, et à ceux obtenus par le Royaume-Uni et la Norvège.

A l'instar de l'article 11 afférent aux intérêts, l'article 12 contient également une disposition destinée à prévenir les utilisations abusives des avantages conventionnels.

7. Gains en capital

L'article 13 , concernant les gains en capital, s'écarte du modèle de l'OCDE par une disposition qui permet à la France d'appliquer sa législation pour l'imposition des plus-values provenant de l'aliénation d'actions, parts ou droits dans des entités à prépondérance immobilière.

8. Professions indépendantes

L'article 14 reprend les principes du modèle de l'ONU. A la différence de celui de l'OCDE, cet article accorde ainsi la possibilité à l'Azerbaïdjan d'imposer les revenus d'un résident de France exerçant une profession libérale, ou d'autres activités de caractère indépendant, en cas de présence sur son territoire supérieure à 183 jours au cours d'une période de 12 mois, et ce, même en l'absence de base fixe.

9. Autres revenus

L'article 21 règle l'imposition des revenus non expressément visés dans les autres articles de la convention. La France a obtenu la taxation exclusive dans le pays de résidence des revenus non spécifiquement visés par la convention. La partie française s'est opposée sur ce point à la proposition azerbaïdjanaise de taxation de ces revenus dans l'Etat de la source, inspirée de la pratique des pays en voie de développement et préconisée par le modèle de l'ONU.

Contraire aux principes du modèle de l'OCDE, une disposition de cette nature aurait été défavorable aux intérêts de la France.

10. Elimination des doubles impositions

Les modalités d'élimination des doubles impositions sont précisées par l'article 23 . Alors que le modèle OCDE laisse le choix aux Etats entre la méthode du crédit d'impôt et celle de l'exemption, la France opte, dans les conventions fiscales qu'elle conclue avec ses partenaires, pour un dispositif mixte, combinant les deux méthodes d'élimination de la double imposition.

En ce qui concerne les revenus des sociétés, le texte prévoit l'exonération en France des revenus imposables en Azerbaïdjan, dès lors que ces revenus sont exemptés d'impôt sur les sociétés en application de la législation fiscale française.

Pour les autres revenus, la méthode retenue pour l'élimination de la double imposition est celle de l'imputation de l'impôt étranger sous la forme d'un crédit d'impôt.

Le crédit d'impôt accordé par la France est calculé de manière différente, selon les revenus en cause.

Par ailleurs, la rédaction du paragraphe 1 a) de l'article 23 de la convention permet à la France d'appliquer sa législation interne en matière de lutte contre l'évasion fiscale, notamment l'article 209 B du code général des impôts. Ce dispositif a été explicité à la partie azerbaïdjanaise et accepté par celle-ci.

Les autres dispositions de la convention sont classiques et n'appellent pas de commentaires particuliers.

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