Rapport n° 309 (2004-2005) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 27 avril 2005

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N° 309

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 14 avril 2005

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 avril 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, portant diverses dispositions d' adaptation au droit communautaire dans le domaine des marchés financiers ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM.Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Voir le numéro :

Sénat : 267 (2004-2005)

Union européenne.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Le présent projet de loi prévoit de transposer les conséquences législatives du dispositif communautaire relatif à l'abus de marché, et d'habiliter le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives de transposition de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil concernant les marchés d'instruments financiers.

Cette législation communautaire présente de nombreux aspects très techniques, mais emporte des conséquences importantes et concrètes sur l'environnement des professionnels des marchés financiers , s'agissant par exemple de la définition et des modes de répression de certaines infractions boursières, et de l'organisation des marchés eux-mêmes, qui ne reposera plus sur le primat de la concentration des ordres sur des marchés réglementés.

Une large part des dispositions du règlement et des quatre directives communautaires relatifs à l'abus de marché, à caractère réglementaire, a déjà été transposée dans le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Il convient donc de détailler préalablement le dispositif communautaire et les mesures de transposition déjà insérées dans notre droit, et de rappeler les justifications et les principales modalités de la répression de l'abus de marché. Il s'agira également d'exposer les principales orientations de la directive 2004/39/CE, précitée, qui est la plus ambitieuse du Plan d'action communautaire pour les services financiers.

La date limite de transposition par les Etats membres des cinq textes communautaires relatifs à l'abus de marché a été fixée au 12 octobre 2004 . La France s'illustre donc une nouvelle fois par un retard de transposition, alors que l'Allemagne et le Royaume-Uni ont d'ores et déjà incorporé le dispositif « abus de marché » dans leur droit interne.

Le délai de transposition de la directive 2004/39/CE concernant les marchés d'instruments financiers, initialement fixé au 30 avril 2006, a été reporté au 31 octobre 2006 . Cette transposition demeure toutefois tributaire de l'adoption de textes communautaires d'application, encore en cours d'élaboration dans le cadre du « processus Lamfalussy » (cf. infra ), ce qui contribue à expliquer le recours du gouvernement, par l'article 5 du présent projet de loi, à une habilitation par ordonnance.

I. L'ABUS DE MARCHÉ, UNE NOTION GÉNÉRIQUE SOUMISE À UNE DOUBLE RÉPRESSION

A. LES JUSTIFICATIONS ÉCONOMIQUES DE LA RÉPRESSION DE L'ABUS DE MARCHÉ

L'abus de marché ne constitue pas une infraction sanctionnée en tant que telle, mais recouvre plusieurs types de comportements délictueux. La nouvelle législation communautaire vise ainsi le délit d'initié et la manipulation de marché . Aux termes de la directive « abus de marché » 2003/6/CE du 28 janvier 2003, cette dernière infraction concerne deux types de comportements que la qualification administrative des manquements boursiers (cf. infra ) tend à distinguer : la diffusion de fausses informations et la manipulation de cours.

La nécessité d'identifier et de réprimer les infractions de marché, et plus particulièrement les délits d'initié, tient moins à leur caractère immoral, qui n'est de surcroît pas dénué d'ambiguïté puisqu'elles suscitent tant l'indignation que la convoitise, qu'au fait qu'elles portent atteinte à l'égalité d'accès des investisseurs à l'information financière , laquelle peut être assimilée à un bien public en ce qu'elle est consubstantielle de l'organisation des marchés boursiers, comme au fonctionnement même de ces marchés . Ainsi que le souligne la convention du Conseil de l'Europe du 20 avril 1989 sur les opérations financières des « initiés », ce type de délit, qui constitue l'une des principales infractions, « compromet (...) l'égalité de chances entre investisseurs et la crédibilité du marché », d'autant qu'il n'est en général pas possible d'identifier clairement une ou des victimes qui se porteraient partie(s) civile(s). La victime de l'abus de marché est l'investisseur au sens large, et ces infractions sapent la confiance , élément déterminant de la liquidité et du développement des marchés financiers.

Au-delà de leur impact psychologique sur les intervenants, le délit d'initié et la manipulation de cours faussent les règles du marché et peuvent affecter le cours des titres sur lesquels portent les opérations. La théorie économique et financière classique, qui repose sur le postulat d'efficience à court ou moyen terme des marchés dès lors que le prix des actifs négociés reflète intégralement l'information disponible 1 ( * ) , conduit à analyser ces infractions comme des facteurs d'asymétrie informationnelle, de distorsion de l'efficience de la distribution des richesses et du couple rendement/risque 2 ( * ) , de captation du profit par une catégorie d' « insiders », susceptibles in fine d'affecter la formation du cours de l'actif par rapport à celui qui serait résulté d'un fonctionnement « normal » du marché. La « sous-information » de certains agents incite, en outre, ces derniers à anticiper les évolutions de cours selon des critères subjectifs, et les conduit à des comportements irrationnels et moutonniers , facteurs de bulle spéculative.

La nature immatérielle et la rapidité de circulation de cet élément essentiel qu'est l'information contribuent donc à accroître la gravité potentielle d'un abus de marché, qui est non seulement de nature à créer un profit individuel illicite, mais crée en outre un préjudice général et « contagieux ».

B. LE DOUBLE RÉGIME RÉPRESSIF DES INFRACTIONS BOURSIÈRES

1. L'originalité de la double répression administrative et pénale

Compte tenu de l'impact des abus de marché, leur répression poursuit autant un objectif de protection de l'activité boursière que des acteurs, de l'investissement et de l'épargne que des investisseurs eux-mêmes. Or l'autorité de régulation des marchés (la Commission des opérations de bourse - COB - et le Conseil des marchés financiers - CMF - jusqu'à novembre 2003, l'Autorité des marchés financiers - AMF - depuis) a pour principale mission de veiller à la transparence des marchés et à la protection des épargnants. La loi n° 89-531 du 2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, intervenue en particulier à la suite de l'affaire Pechiney c/ Triangle qui avait révélé la difficulté de poursuivre pénalement les auteurs de certains délits, a ainsi doublé la répression pénale de certaines infractions boursières d'une répression administrative par la COB en cas de manquements à ses propres règlements. Ces sanctions administratives ont été modernisées par la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière, et sont désormais codifiées à l'article L. 621-15 du code monétaire et financier.

Sur trois terrains , de mêmes faits peuvent donc être sanctionnés à la fois administrativement par l'AMF et pénalement par le juge judiciaire, et sont qualifiés de manquement dans le premier cas, de délit dans le second : le délit ou manquement d'initié, le délit ou manquement de manipulation de cours, et le délit ou manquement de diffusion de fausses informations . Ces incriminations sont proches, mais pas identiques pour autant.

L'entorse ainsi créée à la règle non bis in idem (cf. infra II. 3.) peut susciter des critiques légitimes et l'incompréhension de certains de nos partenaires internationaux, mais est admise par la jurisprudence et le droit communautaire. Elle demeure en outre extrêmement rare dans la pratique, puisqu'on n'a guère recensé entre 1990 et 2002 que quatre cas de cumul de poursuites sur les mêmes fondements.

2. Les sanctions administratives en cas de manquement

Les manquements ont été définis depuis 1989 par plusieurs règlements de la COB 3 ( * ) , en partie actualisés par le règlement général de l'AMF du 24 novembre 2004 (cf. infra ). Le I de l'article L. 621-14 du code monétaire et financier prévoit, en termes assez extensifs, que le collège de l'AMF peut, après avoir entendu les explications de la personne concernée, ordonner qu'il soit mis fin aux pratiques contraires aux dispositions législatives ou réglementaires, lorsque « ces pratiques sont de nature à porter atteinte aux droits des épargnants ou ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché , de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l'égalité d'information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ».

L'article L. 621-15 du code monétaire et financier, précité, prévoit des sanctions disciplinaires et pécuniaires en cas de manquement.

Les sanctions disciplinaires appliquées aux personnes morales soumises au contrôle de l'AMF 4 ( * ) peuvent être le blâme ou l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des services fournis. Pour les personnes physiques, ces sanctions sont l'avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, ou l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des activités.

La commission des sanctions de l'AMF peut prononcer, à la place, ou en sus de ces sanctions disciplinaires, une sanction pécuniaire . Pour les personnes morales, le montant de cette sanction est plafonné à 1,5 million d'euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés. Pour les personnes physiques, ce plafond est de 300.000 euros ou du quintuple du montant des profits éventuellement réalisés, mais est relevé au niveau prévu pour les personnes morales lorsque le manquement relève d'une des pratiques mentionnées au I de l'article L. 621-14, précité. Ces sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l'autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public.

L'échelle des sanctions en fonction des infractions n'est pas précisée , mais l'article L. 621-15, précité, tend à faire respecter un principe de proportionnalité en précisant que « le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements ».

3. Le régime pénal des quatre infractions constitutives d'une atteinte à la transparence des marchés

Le régime pénal des infractions constitutives d'une atteinte à la transparence des marchés est prévu par les articles L. 465-1 à L. 465-3 du code monétaire et financier , et a été modifié par la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, puis par l'article 33 de la loi n° 2001 1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne. Quatre délits , dans lesquels la notion d'« information privilégiée » est centrale, sont ainsi pénalement réprimés : le délit d'initié, la communication d'informations privilégiées, la diffusion d'informations fausses ou trompeuses et la manipulation de cours.

a) La définition des délits et les sanctions applicables aux personnes physiques

Le délit d'initié , qui a été introduit en 1967, ne figure pas sous cette dénomination dans la législation, mais est défini par le premier alinéa de l'article L. 465-1 du code précité comme « le fait, pour les dirigeants d'une société mentionnée à l'article L. 225-109 du code de commerce, et pour les personnes disposant, à l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leurs fonctions, d'informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de réaliser ou de permettre de réaliser, soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces informations ». Ce n'est donc pas le fait d'être initié, c'est-à-dire détenteur d'informations privilégiées, qui est en soi poursuivi , mais l'utilisation précoce et illicite d'informations qui permettent d'acquérir cette qualité.

Les sanctions encourues sont une peine de deux ans d'emprisonnement et une amende semblable à celle prévue par le régime de répression administrative, soit 1.500.000 euros, et dont le montant peut être porté au-delà de ce chiffre, jusqu'au décuple du montant du profit éventuellement réalisé, sans que l'amende puisse être inférieure à ce même profit.

Le troisième alinéa du même article étend la qualification du délit d'initié à toute autre personne que celles mentionnées dans le premier alinéa, qui possède « en connaissance de cause des informations privilégiées », et réalise ou permet de réaliser directement ou indirectement une opération, ou communique à un tiers ces informations, avant que le public en ait connaissance. Lorsque les informations en cause concernent la commission d'un crime ou d'un délit, les peines encourues sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 1.500.000 euros si le montant des profits réalisés est inférieur à ce chiffre.

Le délit de communication d'informations privilégiées est défini par le deuxième alinéa de l'article L. 465-1 précité, comme « le fait, pour toute personne disposant dans l'exercice de sa profession ou de ses fonctions d'une information privilégiée sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de la communiquer à un tiers en dehors du cadre normal de sa profession ou de ses fonctions ». Ce délit est puni d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 150.000 euros.

Le dernier alinéa de l'article L. 465-1 punit des mêmes peines que celles prévues pour le délit d'initié le délit de communication d'informations fausses ou trompeuses , c'est-à-dire « le fait, pour toute personne, de répandre dans le public par des voies et moyens quelconques des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de nature à agir sur les cours ».

Depuis la loi de sécurité quotidienne précitée, l'article 421-1 du code pénal qualifie d' « actes de terrorisme » l'ensemble des délits prévus à l'article L. 465-1 du code monétaire et financier, ce qui tend à conforter la perception de la gravité de ces infractions.

Enfin l'article L. 465-2 du même code définit le délit de manipulation de cours , comme « le fait, pour toute personne, d'exercer ou de tenter d'exercer, directement ou par personne interposée, une manoeuvre ayant pour objet d'entraver le fonctionnement régulier d'un marché d'instruments financiers en induisant autrui en erreur ». Les peines applicables sont identiques à celles du délit d'initié. Cette infraction entretient des liens étroits avec la diffusion de fausses informations et poursuit un objet identique de spéculation illicite, mais à la différence de celle-ci, elle suppose une intervention directe sur le marché.

Le régime de sanction pénale applicable aux personnes physiques est résumé dans le tableau suivant :

Synthèse du régime pénal des quatre délits portant atteinte à la transparence des marchés financiers

Délit d'initié

Communication d'informations privilégiées

Information fausse ou trompeuse

Manipulation de cours

Références

Article L. 465-1 du code monétaire et financier, alinéas 1 et 3

Article L. 465-1 du code monétaire et financier, alinéa 2

Article L. 465-1 du code monétaire et financier, alinéa 4

Article L. 465-2 du code monétaire et financier

Acteurs

Distinction entre les initiés primaires (présomption, pour les dirigeants et mandataires sociaux) et secondaires (relations professionnelles ou d'affaires, pas de présomption).

Obligations d'abstention et de discrétion imposées aux personnes initiées.

Initiés transmettant des informations à des non initiés directs. La difficulté réside dans la détermination du caractère normal ou non de la communication

Toute personne. Il s'agit du « négatif » de la communication d'informations privilégiées, car il ne s'agit pas de faire usage d'une information exacte mais confidentielle, mais de répandre des nouvelles inexactes afin d'influer sur le cours d'un titre

Toute personne qui exerce ou tente d'exercer, directement ou par personne interposée, une manoeuvre induisant autrui en erreur et entravant le fonctionnement régulier d'un marché financier

Elément matériel

Information privilégiée ( ie . précise, particulière et déterminante), accomplissement d'actes illicites et antériorité. La nature de l'information fonde la qualification du délit, non les compétences des bénéficiaires 5 ( * )

La communication (et non l'utilisation) d'une information, quel que soit le moyen

La diffusion dans le public d'informations, par n'importe quel moyen, que le résultat ait été atteint ou non

Délit formel défini par son objet et non son effet. La « manoeuvre » se situe entre le dol et l'escroquerie et se traduit par des actions techniques sur le marché

Elément moral ou intentionnel

L'intention coupable peut résulter de la simple violation du secret auquel l'initié est tenu

Transmission volontaire d'informations que l'on sait privilégiées

Diffusion volontaire d'informations que l'initiateur, de mauvaise foi, sait fausses ou trompeuses

La « manoeuvre » révèle l'intention délictueuse. Dol général et dol spécial

Sanctions maximales

Deux ans de prison (sept en cas de délit aggravé) et 1.500.000 euros d'amende ou jusqu'au décuple des profits réalisés

Un an de prison et 150.000 euros d'amende

Deux ans de prison (sept en cas de délit aggravé) et 1.500.000 euros d'amende ou le décuple des profits réalisés

Deux ans de prison (sept en cas de délit aggravé) et 1.500.000 euros d'amende ou le décuple des profits réalisés

Source : Droit des marchés financiers, Hubert de Vauplane et Jean-Pierre Bornet, Editions Litec

b) Le régime de sanction des personnes morales

La loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières précitée, a étendu le champ d'application de ces délits aux personnes morales , dans la continuité de la réforme du code pénal de 1994. L'article L. 465-3 du code monétaire et financier prévoit ainsi que les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions précitées. Elles encourent alors une amende dont le montant est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques, selon les dispositions de l'article 131-38 du code pénal, et les peines prévues par l'article 131-39 du même code, telles que :

- la dissolution ;

- l'interdiction, à titre définitif ou provisoire (pour une durée de cinq ans au plus), d'exercer directement ou indirectement l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;

- le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;

- la fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

- l'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;

- l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de faire appel public à l'épargne ;

- l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés, ou d'utiliser des cartes de paiement.

II. LE NOUVEAU DISPOSITIF COMMUNAUTAIRE DE RÉPRESSION DE L'ABUS DE MARCHÉ

A. LE CARACTÈRE OBSOLÈTE DE LA DIRECTIVE DU 13 NOVEMBRE 1989 APPELAIT UNE RÉNOVATION DANS LE CADRE DU PLAN D'ACTION POUR LES SERVICES FINANCIERS

1. Une directive dédiée au seul délit d'initié

L'Union européenne, par la directive 89/592/CEE du Conseil du 13 novembre 1989 concernant la coordination des réglementations relatives aux opérations d'initiés , s'est dotée assez tardivement d'un cadre juridique tendant à harmoniser les modes de répression des abus de marché, à la fin d'une décennie marquée par des évolutions majeures de la structure des marchés financiers, particulièrement en France. La désintermédiation, la dématérialisation des titres, l'apparition de nouveaux compartiments boursiers et le plus grand recours des entreprises au financement par le marché, tendance qui s'est amplifiée au cours des années 90, ont ainsi accru les risques d'abus dans l'utilisation de l'information livrée aux marchés, qui constitue le principal déterminant de leur évolution.

La directive du 13 novembre 1989 se révélait toutefois assez succincte et incomplète , dans la mesure où elle ne traitait que le délit d'initié, défini indirectement par l'article 2 de la directive comme le fait, pour une personne détentrice d'une information privilégiée, « d'acquérir ou de céder pour compte propre ou pour compte d'autrui, soit directement soit indirectement, les valeurs mobilières de l'émetteur ou des émetteurs concernés par cette information, en exploitant en connaissance de cause cette information privilégiée ». L'information privilégiée était, quant à elle, définie par l'article premier comme « une information qui n'a pas été rendue publique, qui a un caractère précis et concerne un ou plusieurs émetteurs de valeurs mobilières, ou une ou plusieurs valeurs mobilières et qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d'influencer de façon sensible le cours de cette ou de ces valeurs mobilières ».

L'harmonisation de la seule approche du délit d'initié pouvait, dès lors, conduire les intermédiaires financiers à bénéficier d'une présomption de légitimité pour une opération qui, dans un autre Etat membre, aurait été qualifiée de manipulation de marché.

Cette directive présentait donc de réelles lacunes. Elle ne couvrait pas les manipulations de marché et en particulier la diffusion d'une fausse information sur le marché, infraction que l'on peut juger aussi grave que le délit d'initié et qui tend de surcroît à se cumuler avec ce dernier. Elle énonçait en outre des définitions trop générales des éléments constitutifs des infractions pour que l'on puisse considérer que l'objectif d'harmonisation soit véritablement atteint. Elle prévoyait enfin des obligations de régulation et de coopération qui étaient généralement déjà respectées par les Etats membres, telles que la désignation de la ou des autorités administratives investies des compétences et des pouvoirs de contrôle et d'enquête nécessaires pour assurer le respect des interdictions de communication d'information privilégiée posées par la directive (article 8), une obligation de secret professionnel de leurs agents (article 9), ou les modalités de coopération et d'échange d'informations entre les autorités nationales (article 10), sans préjudice des obligations incombant aux autorités dans le cadre de procédures judiciaires à caractère pénal 6 ( * ) .

2. Une étape importante du Plan d'action pour les services financiers

La Commission européenne a donc jugé nécessaire de compléter et d'unifier le cadre communautaire de la répression de l'ensemble des abus de marché, en partant du constat suivant : le caractère parcellaire et l'inadaptation de la directive du 13 novembre 1989 aux nouvelles pratiques de marché (notamment le rachat par les émetteurs de leurs propres actions), l'incertitude juridique née des disparités des règles des Etats membres traitant des manipulations de marché, le fait que les abus de marché soient source de distorsion de concurrence, contribuent à accroître les coûts de financement des entreprises, portent atteinte au fonctionnement des marchés et sapent la confiance des investisseurs, et la nécessité de confier à une seule autorité administrative , dans chaque Etat membre, la responsabilité d'assurer le contrôle et la répression des deux grandes catégories d'abus de marché. La législation communautaire n'a toutefois pas vocation à harmoniser le régime de la répression pénale , qui demeure propre à chaque Etat membre.

Cette rénovation participait donc de la construction d'un cadre harmonisé de la réglementation des services financiers, vecteur d'intégration du marché financier unique, qui constituait l'objectif du grand chantier juridique que fut le Plan d'action pour les services financiers (PASF), présenté par la Commission le 11 mai 1999.

Ce plan d'action s'est traduit par une intense activité législative sur la période 2000-2004, principalement consacrée aux activités de financement et d'intermédiation sur les marchés, dites activités de « front office », davantage qu'aux services financiers de détail, et dont les mesures les plus marquantes, outre le dispositif relatif à l'abus de marché, furent les suivantes :

- deux directives du 21 janvier 2002 relatives aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) 7 ( * ) ;

- la directive 2002/47/CE du 6 juin 2002 concernant les contrats de garantie financière. A l'initiative de votre rapporteur général, la transposition de cette directive a fait l'objet, dans la loi de simplification du droit n° 2004 1343 du 9 décembre 2004, d'une habilitation du gouvernement à procéder par ordonnance. Cette ordonnance a été publiée le 24 février 2005 8 ( * ) ;

- la directive 2002/65/CE du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs ;

- la directive 2003/71/CE du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d'offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l'admission de valeurs mobilières à la négociation ( directive « prospectus » ) ;

- diverses directives afférentes à la réglementation prudentielle du secteur bancaire. La transposition de la directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002, relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier, a ainsi fait l'objet d'une habilitation 9 ( * ) du gouvernement à procéder par ordonnance. Votre rapporteur général vous propose, par amendement portant article additionnel au présent projet de loi, de ratifier cette ordonnance de transposition , qui a été publiée le 12 novembre 2004 ;

- la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition ( directive « OPA » ) ;

- la directive 2004/39/CE du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers (cf. infra ), qui constitue sans doute l'innovation la plus importante du Plan et dont la transposition fait l'objet de l'article 5 du présent projet de loi ;

- la directive 2004/109/CE du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé ( directive « transparence »).

A l'issue de la législature européenne en juin 2004, 39 des 42 mesures législatives prévues dans le PASF avaient été adoptées dans les délais . La Commission a manifesté son intention de marquer une « pause législative » et de se concentrer sur l'évaluation de l'impact du Plan au cours des prochaines années.

B. UN DISPOSITIF COMPLET DANS LE CADRE DU « PROCESSUS LAMFALUSSY »

1. Une des premières directives issues du « processus Lamfalussy »

Le dispositif communautaire relatif à l'abus de marché s'inscrit dans le cadre procédural spécifique du « processus Lamfalussy 10 ( * ) », initié le 5 février 2002 11 ( * ) et qui permet d'adopter des règlements ou directives mieux adaptés au terrain , dans la mesure où ils sont préparés après la consultation des acteurs concernés, et permettant une plus grande harmonisation , car la procédure prévoit davantage de coopération entre les régulateurs des différents Etats membres.

Cette architecture décisionnelle en quatre niveaux (détaillés dans l'encadré ci-après), que d'aucuns pourraient qualifier de « chef d'oeuvre de l'eurocratie », ne constitue pas réellement un facteur de simplification du processus législatif, mais permet d'aboutir à des textes plus opérationnels et novateurs, et d'atténuer ainsi certaines critiques formulées à l'encontre du contenu parfois « evanescent » de la législation européenne en matière financière. Cette démarche a, de fait, été étendue en novembre 2003 aux secteurs des banques, des assurances et des retraites professionnelles , et a fait l'objet d'une première évaluation, assortie de propositions d'amélioration, en novembre 2004.

La technicité des mesures envisagées suppose, en effet, d'associer pleinement les professionnels à l'élaboration de la législation, mais le développement de cette « comitologie » peut aussi être perçu comme un obstacle au fonctionnement démocratique des institutions . Ce risque de survalorisation de l'expertise, au détriment de l'examen et du vote de la loi par le Parlement européen, est particulièrement prégnant au niveau 2 du processus, où l'intervention des comités de régulateurs européens est susceptible d'aboutir à la mise en oeuvre de dispositions déterminantes pour le fonctionnement des marchés financiers européens, comme l'illustre avec une acuité particulière l'application de la directive sur les marchés d'instruments financiers (cf. infra ).

NIVEAU 2 : ELABORATION DES MESURES D'EXECUTION

L'approche à quatre niveaux du processus Lamfalussy

NIVEAU 1 : ELABORATION DE LA LEGISLATION

La Commission adopte une proposition formelle de directive ou de règlement après avoir procédé à toutes les consultations prévues, notamment celle du Comité européen des valeurs mobilières ( CEVM )

La Commission examine cet avis et présente une proposition au CEVM quand cela est prévu au niveau 1

Parlement européen

Conseil

CESR élabore des recommandations interprétatives communes, des lignes directrices cohérentes et des standards communs (dans les domaines qui ne sont pas couverts par des mesures de niveaux 2), organise des évaluations réciproques et compare les pratiques réglementaires en vue d'assurer une mise en oeuvre et une application cohérente des règles

NIVEAU 3 : COOPERATION DES REGULATEURS

La Commission peut entreprendre un recours contre tout Etat membre qui ne respecterait pas le droit communautaire

La Commission vérifie que les Etats membres sont en conformité avec la législation de l'UE

NIVEAU 4 : CONTRÔLE DU RESPECT DU DROIT

Le Parlement européen est tenu pleinement informé et peut adopter une résolution si les mesures excédent les pouvoirs d'exécution

Le CEVM vote sur la proposition dans un délai de 3 mois maximum

La commission, après avoir consulté le CEVM , sollicite l'avis, quand cela est prévu au niveau 1, du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM) pour entamer la rédaction des mesures techniques d'exécution

Le CERVM prépare, en consultation avec les professionnels et les consommateurs, un avis qu'il soumet à la Commission

La Commission adopte la mesure

Accord sur des principes-cadres et définition de pouvoirs d'exécution dans la directive ou le règlement et désignation du CEVM comme comité de réglementation

2. Le contenu de la directive cadre du 28 janvier 2003

a) Un champ d'application large mais centré sur la répression administrative

Une proposition de directive sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché a été présentée par la Commission européenne le 30 mai 2001.

Conformément à la démarche Lamfalussy, une directive cadre a ensuite été adoptée afin de fixer les définitions, principes et principales mesures d'encadrement du nouveau dispositif relatif à l'abus de marché. La directive 2003/6/CE du 28 janvier 2003 concernant les opérations d'initiés et les manipulations de marché rappelle ainsi dans ses considérants les principes qui guident l'action de la Commission européenne dans le domaine des services financiers 12 ( * ) , et comprend d'importantes dispositions sur le régime applicable aux manipulations de marché et à l'information privilégiée.

Son champ d'application est large puisqu'il concerne toute personne physique ou morale ayant accès au marché et tout instrument financier répondant aux caractéristiques suivantes :

- aux termes de l'article 9, tout instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé d'au moins un Etat membre, ou pour lequel une procédure d'admission est en cours, c'est-à-dire lorsque « une demande d'admission à la négociation sur un tel marché a été présentée, que l'opération elle-même soit effectivement exécutée sur ce marché ou non » ;

- et, s'agissant des dispositions des articles 2, 3 et 4, tout instrument non admis à la négociation sur un marché réglementé mais dont la valeur dépend d'un instrument financier coté sur un tel marché. Cette dernière catégorie vise plus particulièrement les titres convertibles et certains produits dérivés.

Il convient ici d'apporter une précision importante sur ce champ d'application. Bien que le dispositif communautaire relatif à l'abus de marché s'applique aux titres admis à la négociation sur un marché réglementé ou en passe de l'être, il demeure pleinement compatible avec le nouveau cadre communautaire applicable aux négociations sur les marchés d'instruments financiers , prévu par la directive 2004/39/CE dont l'article 5 du présent projet de loi propose la transposition. Cette directive fixe en effet un cadre commun pour trois modes d'exécution des ordres (cf. infra ), qu'il importe de distinguer du critère juridique de l'admission à la négociation sur un marché réglementé, pivot de la législation boursière. La prévention et la répression de l'abus de marché se veulent donc neutres par rapport au lieu de négociation des titres . Les modalités de l'articulation entre les deux dispositifs sont précisées plus loin (cf. IV C).

La directive manifeste une nouvelle approche législative , à la fois moins ambitieuse et plus opérationnelle, de l'abus de marché par rapport aux objectifs de la directive de 1989, en ce qu'elle répond moins à la volonté d'harmoniser les droits des Etats membres qu'à celle de promouvoir une certaine homogénéité des autorités chargées de veiller à la transparence des marchés et à leur égalité d'accès.

Elle n'envisage, en outre, que la répression administrative des infractions et n'intervient donc pas dans la qualification et la sanction pénales de l'abus de marché. Cette approche a pu apparaître problématique pour une partie de la doctrine 13 ( * ) , dans la mesure où le caractère fortement répressif de la procédure de sanction administrative, tel qu'il est prévu par la directive, serait susceptible d'assimilation à une sanction pénale , au sens de la Convention européenne des droits de l'homme, et pourrait donc porter atteinte à la souveraineté des Etats membres, comme le ferait une directive d'incrimination pénale. Dans le dix-huitième considérant de sa décision rendue le 28 juillet 1989 sur la loi du 1 er août 1989 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier 14 ( * ) , le Conseil constitutionnel a ainsi considéré que le principe de nécessité des peines, tel qu'énoncé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ne concernait « pas seulement les peines prononcées par les juridictions répressives mais s'étend(ait) à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la prononcer à une autorité de nature non juridictionnelle ».

b) Le régime de l'information privilégiée et du délit d'initié

L'article premier de la directive « abus de marché » enrichit et précise la définition de l'information privilégiée, notion centrale dans le délit d'initié, par rapport à celle qui était posée dans la directive de 1989. Il s'agit d' « une information à caractère précis qui n'a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d'instruments financiers, et qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d'influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers qui leur sont liés ».

Les articles 2 et 3 prévoient plusieurs interdictions pour toute personne détentrice d'une information privilégiée, dont la transgression apparaît constitutive du délit d'initié , sans pour autant que ce dernier soit expressément défini : utiliser cette information pour la tentative ou la réalisation effective d'une transaction (achat ou cession, de manière directe ou indirecte, pour compte propre ou pour compte de tiers) sur les instruments financiers concernés, communiquer cette information à toute personne hors du cadre normal de l'activité professionnelle, et recommander à une autre personne d'acquérir ou de céder les instruments financiers auxquels se rapporte cette information. Cette dernière interdiction a pour effet d'inclure les analystes et journalistes financiers dans le champ de l'information privilégiée (cf. infra ).

c) Le régime de la manipulation de marché

L'article 5 de la directive pose un principe général d'interdiction à toute personne de procéder à des manipulations de marché. Les comportements que recouvre la notion de manipulation de marché, principale novation de la directive, sont définis extensivement par l'article premier. Il s'agit en particulier du « fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres qui donnent des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l'offre, la demande ou le cours d'instruments financiers », et « qui fixent (...) le cours d'un ou plusieurs instruments financiers à un niveau anormal ou artificiel ».

La manipulation de marché concerne également « le fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres qui recourent à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice », et la diffusion d'informations trompeuses, c'est-à-dire « le fait de diffuser des informations, que ce soit par l'intermédiaire des medias (dont Internet) ou par tout autre moyen, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur des instruments financiers, y compris le fait de répandre des rumeurs, alors que la personne ayant procédé à une telle diffusion savait ou aurait dû savoir que les informations étaient fausses ou trompeuses (...) ». L'imprécision et l'interprétation potentiellement large de certains termes permettent donc d'englober une grande variété d'intentions délictueuses, et le fait que la personne aurait dû connaître le caractère trompeur de l'information tend à créer une présomption d'intention de nuire.

Un régime d'exemption à cette définition est toutefois prévu lorsqu'il est établi que les opérations ou ordres réalisés répondent à des raisons légitimes et qu'ils sont « conformes aux pratiques de marché admises sur le marché réglementé concerné ». Les « pratiques de marché admises » sont définies comme celles qui « sont susceptibles d'être utilisées sur un ou plusieurs marchés financiers et qui sont acceptées par l'autorité compétente ». Cette disposition a, en particulier, une incidence sur l'encadrement des programmes de rachat d'actions (cf. infra ).

d) La gestion des informations privilégiées par les émetteurs et les intermédiaires financiers

Afin de prévenir l'utilisation délictueuse de toute information privilégiée, dont la simple détention ne constitue pas un motif de sanction, l'article 6 de la directive précise certaines obligations d'information du marché pesant sur les émetteurs d'instruments financiers. Ceux-ci doivent ainsi rendre publiques, dès que possible, les informations privilégiées les concernant, et les faire figurer sur leur site Internet « pendant une période appropriée ». Lorsqu'un émetteur, ou une personne agissant pour son compte, communique une information privilégiée à un tiers dans l'exercice normal de ses fonctions, la publicité de cette information doit advenir simultanément , en cas de communication intentionnelle, ou rapidement en cas de communication non intentionnelle, sauf si la personne qui reçoit l'information est tenue par une obligation de confidentialité.

Un émetteur dispose toutefois de la possibilité de différer la publication de l'information lorsque trois conditions cumulatives sont réunies : « afin de ne pas porter atteinte à ses intérêts légitimes, sous réserve que cette omission ne risque pas d'induire le public en erreur et que l'émetteur soit en mesure d'assurer la confidentialité de ladite information ».

Les émetteurs, leurs dirigeants et les personnes agissant pour leur compte sont également astreints à trois grandes obligations d'information de l'autorité de régulation :

- l'établissement d'une liste d'initiés , c'est-à-dire des personnes, salariées ou non, qui ont accès à des informations privilégiées et travaillent pour les émetteurs et leurs intermédiaires. Cette liste doit être régulièrement actualisée et tenue à la disposition de l'autorité compétente ;

- une déclaration des opérations réalisées par les dirigeants des émetteurs : ceux-ci, et le cas échéant les personnes ayant un « lien étroit » avec eux, doivent communiquer « au moins à l'autorité compétente l'existence des opérations effectuées pour leur compte propre » et portant sur des actions, des produits dérivés ou d'autres instruments financiers de l'émetteur qui leur sont liés. Le public doit rapidement disposer d'un accès aisé aux informations sur ces opérations ;

- une déclaration de soupçon portant sur les opérations suspectes : les professionnels intervenant sur les marchés financiers doivent avertir sans délai l'autorité de régulation « lorsqu'ils ont des raisons de suspecter qu'une opération pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché ».

Il importe de relever que le point 5 de l'article 6 prévoit des dispositions particulières pour « les personnes qui réalisent ou diffusent des travaux de recherche concernant des instruments financiers ou des émetteurs (...) ou les personnes qui produisent ou diffusent d'autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement, destinée aux canaux de distribution ou au public », définition qui désigne donc la recherche, l'analyse et la presse financières . Chaque Etat membre doit disposer d'une réglementation tendant à assurer une réelle transparence sur les conflits d'intérêt potentiels auxquels ces professionnels pourraient être confrontés . L'information qu'ils diffusent doit ainsi être « présentée de manière équitable » et ces professionnels doivent mentionner « leurs intérêts ou l'existence de conflits d'intérêts en rapport avec les instruments financiers auxquels se rapporte cette information ».

e) La présomption de légitimité de certaines transactions offerte par les « safe harbours »

Les articles 7 et 8 prévoient que la directive ou les interdictions qu'elles comportent ne s'appliquent pas à trois catégories d'opérations financières, qui bénéficient dès lors d'une présomption de légitimité :

- celles relevant de la politique monétaire, de change ou de gestion de la dette publique conduite par un Etat membre, le Système européen de banques centrales ou une banque centrale nationale ;

- les opérations sur actions propres effectuées dans le cadre de programmes de rachat ;

- les mesures de stabilisation d'un instrument financier suite à une opération de marché primaire.

f) La promotion d'une autorité unique de marché dans chaque Etat membre, investie de pouvoirs suffisants

Aux termes des articles 11 et 12 de la directive, la prévention et la sanction des abus de marché doivent relever d'une autorité administrative unique , qui doit être investie de tous les pouvoirs de surveillance et d'enquête nécessaires à l'exercice de ses fonctions. Il s'agit d'une différence majeure par rapport à l'approche de la directive du 13 novembre 1989 , dont l'article 9 disposait que chaque Etat membre désigne « la ou les autorités administratives compétentes pour veiller, le cas échéant en collaboration avec d'autres autorités (...) » à l'application des dispositions de la directive. Cette promotion d'une autorité de marché unique inspire également le contenu d'autres directives récentes en matière de marchés financiers, telles que les directives « OPA », « transparence » et « prospectus », précédemment évoquées.

Les pouvoirs de l'autorité unique peuvent être exercés directement, en collaboration avec ou par délégation à d'autres autorités ou des entreprises de marché, et par la saisine des autorités judiciaires compétentes.

L'article 12 énumère, en outre, les droits et pouvoirs minimaux dont doit être investie l'autorité de marché : avoir accès à tout document sous quelque forme que ce soit, demander des informations à tout intermédiaire financier et l'entendre, le cas échéant, procéder à des inspections sur place, disposer d'un pouvoir d'injonction de cesser toute pratique contraire aux dispositions de la directive et la possibilité de suspendre la négociation des instruments financiers concernés, requérir le gel et/ou la mise sous séquestre d'actifs, et requérir l'interdiction temporaire d'activité d'un professionnel impliqué dans les infractions visées par la directive.

L'article 13 soumet à une obligation de secret professionnel toutes les personnes qui travaillent ou ont travaillé pour l'autorité compétente ou ses délégataires. Des dispositions législatives nationales peuvent néanmoins aménager le principe de non communication des informations couvertes par le secret professionnel à toute personne ou autorité.

L'article 14 a trait à la dualité des sanctions pénales et administratives , et consacre donc ce qui constitue une des caractéristiques majeures de la répression des infractions boursières en France. Ce faisant, le système français, modernisé par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière, devient une source d'inspiration et trouve à s'exporter, par l'intermédiaire de la législation communautaire, dans les Etats membres qui n'étaient pas dotés d'une telle organisation.

Il est ainsi prévu que, sans préjudice du droit des Etats membres d'imposer des sanctions pénales (l'article 11 précise également que la désignation de l'autorité administrative unique s'exerce « sans préjudice des compétences des autorités judiciaires »), les législations nationales doivent prévoir des mesures administratives appropriées et des sanctions administratives « effectives, proportionnées et dissuasives » à l'encontre des personnes reconnues responsables d'une violation du dispositif relatif à l'abus de marché. Les mesures et sanctions ainsi appliquées par l'autorité de régulation peuvent faire l'objet d'une publicité, sauf dans les cas où « leur publication perturberait gravement les marchés financiers ou causerait un préjudice disproportionné aux parties en cause ».

L'article 15 prévoit que les décisions de l'autorité administrative de régulation puissent faire l'objet d'un recours juridictionnel , conformément au principe du droit au recours effectif posé par l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.

g) La nécessaire coopération entre les autorités nationales de régulation

L'article 16 introduit une obligation de coopération, d'échange d'informations et de concours entre les autorités des Etats membres , chaque fois que cela est nécessaire à l'accomplissement de leur mission et plus spécifiquement dans le cadre d'enquête. Cette obligation est analogue à celle que posait déjà l'article 10 de la directive du 13 novembre 1989, mais ses modalités d'exercice sont plus détaillées, s'agissant en particulier de l'utilisation des informations reçues, de leur communication lorsqu'une autorité d'un Etat membre acquiert la conviction que la législation communautaire sur l'abus de marché a été enfreinte sur le territoire d'un autre Etat membre, et de la demande d'enquête qu'une autorité d'un Etat membre peut formuler auprès de l'autorité d'un autre Etat membre.

Des exceptions à ce principe de coopération sont toutefois prévues. Les autorités compétentes peuvent ainsi refuser de donner suite à une demande d'information lorsque :

« - la communication de l'information concernée est susceptible de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public de l'Etat membre requis ;

« - une procédure judiciaire est déjà engagée pour les mêmes faits et à l'encontre des mêmes personnes devant les autorités de cet Etat, ou

« - lorsque ces personnes ont déjà été définitivement jugées pour les mêmes faits dans cet Etat ».

De même, le point 4 de l'article 16 prévoit que « les autorités compétentes peuvent refuser de procéder à une enquête au titre d'une demande (...) ou ne pas autoriser les membres du personnel de l'autorité compétente d'un autre Etat membre à accompagner les membres de son propre personnel au titre d'une demande (...) » lorsque cette enquête contrevient aux mêmes situations que celles exposées précédemment (atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public de l'Etat requis, ou lorsqu'une procédure judiciaire déjà engagée ou condamnation définitive pour les mêmes faits).

Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, « une autorité compétente dont la demande d'information (ou visant à ouvrir une enquête) ne reçoit pas de suite dans des délais raisonnables ou est rejetée, peut porter cette carence à l'attention du comité européen des régulateurs des marchés de valeurs mobilières ».

3. Les quatre textes d'application

La directive cadre du 28 janvier 2003 a été complétée, conformément au processus Lamfalussy et au point 10 de l'article 6 de cette directive, qui prévoit que la Commission adopte plusieurs mesures d'exécution « afin de tenir compte des évolutions techniques des marchés financiers et d'assurer une application uniforme » de la nouvelle législation, par trois directives et un règlement tendant à préciser plusieurs aspects importants de cette directive évoqués supra , s'agissant en particulier de la prévention des abus de marché.

a) La directive 2003/124/CE du 22 décembre 2003

La directive 2003/124/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 décembre 2003, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne la définition et la publication des informations privilégiées et la définition des manipulations de marchés, apporte des précisions dans les domaines suivants :

- la définition de l'information privilégiée , complétée sur son caractère « précis » et sur « l'effet sensible » qu'elle peut avoir sur le cours d'un instrument financier ;

- les modes et délais de publication de telles informations, afin de garantir au public un accès rapide et de l'informer de tout changement significatif venant affecter cette information postérieurement à sa publication ;

- les mesures tendant à garantir la confidentialité de l'accès à une information privilégiée ;

- le « faisceau d'indices » non limitatifs permettant d'identifier les manipulations consistant à donner des indications fausses ou trompeuses ou à fixer les cours à un niveau anormal ou artificiel, constitutifs d'une manipulation de marché (cf. infra ) ;

- les signaux et indices non limitatifs permettant d'identifier les manipulations consistant à recourir à des procédés fictifs ou à toute forme de tromperie ou d'artifice ;

- enfin les intérêts légitimes de l'émetteur justifiant le report de l'information du public , afin de protéger le secret des affaires. L'article 3 de la directive vise ainsi les deux situations suivantes, de manière non exhaustive :

- « a) (les) négociations en cours, ou éléments connexes, lorsque le fait de les rendre publics risquerait d'affecter l'issue ou le cours normal de ces négociations . En particulier, en cas de danger grave et imminent menaçant la viabilité financière de l'émetteur , mais n'entrant pas dans le champ des dispositions applicables en matière de droit des faillites, la divulgation d'informations au public peut être différée durant une période limitée si elle risque de nuire gravement aux intérêts des actionnaires existants et potentiels en compromettant la conclusion de négociations particulières visant à assurer le redressement financier à long terme de l'émetteur » . Il s'agit donc d'une situation pré-judiciaire , dans laquelle l'émetteur éprouve de graves difficultés financières, sans pour autant se trouver dans la situation de cessation des paiements (ou proche de cette situation, s'agissant de la nouvelle procédure de sauvegarde qu'il est prévu d'introduire en droit français) qui détermine la mise en oeuvre de procédures collectives ;

« b) (les) décisions prises ou contrats passés par l'organe de direction d'un émetteur, qui nécessitent l'approbation d'un autre organe de l'émetteur pour devenir effectifs , lorsque la structure dudit émetteur requiert une séparation entre les deux organes, à la condition que la publication de ces informations avant leur approbation, combinée à l'annonce simultanée que cette approbation doit encore être donnée, fausserait leur correcte appréciation par le public ». Ce cas vise plus particulièrement les sociétés dont l'organisation est qualifiée de « dualiste », dirigées par exemple par un directoire et un conseil de surveillance.

Votre rapporteur général juge que cette définition des intérêts légitimes, outre qu'elle n'est pas limitative et peut donc donner lieu à une conception extensive, est plutôt floue, arbitraire et d'interprétation difficile , alors même que ses conséquences sont importantes car elle porte atteinte à la transparence de l'information. Il rappelle, à cet égard, que les négociateurs allemands, notamment en raison du mode d'organisation traditionnellement dualiste des sociétés de ce pays, se sont montrés les plus attachés à cette notion d'intérêts légitimes, alors que la France y était opposée. Le règlement général de l'AMF, en son article 222-3, n'en a pas moins repris exactement les mêmes termes, ce que l'on peut regretter .

b) La directive 2003/125/CE du 22 décembre 2003

La directive 2003/125/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 décembre 2003, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne la présentation équitable des recommandations d'investissement et la mention des conflits d'intérêt, fournit quant à elle plusieurs précisions qui ont vocation à s'appliquer aux analystes et journalistes financiers, mais ne concernent pas l'activité des agences de notation de crédit , bien que le dixième considérant 15 ( * ) de la directive recommande que ces agences adoptent des procédures internes conformes aux dispositions de la directive.

Le vingt-deuxième considérant de la directive-cadre 2003/6/CE du 28 janvier 2003 16 ( * ) tend, en outre, à préserver la spécificité de certaines professions, et en particulier celle de journaliste , en accordant une certaine latitude aux Etats membres dans la mise en place de la réglementation. La profession de journaliste est ainsi expressément visée dans le onzième considérant de la directive 2003/125/CE, qui précise que la directive « n'empêche en aucune façon les Etats membres d'appliquer leurs dispositions constitutionnelles en matière de liberté de la presse et de liberté d'expression dans les médias ».

Les principales dispositions de cette directive sont les suivantes :

- une définition des recommandations et des « travaux de recherche ou autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement » ;

- des règles relatives à la publication de l'identité des producteurs de recommandations écrites ou non écrites, et le cas échéant de la référence à un code de conduite ou à des normes d'autorégulation ;

- une norme générale et des obligations supplémentaires concernant la présentation équitable des recommandations . Il convient de relever le degré élevé de précision de certaines de ces règles , qui constituent la conséquence législative des critiques, parfois vives, formulées à l'encontre des analystes financiers. Le manque d'indépendance des analystes « sell side » à l'égard aux activités de banque de financement et d'investissement, une tendance à l'imitation et à la reproduction d'un « consensus de marché », l'insuffisante transparence des sources, un biais structurellement acheteur ont par exemple été parfois invoqués pour illustrer le rôle prêté aux analystes dans le gonflement de la « bulle » technologique et la mauvaise information des investisseurs 17 ( * ) . L'article 4 de la directive prévoit dès lors notamment que :

« a) toutes les sources importantes quant au fond de la recommandation sont indiquées comme il convient, y compris l'émetteur concerné, ainsi que le fait que la recommandation a été le cas échéant communiquée à cet émetteur et modifiée suite à cette communication avant sa diffusion ; (...)

« c) la signification de toute recommandation émise (telle que « acheter », « vendre » ou « conserver »), le cas échéant l'horizon temporel de l'investissement auquel se rapporte la recommandation, est expliquée d'une manière adéquate et (que) tout avertissement approprié sur les risques (y compris une analyse de sensibilité des hypothèses retenues) est indiqué ;

« d) il est fait référence à la fréquence prévue, le cas échéant, des mises à jour de la recommandation ainsi qu'à toute modification importante de la politique de couverture précédemment annoncée ; (...) »

- une norme générale et des obligations supplémentaires concernant la mention des intérêts et des conflits d'intérêts des personnes physiques et morales concernées par la fourniture de recommandations. Là encore, les règles afférentes aux informations sur ces intérêts, telles que « les participations importantes existant entre la personne concernée ou toute personne morale qui lui est liée, d'une part, et l'émetteur, d'autre part » se révèlent très détaillées ;

- une norme générale concernant la diffusion des informations ;

- des obligations supplémentaires imposées aux entreprises d'investissement et aux établissements de crédit.

c) Le règlement n° 2273/2003 du 22 décembre 2003

Le règlement n° 2273/2003 de la Commission du 22 décembre 2003, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les dérogations prévues pour les programmes de rachat et la stabilisation d'instruments financiers, est important en ce qu'il a trait à des pratiques de marché parfois controversées , ainsi que l'a illustré le cas des rachats d'actions opérés par la société Vivendi Universal en octobre 2001, dans un contexte boursier fortement affecté par les attentats aux Etats-Unis. Ce règlement ne remet pas en cause la légitimité des interventions des émetteurs sur leurs propres titres , mais s'inscrit dans un courant de promotion du gouvernement d'entreprise et d'une plus grande transparence à l'égard des actionnaires, et répond à une volonté de pallier certains dysfonctionnements intervenus au cours des dernières années.

(1) Les programmes de rachat de titres

L'article 3 de ce règlement, tout comme l'article 8 de la directive du 28 janvier 2003, crée une présomption irréfragable de légitimité 18 ( * ) au regard du régime de l'abus de marché, couramment désignée comme « safe harbour », au profit des programmes de rachats de titres et des mesures de stabilisation d'instruments financiers répondant à certaines conditions.

L'article 3 dispose en particulier que pour bénéficier de la dérogation aux interdictions prévues par la directive du 28 janvier 2003, ce type de programme doit « avoir pour seul objectif de réduire le capital d'un émetteur (en valeur ou en nombre d'actions) ou de lui permettre d'honorer des obligations liées à des titres de créances convertibles en titres de propriété, (ou) à des programmes d'options sur actions ou autres allocations d'actions aux salariés de l'émetteur ou d'une entreprise associée ». Il n'est donc pas fait mention, parmi ces objectifs, des rachats aux fins d'accumuler des titres susceptibles d'être apportés ou échangés dans le cadre de futures opérations de croissance externe.

Cette disposition est néanmoins assouplie par la directive-cadre du 28 janvier 2003, qui prévoit que les régulateurs nationaux peuvent faire bénéficier d'une présomption simple de légitimité des pratiques déjà admises sur leur place financière . L'AMF a ainsi récemment reconnu deux pratiques de marché complémentaires (cf. infra ).

Les conditions d'accès des programmes de rachat au « safe harbour » incluent des règles relatives à la publicité et au déroulement même des opérations, définies par les articles 4 à 6 du règlement et auxquelles le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (cf. infra ) fait explicitement référence. Ces conditions ont trait au prix comme aux volumes des programmes de rachat , et sont précisées plus loin.

La présomption de légitimité suppose aussi, aux termes de l'article 6 du règlement, que l'émetteur s'abstienne de procéder à certaines opérations pendant la durée de la mise en oeuvre du programme de rachat et une période spécifique :

- la vente de ses propres actions ;

- les interventions sur le marché durant une période qualifiée de « fenêtre négative » (cf. infra ) ;

- et les opérations portant sur des valeurs au sujet desquelles l'émetteur a décidé de différer la publication d'une information privilégiée.

Cette obligation d'abstention ne joue toutefois pas dans trois conditions :

- si l'émetteur est une entreprise d'investissement ou un établissement de crédit ayant mis en place des « murailles de Chine » sur la circulation des informations privilégiées ;

- si l'émetteur a mis en place un programme de rachat assorti d'un calendrier précis ;

- et si le chef de file du programme de rachat est une entreprise d'investissement ou un établissement de crédit qui décide de ses interventions en toute indépendance. Cette disposition concerne en particulier les interventions sur le marché dans le cadre d'un « contrat de liquidité » conclu avec l'émetteur.

(2) La stabilisation d'un instrument financier

La stabilisation est définie par le point 7 de l'article 2 comme « tout achat ou offre d'achat de valeurs concernées, ou toute opération portant sur des instruments associés équivalents, réalisé par des entreprises d'investissement ou des établissements de crédit dans le contexte d'une distribution significative de telles valeurs, dans le seul but de soutenir leur prix sur le marché pendant une durée prédéterminée en raison d'une pression à la vente s'exerçant sur elles ». Les articles 7 à 11 du règlement précisent les conditions de publicité et d'information, de durée et de prix qui permettent aux mesures de stabilisation d'un instrument financier de bénéficier de la présomption de légitimité.

La durée des opérations de stabilisation doit être limitée . Pour les actions et autres titres équivalents, la période de stabilisation commence à la date du début de la négociation des valeurs sur le marché réglementé et s'achève au maximum trente jours calendaires plus tard. Pour les obligations et autres titres de créances, cette période commence à la date de publication des conditions de l'offre et s'achève à la plus proche des deux dates suivantes : soit au maximum trente jours calendaires après la date à laquelle l'émetteur des titres a reçu le produit de son émission, soit au maximum soixante jours de calendrier après la date d'allocation des valeurs concernées.

S'agissant des conditions relatives au prix , la stabilisation d'actions ou de titres convertibles en actions ne peut s'effectuer à un prix supérieur à celui de l'offre. Il convient de préciser que cette disposition trouve en particulier à s'appliquer lors de l'introduction d'une société en bourse . Des mesures de stabilisation de cours sont, en effet, fréquemment mises en oeuvre lors du premier jour de cotation et durant la période consécutive à l'introduction. Cette phase d'animation du marché ne doit pas pour autant permettre de contourner les principes d'information du marché, c'est-à-dire de proposer à certains investisseurs un cours supérieur à celui qui a été auparavant annoncé pour la nouvelle offre sur le marché, sous couvert de stabilisation du cours du titre.

d) La directive du 29 avril 2004

La directive 2004/72/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, est essentielle dans la mesure où elle détaille les principales mesures de prévention des abus de marché , associant les émetteurs, les prestataires en services d'investissement et l'autorité administrative de régulation. Elle prévoit ainsi les principales dispositions suivantes, qui ont été en grande partie intégrées dans le règlement général de l'AMF (cf. infra ) ou font l'objet du présent projet de loi de transposition :

- une définition de la « personne exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur » et des personnes qui lui sont étroitement liées ;

- les critères à prendre en compte dans l'évaluation de l'acceptabilité des pratiques de marché . Il s'agit notamment de leur degré de transparence, de l'intensité de leur impact sur la liquidité et l'efficience du marché concerné, du risque qu'elles présentent pour l'intégrité du marché ou des caractéristiques structurelles du marché ;

- les procédures de consultation et de publication des décisions de l'autorité de régulation relatives aux pratiques de marché admises ;

- les circonstances de communication d'une information privilégiée en rapport avec les instruments dérivés sur produits de base ;

- les modalités de constitution et le contenu des listes d'initiés , de la notification des opérations réalisées par les dirigeants et les personnes ayant un lien étroit avec ces derniers, et de la déclaration de soupçon portant sur les opérations suspectes.

Le présent projet de loi concerne plus particulièrement ces dernières dispositions : l'article premier prévoit ainsi l'introduction d'une obligation de déclaration des opérations suspectes, l'article 3 modifie le régime de la déclaration des opérations sur titres réalisées par certaines personnes physiques, et l'article 4 prévoit l'établissement de listes d'initiés par les émetteurs et certains tiers ayant accès à des informations privilégiées. Votre rapporteur général vous propose plusieurs amendements à ces articles, précisant ces dispositifs ou les modifiant de façon plus substantielle.

III. UNE TRANSPOSITION EN GRANDE PARTIE RÉALISÉE

A. UNE ANTICIPATION EN TERMES D'ORGANISATION ET DE PROCÉDURE DE SANCTION PAR LA LOI DE SÉCURITÉ FINANCIÈRE DU 1ER AOÛT 2003

1. Une autorité administrative unique

La volonté de faire reposer le système de régulation financière de chaque Etat membre sur une autorité nationale de marché unique irrigue l'ensemble du Plan d'action pour les services financiers . Elle ne s'est donc pas traduite exclusivement dans le dispositif de prévention de l'abus de marché, mais également dans la législation relative aux offres publiques d'acquisition et à l'information du marché fournie par les sociétés cotées. Cette exigence européenne, jointe à un consensus de place dans lequel votre rapporteur général avait pris une part active 19 ( * ) , a motivé la fusion des deux anciennes autorités de marché françaises , la Commission des opérations de bourse (COB, autorité administrative) et le Conseil des marchés financiers (CMF, instance professionnelle), en une autorité unique et investie de pouvoirs étendus, l'Autorité des marchés financiers. La création de l'AMF constituait ainsi la principale disposition de la loi de sécurité financière n° 2003-706 du 1 er août 2003, en son titre premier.

2. Les nouvelles garanties organisationnelles et procédurales apportées en matière d'enquête et de sanction sur les manquements boursiers

Au-delà de la nouvelle structure d'ensemble de la régulation financière en France, la loi de sécurité financière précitée a transposé certaines dispositions précises de la législation communautaire sur l'abus de marché, telles que l'obligation de déclaration à l'autorité compétente des transactions des dirigeants d'un émetteur et des personnes qui leur sont liées sur les titres dudit émetteur (cf. commentaire de l'article 3 du présent projet de loi).

Elle a, en outre, répondu à certaines critiques auparavant formulées sur le fonctionnement de la COB, en renforçant les pouvoirs de la nouvelle autorité, en particulier le champ de l'injonction administrative, et surtout en procédant à une clarification et à une sécurisation de son régime de sanction administrative , qui est naturellement très impliqué dans la répression de l'abus de marché.

Sans revenir sur les détails de la procédure de contrôle et de sanction, décrite dans le rapport d'information que votre rapporteur général a déposé en 2004 sur la loi de sécurité financière 20 ( * ) , rappelons qu'elle tend à la fois à mieux l'articuler avec les sanctions pénales, à renforcer son effectivité et son impartialité, et à éviter les contestations (et en particulier les annulations qui avaient conduit à un affaiblissement de l'autorité de la COB) au regard des prescriptions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit au procès équitable comme du respect du principe du contradictoire. La loi de sécurité financière précitée a ainsi institué une séparation stricte entre le Collège et la commission des sanctions et a clairement distingué les phases successives de la procédure, que sont l'enquête préalable, qui relève des services de l'AMF et du Collège, l'instruction par le rapporteur 21 ( * ) , et la sanction proprement dite, prononcée par la commission des sanctions.

3. Une entorse mesurée à la règle non bis in idem

S'agissant de la question délicate de la double répression administrative et pénale , sur laquelle la doctrine se montre généralement critique en ce qu'elle constitue une entorse à la règle non bis in idem , votre rapporteur général, lors des débats de première lecture du projet de loi de sécurité financière 22 ( * ) , avait rappelé qu'elle était très rare en pratique, et que la jurisprudence du Conseil constitutionnel et des juridictions judiciaires, comme les dispositions de la directive « abus de marché » du 28 janvier 2003, dont on a vu qu'elle l'admettait explicitement, ne l'avaient pas condamnée. A son initiative, la loi de sécurité financière a néanmoins prévu un dispositif tendant à limiter la concomitance des procédures administratives et pénales par une procédure d'information réciproque , figurant à l'article L. 621-15-1 du code monétaire et financier 23 ( * ) , plutôt qu'à supprimer cette dualité.

D'aucuns ont certes souligné que le principe du non bis in idem pourrait être mieux respecté si l'on introduisait une répartition des contentieux entre la voie pénale et la voie administrative en fonction de leur gravité , ainsi que le gouvernement italien envisage de le faire dans son projet de loi de transposition du dispositif « abus de marché » 24 ( * ) . Mais l'établissement d'une telle ligne de partage semble à la fois difficile et risqué , compte tenu des conséquences parfois mal évaluées et potentiellement graves pour l'intégrité des marchés d'une infraction qui apparaîtrait mineure lors de l'ouverture de l'enquête.

Le nouveau cadre juridique permet donc à l'AMF d'asseoir la crédibilité de ses missions de protection des investisseurs et de la transparence du marché. Les sanctions dont elle dispose sont également dissuasives et proportionnées , conformément aux exigences de l'article 14 de la directive du 28 janvier 2003, précitée. Ainsi qu'il a été précédemment souligné, aux termes du b) du III de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, les sanctions pécuniaires de droit commun sont plafonnées à 1,5 million d'euros, mais peuvent atteindre le décuple des profits illicitement réalisés lors de certaines infractions 25 ( * ) , et plus particulièrement en cas de manquement d'initié ou de manipulation de marché. Ce régime de sanction est, à n'en pas douter, dissuasif , indépendamment des controverses doctrinales et jurisprudentielles sur la conception de la notion de « gain illicite ».

4. La transaction : une faculté a priori utile mais qui requiert un encadrement strict

L'échelle de sanctions de l'AMF serait utilement complétée par l'octroi à cette autorité d'un pouvoir de transaction , ainsi que votre rapporteur général l'avait appelé de ses voeux dans son rapport d'information précité sur la loi de sécurité financière. Un tel pouvoir de transaction, qui n'impliquerait pas nécessairement une reconnaissance juridique et explicite de la culpabilité de la part de l'acteur incriminé, mais plutôt une reconnaissance des faits et un engagement de ce dernier à modifier son comportement sur les marchés, constituerait un facteur puissant de rapidité et donc de crédibilité de l'autorité. Il ne constituerait pas un bouleversement majeur de notre droit , dans la mesure où les procédures de transaction et de clémence peuvent aujourd'hui, depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, être appliquées par le Conseil de la concurrence.

L'introduction de la transaction dans notre droit boursier devrait néanmoins être soumise à une procédure très précise, en particulier au regard de son articulation avec les juridictions judiciaires et du respect des droits de la défense, si l'incrimination revêtait une nature pénale. Il serait ainsi opportun de prévoir une procédure d'« aiguillage » , par laquelle l'AMF, par l'intermédiaire de son secrétaire général, informerait le parquet de la notification des griefs et de son intention de recourir à la transaction, que le parquet aurait alors la faculté (mais non l'obligation) de refuser dans le cas où l'action publique serait déjà engagée sur la même affaire. L'effectivité de la transaction serait, en tout état de cause, soumise à une homologation par le tribunal de grande instance de Paris. Le respect des droits de la défense impliquerait, en outre, que le dispositif de transaction ne puisse intervenir qu'au terme d'un débat contradictoire , au cours duquel toutes les parties intéressées auraient donné leur avis.

On observera que l'introduction récente dans notre droit du dispositif du « plaider coupable », par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, offre une référence propice à la création d'un tel dispositif de transaction de l'AMF, que votre rapporteur général souhaite voir adopter à l'occasion de la discussion d'un prochain texte.

B. LES DISPOSITIONS DU RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF

1. Une démarche inédite de transposition

La publication d'un nouveau règlement général a constitué le premier objectif de l'AMF, lors de son installation le 24 novembre 2003. L'autorité a opté pour une démarche pragmatique d'adoption , consistant non à attendre que le nouveau règlement général soit intégralement finalisé pour le publier, mais à procéder à une actualisation et à une publication progressives au fur et à mesure de l'avancement des travaux, gage de rapidité et de sécurité juridique pour les intervenants sur les marchés.

Une première version « allégée » du règlement général de l'AMF a donc été publiée le 23 février 2004, limitée à la déontologie des membres de l'AMF et des experts nommés auprès des commissions consultatives, ainsi qu'aux modalités de rémunération de ces derniers. L'essentiel du règlement général a toutefois été publié pour le premier anniversaire de l'autorité , soit le 24 novembre 2004, après homologation par un arrêté du 12 novembre 2004. Ce texte de référence comprend ainsi six livres 26 ( * ) , dont le sixième est plus spécifiquement dédié à la prévention et à la répression de l'abus de marché .

Il résulte de cette démarche qu'une grande partie du dispositif communautaire relatif à l'abus de marché a d'ores et déjà été transposée dans la réglementation de l'AMF, dans les Livres II et VI de son règlement général. Les dispositions réglementaires de transpositions précèdent donc en partie celles législatives, qui font l'objet du présent projet de loi . Cette approche s'explique tant par la nature des dispositions des textes communautaires, dont le haut niveau de précision ressortit majoritairement au domaine réglementaire, que par la nécessité de soumettre rapidement aux professionnels des marchés un cadre clair et stabilisé, mais cette chronologie ne correspond pas à la logique normative .

Le présent projet de loi, en particulier l'article 4 relatif à l'établissement de listes d'initiés , qui est une création « ex nihilo » par voie législative, requiert toutefois certaines mesures d'application par le règlement général de l'AMF. Ces dispositions réglementaires n'ont pas encore été prises, afin de ne pas préempter le débat parlementaire.

Compte tenu du délai de transposition du dispositif communautaire, qui a été fixé au 12 octobre 2004, on ne peut que regretter que le présent projet soit soumis tardivement au Parlement , comme une simple « conséquence » nécessaire d'un processus juridique dont les incidences sont pourtant importantes pour notre droit boursier. Le caractère tardif du présent projet de loi apparaît donc doublement contestable.

2. Le Livre II du règlement général de l'AMF

Le Livre II du règlement général de l'AMF, relatif aux émetteurs et à l'information financière, comprend en son titre II, intitulé « Information permanente », les articles 222-3 à 222-11, dont le contenu correspond en partie à la transposition de certaines dispositions de la directive-cadre 2003/6/CE du 28 janvier 2003 et de la directive d'application 2003/124/CE du 22 décembre 2003, précitées.

L'article 222-3 a ainsi trait au principe et aux dérogations relatifs à la publication d'une information privilégiée. Le I de cet article, qui constitue le droit commun de cette publication, prévoit que « tout émetteur doit, dès que possible, porter à la connaissance du public toute information privilégiée définie à l'article 621-1 et qui le concerne directement ». Le II prévoit pour l'émetteur la possibilité, conformément à l'article 3 de la directive précitée, de différer la publication d'une information privilégiée afin de ne pas porter atteinte à ses intérêts légitimes, « sous réserve que cette omission ne risque pas d'induire le public en erreur et que l'émetteur soit en mesure d'assurer la confidentialité de ladite information en contrôlant l'accès à cette dernière ». L'article reprend in extenso la définition des intérêts légitimes posée par l'article 3 de la directive précitée. Ainsi qu'il a été mentionné supra , votre rapporteur général estime que cette définition aurait gagnée à être davantage précisée, d'autant que la directive dispose que les situations visées ne sont pas exhaustives.

Conformément aux dispositions du point 3 de l'article 6 de la directive-cadre du 28 janvier 2003, précitée, l'article 222-4 prévoit que « lorsqu'un émetteur, ou une personne agissant au nom ou pour le compte de celui-ci, communique une information privilégiée à un tiers dans l'exercice normal de son travail, de sa profession ou de ses fonctions (...), il en assure une diffusion effective et intégrale soit simultanément en cas de communication intentionnelle, soit rapidement en cas de communication non intentionnelle. Une exemption est toutefois prévue « lorsque la personne qui reçoit l'information est tenue par une obligation de confidentialité , que le fondement de celle-ci soit législatif, réglementaire, statutaire ou contractuel ». L'article 222-6 dispose que tout changement significatif concernant des informations privilégiées déjà rendues publiques doit être divulgué rapidement selon les mêmes modalités que celles utilisées lors de leur diffusion initiale.

L'article 222-10 envisage enfin les modalités de publication des informations privilégiées. Celles-ci doivent être portées à la connaissance du public sous la forme d'un communiqué dont l'émetteur s'assure de la diffusion effective et intégrale, et que l'AMF doit recevoir au plus tard au moment de sa publication. L'émetteur disposant d'un site Internet doit également faire figurer sur ce site, pendant une période appropriée, toute information privilégiée qu'il est tenu de rendre publique.

3. Le Livre VI du règlement général de l'AMF

Le Livre VI du règlement général de l'AMF comprend trois titres , respectivement intitulés « Dispositions générales », « Opérations d'initié » et « Manipulations de marché », qui comportent les articles 611-1 à 632-1 du règlement général et couvrent les principaux aspects traités par les textes communautaires relatifs à l'abus de marché. Plusieurs de leurs dispositions reprennent la rédaction adoptée dans le règlement et les quatre directives précités.

a) Titre Ier - Dispositions générales

Ce titre aborde successivement le champ d'application du régime juridique de l'abus de marché et les pratiques de marché admises.

Le champ d'application correspond à celui défini par la directive-cadre du 28 janvier 2004 : toute personne physique ou morale ou toute entité ; les instruments financiers, tels que définis à l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, cotés sur un marché réglementé ou pour lesquels une demande d'admission à un tel marché a été présentée ; et toutes les opérations portant sur ces instruments, que celles-ci aient été effectivement exécutées ou non. Les articles 622-1 et 622-2 du règlement général, relatifs à l'abstention d'utilisation d'une information privilégiée (cf. infra ), s'appliquent également aux instruments financiers non cotés sur un marché réglementé, mais dont la valeur dépend d'un instrument financier coté sur un tel marché.

Les « pratiques de marché admises » sont définies par l'article 612-1 comme celles « susceptibles d'être mises en oeuvre sur un ou plusieurs marchés financiers et acceptées par l'AMF ». Les sept critères présidant à l'évaluation de l'acceptabilité d'une pratique de marché, prévus à l'article 612-2, reprennent presque intégralement la formulation prévue par l'article 2 de la directive d'application 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée. Ces critères sont les suivants :

« 1° Le degré de transparence de la pratique concernée au regard de l'ensemble du marché ;

« 2° Le besoin de sauvegarder le libre jeu du marché et l'interaction de l'offre et de la demande ;

« 3° L'importance des effets de la pratique concernée sur la liquidité et l'efficience du marché ;

« 4° La mesure dans laquelle la pratique concernée prend en compte les mécanismes de négociation du marché concerné et permet aux participants à ce marché de réagir de manière adéquate et rapide à la nouvelle situation de marché qu'elle a créée ;

« 5° Le risque que représente la pratique concernée pour l'intégrité des marchés qui s'y rattachent directement ou indirectement, sur lesquels se négocie le même instrument financier dans la Communauté européenne, qu'ils soient ou non réglementés ;

« 6° Les conclusions de tout contrôle ou de toute enquête sur la pratique de marché concernée réalisé par l'AMF, par toute autre autorité ou entreprise de marché avec laquelle l'AMF collabore, par tout autre autorité ou entreprise de marché qui agit par délégation de l'AMF, sous la responsabilité de celle-ci ou par les autorités judiciaires agissant sur saisine de l'AMF, en particulier lorsque la pratique concernée a enfreint des règles ou dispositions destinées à prévenir les abus de marché ou des codes de conduite, que ce soit sur le marché concerné ou sur des marchés directement ou indirectement liés au sein de la Communauté européenne ;

« 7° Les caractéristiques structurelles du marché concerné , en particulier son caractère réglementé ou non, les types d'instruments financiers négociés et les types de participants à ce marché, notamment l'importance relative de la participation des investisseurs non professionnels ».

Conformément au point 3 de l'article 2 de la directive précitée, le II de l'article 612-2 du règlement général prévoit que l'AMF procède régulièrement au réexamen des pratiques de marché admises, en particulier pour prendre en compte les éventuelles modifications des règles de négociation de l'infrastructure de marché.

L'article 612-3 transpose les dispositions de l'article 3 de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée, relatives aux procédures de consultation d'autres autorités compétentes, permettant d'établir l'acceptabilité d'une pratique de marché lorsque l'AMF a été saisie d'une telle demande par une organisation professionnelle représentative d'une catégorie d'intervenants sur les marchés. Lorsque des contrôles ou enquêtes portent sur des cas déterminés, la procédure de consultation est suspendue le temps de leur achèvement. Selon un principe de parallélisme des formes, une pratique de marché qui a été acceptée à l'issue de la procédure de consultation ne peut être modifiée qu'après mise en oeuvre de la même procédure.

L'article 612-4 prévoit enfin les modalités de publication au Bulletin des annonces légales obligatoires (BALO) de la décision de l'AMF de refus ou d'acceptation d'une pratique de marché, en application du point 3 de l'article 3 de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004.

b) Titre II - Opérations d'initié

Les dispositions de ce titre, essentielles pour les opérateurs sur les marchés, définissent la notion d'information privilégiée et précisent les obligations d'abstention des détenteurs de telles informations.

(1) La définition circonstanciée et précise de l'information privilégiée

La définition de l'information privilégiée posée par l'article 621-1 est exactement celle que prévoient le point 1 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003 et les points 1 et 2 de l'article premier de la directive d'application 2003/124/CE du 22 décembre 2003. Ces deux derniers points apportent des précisions sur le caractère précis de l'information privilégiée et sur la notion d'influence sensible qu'elle est susceptible d'exercer sur les cours des instruments financiers :

« Une information est réputée précise si elle fait mention d'un ensemble de circonstances ou d'un événement qui s'est produit ou qui est susceptible de se produire et s'il est possible d'en tirer une conclusion quant à l'effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés.

« Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu'un investisseur raisonnable serait susceptible d'utiliser comme l'un des fondements de ses décisions d'investissement » .

Cette notion d'« influence sensible », importée de la législation communautaire, a suscité certains questionnements au sein de la doctrine 27 ( * ) , dans la mesure où le règlement 90-08 de la COB, désormais caduc, définissait comme privilégiée une information « qui, si elle était rendue publique, pourrait avoir une incidence sur le cours de la valeur ». L' « influence sensible » contribuerait dès lors, selon certains auteurs, à élargir le champ du manquement d'initié, introduirait une incertitude juridique sur la qualification de l'information privilégiée, potentiellement source de contentieux, et manifesterait de surcroît la variété des traductions auxquelles les directives communautaires sont susceptibles de donner lieu 28 ( * ) .

L'interprétation donnée par l'article 621-1 du règlement général de l'AMF paraît toutefois de nature à lever certains doutes , l'information privilégiée y étant assimilée aux éléments déterminants qui fondent la décision d'un investisseur. On peut, en outre, considérer que la notion d' « influence sensible » est en réalité plus restreinte et précise que celle d' « incidence », dont la traduction en termes de variation effective des cours paraît plus difficile à cerner.

L'article 621-2 adapte cette définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base . La définition posée par le point 1 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003 est complétée par deux conditions alternatives : les utilisateurs des marchés concernés devraient s'attendre à recevoir une telle information conformément aux pratiques de marché admises, lorsque cette information « est périodiquement mise à la disposition de leurs utilisateurs ou est rendue publique en application de la loi, des règlements ou des règles de marché, de contrats ou d'usages propres au marché du produit de base sous-jacent ou au marché d'instruments dérivés sur produits de base concernés ».

L'article 621-3 explicite enfin la notion d'information privilégiée pour les personnes chargées de l'exécution d'ordres portant sur des instruments financiers, et reprend à ce titre la rédaction prévue par le point 1 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003 pour ces opérateurs.

(2) Les obligations d'abstention

Le délit d'initié réside non dans la détention par une personne d'une information privilégiée, mais dans son utilisation. Cette détention implique donc diverses obligations d'abstention , conformes aux articles 2 et 3 de la directive-cadre précitée.

L'article 622-1 prévoit que toute personne « doit s'abstenir d'utiliser l'information privilégiée qu'elle détient en acquérant ou en cédant, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, soit directement soit indirectement, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés ». Cette abstention d'intervention sur les marchés s'accompagne d'une abstention de communication ou de recommandation à des tiers . La personne détentrice doit ainsi s'abstenir de :

« 1° Communiquer cette information à une autre personne en dehors du cadre normal de son travail, de sa profession ou de ses fonctions ou à des fins autres que celles à raison desquelles elle lui a été communiquée ;

« 2° Recommander à une autre personne d'acquérir ou de céder, ou de faire acquérir ou céder par une autre personne, sur la base d'une information privilégiée, les instruments financiers auxquels se rapportent cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés ».

Conformément au point 3 de l'article 2 de la directive-cadre précitée, ces obligations ne s'appliquent toutefois pas aux opérations effectuées pour assurer l'exécution d'une obligation contractuelle , dès lors que celle-ci a été conclue avant que la personne concernée soit détentrice de l'information privilégiée.

L'article 622-2 précise que ces obligations d'abstention s'appliquent à toute personne qui détient une information privilégiée en raison de :

« 1° Sa qualité de membre des organes d'administration, de direction, de gestion ou de surveillance de l'émetteur ;

« 2° Sa participation dans le capital de l'émetteur ;

« 3° Son accès à l'information du fait de son travail, de sa profession ou de ses fonctions, ainsi que de sa participation à la préparation et à l'exécution d'une opération financière ;

« 4° Ses activités susceptibles d'être qualifiées de crimes ou de délits ».

S'il s'agit d'une personne morale, les obligations d'abstention s'appliquent aux personnes physiques qui participent à la décision de procéder à l'opération pour son compte. Les obligations d'abstention s'appliquent également, ce qui semble pour le moins logique, à toute autre personne détenant une information privilégiée et qui « sait ou aurait dû savoir » qu'il s'agit d'une telle information.

c) Titre III - Manipulations de marché

Les manipulations de marché comprennent les manipulations de cours et la diffusion d'une fausse information. Le titre III précise également les modalités des « safe harbours » qui font bénéficier certaines pratiques de marché d'une présomption de légitimité, ainsi qu'il a été précédemment indiqué.

(1) Les manipulations de cours

L'article 631-1 pose un principe général d'abstention de procéder à des manipulations de cours . Celles-ci sont définies dans les mêmes termes que le point 2 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003. Deux principaux types d'opérations sont susceptibles de constituer une manipulation de cours :

« 1° Le fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres :

« a) Qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l'offre, la demande ou le cours d'instruments financiers ou ;

« b) Qui fixent, par l'action d'une ou de plusieurs personnes agissant de manière concertée, le cours d'un ou plusieurs instruments financiers à un niveau anormal ou artificiel , à moins que la personne ayant effectué les opérations ou émis les ordres établisse la légitimité des raisons de ces opérations ou de ces ordres et leur conformité aux pratiques de marché admises sur le marché réglementé concerné ».

Il convient ici de relever que le champ du régime administratif de la manipulation de cours ne concerne que les seules cotation et négociation sur un marché réglementé , et n'envisage donc pas les autres modes d'exécution reconnus par la directive 2004/39/CE relative aux marchés d'instruments financiers (cf. infra IV. C.) ;

« 2° Le fait d'effectuer des opérations ou d'émettre des ordres qui recourent à des procédés donnant une image fictive de l'état du marché ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice .

« En particulier, constituent des manipulations de cours :

« a) Le fait, pour une personne ou pour plusieurs personnes agissant de manière concertée, de s'assurer une position dominante sur le marché d'un instrument financier, avec pour effet la fixation directe ou indirecte des prix d'achat ou des prix de vente ou la création d'autres conditions de transaction inéquitables ;

« b) Le fait d'émettre au moment de l'ouverture ou de la clôture, ou le cas échéant lors du fixage, des ordres d'achat ou de vente d'instruments financiers du marché ayant pour objet d'entraver l'établissement du prix sur ce marché ou pour effet d'induire en erreur les investisseurs agissant sur la base des cours concernés ».

L'article 631-3 complète les critères d'analyse par l'AMF de ces pratiques de marché potentiellement trompeuses par deux indices , qui ne sont pas en eux-mêmes constitutifs d'une manipulation de cours et ont trait à la diffusion, avant ou après les opérations en cause, d'informations, de travaux de recherche ou de recommandations faux ou biaisés.

L'article 631-2 du règlement général reprend in extenso la liste des critères de marché de l'article 3 de la directive d'application 2003/124/CE du 22 décembre 2003 qui sont analysés par l'AMF pour apprécier la présence d'une manipulation de cours, sans pour autant que ces éléments constituent en eux-mêmes une telle manipulation. Ces sept indices sont les suivants :

« L'importance de la part du volume quotidien des transactions représentée par les ordres émis ou les opérations effectuées sur l'instrument financier concerné, en particulier lorsque ces interventions entraînent une variation sensible du cours de cet instrument ou de l'instrument sous-jacent ;

« L'importance de la variation du cours de cet instrument ou de l'instrument sous-jacent ou dérivé correspondant admis à la négociation sur un marché réglementé, résultant des ordres émis ou des opérations effectuées par des personnes détenant une position vendeuse ou acheteuse significative sur un instrument financier ;

« 3° La réalisation d'opérations n'entraînant aucun changement de propriétaire bénéficiaire d'un instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé ;

« 4° Les renversements de positions sur une courte période résultant des ordres émis ou des opérations effectuées sur le marché réglementé de l'instrument financier concerné, associés éventuellement à des variations sensibles du cours d'un instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé ;

« 5° La concentration des ordres émis ou des opérations effectuées sur un bref laps de temps durant la séance de négociation entraînant une variation de cours qui est ensuite inversée ;

« 6° L'effet des ordres qui sont émis sur les meilleurs prix affichés à l'offre et à la demande de l'instrument financier, ou plus généralement de la représentation du carnet d'ordres auquel ont accès les participants au marché et qui sont annulés avant leur exécution ;

« 7° Les variations de cours résultant des ordres émis ou des opérations effectuées au moment précis ou à un moment proche de celui où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations » .

(2) Les « safe harbours » et le nouveau régime des opérations des émetteurs sur leurs propres titres

Les programmes de rachat par les émetteurs de leurs propres titres (généralement des actions), qui connaissent un certain développement depuis 2000, ainsi que l'a rappelé un bilan statistique de l'AMF établi en novembre 2004 29 ( * ) , mais dont l'impact potentiel sur les cours requiert un encadrement précis, bénéficient dans certaines conditions d'une présomption de légitimité au regard de la définition des manipulations de marché. Ils ont fait l'objet du règlement européen n° 2273/2003 du 22 décembre 2003, précité, pris en application de la directive-cadre du 28 janvier 2003, et qui concerne également les stabilisations d'instruments financiers.

La mise en oeuvre du règlement européen n'entraîne pas un bouleversement complet du régime français des rachats d'actions . La majorité des conditions prévues par le règlement existaient en effet déjà, si ce n'est avec les mêmes modalités, au moins dans leur principe, dans le précédent régime de rachat d'actions défini par les règlements COB n° 90-04 et n° 98 02, notamment en ce qui concerne la publicité préalable à la mise en oeuvre du programme, l'encadrement du prix et des volumes et les périodes d'abstention (cf. encadré ci-après).

Ainsi qu'il a été souligné, la principale modification provient de la limitation à deux du nombre d'objectifs légitimes des programmes de rachat alors que, dans la pratique française, les objectifs invoqués par les émetteurs s'étaient multipliés au cours des dernières années. L'AMF a ainsi constaté que les sociétés mettant en oeuvre des programmes de rachat pouvaient afficher jusqu'à six objectifs différents par programme , les plus fréquemment invoqués étant l'attribution d'actions ou d'options d'achat aux salariés et/ou aux dirigeants, l'annulation des titres achetés, la remise d'actions dans le cadre d'opérations de croissance externe, la régularisation de cours et l'intervention en fonction des situations de marché.

Rappelons qu'en application de l'article L. 225-209 du code de commerce, les sociétés dont les titres sont cotés sur un marché réglementé sont autorisées à acheter leurs propres actions dans la limite de 10 % de leur capital . L'assemblée générale des actionnaires doit alors autoriser le conseil d'administration (ou le directoire) à procéder au rachat des actions et fixer les finalités, les modalités et le plafond de ces rachats. Une note d'information doit être établie par la société, soumise au visa de l'AMF et rendue publique avant la tenue de l'assemblée générale devant autoriser le programme de rachat.

Le règlement communautaire du 22 décembre 2003, dont les principales dispositions ont été exposées supra , étant d'application directe dans les législations nationales, l'article 631-5 du règlement général de l'AMF prévoit que les opérations réalisées dans le cadre de programmes de rachat de titres ne sont pas constitutives de manipulations de marché dès lors qu'elles sont effectuées conformément aux modalités d'acquisition prévues par ce règlement européen.

De même, l'article 631-6, conformément à l'article 6 du règlement précité, définit la double « fenêtre d'abstention » ou « fenêtre négative », exprimée en jours calendaires, durant laquelle un émetteur ne doit pas intervenir sur ses propres titres. Cette définition reprend celle donnée auparavant dans l'article 8 de l'ancien règlement COB n° 90-04, tout en précisant que les comptes intermédiaires sont compris dans le champ de l'interdiction. Il s'agit de :

- la période comprise entre la date à laquelle la société a connaissance d'une information privilégiée et la date à laquelle cette information est rendue publique ;

- et de la période de quinze jours précédant les dates auxquelles ses comptes consolidés ou sociaux annuels, ainsi que ses comptes intermédiaires (c'est-à-dire semestriels, et le cas échéant trimestriels, conformément aux dispositions de la directive « transparence » du 15 décembre 2004), sont rendus publics.

L'application de ces dispositions peut néanmoins être écartée lors de la mise en oeuvre d'une pratique de marché admise , si la décision d'acceptation de cette pratique le permet expressément. Par deux décisions du 22 mars 2005, l'AMF a ainsi admis, en tant que pratiques de marché constitutives d'une présomption simple de légitimité (cf. infra ), l'acquisition d'actions propres aux fins de conservation et de remise ultérieure en paiement ou en échange dans le cadre d'opérations de croissance externe, ainsi que les rachats opérés dans le cadre d'un contrat de liquidité conclu avec un prestataire de services d'investissement .

Depuis le 13 octobre 2004, date d'entrée en vigueur directe du règlement européen n° 2273/2003 précité, un certain nombre de règles prévues par l'autorité boursière en matière de rachats d'actions ont été rendues caduques , en particulier :

- le règlement COB n° 90-04 modifié par les règlements n° 92-03, n° 98-03, n° 2000-06 et n° 2002-02 relatif à l'établissement des cours ;

- le règlement COB n°98-02 modifié par le règlement n° 2000-06 de la COB relatif à l'information à diffuser à l'occasion de programmes de rachats de titres de capital admis aux négociations sur un marché réglementé ;

- l'instruction COB d'octobre 2003 prise en application du règlement n° 98-02 relatif à l'information à diffuser à l'occasion de programmes de rachats de titres de capital admis aux négociations sur un marché réglementé ;

- l'instruction COB du 10 avril 2001 prise en application du règlement n° 90-04 relatif à l'établissement des cours ;

- diverses recommandations et précisions techniques sur la mise en oeuvre des programmes de rachat.

L'application du règlement européen a induit l'adoption par l'AMF d'un nouveau régime global du rachat d'actions propres , qui ne se traduit pas uniquement par les dispositions intégrées dans le titre VI du règlement général relatif à l'abus de marché, et dont les principales modalités sont exposées dans l'encadré ci-après.

Il apparaît qu'au-delà du double objectif qui constitue la présomption irréfragable de légitimité, les pratiques consistant à mettre en place un programme de rachat planifié , c'est-à-dire dont le calendrier précis est fixé au moment de sa publication, ou à confier l'exécution du programme à un prestataire de services d'investissement (PSI) dans le cadre d'un contrat de liquidité, sont de nature à sécuriser, tant sur le plan technique que juridique, la mise en oeuvre de tels programmes, et ce faisant, à atténuer les soupçons de manipulation de marché susceptibles de peser sur ces rachats.

La nouvelle réglementation applicable à la mise en oeuvre des programmes de rachat d'actions

1 - La prévention de l'abus de marché, pierre angulaire du nouveau régime

Le règlement européen n° 2273/2003 fixe les conditions que doivent respecter les émetteurs procédant au rachat de leurs propres titres afin de pouvoir bénéficier de la présomption irréfragable de légitimité, et qui peuvent être classées en quatre catégories : les deux objectifs légitimes, l'information du marché, les conditions d'intervention et les restrictions imposées pendant la durée du programme, et les périodes spécifiques qualifiées de « fenêtres négatives ». La réglementation de l'AMF prévoit également des conditions afférentes à des instruments ou modalités spécifiques d'intervention sur les marchés (transactions par blocs, instruments dérivés et recours aux PSI) lors de la mise en oeuvre de programmes de rachat d'actions.

2 - Les objectifs des programmes de rachat au regard de la présomption de légitimité

Au-delà des deux objectifs constitutifs de la présomption irréfragable, le dispositif communautaire sur l'abus de marché permet aux régulateurs nationaux d'attribuer une présomption simple à certaines pratiques de marché admises et conformes à une liste de critères. L'AMF a ainsi très récemment accepté deux pratiques de marché complémentaires , qui ont fait l'objet de deux décisions de l'Autorité prises le 22 mars 2005.

a) Le rachat pour conservation et remise dans le cadre d'opérations de croissance externe

Par une décision du 22 mars 2005, l'AMF a ainsi admis, comme pratique de marché, « l'acquisition d'actions propres aux fins de conservation et de remise ultérieure en paiement ou en échange dans le cadre d'opérations de croissance externe ». Se fondant sur les dispositions communautaires relatives à l'abus de marché, cette décision rappelle les sept critères pris en compte pour déterminer l'acceptabilité d'une pratique de marché 30 ( * ) et en précise l'interprétation au regard des opérations de croissance externe. Elle détaille également les modalités de mise en oeuvre de ladite pratique, dans les termes suivants :

« a) Modalités d'intervention

« (...) Les acquisitions peuvent être réalisées par voie de blocs. Les interventions réalisées dans le cadre de cette pratique ne doivent à aucun moment conduire l'émetteur à détenir plus de 10% de son capital.

« b) Affectation à d'autres objectifs et cession des titres acquis

« Lorsque la conservation des titres acquis dans le cadre de cette pratique n'est plus nécessaire, l'émetteur peut décider, soit de réaffecter ces titres à l'un des objectifs mentionnés à l'article 3 du règlement précité ou à une autre pratique de marché, soit de les céder . L'émetteur informe le marché et ses actionnaires de cette décision au plus tard lors de l'assemblée générale suivant la date à laquelle cette décision a été prise.

« Si l'émetteur a mis en oeuvre un programme de rachat d'actions, les opérations de cession sont réalisées par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement agissant de manière indépendante ou par voie de blocs.

« c) Présomption de légitimité quant à l'utilisation ultérieure des titres

« Lorsque les titres remis en paiement dans le cadre d'une opération de croissance externe par un émetteur représentent un pourcentage supérieur à 1 % de son capital , l'utilisation de ces titres est présumée légitime si, préalablement à la réalisation de l'opération, l'émetteur a nommé un expert indépendant en vue de vérifier la valeur des titres, la valeur des biens achetés ainsi que l'équité du rapport d'échange ».

b) Le rachat dans le cadre d'un contrat de liquidité

Dans sa décision du 22 mars 2005, l'AMF décrit en premier lieu cette pratique de marché, et précise que toute société cotée sur un marché réglementé peut conclure un contrat de liquidité avec un PSI. Ce contrat définit les conditions dans lesquelles le PSI intervient pour le compte de l'émetteur à l'achat ou à la vente, pour favoriser la liquidité des transactions et la régularité des cotations des titres de l'émetteur ou éviter des décalages de cours non justifiés par la tendance du marché . Le contrat de liquidité doit respecter les principes énoncés dans la charte de déontologie de l'Association française des entreprises d'investissement (AFEI), annexée à la décision. Pour chaque catégorie différente de titres, l'émetteur ne peut avoir recours qu'à un seul prestataire de services d'investissement pour assurer l'animation du marché du titre concerné.

La décision de l'AMF, a l'instar de celle prise pour les opérations de croissance externe, détaille également les incidences pratiques des critères communautaires de détermination de l'acceptabilité de la pratique de marché, et les modalités de mise en oeuvre , en particulier au regard de l'information du marché, de la pratique de rachat dans le cadre d'un contrat de liquidité :

« a) Modalités d'intervention

« Les conditions de prix et de volume mentionnées à l'article 5 du règlement du 22 décembre 2003 et les restrictions mentionnées à l'article 6 dudit règlement ne s'appliquent pas aux opérations réalisées par un prestataire de services d'investissement dans le cadre d'un contrat de liquidité conforme à la pratique décrite dans la présente décision et aux principes énoncés dans la charte de déontologie établie par l'AFEI.

« Les opérations réalisées par un prestataire de services d'investissement dans le cadre d'un tel contrat ne doivent pas avoir pour effet de provoquer d'écart de cours artificiel par rapport à la tendance constatée sur le marché. Elles peuvent être réalisées par voie de blocs mais ne doivent à aucun moment conduire l'émetteur à détenir plus de 10 % de son capital.

« b) Modalités de publicité

« (...) L'émetteur informe le marché par voie de communiqué :

« - préalablement à sa mise en oeuvre , de la signature du contrat de liquidité en indiquant l'identité du prestataire de services d'investissement, le titre visé, le ou les marchés concernés ainsi que les moyens qui sont affectés au contrat ;

« - chaque semestre et lorsqu'il est mis fin au contrat , du bilan de sa mise en oeuvre en précisant les moyens en titres et en espèces disponibles à la date du bilan et à la signature du contrat ;

« - de toute modification des informations mentionnées au premier tiret.

` Le communiqué est mis en ligne sur le site de l'AMF ainsi que sur celui de l'émetteur lorsque celui-ci dispose d'un tel site.

« Les obligations d'information de l'émetteur sont réputées satisfaites lorsque les informations mentionnées ci-dessus sont rendues publiques préalablement à la mise en oeuvre d'un programme de rachat d'actions dans un communiqué ou une note d'information.

En revanche, l'AMF considère que les interventions réalisées directement par un émetteur en vue de régulariser le cours de bourse ou en fonction des situations de marché , telles qu'elles ont été définies par la COB en juin 2002, ne pourront plus être mises en oeuvre . Ces opérations conduisent en effet les émetteurs à intervenir à l'achat et à la vente au cours d'un même programme de rachat et sont interdites par le règlement européen, compte tenu du risque de manipulation de cours qu'elles représentent. En conséquence, toute activité visant à assurer la liquidité ou à animer le marché du titre devra désormais être confiée à un PSI agissant de manière indépendante, dans le cadre d'un contrat de liquidité.

3 - L'information du marché

L'émetteur doit désormais rendre public le détail de ses opérations au plus tard à la fin de la septième journée boursière suivant leur date d'exécution , par la mise en ligne sur le site Internet de l'AMF d'une déclaration et selon des modalités définies par l'instruction de l'AMF n° 2005-06 du 22 février 2005. Si celle-ci ne présente pas le même détail d'information que la déclaration mensuelle à l'AMF, requise jusqu'alors, cette dernière devra toujours lui être adressée, dans le format défini par l'instruction précitée. Néanmoins, si un émetteur décide d'informer le marché au plus tard sept jours après l'exécution des opérations en publiant le même degré d'information que celui exigé pour la déclaration mensuelle, il est dispensé de cette dernière obligation.

L'obligation d'informer le marché des opérations de rachat peut ne pas s'appliquer à une pratique de marché acceptée par l'AMF lorsque la décision d'acceptation de cette pratique le mentionne expressément. Il est ainsi prévu que cette obligation ne s'applique pas aux opérations réalisées dans le cadre d'un contrat de liquidité.

4 - Les conditions d'intervention

Ces conditions, fixées par l'article 5 du règlement du 22 décembre 2004, ont trait aux prix d'achat des titres et au volume maximal de transaction.

a) Les conditions relatives au prix

Le premier paragraphe de l'article 5 du règlement dispose qu'en « ce qui concerne les prix, l'émetteur s'abstient, lorsqu'il effectue des opérations dans le cadre d'un programme de rachat, d'acheter des actions à un prix supérieur à celui de la dernière opération indépendante ou, s'il est plus élevé, de l'offre indépendante actuelle la plus élevée sur la place où l'achat est effectué ». L'AMF interprète la notion de « dernière opération indépendante » comme le dernier cours coté résultant de l'exécution d'une transaction à laquelle l'émetteur n'a pas été partie prenante, ce qui inclut les opérations réalisées par un PSI dans le cadre d'un contrat de liquidité, et la notion d'« offre indépendante actuelle » comme le meilleur prix proposé à l'achat, par référence à la version anglaise du règlement européen, qui fait état de la notion de « highest current independant bid ».

Le règlement européen impose donc un prix plafond à l'émetteur, qui est équivalent au prix le plus haut entre le dernier cours coté et la meilleure limite à l'achat affichée dans le carnet d'ordres au moment de l'exécution du rachat.

S'agissant de l'utilisation - fréquente - d'instruments dérivés, la contrainte de prix implique désormais que seuls certains types de produits dérivés pourront bénéficier de la protection du règlement européen : si l'émetteur acquiert une option d'achat ( call ), celle-ci devra être « à la monnaie » lors de sa souscription, le prix d'exercice de l'option ne pouvant être supérieur au prix le plus élevé entre le dernier cours coté du sous-jacent et la meilleure limite actuelle à l'achat.

b) Les conditions relatives au volume échangé

S'agissant du volume, l'article 5 du règlement européen, précité, reprend le plafond de 25 % du volume quotidien moyen des actions négociées sur le marché réglementé concerné, qui figurait déjà dans l'ancien règlement COB n°90-04 . La période de calcul des 25 % est toutefois sensiblement modifiée et peut faire l'objet de deux méthodes .

Ce volume quotidien moyen est calculé, pour les programmes de rachat planifiés, sur la base du volume quotidien moyen des opérations réalisées au cours du mois précédant celui au cours duquel le programme de rachat est rendu public, et reste fixé sur cette base pour la durée autorisée du programme. Le règlement européen précise cependant que, dans le cas où le programme de rachat ne fait pas référence à la méthode précitée, le volume quotidien moyen est alors calculé, de manière glissante, sur la base du volume quotidien moyen des actions négociées au cours des vingt jours de négociation précédant le jour de l'achat. En conséquence, si dans la note d'information ou le communiqué publié préalablement à la mise en oeuvre du programme de rachat, il n'est pas expressément mentionné que le volume maximal sera calculé selon la première formule, c'est la seconde qui s'appliquera par défaut pendant toute la durée de mise en oeuvre du programme.

Le règlement européen permet enfin aux émetteurs de déroger à la règle des 25 % « en cas de liquidité extrêmement faible du marché en cause », à condition :

- d'informer préalablement l'autorité compétente du marché en cause de son intention de dépasser ce plafond ;

- d'informer d'une manière adéquate le public de cette possibilité de dépassement du plafond ;

- et de ne pas dépasser 50 % du volume quotidien moyen.

Compte tenu de la difficulté à définir la notion de « liquidité extrêmement faible » de façon générique, l'AMF n'a pas fixé de seuil en pourcentage ou en chiffre absolu pour l'ensemble des émetteurs cotés . En conséquence, les émetteurs qui estimeront se trouver dans une situation de liquidité extrêmement faible devront prendre contact avec les services compétents de l'AMF qui examineront les situations au cas par cas. Si à l'issue de cet examen, il est constaté qu'une souplesse est nécessaire pour s'adapter aux conditions particulières des marchés concernés, ces émetteurs devront publier un communiqué, mis en ligne sur leur site et sur celui de l'AMF, avant de pouvoir dépasser le plafond de 25 %. L'AMF réalisera un bilan à l'issue d'une année d'expérience , et appréciera la nécessité ou non de préciser les critères à prendre en compte pour apprécier la liquidité d'un titre.

5 - Les restrictions d'intervention

Ces restrictions ont trait à la vente d'actions propres et aux périodes d'abstention.

a) Les conditions relatives à la cession d'actions propres

En application du règlement européen précité, un émetteur qui vendrait ses propres actions au cours d'un programme de rachat (dont les bornes temporelles sont précisées par le règlement européen), quelle que soit la date d'acquisition ou l'origine de ces actions, ne bénéficierait plus de la présomption de légitimité pour la totalité des actions qui auraient été ou seraient achetées dans le cadre de ce même programme, sauf si ces cessions sont réalisées par voie de blocs et ne concourant pas à la formation du prix dans le carnet d'ordres.

L'émetteur peut cependant déroger à cette restriction s'il a mis en place un programme de rachat planifié , ou si l'exécution du programme de rachat est confiée à un PSI agissant de manière indépendante et dont les décisions d'ordres ne sont aucunement influencées par l'émetteur.

Ces dispositions ont une incidence importante sur la gestion du « stock » d'actions acquises avant le 13 octobre 2004 (date d'entrée en vigueur du règlement européen), dont les conditions ont été précisées dans l'instruction de l'AMF n° 2005-07 du 22 février 2005.

Un émetteur qui n'a pas mis en oeuvre le programme de rachat approuvé lors de sa dernière assemblée générale peut ainsi céder directement les titres acquis avant le 13 octobre 2004, et doit respecter les formalités de publicité.

Lorsque l'émetteur a mis en oeuvre un programme de rachat d'actions 31 ( * ) , ne peut bénéficier d'aucune des dérogations sus-mentionnées et qu'il souhaite conserver le bénéfice de la présomption, il peut céder les titres acquis avant le 13 octobre 2004 s'il confie cette cession à un intermédiaire agissant de manière indépendante , dans le cadre d'un mandat de cession qui doit mentionner expressément certaines informations, prévues par l'instruction précitée. Le mandat de cession est communiqué à l'AMF à sa demande, et les opérations réalisées dans le cadre d'un tel contrat doivent également faire l'objet d'une publicité au plus tard le septième jour de négociation suivant leur date d'exécution .

Naturellement, l'émetteur peut aussi décider de mettre un terme au programme de rachat en cours , et retrouve alors la possibilité de céder librement ses actions, sous réserve d'une publicité de sa décision.

Les mêmes règles s'appliquent pour la cession des titres acquis depuis le 13 octobre 2004 . Si l'émetteur a un programme de rachat en cours de réalisation, les actions acquises ne peuvent être cédées directement que par voie de blocs ou dans le cadre d'un mandat de cession conclu avec un PSI agissant de manière indépendante.

b) Les conditions afférentes à la période d'abstention

Ainsi qu'il a été précisé, l'article 631-6 du règlement général de l'AMF définit la double « fenêtre négative » pendant laquelle l'émetteur doit s'abstenir d'intervenir sur ses propres titres, dans la mesure où le règlement européen renvoie au droit national des Etats membres sur ce point. Cette restriction ne s'applique pas lorsque l'émetteur met en oeuvre un programme de rachat planifié ou lorsque le programme est exécuté par un PSI intervenant de manière indépendante.

6 - La réaffectation des titres acquis

Dans un communiqué du 13 octobre 2004, l'AMF a indiqué qu'un émetteur souhaitant bénéficier de la présomption irréfragable de légitimité devait immédiatement affecter les titres rachetés à un compte distinct réservé à l'un des objectifs prévus par le règlement , étant précisé que les actions ainsi acquises ne pourront pas être réaffectées ultérieurement à d'autres objectifs. L'émetteur a donc l'obligation d'assurer une parfaite traçabilité des ordres d'achat et de vente. Dans tous les cas, il doit informer la prochaine assemblée générale annuelle des affectations précises des actions rachetées.

Un émetteur qui aura affecté des actions à l'objectif d'annulation doit dès lors procéder à l'annulation effective de ses titres au plus tard le 31 décembre 2005 si ces actions ont été acquises avant le 13 octobre 2004, ou dans un délai de 9 mois suivant leur acquisition, si ces actions ont été acquises après le 13 octobre 2004. Si les actions ont été affectées à la couverture de plans d'options, l'émetteur peut alors réaffecter ces titres à l'objectif d'annulation ou les céder dans les conditions mentionnées ci-dessus. Ces actions ne peuvent pas être affectées à une pratique de marché admise.

A l'inverse, les actions acquises dans le cadre d'une pratique de marché admise par l'AMF, notamment dans le cadre d'un contrat de liquidité, pourront être affectées à l'annulation ou à la couverture . En ce qui concerne les titres acquis et conservés en vue d'une opération de croissance externe, l'émetteur peut décider de les réaffecter à un autre objectif en cas de changement de stratégie. Il peut également décider de céder ces actions dans les conditions prévues par la définition de la pratique de marché admise.

7 - Les opérations réalisées par voie de blocs d'actions

Le règlement européen du 22 décembre 2003 permet à un émetteur d'acquérir ses titres par blocs, mais soumet le bénéfice de la présomption aux conditions suivantes :

- s'agissant du prix , le règlement européen dispose que lorsque la place où l'achat est effectué n'est pas un marché réglementé, le prix de la dernière opération indépendante ou de l'offre indépendante actuelle la plus élevée pris comme référence est celui du marché réglementé de l'État membre où l'achat est effectué (cours de clôture ou dernière cotation au moment de la transaction hors marché) ;

- s'agissant du volume maximal , les transactions réalisées par voie de blocs et les applications ne concourant pas à la formation des cours, car exécutées en dehors du carnet d'ordres, doivent être exclues du calcul du volume. En effet, cette limitation du volume a pour objectif d'empêcher un émetteur d'influer, par des interventions massives, sur la formation du cours au sein du carnet d'ordres central.

8 - La limitation du nombre d'intermédiaires

Le règlement européen ne prévoit aucune limitation du nombre d'intermédiaires, alors que l'article 7 du règlement COB n° 90-04 le limitait à un seul, voire deux, lorsque l'émetteur réalisait partiellement son programme de rachat par l'utilisation de produits dérivés.

Compte tenu de la possibilité pour un émetteur de procéder à des rachats via un PSI tout en bénéficiant de la présomption, l'AMF accepte désormais que deux intermédiaires puissent intervenir au cours de la même séance pour deux objectifs différents , à condition qu'ils interviennent tous les deux dans le cadre de contrats qui garantissent leur indépendance vis-à-vis de l'émetteur.

9 - L'utilisation des produits dérivés dans le cadre de programmes de rachat

A la suite de la réforme du régime des rachats d'actions par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, la COB avait fixé les règles minimales à suivre qui permettent à un émetteur de céder des options de vente sur son propre titre. La COB avait ensuite lancé en mai 2003 une consultation publique sur l'utilisation de produits dérivés dans le cadre de programmes de rachat d'actions. L'article 5 du règlement européen du 22 décembre 2003 dispose quant à lui que « dans le cas où l'émetteur procède à l'achat d'actions propres au moyen d'instruments financiers dérivés, le prix d'exercice de ceux-ci n'est pas supérieur à celui de la dernière opération [indépendante] ou, s'il est plus élevé, de l'offre indépendante actuelle la plus élevée ». Cette contrainte a pour objectif d'empêcher toute possibilité de manipulation par un émetteur du cours de son propre titre lorsqu'il utilise des produits dérivés. L'encadrement du prix d'exercice implique désormais que les émetteurs, afin de bénéficier de la présomption, soient limités à un champ plus restreint de produits dérivés.

L'AMF considère désormais que les émetteurs peuvent utiliser des produits dérivés dans le cadre d'un programme de rachat d'actions, et plus spécifiquement acheter des options d'achat , sous réserve que ces opérations correspondent à la logique de l'objectif poursuivi et de respecter les conditions suivantes :

- les produits dérivés sont utilisés afin de couvrir des positions optionnelles prises, par ailleurs, par l'émetteur (options d'achat ou de souscription accordées aux salariés du groupe, titres de créance donnant accès au capital de l'émetteur) ;

- ces interventions ne concourent pas à la formation du cours , ni à l'ouverture ni à la clôture de la séance de bourse notamment, et elles n'ont pas pour objectif d'influer sur le cours de compensation d'un instrument financier dérivé du titre du capital ;

- une mention explicite , permettant à la société de procéder au rachat de ses propres titres au moyen de produits dérivés, doit être intégrée dans la résolution relative à l'autorisation d'achat d'actions votée par l'assemblée générale ;

- l'échéance minimale des produits dérivés ne peut être inférieure à trois mois , que ces produits soient cotés ou non ;

- le nombre d'actions propres de l'émetteur sur lequel portent les produits dérivés, défini comme la taille notionnelle, doit être pris en compte pour apprécier le seuil de détention maximal de 10 % prévu par l'article L. 225-209 du code de commerce ;

- lorsque la mise en place de produits dérivés par un émetteur occasionne des opérations de couverture par la contrepartie sous forme, par exemple, de la constitution d'un delta en titres sous-jacents, le volume de ces opérations doit être pris en compte pour le calcul de la limite maximale de 25 % des volumes quotidiens moyens prévue par le règlement européen.

Ces conditions s'appliquent à toutes les interventions, qu'elles soient réalisées dans le cadre des objectifs prévus par le règlement européen ou de pratiques de marché, étant entendu que l'utilisation des produits dérivés n'est pas admise dans le cadre des contrats de liquidité .

Enfin, s'agissant de la vente d'options de vente par un émetteur dans le cadre d'un programme de rachat, l'AMF considère que la cession de « puts » ne constitue pas une opération de couverture, et qu'en outre une telle opération consiste en une spéculation sur la volatilité anticipée du titre. Un tel comportement, de la part d'un émetteur, représente pour l'Autorité un risque qui ne semble pas correspondre aux objectifs d'un programme de rachat.

Il en résulte qu'un émetteur mettant en oeuvre un programme de rachat d'actions ne pourra pas recourir à ce type de produit dérivé.

Source : bulletin Jolynews des Editions Joly et publications de l'AMF (17 mars et 22 mars 2005)

Votre rapporteur général considère que l'encadrement, par l'AMF, de la pratique de marché afférente aux rachats d'actions aux fins de conservation et de remise dans le cadre d'opérations de rachat de sociétés, se montre insuffisant, en particulier au regard du délai d'utilisation des titres pour ce type d'objectif et du plafond de rachat susceptible de lui être affecté.

Votre rapporteur général estime, en effet, que certains abus et ambiguïtés constatés au cours des années récentes, les objectifs du nouveau dispositif communautaire de prévention de l'abus de marché, et l'esprit des recommandations formulées dans le rapport de M. Bernard Esambert et approuvées par le collège de la COB le 6 janvier 1998, ne sauraient conduire l'AMF à adopter une réglementation trop souple s'apparentant à un « blanc seing » pour des pratiques déjà existantes sur les marchés.

(3) Les exemptions prévues pour la stabilisation d'un instrument financier

L'article 631-7 du règlement général de l'AMF exempte les opérations réalisées par des prestataires de services d'investissement dans le cadre de la stabilisation d'un instrument financier, des règles relatives à la manipulation de cours, à condition que ces opérations soient réalisées dans le respect des dispositions du règlement n° 2273/2003 du 22 décembre 2003, précité, qui ont été évoquées supra .

Les articles 631-8 à 631-10 précisent les obligations d'information du public imposées à l'émetteur ou le cédant, selon le cas, ou à l'entité procédant aux opérations de stabilisation , qu'elle agisse ou non pour le compte de ces personnes. Ils doivent ainsi, en premier lieu, porter à la connaissance du public les informations mentionnées au point 1 de l'article 9 du règlement précité avant le début de la période d'offre sur le marché des instruments financiers. Ces informations, qui doivent être mises en ligne sur le site Internet de l'AMF et, le cas échéant, sur celui de l'émetteur, sont les suivantes selon les termes du règlement :

« a) le fait qu'une stabilisation peut être entreprise, qu'il n'est pas garanti qu'elle le soit effectivement et qu'il peut y être mis fin à tout moment ;

« b) le fait que les opérations de stabilisation visent à soutenir le prix des valeurs concernées sur le marché ;

« c) le début et la fin de la période durant laquelle une stabilisation peut avoir lieu ;

« d) l'identité du gestionnaire de la stabilisation, à moins qu'elle ne soit pas connue au moment de la publication, auquel cas elle est divulguée au public avant le début des opérations de stabilisation ;

« e) l'existence éventuelle et la taille maximale de toute facilité de surallocation ou option de couverture correspondante, la période d'exercice d'une telle option et les modalités éventuelles du recours à cette facilité ou de l'exercice de cette option.

En second lieu, l'émetteur, le cédant ou le prestataire doit également, aux termes de l'article 631-9, notifier à l'AMF, au plus tard le septième jour de négociation suivant la date d'exécution, les détails de toutes les opérations de stabilisation qui ont été réalisées , comme c'est également le cas pour les programmes de rachat de titres (cf. encadré précédent). L'article 631-10 prévoit enfin que les informations exigées par le point 3 de l'article 9 du règlement européen précité soient mises en ligne dans la semaine qui suit la fin de la période de stabilisation.

Aux termes du règlement européen, les informations qui doivent être publiées sont : le fait qu'une stabilisation a été effectuée ou non, la date de début de la stabilisation, la date à laquelle la dernière opération de stabilisation a été effectuée, et la fourchette de prix à l'intérieur de laquelle la stabilisation a eu lieu, pour chaque date à laquelle des opérations de stabilisation ont été effectuées.

(4) La diffusion d'une fausse information

La diffusion d'une fausse information est un comportement constitutif d'une manipulation de marché . Conformément au c) du point 2 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2003, l'article 632-1 du règlement général prévoit un principe général d'interdiction de communication ou de diffusion d'une information trompeuse, imprécise ou inexacte sur un instrument financier émis par voie d'appel public à l'épargne (donc au-delà de la simple admission aux négociations sur un marché réglementé, cf infra IV. C.), quel que soit le support utilisé et y compris en répandant des rumeurs.

En application des dispositions de la directive précitée, le second alinéa de cet article complète la définition de la diffusion d'une fausse information, qui est également constituée par « le fait d'émettre, sur quelque support que ce soit, un avis sur un instrument financier ou indirectement sur l'émetteur de celui-ci, après avoir pris des positions sur cet instrument financier et de tirer profit de la situation qui en résulte, sans avoir simultanément rendu public, de manière appropriée et efficace, le conflit d'intérêts existant ». Ce type de comportement concerne essentiellement l'activité de recherche et d'analyse financières, qui doit s'exercer dans le respect des « murailles de Chine » , lesquelles ont pour objet de prévenir la circulation indue d'informations confidentielles grâce au cloisonnement des activités de recherche et de placement de titres au sein d'un établissement financier.

Le troisième et dernier alinéa de cet article traite la situation spécifique des journalistes , dont le non-respect de l'interdiction de diffusion d'informations fausses ou trompeuses doit être apprécié en tenant compte de la réglementation applicable à cette profession . L'insertion des journalistes dans la liste des professions concernées par le dispositif de répression de l'abus de marché a en effet suscité des controverses , au motif qu'elle était susceptible de porter atteinte à l'indépendance et à la déontologie des journalistes.

Le règlement général de l'AMF, conformément à l'esprit et à la lettre du vingt-deuxième considérant 32 ( * ) et de l'article premier de la directive-cadre précitée 33 ( * ) , qui accordent une certaine latitude aux Etats membres, entend donc préserver un équilibre délicat entre les exigences propres à cette activité et le caractère transversal du régime de l'abus de marché. Le règlement général comme la directive font toutefois prévaloir les principales exigences de la répression de l'abus de marché , puisqu'il est précisé que le non-respect de l'interdiction précitée « est susceptible de constituer par lui-même un manquement dès lors que les intéressés retirent, directement ou indirectement, un avantage ou des profits de la diffusion de telles informations ».

IV. LA NOUVELLE ARCHITECTURE BOURSIÈRE INTRODUITE PAR LA DIRECTIVE DU 20 AVRIL 2004 SUR LES MARCHÉS D'INSTRUMENTS FINANCIERS

A. LA « DSI » DU 10 MAI 1993, INSTRUMENT INACHEVÉ DE LA RÉALISATION DU MARCHÉ UNIQUE DES SERVICES FINANCIERS

La directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement dans le domaine des valeurs mobilières, dite « DSI », entrée en vigueur le 31 décembre 1995 et transposée en droit français par la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières 34 ( * ) , fut présentée par la Commission européenne comme la « pierre angulaire » de la création d'un marché unique des valeurs mobilières en Europe. Cette directive, en créant la notion d'entreprise d'investissement, a permis l'introduction d'un « passeport européen », accordant aux entreprises qui en bénéficient la capacité pour fournir des services d'investissement (et éventuellement des activités connexes) dans les Etats membres de l'Espace économique européen, en libre établissement et en libre prestation de services. Ce passeport s'est traduit par une reconnaissance mutuelle des agréments des Etats d'origine (dont les conditions de délivrance ont fait l'objet d'une harmonisation minimale), et par un principe de contrôle et de sanction par l'Etat d'origine, quel que soit l'Etat membre dans lequel le manquement soumis a été réalisé.

La DSI a également laissé aux Etats membres la faculté de faire prévaloir le principe de concentration des ordres boursiers sur des marchés dits « réglementés », mais sans pour autant donner une définition précise de ces derniers et en accordant aux Etats membres une certaine latitude quant à la fixation de leurs critères de qualification, et à leur droit d'autoriser ou d'interdire la création de tels marchés. Ces dispositions se trouvaient au coeur de la dualité traditionnelle entre « marché régi par les prix » , qui est l'apanage des pays de tradition anglo-saxonne, et « marché régi par les ordres » , que privilégient les pays d'Europe continentale, dont la France. La transposition de la DSI en droit français a donc fait prévaloir le principe de centralisation des ordres sur les marchés réglementés, prévu par l'article L. 421-12 du code monétaire et financier 35 ( * ) .

Ce même article, conformément aux dispositions de la DSI, selon lesquelles le principe de centralisation n'implique pas un monopole des marchés réglementés, prévoit toutefois une dérogation 36 ( * ) à la règle de centralisation des ordres, soumise à des conditions de territorialité et aux caractéristiques des transactions fixées par le règlement général de l'AMF.

B. UNE RÉNOVATION CONCEPTUELLE À LA FAVEUR DE LA MODERNISATION DE LA « DSI »

1. La nécessaire modernisation de la « DSI »

Les importants changements technologiques (dématérialisation des titres, cotation électronique et bourse en ligne en particulier), l'avènement de l'euro, l'accroissement des transactions transfrontalières, l'émergence d'une nouvelle génération de prestataires de services financiers et les évolutions des marchés financiers (consolidation et concentration des entreprises de marché, accélération de l'intégration des mécanismes de compensation et de règlement, etc .), intervenus depuis 1993, ont incité la Commission européenne à promouvoir une modernisation de la DSI .

2. La genèse de la « directive MIF »

Cet objectif est, ainsi, devenu un des éléments essentiels du Plan d'action pour les services financiers, ainsi qu'il a été précisé supra . Les quatre priorités annoncées par la Commission furent :

- l'amélioration du fonctionnement du passeport pour les entreprises d'investissement, dont l'utilité s'est révélée compromise par d'importantes dérogations limitant son champ d'application ;

- la reconnaissance et l'application de normes de contrôle communes pour de nouvelles formes de prestations de services, en particulier des systèmes de négociations alternatifs ( alternative trading systems - ATS, selon l'ancienne appellation, multilateral trading facilities - MTF, selon la nouvelle) qui font concurrence aux entreprises de marché, et occasionnellement aux fournisseurs d'infrastructures ;

- le développement des mécanismes d'échange d'informations et de coopération entre autorités boursières nationales ;

- et surtout, la mise en place d'une concurrence effective entre les divers lieux et modes d'exécution des ordres, quel que soit leur statut , et partant, entre les marchés financiers, réglementés ou non, et les nouvelles plates-formes de négociation, en particulier celles « internalisées » au sein des prestataires de services d'investissement 37 ( * ) , appelés « internalisateurs systématiques », en respectant des normes de transparence et de divulgation d'informations sur les ordres traités 38 ( * ) .

Sur le fondement de travaux initiés au premier semestre 2000, la Commission européenne a ainsi publié, le 19 novembre 2002, une proposition de directive destinée à remplacer la DSI. Après deux années d'âpres débats, la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil concernant les marchés d'instruments financiers a été définitivement adoptée le 21 avril 2004. Elle est communément désignée par le vocable « directive MIF ».

Conformément aux préconisations du Comité des sages présidé par M. Alexandre Lamfalussy, cette directive a été conçue comme une directive-cadre définissant les principes et obligations générales que les Etats membres devront mettre en oeuvre, selon le même procédé que celui adopté pour la directive « abus de marché » du 28 janvier 2003, précitée. Les mesures d'exécution plus détaillées relèvent donc du niveau 2 du processus Lamfalussy (cf. supra ), et sont fixées par la Commission européenne, assistée du Comité européen des valeurs mobilières (CEVM) et du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM/CESR).

Ce travail de « comitologie » a été amorcé dès le début 2004, par l'intermédiaire de mandats provisoires et matériellement circonscrits délivrés par la Commission au CERVM. La difficulté de ce processus législatif réside néanmoins dans sa technicité, et dans le fait que les controverses nées au cours des débats portant sur la directive cadre ont conduit les parties à confier au niveau 2 la définition de certaines mesures jugées essentielles par les opérateurs , en particulier s'agissant de la transparence pré-transaction et des moyens par lesquels les entreprises d'investissement peuvent se conformer à certaines obligations, et échappant de fait à toute emprise des législateurs nationaux.

Le délai de transposition de la « directive MIF » a été initialement fixé au 1 er mai 2006. Compte tenu de son impact et du nombre de questions techniques qui doivent être traitées en comitologie, ce délai devrait être reportée de six mois, soit au 31 octobre 2006 , pour une application dans les Etats membres au 30 avril 2007.

3. Vers une nouvelle architecture des marchés financiers

La principale innovation de la « directive MIF » a trait à l'architecture même des marchés financiers, puisqu'il s'agit de mettre en place un cadre réglementaire global s'appliquant aux différents modes d'exécution des ordres, et non plus aux seuls marchés réglementés comme le prévoyait la DSI, et de permettre ainsi une plus grande concurrence entre marchés réglementés, plates-formes multilatérales et systèmes internes de négociation. Ces deux derniers systèmes sont gérés par les entreprises d'investissement elles-mêmes, et ont connu un certain développement depuis une dizaine d'années, contribuant à atténuer la frontière entre intermédiaires et marchés .

Ainsi qu'il a été précisé plus haut, cette reconnaissance de différents modes d'exécution des ordres s'exerce sans préjudice du critère juridique de l'admission des titres à la négociation sur un marché réglementé , qui emporte toute une série de conséquences dans la législation boursière. Dans le cadre de la « directive MIF », les ordres exécutés par des internalisateurs portent sur des titres qui sont nécessairement admis à la négociation sur un marché réglementé 39 ( * ) , mais il peut en être autrement pour les MTF (cf. commentaire de l'article 5 du présent projet de loi). Il en résulte que la compétence des autorités nationales de régulation ne se limite pas au seul mode de négociation sur un marché réglementé, mais devra vraisemblablement être adaptée , en particulier en vue d'assurer une meilleure surveillance de l'abus de marché (cf. infra ).

Cette nouvelle organisation a en premier lieu pour finalité de bénéficier aux investisseurs , la concurrence étant censée aboutir à une amélioration de la qualité et à une diminution des coûts de transaction. Elle est néanmoins porteuse de quatre principaux risques :

- le risque le plus souvent mis en exergue est celui de la fragmentation des bassins de liquidité - élément qui détermine la « profondeur » des marchés boursiers - sur plusieurs lieux de négociation, d'où il résulte un double risque de détérioration du processus de formation des prix et de moins bonne accessibilité des investisseurs à l'information nécessaire à leur décision d'investissement ;

- la faculté, pour les investisseurs, d'apprécier et de comparer la qualité d'exécution des ordres peut être rendue plus difficile , compte tenu de la multiplicité des lieux de négociation offrant chacun leurs propres conditions, et de la disparition du rôle de référence que jouaient les cours établis sur les marchés réglementés ;

- la nouvelle organisation pourrait accroître les risques de conflits d'intérêt au sein des entités qui exécuteront les ordres de leurs clients par voie d'internalisation ;

- elle complique enfin la mission des autorités de régulation en matière de surveillance du marché.

Les rédacteurs de la directive n'ont pas éludé ces risques, et les autorités françaises ont plaidé, lors des travaux de révision de la DSI, pour que la nouvelle architecture des marchés n'altère pas leur efficience ni la protection des investisseurs et la qualité du processus de formation des prix. La directive prévoit donc un certain nombre de gardes fous , détaillés dans le commentaire de l'article 5 du présent projet de loi, qui sont de cinq ordres :

- des règles de transparence des informations pré et post-négociation sur les différents canaux . Les systèmes multilatéraux que sont les marchés réglementés et les MTF sont soumis aux mêmes règles, tandis que les systèmes internes, qui ne contribuent pas directement à la formation des cours, sont soumis à des règles spécifiques. Les débats se sont en particulier focalisés sur la question de l'opportunité d'une transparence pré-négociation pour les internalisateurs, à laquelle les anglo-saxons se montraient plutôt opposés. L'inclusion de cette obligation de transparence dans le texte final a contribué à rapprocher le compromis des positions françaises ;

- des règles de traitement des ordres de client , portant en particulier sur le « routage » des ordres à cours limité, que les systèmes internalisés ne peuvent exécuter, vers les systèmes multilatéraux ;

- une règle de « meilleure exécution » , que doivent respecter les entreprises d'investissement et qui permet de suppléer partiellement la concentration de la liquidité sur les marchés réglementés. Cette règle se traduit par une comparaison « multi-critères » des transactions et la mise en place, par l'entreprise d'investissement, de procédures tendant à garantir la meilleure exécution possible ;

- le traitement d'ordres hors marchés réglementés ou MTF requiert que les entreprises d'investissement obtiennent l'accord préalable de leurs clients ;

- un renforcement des règles de prévention et de gestion des conflits d'intérêt au sein des entreprises d'investissement.

Il importe donc que les mesures harmonisées de niveau 2 ne dénaturent pas les garanties et règles de transparence prévues par la directive-cadre, et préservent l'objectif de convergence des pratiques nationales . Les risques de disparités dans l'application par les Etats membres seront ainsi fonction du plus ou moins grand degré de précision de ces nouvelles règles. La transposition par ordonnance dans notre droit doit également être suffisamment encadrée. Votre rapporteur général vous propose à ce titre un amendement à l'article 5 du présent projet de loi.

C. L'ARTICULATION ENTRE LA « DIRECTIVE MIF » ET LA RÈGLEMENTATION RELATIVE À L'ABUS DE MARCHÉ

Ainsi qu'il a été souligné, le dispositif communautaire relatif à l'abus de marché s'applique à l'ensemble des instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé, indépendamment du mode d'exécution des ordres. Dès lors que l'on distingue le critère juridique d'admission d'un titre à la négociation sur un marché réglementé du mode de négociation et d'exécution des ordres et de la notion plus large d'appel public à l'épargne (qui inclut la cotation sur un marché réglementé mais ne se confond pas avec elle), quatre situations différentes apparaissent susceptibles de s'appliquer aux titres proposés par un émetteur :

- la cotation et la négociation sur un marché réglementé, cas aujourd'hui majoritaire dans le système boursier français ;

- la cotation sur un marché réglementé et la négociation sur un autre marché, tel qu'un MTF ou un système internalisé ;

- la cotation et la négociation sur un marché non réglementé. Tel est le cas, par exemple, des MTF tels qu'Alternext pour le marché français (plate-forme récemment créée par Euronext Paris et dont le lancement effectif devrait intervenir très prochainement) ou AIM, géré par le London Stock Exchange , sur lesquels les titres négociés ne sont pas nécessairement cotés sur un marché réglementé ;

- enfin l'appel public à l'épargne « simple », donc sans cotation sur un marché, réglementé ou non.

Les compétences de l'AMF en cas de manquement administratif constitutif d'un abus de marché, telles qu'elles résultent du règlement général du 24 novembre 2004, ne couvrent pas l'ensemble des situations . La diffusion de fausse information est ainsi sanctionnée pour tout instrument financier émis par voie d'appel public à l'épargne, donc quels que soient les modes de cotation et de négociation. Le manquement d'initié est en revanche sanctionné lorsqu'il a trait à un titre coté sur un marché réglementé, ce qui correspond aux deux premières situations précitées. Le régime de la manipulation de cours ne concerne enfin que les seules cotations et négociation sur un marché réglementé, par référence aux « pratiques de marché admises » sur ce type de marché.

Il sera donc nécessaire de préciser et d'adapter le pouvoir de sanction de l'AMF, afin de lui donner les capacités d'intervenir sur l'ensemble des abus de marché . D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, un prochain texte de loi relatif à la confiance et à la modernisation de l'économie devrait octroyer à l'AMF le pouvoir (mais non l'obligation) de décider de l'application des règles relatives à l'abus de marché pour les configurations de marché qui ne sont aujourd'hui pas couvertes. L'AMF devrait en particulier pouvoir assurer une supervision de marchés organisés non réglementés , tels que les MTF exerçant une fonction d'admission à la cotation (cf. commentaire de l'article 5 du présent projet de loi), à la demande des organisateurs de tels marchés. Pour ces derniers, une telle démarche participerait en effet de la mise en place d'un « label » de qualité destiné à renforcer la confiance des investisseurs dans le MTF concerné.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er

Déclaration d'opérations suspectes à l'Autorité des marchés financiers

Commentaire : le présent article a pour objet de créer une obligation de déclaration, imposée aux intervenants professionnels sur les marchés financiers et établie auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF), des opérations suspectes portant sur des instruments financiers cotés. Il prévoit les conditions de la déclaration, son contenu, ses modes de transmission, ainsi que le régime de responsabilité des personnes procédant à la notification et destinataires de celle-ci.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE MÉCANISME DE DÉCLARATION DE SOUPÇON EXISTANT EN MATIERE DE LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DES CAPITAUX

1. Un défi croissant qui implique des obligations étendues

Dans un contexte marqué par la multiplication, la complexification et l'internationalisation des flux financiers, la lutte contre le financement du terrorisme et contre le blanchiment 40 ( * ) des capitaux issus du trafic de drogue et du crime organisé constitue un défi important pour le monde économique et a suscité aux niveaux communautaire 41 ( * ) et national une législation étoffée au cours des quinze dernières années, ainsi que l'établissement de recommandations précises par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

Se fondant sur le principe de la connaissance du client, ce cadre juridique présente l'originalité de requérir le concours des acteurs financiers, et plus particulièrement des établissements de crédit, pour la mise en oeuvre de cette police des capitaux et la détection des flux d'origine (s'agissant du trafic de stupéfiants) ou à vocation (s'agissant du terrorisme) illicites .

Les établissements financiers et certaines professions réglementées, telles que les notaires et les avocats, sont ainsi soumis à un certain nombre d'obligations de vigilance , régies par les articles L. 563-1 à L. 563-6 du code monétaire et financier. Elles consistent par exemple à identifier tout client avant de nouer une relation contractuelle avec lui, à identifier les clients « occasionnels » qui demandent à réaliser des opérations d'un montant supérieur à 8.000 euros ou à louer un coffre, et à surveiller particulièrement les opérations d'un montant supérieur à 150.000 euros, qui se présentent dans des conditions inhabituelles de complexité et ne paraissent pas avoir de justification économique ou d'objet licite.

2. La prévention par la déclaration d'opérations suspectes

Les dispositions du présent article tendent à s'inspirer du mécanisme de « déclaration de soupçon » prévu en matière de lutte contre le blanchiment , pour l'appliquer aux opérations susceptibles d'être constitutives d'abus de marché.

Un grand nombre de professionnels 42 ( * ) au contact d'investisseurs sont soumis à une obligation de déclaration de soupçon portant, aux termes de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, sur les sommes et opérations qui pourraient provenir du trafic de stupéfiants 43 ( * ) , d'activités criminelles organisées, de la corruption et de la fraude aux intérêts des Communautés européennes, ou qui pourraient participer au financement du terrorisme 44 ( * ) .

Cette déclaration est adressée à la cellule TRACFIN , service administratif rattaché au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dont les attributions ont été fixées par la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants, et dont l'activité opérationnelle a véritablement démarré le 13 février 1991. Selon la Fédération bancaire française, 9.007 déclarations de soupçon ont ainsi été reçues par TRACFIN en 2003 (8.719 en 2002 et 4.639 en 2001), dont les trois quarts émanaient des établissements de crédit.

Cette obligation de déclaration a été étendue par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, d'une part, aux opérations dont l'identité du donneur d'ordre ou du bénéficiaire reste douteuse malgré les vérifications d'identité auxquels les organismes financiers doivent procéder, et d'autre part, aux opérations faisant apparaître un fonds fiduciaire dont l'identité des constituants ou des bénéficiaires n'est pas connue.

Ces dernières obligations peuvent en outre être étendues par décret à certains pays dont la législation est reconnue comme insuffisante, ou dont les pratiques sont considérées comme faisant obstacle à la lutte contre le blanchiment des capitaux par le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) de l'OCDE 45 ( * ) .

B. LES DISPOSITIONS PRÉVUES PAR LE NOUVEAU RÉGIME COMMUNAUTAIRE DE L'ABUS DE MARCHÉ

1. La déclaration de soupçon, élément déterminant de la prévention des abus de marché

La déclaration d'opérations suspectes auprès d'une autorité compétente participe de la prévention des délits d'initiés et des manipulations de marché, qui a fait l'objet d'un important dispositif législatif communautaire que le présent projet de loi propose de transposer.

Ainsi qu'il a été précisé, cette législation est structurée en deux « étages » comprenant une directive-cadre, la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (directive « abus de marché »), et quatre textes d'application venant préciser les incidences organisationnelles et techniques des principes exposés par cette directive-cadre.

Le vingt-septième considérant de la directive 2003/6/CE pose un principe d'implication des acteurs financiers dans la prévention et la détection des abus de marché , analogue à celui prévalant en matière de lutte contre le blanchiment, en précisant qu' « il convient que les opérateurs de marché contribuent à prévenir les abus de marché et adoptent des dispositions structurelles visant à empêcher et à déceler les pratiques de manipulations de marché. Au nombre de ces dispositions peuvent figurer des prescriptions concernant la transparence des opérations conclues (...) (et) l'introduction d'un système efficace de détection des ordres anormaux (...) ».

Le point 9 de l'article 6 de cette directive prévoit explicitement le principe de la déclaration de soupçon des professionnels des marchés , en disposant que « les Etats membres imposent à toute personne effectuant des opérations sur instruments financiers à titre professionnel d'avertir sans délai l'autorité compétente si cette personne à des raisons de suspecter qu'une opération pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché ».

2. Le haut degré de précision des dispositions de la directive 2004/72/CE

Les articles 7 à 11 de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, apportent les précisions nécessaires à la mise en oeuvre de la nouvelle obligation de déclaration de soupçon. Cette directive devait être transposée dans la législation des Etats membres avant le 12 octobre 2004 .

L'article 7 expose les conditions de la notification des opérations suspectes . Il dispose ainsi :

« Les États membres veillent à ce que les personnes visées à l'article 1 er , point 3 46 ( * ) , décident, sur la base d'un examen au cas par cas, si une opération peut raisonnablement être suspectée de constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché . Pour ce faire, elles tiennent compte des éléments constitutifs de l'opération d'initié ou de la manipulation de marché mentionnés aux articles 1 er à 5 de la directive 2003/6/CE, dans la directive de la Commission 2003/124/CE (...) , ainsi que par l'article 4 de la présente directive. Sans préjudice de l'article 10 de la directive 2003/6/CE, les personnes qui effectuent des opérations à titre professionnel sont soumises aux règles de notification de l'État membre dans lequel elles ont leur siège social ou leur administration centrale ou, dans le cas d'une succursale, de l'État membre où celle-ci est située. La notification est adressée à l'autorité compétente de cet État membre.

« Les États membres veillent à ce que les autorités compétentes auxquelles des opérations suspectes sont notifiées transmettent immédiatement cette information aux autorités compétentes des marchés réglementés concernés ».

L'article 8 prévoit que la notification de « tout fait ou information rendant l'opération concernée raisonnablement suspecte » soit effectuée sans délai par les professionnels des marchés.

L'article 9 expose dans les détails le contenu de la notification d'opérations suspectes. Elle doit ainsi comporter les informations suivantes :

« a) la description des opérations, en particulier du type d'ordre (ordre limité, ordre « au mieux » ou autres caractéristiques de l'ordre) et du mode de négociation utilisé (achat en bloc, par exemple) ;

« b) les raisons amenant à soupçonner que les opérations pourraient constituer un abus de marché ;

« c) les moyens d'identification des personnes pour le compte desquelles les opérations ont été réalisées et des autres personnes impliquées dans ces opérations ;

« d) la qualité en vertu de laquelle agit la personne soumise à l'obligation de notification (telle que pour compte propre ou pour compte de tiers) ;

« e) toute autre information pertinente concernant les opérations suspectes » .

En cas d'indisponibilité de ces informations au moment de la notification, celle-ci doit au moins mentionner les raisons pour lesquelles les personnes l'effectuant soupçonnent les opérations d'être constitutives d'une opération d'initié ou d'une manipulation de marché. Les informations complémentaires doivent être communiquées à l'autorité compétente dès qu'elles deviennent disponibles.

L'article 10 a trait aux modes de notification . Celle-ci peut être effectuée par lettre, courrier électronique, télécopie ou téléphone, sous réserve dans ce dernier cas qu'une confirmation soit formulée par écrit sur demande de l'autorité compétente.

L'article 11 expose enfin le régime de responsabilité et de respect du secret professionnel des personnes procédant à la notification comme du personnel de l'autorité compétente.

Le point 1 de l'article 11 prévoit une interdiction , pour les personnes procédant à la notification, d'en informer d'autres personnes que l'autorité compétente, et en particulier celles pour le compte desquelles les opérations suspectes ont été effectuées ou les parties qui leur sont liées, sauf en vertu de dispositions légales. Le respect de cette obligation n'expose la personne ayant effectué la notification à aucune responsabilité d'aucune sorte , pour autant que la personne qui notifie ait agi de bonne foi.

Le point 2 interdit à l'autorité compétente destinataire d'informer quiconque de l'identité des personnes qui ont notifié les opérations suspectes, dès lors qu'une telle information porterait préjudice à ces personnes ou risquerait de leur nuire.

Le point 3 dispose enfin que la notification de bonne foi à l'autorité compétente ne constitue pas une violation du secret professionnel requis en vertu de dispositions législatives, réglementaires, ou de stipulations contractuelles, et exonère dès lors de toute responsabilité la personne ayant effectué cette notification.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article propose d'insérer une nouvelle sous-section 5, composée de six articles numérotés L. 621-17-1 à L. 621-17-6, dans la section 4 du titre II du livre VI du code monétaire et financier, qui est consacrée aux pouvoirs de l'AMF.

Le I du présent article procède par conséquent à une renumérotation des sous-sections de cette section 4. La sous-section 5 intitulée « Autres compétences » devient la sous-section 6, tandis que le II du présent article crée une nouvelle sous-section 5 intitulée « Déclaration d'opérations suspectes ».

A. LE CHAMP RATIONAE PERSONAE ET RATIONAE MATERIAE DE LA DÉCLARATION D'OPÉRATIONS SUSPECTES

1. Les dispositions proposées pour l'article L. 621-17-1 du code monétaire et financier

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-1 du code monétaire et financier expose les principales caractéristiques de l'obligation de notification des opérations suspectes. Les personnes soumises à cette obligation sont les prestataires de services d'investissement (PSI) agréés (établissements de crédit et les entreprises d'investissement), et les personnes mentionnées à l'article L. 421-8 du même code, c'est-à-dire les membres des marchés réglementés 47 ( * ) . L'autorité destinataire de la notification est logiquement l'AMF.

L'objet de la notification porte sur toute opération sur des instruments financiers cotés, effectuée pour compte propre ou pour compte de tiers, dont les personnes soumises à l'obligation de notification « ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de marché, au sens des dispositions du règlement général de l'AMF ». Cette formulation est donc proche de celle prévue par la directive 2004/72/CE, précitée, et peut être jugée plus appropriée, dans la mesure où la transposition des termes de la directive « si une opération peut raisonnablement être suspectée de constituer une opération d'initié (...) » se traduit par les termes plus objectifs « dont ils ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer (...) ».

Le caractère « raisonnable » de la motivation de la déclaration de soupçon peut paraître de nature à créer une incertitude juridique au détriment du déclarant. Cette incertitude peut toutefois être relativisée par le régime d'exemption de responsabilité prévu par la législation communautaire et le présent article (cf. infra ), comme par les éclaircissements apportés par le neuvième considérant de la directive d'application 2004/72/CE, précitée, qui dispose :

« La notification aux autorités compétentes des opérations suspectes réalisées par des personnes effectuant des opérations sur instruments financiers à titre professionnel doit s'accompagner d'indications suffisamment probantes de l'existence d'un risque d'abus de marché, c'est-à-dire de motifs sérieux amenant à soupçonner ces opérations d'être liées à une opération d'initié ou une manipulation de marché. Certaines opérations peuvent paraître entièrement dénuées de caractère suspect en elles-mêmes, mais leur mise en rapport avec d'autres opérations, un certain comportement ou d'autres informations peut fournir de telles indications sur la possibilité d'un abus de marché ».

La législation communautaire entend donc trouver un compromis , certes difficile dans sa traduction concrète, entre la volonté d'éviter les déclarations abusives et totalement dénuées de fondement, et la nécessité de déclarer extensivement des opérations dont la nature délictueuse n'est pas certaine, mais qui peuvent contribuer à un faisceau d'indices sur un abus de marché complexe et comportant plusieurs opérations liées. Cet équilibre parfois subtil est lié aux contours nécessairement imprécis de la notion même de soupçon.

2. Les dispositions proposées pour l'article L. 621-17-2 du code monétaire et financier

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-2 du code monétaire et financier ne constitue pas une mesure de transposition de la directive précitée. Il traite le cas où l'AMF, conformément aux procédures d'information réciproque prévues par les articles L. 621-15-1 48 ( * ) et L. 621-20-1 49 ( * ) du code monétaire et financier, intervenant entre celle-ci et le procureur de la République dans le cadre de la double incrimination, pénale et administrative, d'une infraction, transmet certains faits ou informations au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris. Le procureur de la République a alors communication d'une éventuelle déclaration d'opérations suspectes, mais celle-ci ne figure pas au dossier de la procédure, conformément au mécanisme déjà existant en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux, afin de préserver son caractère confidentiel . Le dossier est en effet accessible aux parties, et notamment à la ou aux personnes susceptibles de figurer dans la déclaration.

B. LE CONTENU DE LA DÉCLARATION

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier dispose, en son premier alinéa, que le règlement général de l'AMF précise les conditions dans lesquelles est faite la déclaration de soupçon.

Le deuxième alinéa prévoit que la déclaration peut être écrite ou verbale , conformément aux dispositions de l'article 10 de la directive 2004/72/CE, précitée. Cette dernière se révèle toutefois plus précise, puisqu'elle mentionne une liste des moyens techniques de transmission de la déclaration, soit la lettre, le courrier électronique, la télécopie ou le téléphone, ce dernier moyen de transmission impliquant effectivement la possibilité d'une transmission orale et non écrite. La formulation, quoique moins détaillée, du texte proposé par le présent article, peut néanmoins être retenue, considérant la nécessité de préserver la marge d'évolution des techniques utilisées - et ce faisant la pérennité de la loi -, comme de s'en tenir aux critères déterminants de la communication écrite ou verbale.

Il est également précisé, comme le dispose l'article 10 de la directive précitée, qu'en cas de déclaration orale, l'AMF peut en demander une confirmation par écrit. Il est toutefois permis de s'interroger sur le caractère facultatif de cette demande de confirmation écrite , qui peut donner lieu à des oublis ou négligences et à une exonération de responsabilité de l'Autorité en cas de litige. Le texte de la directive tend à conférer un caractère plus obligatoire à cette confirmation, puisqu'il prévoit que la notification peut être effectuée par téléphone, « sous réserve (...) qu'une confirmation soit donnée par écrit sur demande de l'autorité compétente ».

Les alinéas suivants exposent le contenu de la déclaration , qui reprend, dans des termes analogues, les éléments prévus par l'article 9 de la directive précitée :

- la description des opérations et du mode de négociation utilisée ;

- les raisons conduisant à soupçonner que les opérations constituent un délit d'initié ou une manipulation de cours ;

- les moyens d'identification des personnes pour le compte de qui les opérations ont été réalisées et de toute autre personne impliquée dans ces opérations ;

- l'indication que les opérations ont été effectuées pour compte propre ou pour compte de tiers ;

- toute autre information pertinente concernant les opérations déclarées.

Conformément au point 2 de l'article 9 de la directive précitée, le dernier alinéa du texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier précise également la procédure que le déclarant doit suivre en cas d'indisponibilité des informations requises ci-dessus. La déclaration doit alors au moins mentionner les raisons conduisant à suspecter le caractère délictueux des opérations incriminées, et les autres informations sont communiquées à l'AMF dès qu'elles deviennent disponibles.

C. LES OBLIGATIONS DE SECRET DES INTERVENANTS

Le texte proposé par le présent article pour les articles L. 621-17-4 à L. 621-17-6 du code monétaire et financier transpose l'article 11 de la directive 2004/72/CE, relatif aux exemptions de responsabilité et au secret professionnel des déclarants et de l'autorité récipiendaire des informations.

L'article L. 621-17-4 sanctionne le fait, pour les préposés ou les dirigeants des personnes auteurs de la déclaration, d'informer les personnes ou les parties liées aux personnes pour le compte desquelles les opérations déclarées ont été effectuées , de l'existence de la déclaration ou des suites qui lui sont réservées. Le non respect de cette obligation est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal, relatif aux atteintes au secret professionnel 50 ( * ) , soit un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende.

Réciproquement, le texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 621-17-5 impose une interdiction similaire de révélation des informations recueillies lors de la notification de la déclaration d'opérations suspectes, à l'AMF et à un champ large de personnes physiques qui lui sont liées : chacun de ses membres, les experts nommés dans ses commissions consultatives 51 ( * ) , les membres de son personnel et ses préposés. Cette interdiction s'applique en outre aux personnes dont l'AMF pourrait solliciter le concours dans le cadre de ses missions de contrôle et d'enquête 52 ( * ) , ainsi qu'à leurs dirigeants et préposés.

Cette interdiction s'exerce toutefois sans préjudice des obligations incombant aux autorités publiques et aux fonctionnaires au titre de l'article 40 du code de procédure pénale 53 ( * ) , portant sur la communication à l'autorité judiciaire de toute information sur un crime ou délit dont ils auraient eu connaissance. Elle s'applique également sans préjudice de l'exercice par l'AMF de ses pouvoirs, ni de ses obligations d'information du procureur de la République au titre des articles L. 621-15-1, L. 621-17-2 (introduit par le texte proposé par le présent article) et L. 621-20-1 54 ( * ) du code monétaire et financier.

Conformément au point 2 de l'article 11 de la directive précitée, le texte proposé par le présent article pour le deuxième alinéa de l'article L. 621-17-5 du même code punit, en cas de révélation du contenu de la déclaration d'opérations suspectes ou de l'identité des personnes qu'elle concerne, les personnes physiques précédemment mentionnées des peines prévues à l'article L. 642-1 du code monétaire et financier 55 ( * ) . Il s'agit des mêmes peines de l'article 226-13 du code pénal que celles prévues par le premier alinéa en cas d'infraction à l'obligation de secret commise par les personnes effectuant la déclaration.

Le texte proposé pour le troisième et dernier alinéa de l'article L. 621-17-5 du code monétaire et financier prévoit une procédure d'information d'une autorité compétente étrangère , lorsque des opérations ayant fait l'objet d'une déclaration de soupçon notifiée à l'AMF relèvent de la compétence de l'autorité de régulation d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'Espace économique européen. L'AMF doit alors transmettre sans délai la déclaration à cette autorité étrangère , considérant le fait que toutes les déclarations de soupçon effectuées par les intermédiaires français doivent l'être auprès de l'AMF, y compris lorsqu'elles concernent des opérations réalisées sur des marchés relevant d'autres autorités de tutelle.

D. LE RÉGIME DES EXEMPTIONS DE RESPONSABILITÉ

Le texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-6 du même code tend à assurer une protection juridique élevée , au regard de la responsabilité civile et pénale, des personnes physiques ayant effectué la déclaration d'opérations suspectes, conformément au point 3 de l'article 11 de la directive 2004/72/CE, précitée. La transposition ainsi proposée, qui envisage les exonérations portant sur les différents motifs potentiels de responsabilité, se veut toutefois plus précise que la formulation de la directive , qui prévoit de façon plus lapidaire que la notification de bonne foi n'entraîne « aucune responsabilité d'aucune sorte » des personnes l'ayant effectuée.

Le premier alinéa prévoit ainsi une exonération de responsabilité pénale au profit des dirigeants et préposés des personnes soumises à l'obligation de déclaration, lorsqu'elles ont effectué de bonne foi cette déclaration. Aucune poursuite pour violation de secret professionnel, sur le fondement de l'article 226-13 du code pénal, précité, ne peut dès lors être exercée contre ces personnes. Le deuxième alinéa prévoit en outre une exonération de responsabilité civile pour ces mêmes personnes.

Le troisième alinéa précise les conséquences de l'exemption de toute responsabilité du déclarant. Aucune poursuite pénale ne peut être engagée contre ses dirigeants ou préposés en faisant application des articles L. 465-1 et L. 465-2 du code monétaire et financier, qui prévoient le régime de sanction applicable en cas de délit d'initié 56 ( * ) , de diffusion d'information fausse ou trompeuse et d'entrave au fonctionnement régulier d'un marché financier, et des articles 321-1 à 321-3 du code pénal, relatif au recel 57 ( * ) de crimes et délits. De même, ces personnes ne peuvent faire l'objet d'aucune procédure de sanction administrative de l'AMF pour des faits liés à une opération d'initié ou à une manipulation de cours. Le bénéfice de ces exemptions suppose toutefois, et de façon logique, que le déclarant ne se soit livré à aucune concertation frauduleuse avec l'auteur de l'opération ayant fait l'objet de la déclaration.

Le quatrième et dernier alinéa étend ces exonérations de responsabilité au cas où la déclaration de soupçon se révèlerait in fine « inutile » en ne divulguant aucun fait répréhensible. Il en résulte que la déclaration de bonne foi à l'AMF ne saurait entraîner de poursuites à l'encontre des déclarants , quand bien même les opérations déclarées se révèleraient a posteriori ne présenter aucun caractère fautif ou délictueux, auraient fait l'objet d'une décision de non-lieu ou de relaxe, ou ne conduiraient à aucune sanction prononcée par l'AMF.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances approuve le principe de cette déclaration d'opérations suspectes , qui se voit ainsi étendue des flux bancaires aux opérations boursières. Ses modalités, les dispositions du règlement général de l'AMF tendant à préciser la nature de l'utilisation délictueuse d'une information privilégiée et les indices de manipulation de marché, ainsi que le haut niveau de protection offert aux déclarants, sont de nature à renforcer la préservation de l'intégrité des marchés. L'efficacité de cette réforme suppose néanmoins que l'AMF dispose des moyens de se prononcer rapidement sur les opérations qui lui auront été notifiées , afin de garantir la visibilité d'action des investisseurs comme des émetteurs des titres concernés par les déclarations.

Le régime d'exemption de responsabilité civile et pénale, sauf cas de complicité avec l'auteur du délit, se révèle légitime et nécessaire pour préserver l'incitation des intermédiaires financiers à procéder aux déclarations et à faire preuve de prudence, sans encourir le risque d'être poursuivis par leurs clients, en particulier dans le cas où les opérations déclarées ne se révèleraient in fine pas délictueuses.

Il importe toutefois de préciser que la mise en oeuvre concrète des mécanismes d'alerte, de filtre et d'organisation de la procédure globale de déclaration de soupçon des abus de marché se traduira par une certaine complexité des systèmes d'information des intermédiaires financiers , source de nouveaux investissements et de délais de mise en place. Cette complexité paraît plus prononcée pour les opérations portant sur des titres obligataires , dont les critères d'analyse n'ont pas encore été finalisés par le CERVM. Il appartiendra donc aux prestataires de services d'investissement de faire preuve d'une certaine réactivité dans la mise en place de leurs procédures, comme à l'AMF de faire preuve d'objectivité et de mesure, le cas échéant, dans l'examen au cas par cas de la fiabilité des nouveaux systèmes.

Il reste que l'antériorité du dispositif communautaire relatif à l'abus de marché, la concertation menée en amont avec les professionnels et le retard pris par la France dans la transposition des différents textes européens ne justifient guère l'éventuel octroi, par voie législative, d'un délai de plusieurs mois de mise en place des systèmes d'information requis.

La pleine applicabilité du dispositif ne sera toutefois acquise que lors de la publication des dispositions du règlement général de l'AMF qui, aux termes du texte proposé par le présent article pour l'article L. 621-17-3 du code monétaire et financier, viendront préciser les conditions dans lesquelles est réalisée la déclaration d'opérations suspectes. L'AMF pourra donc, le cas échéant, tenir compte des difficultés techniques auxquelles seraient confrontés les émetteurs pour publier ces dispositions dans un délai qui soit cohérent avec la mise en place concrète des systèmes de détection des opérations suspectes.

Il pourrait être objecté que ce nouveau dispositif ne fait que conforter l'entrée dans une « ère de la délation », déjà initiée par le renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux. Votre rapporteur général considère que le caractère occulte et souvent complexe des abus de marché, la multiplicité des intervenants sur les marchés boursiers et les conséquences économiques potentiellement graves que peuvent exercer ces abus sur les émetteurs dont les titres sont l'objet, conduisent à ne plus s'en remettre à la seule surveillance des régulateurs nationaux . La participation des PSI et des membres des marchés réglementés à la détection des infractions devient nécessaire, dans un double objectif de prévention des délits et de renforcement de la responsabilité des intermédiaires financiers dans la mise en oeuvre d'une transparence réelle.

Ainsi qu'il a été précisé supra , la déclaration peut être écrite ou verbale. Le texte proposé par le présent article prévoit que dans ce second cas, la demande de confirmation par écrit de l'AMF est facultative. Votre rapporteur général vous propose un amendement tendant à rendre cette confirmation obligatoire . Cette disposition serait à la fois plus proche de l'esprit du texte de la directive, renforcerait la responsabilité de l'AMF et préviendrait un recours abusif aux notifications sans fondement.

Votre rapporteur général vous propose également un amendement tendant à préciser les modalités de transmission, par l'AMF, d'informations à une autorité de tutelle d'un autre Etat membre, lorsque les opérations ayant fait l'objet de la déclaration relèvent de la compétence de cette autorité. Dans la mesure où le texte proposé par le présent article pour le troisième alinéa de l'article L. 621-17-5 du code monétaire et financier n'indique pas explicitement la procédure que doivent suivre les intermédiaires français en cas de demandes de complément d'informations émanant de ces autorités étrangères, il est proposé, dans un souci de parallélisme des formes, que ces compléments d'information soient d'abord communiqués à l'AMF, qui les transmet ensuite à l'autorité étrangère compétente .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Coordination

Commentaire : le présent article procède à une coordination au sein du code monétaire et financier, afin de tenir compte des dispositions de l'article premier, relatives à la notification d'opérations suspectes.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

L'article L. 532-18 du code monétaire et financier, introduit par la loi de sécurité financière n° 2003-706 du 1 er août 2003 et relatif à la libre prestation de services financiers en France, tend à assimiler à des prestataires de services d'investissement (PSI) les personnes morales ou physiques agréées dans un autre Etat et qui établissent des succursales en France pour fournir des services d'investissement et des services connexes. Il dispose ainsi :

« Dans la limite des services qu'elle est autorisée à fournir sur le territoire de son Etat d'origine, et en fonction de l'agrément qu'elle y a reçu, toute personne morale ou physique agréée pour fournir des services d'investissement peut, sans préjudice des dispositions des articles L. 511-21 à L. 511-28, sur le territoire de la France métropolitaine et des départements d'outre-mer, établir des succursales pour fournir des services d'investissement et des services connexes, et intervenir en libre prestation de services dans des conditions fixées par le conseil des marchés financiers, notamment en ce qui concerne la protection des fonds des clients.

« Pour l'application des articles L. 213-3, L. 322-1 à L. 322-4, L. 421-6, L. 421-7, L. 421-8 à L. 421-11, L. 432-20, L. 431-7, L. 531-10, L. 533-3, L. 533-4, L. 533-6 à L. 533-11, L. 533-13 et L. 621-18-1, les personnes mentionnées à l'alinéa précédent sont assimilées à des prestataires de services d'investissement ».

Par coordination, le texte proposé par le présent article tend à insérer dans le second alinéa de l'article L. 532-18 du code monétaire et financier, une référence aux articles L. 621-17-1 à L. 621-17-6 du même code, afin que les personnes physiques ou morales agréées à l'étranger et établies en France en libre prestation de services, puissent être également soumises à l'obligation de déclaration d'opérations suspectes prévue par l'article premier du présent projet de loi .

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances approuve ces dispositions formelles.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Adaptation du régime de déclaration d'opérations sur titres effectuées par les dirigeants d'un émetteur et les personnes qui leur sont liées

Commentaire : le présent article a pour objet d'actualiser les dispositions de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, issu de la loi de sécurité financière du 1 er août 2003 et relatif à l'obligation de déclaration des opérations effectuées par les dirigeants d'un émetteur, et les personnes qui leur sont liées, sur les titres dudit émetteur.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DISPOSITIONS DE LA LÉGISLATION COMMUNAUTAIRE SUR L'ABUS DE MARCHÉ

1. La directive-cadre 2003/6/CE

La directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché, dispose dans le point 4 de son article 6 que « les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur d'instruments financiers et, le cas échéant, les personnes ayant un lien étroit avec elles, communiquent au moins à l'autorité compétente l'existence des opérations effectuées pour leur compte propre et portant sur des actions dudit émetteur, ou sur des instruments financiers dérivés ou d'autres instruments financiers qui leur sont liés. Les États membres veillent à ce que le public ait aisément accès aux informations, au moins individuelles, concernant ces opérations dès que possible ».

La notion de « personne ayant un lien étroit » avec les dirigeants a été précisée ultérieurement, dans la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004 (cf. infra ).

2. La directive d'application 2004/72/CE

a) Le champ des personnes devant procéder à la notification de leurs opérations sur des titres de l'émetteur

Le septième considérant de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, permet de cerner les motivations des autorités communautaires et l'esprit du dispositif relatif aux déclarations d'opérations sur les titres d'un émetteur. Il dispose ainsi :

« la déclaration des opérations effectuées pour leur compte propre par des personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur, ou par des personnes ayant un lien étroit avec elles, constitue une information précieuse pour les participants au marché, mais aussi un moyen supplémentaire de surveillance des marchés par les autorités compétentes . L'obligation pour les responsables de haut niveau de notifier leurs opérations est sans préjudice de leur obligation de s'abstenir de toute opération d'initié sur la base de toute information privilégiée (...) ».

Le point 1 de l'article premier de cette directive précise ainsi le champ rationae personae des personnes « exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur » . Il s'agit d'une personne qui est :

« a) un membre des organes d'administration, de gestion ou de surveillance de l'émetteur ;

« b) un responsable de haut niveau qui, sans être membre des organes visés au point a), dispose d'un accès régulier à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur et du pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant l'évolution future et la stratégie d'entreprise de cet émetteur ».

Le point 2 de ce même article définit très précisément la notion de « personne étroitement liée à une personne exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un instrument financier ». Il s'agit des personnes suivantes :

« a) le conjoint de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes, ou tout autre partenaire de cette personne considéré comme l'équivalent du conjoint par la législation nationale ;

« b) selon le droit national, les enfants à charge de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes ;

« c) tout autre parent de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes qui partage le même domicile depuis au moins un an à la date de l'opération concernée ;

« d) toute personne morale , fiducie ou autre trust , ou partnership dont les responsabilités dirigeantes sont exercées par une personne visée au paragraphe 1 du présent article ou aux points a), b) et c) du présent paragraphe, ou qui est directement ou indirectement contrôlée par cette personne, ou qui a été constituée au bénéfice de cette personne, ou dont les intérêts économiques sont substantiellement équivalents à ceux de cette personne ».

b) Le délai et le contenu de la notification

L'article 6 de cette même directive apporte des précisions sur les règles de territorialité du droit applicable, le délai et le contenu de la notification :

« 1. Aux fins de l'application de l'article 6, paragraphe 4, de la directive 2003/6/CE, et sans préjudice du droit de chaque État membre d'imposer des obligations de notification autres que celles prévues par cet article, les États membres veillent à ce que toutes les opérations portant sur des actions admises à la négociation sur un marché réglementé, ou sur des instruments dérivés ou d'autres instruments financiers liés à celles-ci, effectuées pour compte propre par les personnes visées à l'article 1 er , points 1 et 2, soient notifiées aux autorités compétentes. Les règles de notification auxquelles ces personnes sont tenues de se conformer sont celles de l'État membre dans lequel l'émetteur a son siège social . La notification est effectuée dans les cinq jours ouvrables suivant l'opération auprès de l'autorité compétente de cet État membre. Lorsque l'émetteur n'a pas son siège social dans un État membre, cette notification est effectuée auprès de l'autorité compétente de l'État membre dans lequel il est tenu de déposer les informations annuelles relatives à ses actions en vertu de l'article 10 de la directive 2003/71/CE.

« 2. Les États membres peuvent décider que jusqu'à ce que le montant total des opérations atteigne cinq mille euros à la fin d'une année civile, la notification n'est pas requise ou peut être reportée au 31 janvier de l'année suivante (...).

« 3. La notification doit contenir les informations suivantes :

« a ) le nom de la personne exerçant des responsabilités dirigeantes au sein de l'émetteur ou, le cas échéant, le nom de la personne ayant un lien étroit avec celle-ci ;

« b) le motif de l'obligation de notification ;

« c ) le nom de l'émetteur concerné ;

« d) la description de l'instrument financier ;

« e) la nature de l'opération (par exemple acquisition ou cession) ;

« f) la date et le lieu de l'opération ;

« g) le prix et le montant de l'opération.

B. LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 122 DE LA LOI DE SÉCURITÉ FINANCIÈRE

L'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, introduit par l'article 122 de la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière, a en partie transposé les dispositions de la directive 2003/6/CE, précitée, en prévoyant que les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de titres d'une personne faisant appel public à l'épargne, réalisées par certaines personnes physiques, soient communiquées à l'AMF . Il dispose ainsi :

« Toute personne faisant appel public à l'épargne communique à l'Autorité des marchés financiers et rend publics dans un délai déterminé par le règlement de l'Autorité des marchés financiers les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de leurs titres ainsi que les transactions opérées sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme, réalisés par :

« a) les membres du conseil d'administration, du directoire, du conseil de surveillance, le directeur général, le directeur général unique, le directeur général délégué ou le gérant de cette personne ;

« b) des personnes ayant, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, des liens personnels étroits avec l'un de ceux qui sont mentionnés ci-dessus.

« Les modalités et conditions de la communication et de la publication prévues ci-dessus sont fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée de ces opérations » .

Sur l'initiative de votre rapporteur général, la rédaction proposée dans le projet de loi avait été améliorée sur deux points :

- l'insertion, dans le champ des opérations soumises à l'obligation de communication de l'AMF, des transactions portant sur les produits dérivés ayant comme sous-jacent les titres des émetteurs concernés ;

- la mention de « liens personnels étroits » avec les dirigeants et mandataires sociaux plutôt que celle, manquant d'assise juridique, de « liens personnels », afin de mieux tenir compte de la formulation prévue par la directive 2003/6/CE du Conseil du 28 janvier 2003, précitée.

Le champ des personnes morales couvert par l'article 122 de la loi de sécurité financière et par l'article 222-14 du règlement général de l'AMF (cf. infra ) est donc plus large que celui prévu par le dispositif communautaire 58 ( * ) , puisque la déclaration porte sur les opérations financières réalisées par certaines personnes physiques sur les titres de « toute personne faisant appel public à l'épargne », alors que l'article 6 de la directive-cadre 2003/6/CE du 28 janvier 2003 vise les « émetteurs d'instruments financiers », c'est-à-dire les émetteurs dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé. Il convient à cet égard de rappeler que les titres d'une société faisant appel public à l'épargne ne sont pas nécessairement cotés sur un marché réglementé. Les dispositions nées de la loi de sécurité financière demeurent néanmoins compatibles avec la législation communautaire , dans la mesure où le directive d'application 2004/72/CE, précitée, n'est pas d'harmonisation maximale et laisse donc aux Etats membres la possibilité de prévoir des dispositions plus contraignantes.

C. LES MODALITÉS PRÉVUES PAR LE RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF

Les dispositions d'application de l'article 6 de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée, ont été essentiellement transposées dans le règlement général de l'AMF , conformément au processus de transposition précédemment décrit (cf. exposé général), et plus particulièrement dans ses articles 222-14 et 222-15 , qui figurent dans la section 4 intitulée « Opérations des dirigeants et des personnes qui leur sont étroitement liées sur les titres de la société » du chapitre II (« Information permanente ») du titre II (« Information périodique et permanente ») du livre II (« Emetteurs et information financière ») du règlement général. Ces deux articles précisent notamment le délai, le seuil et le contenu de la notification, qui reprennent les dispositions précitées. Cette obligation de notification est entrée en vigueur le 25 novembre 2004.

L'article 222-14 du règlement général de l'AMF prévoit ainsi que :

« tout émetteur faisant appel public à l'épargne communique à l'AMF et rend publics au moyen d'un communiqué, dans un délai de cinq jours de négociation , les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de ses instruments financiers ainsi que les transactions opérées sur ces instruments au moyen d'instruments financiers à terme, réalisés par les personnes mentionnées à l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier. Ce délai court à compter de la réception par l'émetteur de la déclaration de ces opérations.

« Lorsque le montant total des opérations réalisées, sur une année civile, par les personnes mentionnées à l'article L. 621-18-2 précité est inférieur ou égal à 5.000 euros , l'obligation de communication à l'AMF mentionnée au premier alinéa n'est pas requise.

« Ce montant total est calculé en additionnant les opérations effectuées par les personnes mentionnées au point a de l'article L. 621-18-2 précité ou pour le compte de ces personnes ainsi que les opérations effectuées pour le compte propre des personnes mentionnées au point b de l'article précité.

« En cas d'opération portant sur des instruments financiers à terme, ce même montant s'applique au sous-jacent .

L'article 222-15 dispose quant à lui :

« le communiqué mentionné à l'article 222-14 indique :

« 1° Pour les opérations réalisées par une personne mentionnée au point a de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, le nom de cette personne et sa qualité ;

« 2° Pour les opérations réalisées par une personne mentionnée au point b de ce même l'article, la mention : « une (des) personne(s) liée(s) à... » suivie du nom et de la qualité de la personne mentionnée au point a de l'article précité ;

« 3° La dénomination de l'émetteur concerné ;

« 4° La description de l'instrument financier ;

« 5° La nature de l'opération ;

« 6° La date et le lieu de l'opération ;

« 7° Le prix et le montant de l'opération.

« Le communiqué est mis en ligne sur le site de l'AMF et sur le site de l'émetteur lorsqu'il dispose d'un tel site. Il peut prendre la forme du modèle-type défini dans une instruction de l'AMF ».

Un communiqué de l'AMF du 27 décembre 2004 est en outre venu apporter des précisions sur les champs rationae personae et rationae materiae de la déclaration, dans l'attente de l'adoption de certaines mesures réglementaires.

Communiqué de l'AMF du 27 décembre 2004 sur les déclarations d'opérations sur titres effectuées par les dirigeants de sociétés et les personnes qui leur sont liées

En vertu de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, les émetteurs doivent communiquer à l'AMF et rendre publiques au moyen d'un communiqué, les opérations sur instruments financiers réalisées et déclarées par leurs dirigeants 59 ( * ) , sur une base individuelle et nominative, dans les cinq jours de négociation à compter de la réception de la déclaration de ces opérations, conformément aux articles 222-14 et 222-15 du règlement général de l'AMF. Cette obligation est entrée en vigueur le 25 novembre 2004.

S'agissant des « personnes ayant un lien étroit avec ces dirigeants » et dans l'attente de la publication du décret en Conseil d'Etat qui viendra préciser le périmètre de définition de cette notion, il est recommandé aux dirigeants de communiquer également aux émetteurs les opérations qui leur auront été déclarées par les personnes qui leur sont liées par référence à la liste de l'article 1 er , 2) de la directive 2004/72/CE 60 ( * ) , et en tout cas celles du conjoint non séparé de corps et des enfants à charge résidant chez eux.

Concernant les « responsables de haut niveau » qui disposent d'un accès régulier à des informations privilégiées 61 ( * ) , aucune information n'est en l'état requise dans l'attente de la transposition de cette notion dans la loi française .

S'agissant en second lieu des opérations concernées, il est précisé que ce dispositif s'applique aux souscriptions et aux achats par l'exercice d'options de souscription ou d'achat d'actions même non suivi d'une cession des actions obtenues. Il ne s'applique pas en revanche :

- aux donations, donations-partages et successions, (mais il s'applique aux acquisitions ou souscriptions des titres faisant l'objet de la donation) ;

- aux opérations réalisées par des intermédiaires en vertu d'un mandat exercé dans le cadre du service de gestion de portefeuille pour compte de tiers à la condition que le mandant n'intervienne pas dans la gestion du mandat, ou ;

- aux opérations réalisées par les personnes morales mandataires sociales au sein du groupe auquel elles appartiennent.

En outre, dans l'attente de la publication de l'instruction de l'AMF qui précisera les conditions de transmission de ces informations à l'AMF, les émetteurs peuvent s'inspirer du modèle de la déclaration annexée à la recommandation COB n° 2002-01.

Enfin, le seuil de déclaration de 5.000 euros mentionné au deuxième alinéa de l'article 222-14 du règlement général s'applique par dirigeant et par année civile , en agrégeant l'ensemble des opérations réalisées par un dirigeant et les opérations réalisées par les personnes qui lui sont étroitement liées.

Pour cette première année, la période de calcul court en conséquence du 25 novembre au 31 décembre 2004.

Source : site Internet de l'AMF

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article tend à modifier l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, afin de le rendre plus compatible avec la législation communautaire sur l'abus de marché.

A. L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP RATIONAE MATERIAE

Le du présent article tend à substituer, dans le premier alinéa de l'article L. 621-18-2, précité, les termes « sur des instruments financiers qui leur sont liés » aux termes « sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme ». Cette disposition a pour effet d'élargir le champ des opérations visées par l'obligation de notification précédemment exposée, en ce qu'elle ne vise plus les seuls titres de l'émetteur, c'est-à-dire des titres de capital ou de créance, et les produits dérivés qui ont ces titres pour sous-jacent, mais de façon plus extensive les titres de l'émetteur et l'ensemble des instruments financiers qui sont liés à ces titres . Aux termes de l'article 211-1 du code monétaire et financier, qui définit les instruments financiers, ces derniers comprennent :

« 1. Les actions et autres titres donnant ou pouvant donner accès, directement ou indirectement, au capital ou aux droits de vote, transmissibles par inscription en compte ou tradition ;

« 2. Les titres de créance qui représentent chacun un droit de créance sur la personne morale ou le fonds commun de créances qui les émet, transmissibles par inscription en compte ou tradition, à l'exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ;

« 3. Les parts ou actions d'organismes de placements collectifs ;

« 4. Les instruments financiers à terme 62 ( * ) ;

« 5. Et tous instruments financiers équivalents à ceux mentionnés aux précédents alinéas, émis sur le fondement de droits étrangers ».

Cette disposition, que l'on peut qualifier de « précaution » mais qui est en ligne avec la directive 2004/72/CE, précitée, a essentiellement pour objet d'inclure dans le champ des opérations la grande variété d'instruments hybrides liés aux titres de l'émetteur, tels que les obligations convertibles ou remboursables, et non les seuls instruments dérivés.

B. LE CHAMP RATIONAE PERSONAE

Le du présent article tend à modifier le deuxième alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, pour élargir le champ rationae personae des personnes assujetties à l'obligation de notification , conformément aux dispositions de la directive 2004/72/CE, précitée.

Outre les membres des organes sociaux, le directeur général (unique ou délégué) ou le gérant de l'émetteur, l'obligation de notification s'impose également à toute autre personne qui dispose d'une influence ou d'un pouvoir déterminant ou a accès à des informations importantes au sein de l'émetteur, c'est-à-dire « toute autre personne qui, dans les conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, a, d'une part, au sein de l'émetteur, le pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant son évolution et sa stratégie, et a, d'autre part, un accès régulier à des information privilégiées concernant cet émetteur ».

Cet ajout est conforme à la définition précise que prévoit le point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, précitée, à ceci près qu'il ne vise pas directement les « responsables de haut niveau », qui constituent les termes de la directive, mais le champ plus large de « toute personne » exerçant un pouvoir de décision sur l'évolution et la stratégie de l'émetteur, ou disposant d'un accès régulier à des informations privilégiées. Cette distinction paraît toutefois mineure, en ce que la rédaction proposée par le présent article préserve bien le critère objectif des « responsabilités dirigeantes » que prévoit la directive-cadre du 28 janvier 2003.

En tout état de cause, le nouveau champ des personnes concernées par l'obligation de notification ne saurait inclure des prestataires ou partenaires extérieurs disposant éventuellement d'un accès à des informations privilégiées, tels que les analystes financiers et les commissaires aux comptes, dans la mesure où les personnes visées sont celles qui travaillent « au sein de l'émetteur ».

C. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONTRAINTES PESANT SUR L'EMETTEUR

Le du présent article complète le dernier alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, précité, qui prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée de la notification, par des dispositions tendant à alléger la responsabilité de l'émetteur au regard de la collecte des informations portant sur les transactions qui font l'objet de la notification à l'AMF.

Le premier alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier prévoit en effet que la communication des transactions sur titres, réalisées par les personnes précédemment mentionnées, est effectuée par l'émetteur (ie. « toute personne faisant appel public à l'épargne »), et non par les personnes physiques ayant réalisé les opérations.

Si cette obligation de centralisation et de communication de l'information par l'émetteur peut sembler légitime s'agissant des opérations réalisées par les membres des organes sociaux et les dirigeants dudit émetteur, compte tenu de la proximité géographique et fonctionnelle entre ces personnes physiques et la société dont ils sont mandataires ou salariés, elle paraît plus difficile à mettre en oeuvre pour les transactions des personnes entretenant des liens étroits avec les dirigeants et mandataires sociaux. Ces liens étroits étant susceptibles de ressortir à la vie familiale et privée des dirigeants, le risque paraît réel que l'émetteur encoure des sanctions disproportionnées en cas de défaillance dans la collecte d'informations portant sur les transactions de personnes très diverses et sur lesquelles il ne peut exercer qu'un contrôle très variable.

Dès lors, le 3° du présent article prévoit que les personnes concernées par l'obligation de déclaration des transactions sont tenues de communiquer à l'émetteur les informations permettant à cette dernière de remplir ses obligations de communication à l'AMF. Ce faisant, l'émetteur demeure responsable de la centralisation et de la transmission à l'AMF des informations qui lui ont été transmises, mais non plus, le cas échéant, de la sollicitation « pro-active », à l'échelon inférieur, de ces informations auprès des personnes physiques concernées , et en particulier auprès des personnes entretenant des liens étroits avec les dirigeants et mandataires sociaux. La charge de la preuve de la divulgation des informations ne repose donc plus sur l'émetteur, mais sur les personnes physiques - dirigeants, mandataires sociaux et personnes qui leur sont étroitement liées - assujetties à l'obligation de déclaration de leurs transactions.

Cette atténuation des contraintes juridiques pesant sur l'émetteur contribue à relativiser les critiques qui ont parfois été formulées sur le délai de cinq jours de communication à l'AMF et de publication des opérations ainsi déclarées. Ce délai peut être jugé raisonnable, d'autant qu'il porte sur cinq jours de négociation (et non cinq jours calendaires), court à compter de la réception par l'émetteur de la déclaration des opérations, réalisée par les personnes physiques concernées, et se révèle plus strict dans certains Etats membres 63 ( * ) .

Le 3° du présent article prévoit également qu'un décret en Conseil d'Etat définit, outre les conditions dans lesquelles l'assemblée générale des actionnaires est informée des opérations notifiées, les modalités de communication des opérations. Ce décret devrait être pris dans les prochains mois.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général approuve l'élargissement du champ rationae materiae et rationae personae de l'obligation de déclaration des transactions réalisées par certaines personnes physiques, qui est cohérent avec les dispositions de la directive d'application 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004. Il considère néanmoins que l'allègement de la responsabilité de l'émetteur dans la collecte des informations portant sur ces transactions constitue un progrès insuffisant, en ce qu'il n'est pas conforme à la lettre des textes communautaires sur l'abus de marché et n'est pas facteur de simplification du dispositif .

Le point 4 de l'article 6 de la directive 2003/6/CE fait en effet peser sur les seules personnes physiques l'obligation de déclaration et de communication des opérations sur titres, puisqu'il dispose que « les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein d'un émetteur d'instruments financiers et, le cas échéant, les personnes ayant un lien étroit avec elles, communiquent au moins à l'autorité compétente l'existence des opérations effectuées pour leur compte propre et portant sur des actions dudit émetteur, ou sur des instruments financiers dérivés ou d'autres instruments financiers qui leur sont liés ».

Le fait que l'émetteur doive centraliser les informations sur les transactions avant de les communiquer à l'AMF crée en outre une étape intermédiaire, qui tend à alourdir le dispositif et n'apparaît pas nécessaire, dès lors que la publicité des transactions est d'une façon ou d'une autre assurée . On ne peut invoquer une obligation de vigilance et de contrôle a posteriori de l'émetteur sur ces transactions, en ce qu'elle relève, le cas échéant, d'un dispositif préventif interne.

Votre rapporteur général vous propose donc un amendement de réécriture de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, comportant les trois dispositions suivantes :

- il fait peser sur les seules personnes physiques l'obligation de déclaration et de transmission à l'AMF des transactions qu'elles réalisent sur les titres d'une personne faisant appel public à l'épargne à laquelle elles sont liées. L'émetteur ne serait donc plus soumis à l'obligation de centralisation et de communication à l'AMF de ces transactions. L'amendement prévoit également que les déclarants adressent une copie de leur déclaration à l'émetteur, et que l'AMF assure la publicité des déclarations qui lui sont transmises ;

- il tend à réorganiser d'une manière plus lisible le deuxième alinéa de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, afin de bien distinguer les trois catégories de personnes physiques sur lesquelles pèse l'obligation de déclaration des transactions, c'est-à-dire les dirigeants sociaux, les responsables de haut niveau exerçant un pouvoir de décision sur la stratégie et l'évolution de l'émetteur disposant d'un accès régulier à des informations privilégiées sur cet émetteur, et des personnes entretenant des liens personnels étroits avec les précédentes ;

- il précise enfin que l'information privilégiée détenue par les personnes soumises à l'obligation de déclaration concerne « directement ou indirectement » l'émetteur, conformément à la lettre du dispositif communautaire sur l'abus de marché, et plus particulièrement à la rédaction du point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4

Etablissement d'une liste d'initiés par les émetteurs et certains tiers

Commentaire : le présent article a pour objet de créer une obligation d'établissement d'une liste d'initiés, imposée aux émetteurs et aux tiers ayant accès à des informations privilégiées dans le cadre de leurs relations professionnelles avec ces derniers.

I. LE NOUVEAU DROIT COMMUNAUTAIRE APPLICABLE

Les textes communautaires relatifs à la prévention et à la répression de l'abus de marché ont prévu l'établissement d'une liste d'initiés par les sociétés cotées. Une telle liste a pour objectif de faciliter, lors de la mise en oeuvre d'une enquête par les autorités judiciaires ou administratives, l'identification des personnes susceptibles d'avoir commis un délit d'initié .

A. LA DIRECTIVE 2003/6/CE

Le point 3 de l'article 6 de la directive-cadre 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003, sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché, prévoit ainsi les conditions générales de cette obligation d'établissement d'une liste d'initiés, selon les termes suivants :

« Les Etats membres exigent des émetteurs, ou des personnes qui agissent au nom ou pour le compte de ceux-ci, qu'ils établissent une liste de personnes travaillant pour eux, que ce soit dans le cadre d'un contrat de travail ou non, et ayant accès à des informations privilégiées. Les émetteurs et les personnes qui agissent au nom ou pour le compte de ceux-ci actualisent régulièrement cette liste et la communiquent à l'autorité compétente lorsque celle-ci le demande ».

Le critère déterminant d'inscription sur cette liste est donc l'accès à une information privilégiée , qui de fait, est la condition préalable du délit d'initié, lequel est constitué lorsqu'il est fait un usage ou une communication illicite de cette information. Le champ rationae personae est double , puisqu'il porte tant sur les personnes établissant la liste que sur celles susceptibles d'y figurer, et potentiellement étendu puisqu'il inclut, pour le premier, les personnes agissant au nom ou pour le compte des émetteurs, et pour le second, les salariés et prestataires personnes physiques ou morales qui « travaillent pour » ces personnes, notion pour le moins souple.

B. LA DIRECTIVE 2004/72/CE

Le sixième considérant de la directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004, portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés , la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes, permet d'appréhender les justifications et l'esprit du dispositif relatif à l'établissement de listes d'initiés. Il dispose ainsi :

« l'établissement, par les émetteurs ou les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte, de listes de personnes travaillant pour leur compte dans le cadre d'un contrat de travail ou autre et ayant accès à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur est une mesure utile à la protection de l'intégrité des marchés. Ces listes pourraient être utilisées par ces émetteurs ou ces autres personnes pour mieux maîtriser le flux de ces informations privilégiées et, ce faisant, mieux gérer leurs obligations de confidentialité . De plus, elles fourniraient aux autorités compétentes un instrument précieux de contrôle de l'application de la législation relative aux abus de marché . Il est nécessaire que les émetteurs et les autorités compétentes identifient les informations privilégiées auxquelles un initié a accès et déterminent la date à laquelle il y a eu accès (...) ».

L'article 5 de cette directive précise le contenu de la liste, ses modalités d'actualisation et de conservation, ainsi que les obligations de sensibilisation des personnes y figurant au régime légal, pénal et administratif afférent à l'utilisation d'informations privilégiées . Il dispose ainsi :

« 1. Aux fins de l'application de l'article 6, paragraphe 3, troisième alinéa, de la directive 2003/6/CE, les États membres veillent à ce que les listes d'initiés incluent toutes les personnes visées par cet article qui ont accès à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement l'émetteur, de manière régulière ou occasionnelle .

« 2. Les listes d'initiés doivent au minimum mentionner :

« a) l'identité de toute personne ayant accès à des informations privilégiées ;

« b) le motif pour lequel elle est inscrite sur la liste ;

« c) les dates de création et d'actualisation de la liste d'initiés.

« 3. Une liste d'initiés doit être rapidement actualisée :

« a) en cas de changement du motif pour lequel une personne a été inscrite sur la liste ;

« b) lorsqu'une nouvelle personne doit être ajoutée à la liste ;

« c) en mentionnant si et quand une personne inscrite sur la liste cesse d'avoir accès à des informations privilégiées.

« 4. Les États membres veillent à ce que les listes d'initiés soient conservées pendant au moins cinq ans après leur établissement ou leur actualisation.

« 5. Les États membres veillent à ce que les personnes tenues d'établir des listes d'initiés prennent les mesures nécessaires pour que toute personne figurant sur ces listes ayant accès à des informations privilégiées soit dûment sensibilisée aux obligations légales et réglementaires qui lui incombent et informée des sanctions pénales, administratives ou disciplinaires prévues en cas d'utilisation illicite ou de circulation indue de ces informations » .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article tend à insérer un nouvel article L. 621-18-4 dans la section 4 du titre II du livre VI du code monétaire et financier, relative aux pouvoirs de l'AMF.

A. L'ÉTABLISSEMENT DE LA LISTE PAR L'ÉMETTEUR

Le texte proposé par le présent article pour le premier alinéa de l'article L. 621-18-4 du code monétaire et financier expose l'obligation d'établissement de la liste d'initiés imposée aux émetteurs .

Tout émetteur dont les titres sont cotés a ainsi l'obligation d'établir, de mettre à jour et tenir à la disposition de l'AMF, une liste des personnes ayant accès à des informations privilégiées le concernant . Ces personnes peuvent appartenir à deux catégories :

- celles « travaillant » au sein de l'émetteur . Cette disposition concerne donc uniquement les salariés et préposés de l'émetteur ayant accès à des informations privilégiées, tels que les cadres dirigeants ou les collaborateurs des services comptables et financiers ;

- les tiers ayant accès à des informations privilégiées « dans le cadre de leurs relations professionnelles » avec l'émetteur . Cette catégorie est également large et concerne en particulier, s'agissant de l'accès à des informations financières sur l'émetteur, les prestataires de conseil que sont les avocats, commissaires aux comptes ou les banques de financement et d'investissement, qui ont par exemple travaillé avec l'émetteur sur le montage d'une opération financière, ou qui entretiennent des relations professionnelles régulières leur donnant accès à de l'information privilégiée.

Les analystes et journalistes financiers ne sont en revanche a priori pas concernés , dans la mesure où ils ne sont pas réputés disposer d'informations privilégiées sur l'émetteur, de même que les collaborateurs des agences de notation.

Les conditions d'établissement de cette liste seront précisées par le règlement général de l'AMF , qui indiquera notamment son contenu et ses modalités d'actualisation et de conservation, ainsi que le prévoit la directive 2004/72/CE, précitée. La version actuelle du règlement général, tel qu'elle a été publiée le 24 novembre 2004, n'a en effet pas anticipé sur cette création législative ex nihilo .

B. UN SYSTÈME DÉCENTRALISÉ DE RESPONSABILITÉ, PRÉFÉRÉ À CELUI DES « POUPÉES GIGOGNES »

Les tiers ayant accès à des informations privilégiées dans le cadre de leurs relations professionnelles avec l'émetteur sont doublement concernés par le dispositif proposé par le présent article, puisqu'ils sont susceptibles de figurer sur une liste d'initiés, ainsi qu'il a été précisé supra , comme de procéder à l'établissement d'une telle liste.

Le texte proposé par le présent article pour le second alinéa de l'article L. 621-18-4 du code monétaire et financier soumet ainsi ces tiers à une obligation d'établissement d'une liste d'initiés, selon les mêmes modalités que celles prévues par le premier alinéa.

Les tiers doivent donc, à leur tour, établir la liste des deux catégories de personnes qui ont accès aux informations privilégiées concernant l'émetteur, soit les personnes travaillant en leur sein et les tiers ayant accès à ces informations dans le cadre de leurs relations professionnelles avec ces tiers.

L'émetteur n'est donc pas soumis à une obligation de centralisation puis de communication à l'AMF de toutes les listes qui auront été établies, aux échelons « inférieurs », par la chaîne des tiers qui entretiennent directement ou indirectement des relations professionnelles avec lui , ce dont il n'aurait pas nécessairement les moyens humains et matériels, en particulier s'agissant des petites et moyennes sociétés cotées. Un tel système aurait ainsi pu être qualifié de « poupées gigognes ». Afin de ne pas faire peser sur l'émetteur une responsabilité trop étendue quant à l'établissement des listes exhaustives d'initiés, il a été privilégié un processus par lequel chaque niveau intermédiaire établit et communique lui-même la liste des initiés travaillant en son sein et des prestataires du niveau suivant.

De fait, cette possibilité est ouverte par la directive d'application 2004/72/CE, précitée, dont le sixième considérant fait référence à l'établissement des listes d'initiés « par les émetteurs ou les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte ».

Ce dispositif a également une vertu pédagogique , dans la mesure où la décentralisation de la responsabilité de l'établissement des listes permet de sensibiliser chaque échelon aux obligations résultant de la détention d'une information privilégiée, conformément aux dispositions du point 5 de l'article 5 de 5 de la directive d'application 2004/72/CE du 29 avril 2004, précitée.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général approuve les dispositions du présent article, et en particulier l'approche pragmatique qui a prévalu dans la diffusion auprès des tiers de l'obligation d'établissement de la liste d'initiés. Il considère que ces listes devraient contribuer à une plus grande efficacité de la prévention des délits d'initiés. Si le fait de figurer sur la liste n'est naturellement pas constitutif d'une présomption de délit d'initié, dans la mesure où la simple détention d'une information privilégiée n'emporte pas utilisation délictueuse de celle-ci, il constitue un indice concordant qui atténue la possibilité pour l'auteur présumé d'un délit d'apporter la preuve contraire .

Votre rapporteur général vous propose un amendement tendant à préciser que les informations privilégiées auxquelles ont accès les personnes inscrites sur la liste d'initiés concernent « directement ou indirectement » l'émetteur, conformément à la rédaction du point 1 de l'article 5 de la directive 2004/72/CE.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5

Transposition par ordonnance de la directive 2004/39/CE relative aux marchés d'instruments financiers

Commentaire : le présent article a pour objet d'habiliter le gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2004/39/CE concernant les marchés d'instruments financiers, qui remplace la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement. Cette directive tend en particulier à consolider l'harmonisation du cadre juridique des services et entreprises d'investissement, et consacre l'existence de modes de négociation des ordres autres que ceux transitant par les marchés réglementés.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA DIRECTIVE 2004/12/CE DU 21 AVRIL 2004

1. L'ambition d'une réglementation transversale, applicable quels que soient les canaux de négociation des instruments financiers

La directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil, dite « directive MIF », dont le processus d'adoption et les grandes orientations ont été précédemment exposées, abroge et remplace la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement (« DSI »). Elle prévoit un corpus de règles fondamentales applicables à la négociation d'instruments financiers, quel que soit le marché ou l'infrastructure de négociation en cause .

Bien que la DSI ait été modifiée et augmentée à quatre reprises, la directive MIF est beaucoup plus détaillée et comporte 44 pages et 73 articles. Elle comporte cinq titres, dont un titre nouveau sur les marchés réglementés, et deux annexes, dont le plan est exposé ci-après. Les nouvelles dispositions incorporent un certain nombre de travaux du Comité des régulateurs européens (FESCO puis le CEVM) sur les marchés réglementés, les systèmes alternatifs de négociation (ATS) ou les règles de conduite applicables aux entreprises d'investissement.

Par ailleurs, conformément à la procédure Lamfalussy , exposée précédemment, la directive MIF prévoit une cinquantaine de renvois à des dispositions de niveau 2 (règlements ou directives de la Commission européenne), sur lesquelles le CEVM a rendu un premier avis à la fin du mois de janvier 2005 et doit rendre un second avis à la fin du mois d'avril 2005.

Plan de la directive MIF

Titre premier : définitions et champ d'application (articles 1 à 4)

Titre II : conditions d'agrément et d'exercice applicables aux entreprises d'investissement (articles 5 à 35)

Chapitre premier - Conditions et procédures d'agrément (articles 5 à 15)

Chapitre II - Conditions d'exercice applicables aux entreprises d'investissement (articles 16 à 30)

Section 1 - Dispositions générales

Section 2 - Dispositions visant à garantir la protection des investisseurs

Section 3 - Transparence et intégrité du marché

Chapitre III - Droits des entreprises d'investissement (articles 31 à 35)

Titre III - Marchés réglementés (articles 36 à 47)

Titre IV - Autorités compétentes (articles 48 à 63)

Chapitre premier - Désignation, pouvoirs et procédures de recours (articles 48 à 55)

Chapitre II - Coopération entre les autorités compétentes de plusieurs Etats membres (articles 56 à 62)

Chapitre III - Coopération avec les pays tiers (article 63)

Titre V - Dispositions finales (articles 64 à 73)

Annexe I - Liste des services, des activités et des instruments financiers

Annexe II - « Clients professionnels » aux fins de la directive

La principale innovation introduite par la directive MIF n'apparaît pas explicitement dans le texte, du fait de sa vocation à régir de façon transversale les entreprises d'investissement, parmi lesquelles certaines peuvent régir des infrastructures de négociation concurrençant les marchés réglementés. Il s'agit de la suppression de la possibilité ouverte aux Etats membres, par les points 3 et 4 de l'article 14 de la DSI, de prévoir un principe de centralisation des ordres sur les marchés réglementés , à condition de l'assortir d'exceptions. Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé général, l'article L. 421-12 du code monétaire et financier a introduit ce principe de centralisation et prévu des dérogations.

A l'issue du processus de transposition de la directive MIF, les titres cotés pourront donc être traités sur n'importe quelle autre plate-forme de négociation, en particulier les plates-formes multilatérales ( multilatéral trading facilities , MTF) et les systèmes bilatéraux internalisés au sein d'entreprises d'investissement (cf. infra ), ou négociés de gré à gré. La structuration juridique des marchés boursiers en marchés réglementés et de gré à gré, sous-jacente dans la DSI, s'est en effet révélée inadaptée aux nouvelles techniques boursières et n'a pas permis d'y assimiler les plates-formes multilatérales, les marchés privés organisés (tels que le marché libre en France) ni les systèmes internalisés.

Rappelons que le délai de transposition de cette directive, initialement fixé au 1 er mai 2006, devrait être reportée de six mois, soit au 31 octobre 2006 , pour une application dans les Etats membres au 30 avril 2007.

2. Les nouvelles règles relatives à l'architecture des marchés

a) Trois modes équivalents d'exécution des ordres

Alors que la DSI ne traitait - de façon assez peu développée - que des marchés réglementés, la directive MIF reconnaît trois grands modes d'exécution des transactions qu'elle place sur un même plan , et qui conduisent nécessairement à la suppression du principe de concentration des ordres que posait la DSI : l'exécution sur un marché réglementé, sur un système multilatéral de négociation, et directement par un prestataire de services d'investissement.

La notion d' « admission à la négociation sur un marché réglementé », qui irrigue tout le droit boursier, demeure toutefois un pivot de la nouvelle législation, quel que soit le mode d'exécution des ordres, et contribue à conférer aux marchés réglementés un rôle de référence juridique, notamment dans le cadre de la prévention et de la répression de l'abus de marché.

Aux côtés des marchés réglementés 64 ( * ) , qui sont gérés par les seuls opérateurs de marché 65 ( * ) (lesquels sont l'équivalent des entreprises de marché au sens du code monétaire et financier), est ainsi reconnue en premier lieu une nouvelle catégorie de marchés organisés que sont les MTF 66 ( * ) ; mis en oeuvre par des entreprises d'investissement ou des opérateurs de marché . Les marchés réglementés et les MTF appartiennent donc à la même « famille » et remplissent les mêmes fonctions de négociation ; leur régime juridique présente à ce titre de nombreuses similitudes.

Deux grandes différences existent néanmoins : les MTF ne sont pas intrinsèquement dotés d'une fonction d'admission à la négociation au sens juridique du terme (le statut d'instrument financier admis à la négociation entraîne un certain nombre d'obligations d'informations pour l'émetteur concerné), et ils n'ont pas l'obligation formelle d'être agréés ni de fonctionner régulièrement. Il reste qu'une entreprise de marché telle qu'Euronext, qui gère le marché réglementé Euronext Paris, peut tout à fait créer une plate-forme multilatérale de négociation, comme cela sera le cas avec Alternext .

On est dès lors amené à distinguer deux principaux types de MTF :

- les pures plates-formes d'exécution d'ordres qui n'exercent aucune fonction juridique d'admission à la négociation, et sur lesquelles sont négociés des titres cotés ou non sur des marchés réglementés ;

- les MTF qui exercent une fonction d'admission à la négociation et qui, dans la pratique, fonctionnent comme des marchés réglementés sans en détenir le statut. Tel sera par exemple le cas d'Alternext, marché dédié aux petites et moyennes valeurs créé par Euronext Paris, qui devrait voir le jour le 17 mai 2005. Les conditions d'accès à ce marché et d'information par les émetteurs seront largement simplifiées, mais traduiront des exigences supérieures à celles de l'ancien marché libre. De façon générale, ce type de MTF tend à mettre en évidence un « label » de qualité destiné à renforcer la crédibilité de l'infrastructure de marché et la confiance des investisseurs, qui se traduira en France par la possibilité pour l'AMF d'assurer une certaine supervision, à la demande du gestionnaire de la plate-forme .

Le troisième mode d'exécution est assuré directement par une entreprise d'investissement, qui réalise la transaction en interne en s'interposant face au client et agit alors en tant qu' « internalisateur systématique » 67 ( * ) . Par opposition aux MTF, ces systèmes sont qualifiés de « bilatéraux » dans la mesure où l'entreprise qui gère le système se porte contrepartie de tous les ordres de ses clients, à l'achat comme à la vente et sans recourir à un intermédiaire, sous réserve qu'il détienne leurs comptes espèces et comptes titres.

La question a néanmoins été posée 68 ( * ) de savoir si les internalisateurs pouvaient être réellement qualifiés de « marché » , bien que cette notion apparaisse quelque peu insaisissable lorsqu'elle est envisagée sous l'angle juridique plutôt qu'économique. L'opération conclue dans le cadre de l'internalisation n'est en effet pas réellement le résultat d'une rencontre de l'offre et de la demande, dans la mesure où il s'agit d'une prestation de service adossée à une contrepartie et indissociable d'un fort degré d' intuitu personae .

b) Les règles spécifiques afférentes aux marchés réglementés et aux MTF

La directive MIF précise les règles applicables aux différents types de plates-formes de négociation :

Le titre III, qui est presque entièrement nouveau, développe les règles applicables aux marchés réglementés et à leurs opérateurs . S'agissant des marchés réglementés, elle précise notamment les exigences organisationnelles (article 39), les conditions d'admission et de retrait des instruments financiers aux négociations (articles 40 et 41), les règles d'accès direct ou à distance des prestataires de services d'investissement (PSI), qui aux termes de l'article 42 doivent être « transparentes, non discriminatoires, fondées sur des critères objectifs », et les principes de contrôle des négociations 69 ( * ) et de signalement des manquements aux autorités compétentes (article 43). Aux termes de l'article 47, chaque Etat membre publie également une liste des marchés réglementés dont il est l'Etat d'origine, et communique cette liste ainsi que ses modifications ultérieures aux autres Etats membres ainsi qu'à la Commission européenne. Les opérateurs de marché sont quant à eux des entités ad hoc soumises à des règles largement inspirées de celles applicables aux entreprises d'investissement.

S'agissant des MTF , l'annexe I de la directive prévoit que leur exploitation constitue désormais une activité d'investissement (cf. infra ), exercée par un PSI ou un opérateur de marché, que la directive MIF soumet par ailleurs à différentes obligations, notamment organisationnelles. Les dispositions applicables aux MTF, qui relèvent du titre II, sont dès lors pour la plupart analogues à celles qui régissent les marchés réglementés.

L'article 14 de la directive prévoit les règles afférentes au processus de négociation et au dénouement des transactions sur les MTF. Les personnes exploitant un MTF sont ainsi tenues d'établir et de maintenir des « règles transparentes, sur la base de critères objectifs, régissant l'accès à leur système », qui sont fixées par renvoi aux dispositions de l'article 43 applicables aux marchés réglementés , d'instaurer des procédures de fonctionnement « transparentes et non discrétionnaires afin de garantir un processus de négociation équitable et ordonné », d'informer les utilisateurs de leurs responsabilités respectives quant au règlement des transactions exécutées sur leur système, et de fournir « des informations suffisantes au public » ou de s'assurer « qu'il existe un accès à de telles informations pour permettre aux utilisateurs de se forger un jugement en matière d'investissement ».

Le point 6 de l'article 14 prévoit également, comme pour les marchés réglementés, que les MTF puissent traiter des valeurs mobilières sans le consentement de l'émetteur , celui-ci ne pouvant alors être assujetti à « aucune obligation d'information financière initiale, périodique ou spécifique par rapport à ce MTF ». De même, à l'instar des marchés réglementés, l'article 26 impose aux MTF un contrôle du respect de leurs règles de fonctionnement et d'autres obligations légales.

c) Les importantes dispositions relatives à la transparence de marché

La directive MIF comporte plusieurs dispositions relatives aux conditions de transparence post-négociation (transparence « post-trade »), qui ont trait aux obligations de déclaration des transactions réalisées, et de transparence pré-négociation (transparence « pre-trade »), qui concerne la déclaration des intentions d'achat et de vente présentes dans le marché. Le bon fonctionnement des marchés financiers apparaît en effet largement tributaire de l'information ainsi publiée. La directive prévoit des articles distincts selon les modes d'exécution des ordres, mais les règles portant sur les marchés réglementés et les MTF sont similaires.

Cet aspect de la nouvelle architecture des marchés, et en particulier les règles de transparence pré-négociation applicables aux systèmes internes 70 ( * ) , fixées par l'article 27 de la directive, est en tout état de cause celui qui a suscité les débats les plus vifs lors des négociations au Conseil comme au Parlement européen. L'ensemble de ces règles doit être précisé par des dispositions de niveau 2 , qui seront essentielles pour garantir à la fois l'égalité de concurrence entre les différentes plates-formes et la protection des investisseurs.

1 - La transparence pré-négociation

L'article 44 fixe les exigences de transparence avant négociation applicables aux marchés réglementés. Ceux-ci doivent rendre publics, à des « conditions commerciales raisonnables et en continu » et pendant les heures de négociation normales, les prix acheteurs et vendeurs ainsi que l'importance des positions de négociation exprimées à ces prix. Les marchés réglementés peuvent toutefois être dispensés par l'autorité de leur Etat d'origine de rendre publiques ces informations , « en fonction du modèle de marché ou du type et de la taille des ordres », l'autorité ayant en particulier le pouvoir de lever cette obligations pour les « transactions dont la taille est inhabituellement élevée par rapport à la taille normale de marché pour les actions ou catégories d'actions négociées », afin de préserver la confidentialité de certaines transactions par blocs.

Cette notion est centrale puisqu'elle détermine l'ampleur des aménagements à la transparence pré-négociation . Le fait qu'elle soit précisée, ainsi que d'autres mesures d'exécution, par des mesures du niveau 2 de la comitologie, contribue à renforcer l'importance des débats techniques postérieurs à la directive MIF.

Aux termes de l'article 29 de la directive, les MTF, qui partagent avec les marchés réglementés la caractéristique d'être des systèmes multilatéraux, sont soumis à des règles de transparence similaires , ce qui inclut la dérogation relative aux transactions de taille inhabituellement élevée.

Des exigences spécifiques sont en revanche prévues pour l'internalisation , compte tenu des caractéristiques particulières des PSI qui assurent ce type de service 71 ( * ) , et qui furent au coeur des discussions qui ont précédé l'adoption de la directive 72 ( * ) . Le compromis final a consisté à délimiter des exigences de transparence applicables aux prestataires répondant, aux termes de l'article 27, à une triple condition : qu'ils soient des internalisateurs systématiques (selon la définition, précitée, posée par l'article 4 de la directive), que les titres qu'ils traitent en cette qualité soient admis à la négociation sur un marché réglementé, et qu'ils effectuent des transactions « ne dépassant pas la taille normale de marché » 73 ( * ) .

Ici encore, la notion de « taille normale de marché » est décisive pour l'appréciation du niveau de transparence des transactions . Elle est définie par l'article 27 comme « une taille représentative de la moyenne arithmétique de la valeur des ordres exécutés sur le marché pour les actions appartenant à chaque catégorie d'actions » et repose sur la détermination du marché le plus pertinent, en termes de liquidité, pour chaque action négociée 74 ( * ) .

Les internalisateurs systématiques réunissant ces conditions sont alors soumis au régime de transparence suivant :

- ils doivent publier un prix ferme sur les titres qu'ils traitent et pour lesquels il existe un marché liquide 75 ( * ) , et peuvent décider de la taille ou des tailles de transaction pour lesquelles ils établissent un prix, chaque cotation devant comporter « un ou des prix fermes acheteurs et/ou vendeurs, pour une taille ou des tailles qui pourraient aller jusqu'à la taille normale de marché pour la catégorie d'actions à laquelle l'action appartient » ;

- les internalisateurs systématiques doivent publier leurs prix « de façon régulière et continue pendant les heures normales de négociation », à des conditions commerciales raisonnables. Ils peuvent actualiser leurs prix à tout moment, et sont également autorisés, en cas de conditions de marché exceptionnelles (dont les critères seront déterminés par la comitologie), à les retirer ;

- des améliorations de prix sont possibles pour les clients professionnels . Le principe est que les internalisateurs systématiques doivent exécuter les ordres de leurs clients aux prix affichés au moment de la réception de l'ordre, mais il n'est pleinement applicable qu'aux clients de détail. Ils ont alors la possibilité d'exécuter les ordres de leurs clients professionnels « à un meilleur prix lorsque cela est justifié, sous réserve que ce prix s'inscrive dans une fourchette rendue publique et proche des conditions du marché et que les ordres soient d'une taille supérieure à celle normalement demandée par un investisseur de détail ».

Bien qu'elle soit censée préserver les intérêts des investisseurs particuliers, cette faculté de « price improvement » a été controversée . En outre, face à ces mêmes clients professionnels, les internalisateurs systématiques ne sont plus tenus par les prix publiés et peuvent exécuter les ordres à des prix différents, dès lors qu'il s'agit de « transactions dont l'exécution relative à plusieurs valeurs mobilières ne représente qu'une seule transaction » ou d'ordres « soumis à des conditions autres que le prix du marché en vigueur » ;

- les internalisateurs systématiques peuvent sélectionner des catégories de clientèle , « en fonction de leur politique commerciale et d'une manière objective et non discriminatoire ». Aux termes du considérant 50 76 ( * ) de la directive, cette sélection serait en réalité binaire et distinguerait les clients professionnels et de détail . Ces prestataires peuvent également refuser d'établir une relation commerciale avec des investisseurs ou la cesser, sur le fondement de considérations commerciales telles que la solvabilité de l'investisseur, le risque de contrepartie et le règlement définitif de la transaction ;

- lorsqu'un internalisateur reçoit un ordre d'une taille supérieure à la taille pour laquelle il a établi un prix mais inférieure à la taille normale de marché, il peut décider d'exécuter la partie de l'ordre qui dépasse cette taille, dans la mesure où il l'exécute au prix fixé, sous réserve des règles particulières s'appliquant aux clients professionnels. S'il a établi un prix pour différentes quantités mais qu'il reçoit et décide d'exécuter un ordre se situant entre ces tailles, il doit le faire à l'un des prix établis.

2 - La transparence post-négociation

Par parallélisme avec les obligations de transparence pré-négociation, l'article 45 dispose que les marchés réglementés doivent publier, « à des conditions commerciales raisonnables et, dans la mesure du possible, en temps réel » le prix, le volume et l'heure des transactions exécutées. L'autorité d'origine peut toutefois permettre à ces marchés de différer la publication de ces informations en fonction du type et de la taille des transactions, notamment pour les transactions « dont la taille est élevée par rapport à la taille normale de marché pour les actions ou catégories d'actions négociées ». L'autorité de régulation doit alors préalablement approuver les dispositions proposées pour organiser cette publicité différée, et veiller à ce qu'elles soient clairement communiquées aux participants de ces marchés et aux investisseurs. Les MTF , aux termes de l'article 30, sont soumis à des dispositions semblables. L'ensemble du dispositif sera précisé par des mesures d'exécution.

L'article 28, relatif à la « transparence assurée par les entreprises d'investissement après la négociation », fixe des obligations proches pour les entreprises d'investissement concluant des transactions portant sur des actions admises à la négociation sur un marché réglementé, soit pour compte propre, soit au nom de clients en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF, donc le cas échéant par la voie de l'internalisation. Ces prestataires sont tenus, dans la mesure du possible en temps réel, de publier le volume, le prix et l'heure de ces transactions, sous une forme aisément accessible aux autres participants du marché. De même, la possibilité d'une publication différée de ces informations pour certaines catégories de transactions s'applique « mutatis mutandis aux mêmes transactions lorsqu'elles sont conclus en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF ».

3. L'offre de services d'investissements

La réforme de la DSI a été mise à profit pour étendre le champ de la réglementation communautaire , tant en termes de services que d'instruments financiers couverts. Le titre premier de la directive MIF introduit de nombreuses définitions nouvelles et précise le champ de la directive en ouvrant aux Etats membres un certain nombre d'options de transposition, exposées plus loin (cf. les mesures prévues de transposition).

a) La redéfinition des services d'investissement et des instruments financiers

L'annexe I modifie la liste des services ou activités d'investissement et des services auxiliaires . La première catégorie, outre la liste prévue par la DSI 77 ( * ) et transposée dans le code monétaire et financier, intègre désormais le conseil en investissement (auparavant placé dans les services auxiliaires) et l'exploitation d'un MTF. Des modalités particulières d'offre du service de réception et transmission d'ordres ou d'exécution d'ordres sans conseil ont été introduites au cours des négociations sur le texte proposé par la Commission européenne. Les entreprises d'investissement pourront ainsi fournir un service d'exécution simple execution only service ») sur des produits dits simples, sans avoir à obtenir du client ou prospect d'informations préalables sur ses connaissances ou son expérience en matière de services d'investissement, et donc sans avoir à évaluer ex ante si le service ou le produit proposé est adapté à ses exigences.

La catégorie des services auxiliaires s'enrichit 78 ( * ) de l'activité de « recherche en investissements et l'analyse financière ou toute autre forme de recommandation générale concernant les transactions sur instruments financiers ». Cette importante innovation permet de prévoir des règles harmonisées de prévention et de gestion des conflits d'intérêts pour la recherche et l'analyse financières, activité au coeur de l'information des investisseurs, et donc du fonctionnement des marchés, mais qui, par contagion, a pâti au cours des trois dernières années des controverses et actions judiciaires nées des scandales révélés outre-Atlantique.

Cette annexe complète également la liste des instruments financiers, et se montre en particulier plus précise et exhaustive que la DSI sur les instruments financiers à terme . La législation communautaire couvre désormais les contrats dérivés sur matières premières, réglés en espèces ou par livraison physique 79 ( * ) , les instruments dérivés servant au transfert du risque de crédit (communément appelés « dérivés de crédit »), les « contrats financiers par différence » (traduction directe de l'expression anglaise) et ceux relatifs à des variables climatiques 80 ( * ) , des tarifs de fret, des autorisations d'émission, des taux d'inflation ou d'autres statistiques officielles.

b) Des règles de conduite des entreprises d'investissement largement affinées

La directive MIF permet de mieux proportionner les obligations des entreprises d'investissement selon la nature professionnelle ou non du client, point qui avait été mal pris en compte par la DSI, et se révélait dès lors source de divergences d'interprétation entre autorités de régulation nationales, et de lourdeurs supplémentaires pour les intermédiaires souhaitant faire usage du passeport. L'article 19, relatif aux « règles de conduite pour la fourniture de services d'investissement à des clients », prévoit que l'application uniforme des dispositions relatives au traitement différencié de la clientèle se traduise par des mesures de niveau 2 , dans le cadre d'un mandat confié au CERVM.

Les règles afférentes au recours, par les entreprises d'investissement, à des agents liés 81 ( * ) pour fournir leurs services, sont également clarifiées (cf. infra , mesures de transposition).

La différenciation de la clientèle implique une meilleure définition de celle-ci, et l'annexe II de la directive reprend à cet égard la classification des clients professionnels et de détail élaborée par le CERVM. Sont ainsi réputés clients professionnels les entités tenues d'être agréées ou réglementées pour opérer sur les marchés financiers (telles que les établissements de crédit, les entreprises d'investissement, les organismes de placement collectif et leurs sociétés de gestion, les entreprises d'assurance...), les entreprises réunissant deux de trois critères quantitatifs 82 ( * ) , les gouvernements et collectivités territoriales, les banques centrales et organisations internationales, et d'autres investisseurs institutionnels dont l'activité principale consiste à investir dans des instruments financiers, tels que les entités dédiées à la titrisation d'actifs.

Des clients, en particulier des personnes physiques, peuvent également être traités comme des professionnels à leur propre demande , donc selon un système d' « opt in », moyennant le respect de critères de compétence et d'activité sur les marchés 83 ( * ) , et d'une procédure écrite liant le client à l'entreprise d'investissement. Il est a contrario prévu un système d' « opt out » pour les entités qui sont réputées être des clients professionnels et souhaitent ne plus être considérées comme tels. Le point 4 du I de l'annexe II précise ainsi que ces entités « doivent néanmoins pouvoir demander le traitement réservé aux non-professionnels, et les entreprises d'investissement peuvent accepter de leur accorder un niveau de protection plus élevé ». La responsabilité de l'octroi d'une telle protection repose sur le client réputé professionnel , dans la mesure où il lui incombe « de demander cette plus grande protection s'il estime ne pas être en mesure d'évaluer ou de gérer correctement les risques auxquels il est amené à s'exposer ».

La protection des investisseurs se traduit une législation plus étoffée sur les règles de bonne conduite auxquelles sont soumises les entreprises d'investissement, qui aux termes de l'article 19 de la directive, doivent agir « d'une manière honnête, équitable et professionnelle ». Il convient ainsi de relever :

- les obligations d'évaluation et d'information préalable des clients : ces obligations sont modulées, voire levées, selon les services d'investissement et les catégories de clients. Dans cette perspective, outre la classification des clients professionnels et de détail, la directive introduit la notion de « contrepartie éligible » 84 ( * ) , à l'égard desquelles les entreprises d'investissement sont dispensées de l'application des règles de conduite prévues pour les professionnels et les particuliers, sauf à ce que ces entités demandent à être traitées comme des clients bénéficiant de ces règles ;

- la règle fondamentale de « meilleure exécution » , prévue par l'article 21 de la directive et qui sera complétée par des mesures de niveau 2 , impose aux entreprises d'investissement d'exécuter les ordres aux conditions les plus favorables pour leurs clients, c'est-à-dire « le meilleur résultat possible compte tenu du prix, du coût, de la rapidité, de la probabilité de l'exécution et du règlement, de la taille, de nature de l'ordre et de toute autre considération relative à l'exécution de l'ordre », sans préjudice des éventuelles instructions spécifiques données par le client. La difficulté a consisté, lors de la négociation de la directive, à trouver un équilibre entre le souhait des intermédiaires financiers de ne pas se voir imposer une règle absolue et présentant un fort risque juridique, et celui des autorités de régulation d'offrir de véritables garanties de meilleure exécution et de permettre un véritable contrôle, tant par elles-mêmes que par les clients.

Aux termes du point 2 de l'article 21, les entreprises d'investissement doivent se doter d'une « politique d'exécution des ordres », dont le client est informé et à laquelle il donne son consentement préalable, tendant à assurer la meilleure exécution possible. Les entreprises devront mettre en place des procédures à cette fin, en vérifier l'efficacité et actualiser, si besoin est, les lieux d'exécution choisis. Le contrôle du respect de l'obligation de meilleure exécution par les autorités compétentes ne porte pas sur un contrôle au cas par cas, mais sur la vérification de l'existence des procédures. La charge de la preuve de la meilleure exécution repose en outre sur l'entreprise d'investissement puisque celle-ci devra être en mesure de démontrer, à la demande de ses clients, qu'elle a obtenu le meilleur résultat possible aux termes de sa politique d'exécution ;

- la règle de traitement et de circulation des ordres à cours limité des clients , prévue par l'article 22 de la directive, qui participe des liens entre les systèmes internalisés et le marché au sens large et protège les intérêts des donneurs d'ordre. Un internalisateur ne pouvant exécuter immédiatement un tel ordre devra ainsi en faciliter l'exécution la plus rapide en le rendant public selon des modalités facilement accessibles aux autres participants, puis en transmettant l'ordre à un marché réglementé ou à une MTF 85 ( * ) . Il est toutefois prévu une dérogation dans le cas « d'ordres à cours limité portant sur une taille inhabituellement élevée » (cf. supra sur la transparence pré-négociation) ;

- la nécessité d'obtenir l'accord préalable du client pour l'exécution d'ordres hors marchés réglementés ou MTF , donc par la voie de l'internalisation. Il s'agit de veiller à ce que les clients soient avertis et consentent à ce que leurs ordres puissent être traités directement par l'entreprise d'investissement, qui se porte contrepartie en l'exécutant face à son compte propre. Cette précaution est nécessaire, compte tenu des risques accrus de conflits d'intérêt auxquels est susceptible d'être confrontée l'entreprise d'investissement qui internalise les ordres et réalise, le plus souvent, d'autres services d'investissement ;

- alors que la DSI ne prévoyait l'encadrement des conflits d'intérêt qu'en des termes généraux et peu contraignants 86 ( * ) , l'article 18 est dédié aux conflits d'intérêt et impose à ce titre aux entreprises d'investissement des obligations en matière d'identification, de prévention et de gestion des conflits d'intérêt qui peuvent naître dans le cadre de l'offre de services et d'activités d'investissement. Ces obligations seront complétées et précisées par des mesures de comitologie, notamment aux fins de définition des critères de détermination des différents types de situations susceptibles de porter préjudice aux intérêts des clients.

4. La surveillance et la coopération des autorités nationales

Le titre IV relatif aux autorités compétentes reprend et complète les dispositions de la DSI, afin de permettre aux autorités de marché d'assurer une surveillance intégrée d'un nouvel environnement de marché plus complexe, notamment au regard de la prévention des manipulations de cours et du respect de la règle de meilleure exécution. La directive MIF se distingue de la DSI par les dispositions suivantes :

- le régime des déclarations portant sur les transactions financières est complété et sera précisé par voie de comitologie. Pour les entreprises d'investissement, ces déclarations parviennent à l'autorité de l'Etat d'origine. Pour les succursales d'entreprises d'investissement, elles sont adressées à l'autorité de l'Etat dans lequel est implanté la succursale, puis transmises à l'autorité de l'Etat membre d'origine. Elles sont en outre envoyées par ces autorités à l'autorité en charge de la surveillance du marché pertinent en termes de liquidité pour les instruments financiers concernés ;

- en application de l'article 57 de la directive, le régime de coopération entre autorités dans le cadre de leurs fonctions de surveillance et d'enquête prévoit désormais la possibilité, pour l'autorité compétente d'un marché réglementé, de s'adresser directement aux entreprises membres à distance de ce marché et situées dans un autre Etat membre. L'autorité de régulation de cet Etat membre est alors informée de cette consultation ;

- la coordination des autorités est adaptée au caractère de plus en plus transfrontalier des marchés réglementés et aux situations où les activités d'un tel marché « ont acquis une importance considérable pour le fonctionnement des marchés des valeurs mobilières et la protection des investisseurs » dans un Etat membre d'accueil, selon les termes du point 2 de l'article 56 de la directive. Les autorités de l'Etat d'origine et de l'Etat d'accueil du marché réglementé devront alors mettre en place des « dispositifs de coopération proportionnés ». Les critères d'appréciation de l'impact transfrontalier d'un marché réglementé seront précisés par les mesures d'application de niveau 2 ;

- les obligations d'assistance mutuelle et de coopération entre autorités nationales sont renforcées, en particulier en cas de violation de ses obligations par un marché réglementé ou MTF opérant de façon transfrontalière ;

- enfin le point 1 de l'article 56 de la directive impose aux Etats membres qui, à l'instar de la France, ont plusieurs autorités compétentes, de désigner une autorité unique servant de point de contact pour les échanges d'information avec les autorités des autres Etats membres.

B. LES DISPOSITIONS DU RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'AMF RELATIVES AUX NOUVELLES INFRASTRUCTURES MULTILATÉRALES

Le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF), tel qu'il a été homologué par un arrêté du 12 novembre 2004, comporte un livre V relatif aux infrastructures de marché . Ce livre précise, en son titre premier, les règles afférentes aux marchés réglementés, telles que le contenu du dossier que les entreprises de marché souhaitant obtenir la reconnaissance d'un marché réglementé doivent soumettre à l'Autorité, les modalités d'approbation de ce dossier par l'AMF, les règles de déontologie applicables à l'entreprise de marché et à ses collaborateurs, les conditions d'exercice des fonctions de certains collaborateurs d'une telle entreprise, les règles afférentes aux membres des marchés réglementés et aux transactions opérées sur ces derniers, les règles de centralisation des ordres sur ces marchés et les dérogations octroyées 87 ( * ) , les dispositions particulières à certains marchés réglementés (notamment le service de règlement et de livraison différé et les dispositions régissant les marchés réglementés d'instruments financiers à terme).

Le titre II tend à tenir compte des innovations de la directive 2004/39/CE, précitée, en ce qu'il concerne plus particulièrement les systèmes multilatéraux de négociation ou MTF , définis par la doctrine 88 ( * ) comme « une entité qui, sans être un marché réglementé, utilise un système automatisé qui met en contact des intérêts à l'achat et à la vente, dans le système et selon les règles établies par celui qui le gère, d'une manière qui forme ou dont il résulte un contrat irrévocable ». Ces dispositions sont originellement issues d'une décision n° 2003-02 du Conseil des marchés financiers , qui pour la première fois manifestait la prise en compte par les autorités de marché françaises de la montée en puissance des MTF, bien qu'ils soient encore peu utilisés en France.

Aux termes de l'article 312-2 du règlement général, ces systèmes sont considérés comme exerçant une activité d'exécution d'ordres pour le compte de tiers 89 ( * ) . Le titre II inclut les dispositions suivantes :

- le chapitre premier prévoit les documents et informations qui doivent être préalablement communiqués à l'AMF ;

- le chapitre II détaille les règles de fonctionnement des MTF : conditions d'adhésion et communication des informations de marché aux participants, traitement des transactions, publication d'informations sur les transactions réalisées, règles afférentes à la compensation et au règlement-livraison et règles de bonne conduite. L'article 522-2 prévoit d'importantes garanties quant au fonctionnement équitable de ces systèmes et à la préservation de l'intégrité du marché , et dispose ainsi :

« Les moyens humains et matériels mis en oeuvre par les prestataires de services d'investissement gérant un système multilatéral de négociation, ainsi que les règles du système et le cas échéant leurs dispositions d'application, doivent garantir une formation équitable des prix et un fonctionnement ordonné des négociations .

« Les prestataires de services d'investissement doivent garantir aux participants du système le meilleur prix disponible dans le système compte tenu de l'heure de production et de la taille de leurs ordres. Ils ne doivent pas porter atteinte à l'intégrité du marché des instruments financiers concernés ».

- le chapitre III a trait à la surveillance des participants et à la déclaration comme à la conservation des données relatives aux transactions ;

- le chapitre IV précise les conditions que doivent remplir les systèmes informatiques de négociation.

II. L'HABILITATION PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

A. LES PRINCIPES ET L'ÉCHÉANCIER DE LA TRANSPOSITION

Le présent article propose d'autoriser le gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures nécessaires à la transposition de la directive 2004/39/CE concernant les marchés d'instruments financiers, précitée. Dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, le gouvernement justifie ce recours à l'habilitation législative par la longueur et le haut degré de technicité de la directive.

Cet article tend à préciser le champ de l'habilitation . Il est ainsi prévu que les mesures de transposition comportent celles « tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés d'instruments financiers ».

Compte tenu de l'impact étendu de la directive, le délai d'habilitation serait de dix-huit mois à compter de la publication de la loi. Un projet de loi de ratification serait ensuite déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

B. LE CONTENU PROJETÉ DE LA TRANSPOSITION

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, les mesures de transposition prévues seront d'ordre législatif ou réglementaire, lèveront certaines des options ouvertes par la directive, et nécessiteront d'importantes modifications de notre droit.

1. Délimitation entre les dispositions législatives et réglementaires

Il est envisagé de transposer par ordonnance les mesures législatives suivantes :

- les dispositions modifiant des articles existants de la partie législative du code monétaire et financier : le champ d'application et exemptions prévus au titre premier de la directive, ce qui inclut un certain nombre de définitions ; la nomenclature des instruments financiers, des services d'investissement et des services connexes (annexe I) ; et une partie des dispositions du titre II relatives aux entreprises d'investissement ;

- un certain nombre de principes nouveaux posés par la directive , et notamment ceux concernant les marchés réglementés (titre III) et les systèmes multilatéraux de négociation (titre II), bien que la réglementation relative à ces derniers ressortisse actuellement au règlement général de l'AMF. Il pourrait en effet paraître incohérent que les règles applicables aux marchés réglementés et aux MTF continuent d'être fixées par la voie réglementaire, alors que celles applicables aux entreprises d'investissement, qui sont largement comparables, figurent dans la loi. Ceci apparaît d'autant plus nécessaire que les entreprises de marché, comme les entreprises d'investissement, pourront gérer des MTF ;

- les dispositions relatives à la responsabilité des entreprises d'investissement et d'autres acteurs ;

- les dispositions relatives au secret professionnel , dans la mesure où son inobservation est sanctionnée pénalement ;

- enfin les dispositions du titre IV fixant les obligations pesant sur les Etats membres ou sur les autorités compétentes . Ces dernières peuvent toutefois en grande partie être renvoyées à des décrets, en particulier lorsqu'ils existent déjà.

La transposition par voie réglementaire concernerait les mesures suivantes :

- une partie importante des règles relatives à l'agrément et au passeport des entreprises d'investissement , aujourd'hui prévues par le décret n° 96-880 du 8 octobre 1996 relatif à l'accès à l'activité de prestataire de services d'investissement ;

- une partie des dispositions relatives aux échanges d'informations entre autorités compétentes , qui figurent actuellement dans le décret n° 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers ;

- l'essentiel des dispositions du titre II de la directive relatives à la publicité des ordres et transactions . La loi renvoie d'ores et déjà sur ce point au règlement général de l'AMF ;

- l'essentiel, voire la totalité, des dispositions de l'annexe II, relative à la définition des clients professionnels .

2. Options ouvertes aux Etats membres par la directive qu'il est prévu d'exercer lors de la transposition

a) Exemptions d'agrément

La transposition en droit français se traduirait par des exemptions d'agrément pour les professionnels suivants :

- entreprises spécialisées dans la réception-transmission d'ordres et le conseil en investissement (article 3 de la directive, intitulé « Exemptions optionnelles ») : cette option figurait partiellement dans l'article 2 de la DSI de 1993, mais n'avait pas été retenue lors de la transposition par la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières. L'article 3 de la directive MIF l'élargit au conseil en investissement. La levée de cette option conduira à aménager le régime des conseillers en investissement financier , introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière ;

- agents liés (article 23) : les agents liés sont des personnes physiques ou morales liées de manière exclusive à une entreprise d'investissement ; ils agissent pour le compte de celle-ci et sous sa responsabilité entière et inconditionnelle. Ils peuvent exercer la réception-transmission d'ordres, le conseil, le placement, ainsi que le démarchage. Ils sont soumis à une procédure d'enregistrement dans l'Etat membre où ils sont établis et peuvent bénéficier du passeport de leur mandant. Si l'Etat membre dans lequel ils sont établis n'a pas exercé l'option en faveur des agents liés, ils sont enregistrés dans l'Etat membre d'origine de l'entreprise d'investissement pour le compte de laquelle ils agissent. Sur option des Etats membres, ils peuvent recevoir des fonds ou des titres de la clientèle. Dans son esprit, ce régime est proche de celui des mandataires exclusifs prévu par le règlement général de l'AMF. Il est prévu de retenir cette option, mais sans permettre aux agents liés de recevoir des fonds ou des titres de la clientèle.

b) Entreprises d'investissement à statut allégé

La directive prévoit que certaines catégories d'entreprises d'investissement peuvent faire l'objet d'un agrément selon des modalités spécifiques :

- entreprises d'investissement spécialisées dans la réception-transmission d'ordres et le conseil en investissement (point 5 de l'article 5) : ces entités spécialisées doivent être agréées en qualité d'entreprises d'investissement, mais bénéficient de règles prudentielles allégées combinant un capital minimum et une assurance de responsabilité civile, prévue à l'article 67 de la directive. Ces règles sont au demeurant transitoires, la directive sur l'adéquation des fonds propres devant être revue sur ce point, dans la continuité des nouvelles orientations du Comité de Bâle

Une fois agréées, ces entreprises d'investissement bénéficieront du passeport européen. La Commission européenne a précisé que les Etats membres qui retiendraient l'option d'exemption prévue à l'article 3 de la directive (cf. supra ) pourraient néanmoins permettre aux entités concernées d'opter pour le régime d'entreprise d'investissement afin de bénéficier du passeport . Il est prévu de retenir cette solution lors de la transposition ;

- entreprises d'investissement personnes physiques (point 1 de l'article 4) : cette possibilité d'agrément était déjà prévue dans la DSI de 1993, mais n'avait pas été retenue dans la transposition française. La directive MIF prévoit que les entreprises concernées peuvent être soumises à des règles d'organisation et de contrôle adaptées, sous réserve que le niveau de protection des intérêts des tiers et la surveillance prudentielle soient équivalents à ceux prévus pour les personnes morales. Les autorités nationales de contrôle sont hostiles à cette option pour des raisons prudentielles. Il convient néanmoins de rappeler que les services de conseil en investissement et de réception-transmission d'ordres pourront être fournis dans le cadre d'un régime national, et notamment par des personnes physiques. Votre rapporteur général estime qu'il conviendra de rejeter cette option ;

- entreprises d'investissement à dirigeant unique (point 4 de l'article 9) : la directive prévoit que l'agrément des entreprises d'investissement personnes physiques ou morales peut déroger à la règle, inspirée des dispositions communautaires afférentes au secteur bancaire, prévoyant que la gestion soit assurée par au moins deux dirigeants. Par cohérence avec leur position sur l'agrément des entreprises d'investissement personnes physiques, les autorités françaises de contrôle sont défavorables à cette option , et ce point devra donc également être tranché à l'issue des consultations. On peut toutefois rappeler que le droit national des sociétés unipersonnelles (sociétés par action simplifiées ou entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée) offre d'ores et déjà un cadre souple d'exercice.

3. Mesures d'adaptation du droit interne

a) Abrogation de la règle de centralisation des ordres sur les marchés réglementés

Ainsi qu'il a été précédemment exposé, la directive MIF ne permet plus aux Etats membres d'adopter des règles de centralisation des ordres sur les marchés réglementés. Cette disposition majeure conduit à abroger les articles L. 421-12 (principe général de centralisation des ordres) et L. 421-13 (règle renforcée applicable en période d'offre publique) du code monétaire et financier .

Il conviendra vraisemblablement de prévoir des mesures législatives d'accompagnement pour les périodes d'offres publiques , telles qu'un renforcement des sanctions pour non-déclaration d'acquisitions de titres faisant l'objet d'une offre. Ces mesures sont actuellement à l'étude.

b) Supervision des entreprises de marché (article 39 f de la directive)

La directive MIF introduit des règles spécifiques aux opérateurs de marché réglementé, calquées en grande partie sur celles applicables aux entreprises d'investissement , mais distinctes de celles-ci. Le 21 e considérant prévoit en outre que la prochaine directive sur l'adéquation des fonds propres sera révisée afin d'instituer des règles de fonds propres minimums harmonisées pour ces opérateurs.

En droit français, les entreprises de marché ne sont actuellement pas soumises à des règles prudentielles explicites 90 ( * ) . De fait, la seule entreprise de marché existante, Euronext Paris, en tant qu'héritière de la Bourse de Paris, a un statut d'établissement de crédit , en tant qu'institution financière spécialisée. Elle est donc soumise à ce titre à la réglementation et au contrôle de la Commission bancaire. Ce régime n'est pas conforme à la nouvelle réglementation communautaire , dans la mesure où la Commission européenne a indiqué qu'un opérateur de marché réglementé au sens de la directive MIF ne pourrait pas effectuer d'opérations de banque, ni avoir le statut d'établissement de crédit.

Des discussions sont donc en cours entre le Trésor et les autorités concernées (AMF, Comité des entreprises d'investissement et des établissements de crédit, Commission bancaire) pour préciser les règles applicables aux entreprises de marché, ainsi que la répartition des compétences de réglementation et de contrôle en la matière.

c) Actionnariat des entreprises de marché (article 38)

L'article 38 de la directive MIF, intitulé « Exigences applicables aux personnes qui exercent une influence significative sur la gestion d'un marché réglementé », prévoit, d'une part, des obligations déclaratives à la charge des opérateurs de marché (point 2) portant sur l'identité et les intérêts des propriétaires du marché réglementé et/ou de l'opérateur de marché, et d'autre part, une obligation pour les autorités compétentes de s'opposer à un changement de contrôle lorsque celui-ci risquerait de compromettre la gestion saine et prudente du marché (point 3).

Les dispositions actuelles du règlement général de l'AMF font peser sur les entreprises de marché des obligations déclaratives conformes aux principes posés par la nouvelle directive. Ces obligations ne sont toutefois ni aussi précises, ni aussi contraignantes que celles prévues par la directive , et devront donc être complétées.

L'article L. 441-1 du code monétaire et financier 91 ( * ) , tel que modifié en 2001, impose des obligations déclaratives aux actionnaires directs et indirects de ces entreprises, qui se révèlent mieux adaptées au cas particulier d'Euronext Paris, intégralement détenu par une holding néerlandaise cotée. Le décret d'application de cet article pas été pris à ce jour. Ce dispositif doit en tout état de cause être revu dans le cadre plus général des règles applicables aux entreprises de marché.

d) Services et activités d'investissement (points 1 et 2 de l'article 4 et annexe 1)

La typologie et les définitions des services ou activités d'investissement devront être mises en conformité avec celles de la directive. A cette occasion, il est prévu d'intégrer les définitions de ces services dans la loi , comme c'est déjà le cas pour celles des opérations de banque. Cette « réévaluation normative » permettra de réprimer plus efficacement l'exercice illégal de ces activités.

e) Point de contact unique dans le cadre de la coopération entre autorités nationales (point 1 de l'article 56)

Ainsi qu'il a été exposé précédemment, le point 1 de l'article 56 de la directive, intitulé « Obligation de coopérer », prévoit que, pour faciliter la coopération et l'échange d'informations entre autorités européennes, les Etats membres qui ont plusieurs autorités devront désigner une autorité unique servant de point de contact pour l'application de la directive. La Commission européenne a précisé :

- que tous les échanges d'informations officiels devraient transiter par ce point de contact, mais que ceci n'empêchait pas que des copies des informations concernées soient échangées directement entre autorités autres que le point de contact ;

- et que les Etats membres pouvaient étendre cette procédure aux établissements de crédit prestataires de services d'investissement. Ce dernier point reste à préciser.

Il est prévu de désigner l'AMF comme point de contact . Par ailleurs, en liaison avec cette désignation, il est envisagé de transmettre à l'AMF un certain nombre de compétences jusqu'ici dévolues au ministre chargé de l'économie , en particulier le pouvoir d'accorder et de retirer la reconnaissance du statut de marché réglementé (article L. 421-1 du code monétaire et financier) et celui de demander au juge de suspendre les droits de vote d'actionnaires indésirables dans une entreprise de marché (article L. 441-1 du même code).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE OBLIGATION DE VIGILANCE SUR LES EFFETS POTENTIELS DE LA DIRECTIVE MIF

Ainsi que votre rapporteur général a déjà eu l'occasion de le rappeler 92 ( * ) , la directive MIF franchit un seuil qualitatif majeur dans la conception communautaire du droit boursier , avec l'abandon du principe originel de concentration des ordres sur les marchés réglementés, qui avait déjà fait l'objet d'une interprétation relativement souple dans la DSI de 1993, mais qui préservait l'unicité et la transparence des prix.

Le nouveau cadre communautaire répond à un objectif légitime d'extension de la concurrence, destiné à permettre une diminution des coûts de transaction et une meilleure adaptation des modes d'exécution des ordres aux caractéristiques des transactions et de la clientèle. Il s'agissait également de tenir compte de l'existant, et en premier lieu du développement de structures de négociation organisées, pour éviter que des zones d'opacité et d'incertitude juridiques ne se créent sur les marchés non réglementés. Les négociateurs français se sont cependant attachés à promouvoir une concurrence équitable et qui n'accorde pas un avantage indu aux pays où prévaut le rôle des teneurs de marché (« market makers »), dans le cadre de la conception d'un marché régi par les prix.

On peut néanmoins anticiper que l'institutionnalisation de la concurrence est susceptible d'aboutir à une spécialisation des infrastructures par type de clientèle . Les MTF et a fortiori les internalisateurs seront dédiés aux investisseurs professionnels, tandis que les marchés réglementés continueront de traiter les ordres des particuliers. Pour que l'abandon du principe de concentration des ordres n'aboutisse pas à une marginalisation de ces derniers et, ce faisant, à un effet d'éviction de l'investissement direct des particuliers (qui ne se verraient alors offrir d'autre choix que de s'en remettre à la gestion collective ou sous mandat 93 ( * ) ), une consolidation des places en Europe apparaît nécessaire et inévitable . Euronext a bien vocation à incarner ce grand marché réglementé européen, susceptible d'offrir des conditions tarifaires attractives et un volume de transaction suffisant pour atténuer la domination de la place américaine. La logique qui détermine cette consolidation se voit également renforcée par la dématérialisation des titres et l'importance désormais accordée aux systèmes informatiques, qui tendent à relativiser la territorialité des marchés réglementés.

La directive n'a toutefois pu aboutir à un compromis acceptable par les parties qu'au prix du renvoi en comitologie de mesures certes techniques mais dont les conséquences concrètes peuvent être déterminantes . Le processus législatif afférent au nouvel environnement boursier est donc loin d'être achevé. Parmi ces mesures, les critères de définition de la « taille normale de marché » et des « conditions de marché exceptionnelles », ou les précisions relatives à l'amélioration des prix pour les clients professionnels et à la règle de meilleure exécution, appellent une vigilance particulière des négociateurs, afin que ne soient pas dénaturées les règles prévues par la directive MIF.

Les principes qui ont inspiré la directive de 1993, en particulier la lisibilité et la transparence de l'accès aux marchés et de leur utilisation, demeurent cependant d'actualité et doivent donc être préservés. Dans le nouvel environnement qui se dessine, et dans lequel les règles relatives aux internalisateurs systématiques constituent le point le plus sensible, certaines exigences doivent être respectées dans l'ensemble du dispositif communautaire comme dans les mesures de transposition en droit français :

- préserver la circulation des ordres , en particulier ceux à cours limité, entre les différents canaux d'exécution, dans un contexte de fractionnement de la liquidité ;

- garantir la protection de l'investisseur le plus fragile et le moins familier des marchés , c'est-à-dire du particulier, par une information claire et exhaustive sur les conditions de fonctionnement de chaque plate-forme de négociation et une application réelle de la règle de meilleure exécution, en vue d'assurer la bonne fin des transactions et un traitement équitable des investisseurs, quel que soit leur niveau de compétence ;

- l'équité des investisseurs est également indissociable d'un principe de proportionnalité des dérogations octroyées à la transparence des transactions au regard de leur montant. Plus précisément, le traitement dérogatoire des transactions par blocs et de montant élevé doit être soumis à un seuil suffisamment haut pour que la transparence pré-négociation trouve à s'appliquer sur un champ large d'ordres, en particulier au sein des internalisateurs ;

- assurer la meilleure transparence possible de l'exécution des ordres . Si les dispositions relatives à la transparence post-négociation n'apparaissent guère problématiques, le régime de la transparence pré-négociation peut susciter davantage d'inquiétudes, compte tenu des enjeux techniques que revêt la notion générique de « taille normale de marché ». La promotion de cette transparence est en outre cohérente avec le renforcement de la prévention et de la répression de l'abus de marché, qui a fait l'objet de nombreuses règles communautaires. Il importe, en particulier, que les aménagements prévus au profit des internalisateurs ne se révèlent pas, in fine , en contradiction avec l'objectif communautaire maintes fois affirmé de plus grande efficacité de la lutte contre les délits d'initiés et les manipulations de cours , compte tenu des risques inhérents au mode d'exécution des ordres par ces entreprises d'investissement ;

- enfin la prévention des conflits d'intérêt au sein des entreprises d'investissement participe tout autant des exigences de transparence et de préservation de l'intégrité des marchés.

B. L'AMENDEMENT PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général vous propose un amendement de réécriture du présent article, afin d'y intégrer deux dispositions :

- l'insertion d'un I tendant à proposer l'abrogation des articles L. 421-12 et L. 421-13 du code monétaire et financier, relatifs à la centralisation des ordres sur les marchés réglementés . Votre rapporteur général juge, en effet, nécessaire que cette conséquence majeure de la directive MIF sur l'organisation de nos marchés financiers puisse figurer explicitement dans le présent projet de loi, plutôt que dans l'ordonnance de transposition, et suscite ainsi un débat parlementaire cohérent avec les enjeux de la transposition. Par coordination, il est également proposé que cette abrogation prenne effet au même moment que les autres mesures législatives et réglementaires de transposition, soit à compter de la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance ;

- le champ de l'habilitation proposée par le présent article pour la transposition de la directive MIF prévoit que les mesures de transposition consisteront notamment en « celles tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés financiers ». Votre rapporteur général considère que cet encadrement de l'habilitation pourrait être opportunément précisé, afin de renforcer les garanties de prévention de certains risques inhérents au nouveau cadre des marchés.

Il vous propose ainsi de compléter cet encadrement par une formulation disposant que « dans ce cadre, (le gouvernement) veille plus particulièrement à définir les principes et modalités garantissant la meilleure exécution possible des ordres et la fluidité de leur circulation entre les infrastructures de marché, la prévention des conflits d'intérêt au sein des prestataires de services d'investissement, et une définition équitable des dérogations accordées à la transparence des négociations ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6

Application en outre-mer

Commentaire : le présent article a pour objet de rendre applicables les dispositions du présent projet de loi, à l'exception de l'article 2, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Les collectivités territoriales à statut particulier que sont la Nouvelle-Calédonie, la collectivité départementale de Mayotte, la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna sont des parties du territoire national soumises au principe de spécialité législative , qui constitue un des critères déterminants de distinction de celles-ci des départements d'outre-mer. Ces derniers sont en effet régis par le principe de l'assimilation législative en application des dispositions de l'article 73 de la Constitution, dont le premier alinéa prévoit que « dans les départements et régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit 94 ( * ) ». L'application des normes législatives dans les quatre collectivités territoriales précitées est donc subordonnée à l'adoption d'une disposition expresse d'extension.

Le présent article prévoit donc une mention expresse d'applicabilité des dispositions du présent projet de loi dans ces quatre collectivités d'outre-mer, à l'exception des dispositions de coordination de l'article 2 . Le texte proposé par cet article prévoit en effet une mesure de coordination portant sur l'article L. 532-18 du code monétaire et financier, relatif à la libre prestation de services financiers en France 95 ( * ) . Or le principe communautaire de libre prestation de services ne s'applique pas dans les quatre collectivités d'outre-mer susvisées.

La future ordonnance de transposition de la directive 200439/CE du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, prévue par l'habilitation proposée à l'article 5 du présent projet de loi, devra également comporter une mention expresse rendant ses dispositions applicables de plein droit dans ces quatre collectivités.

En vertu des différentes lois statutaires, la consultation de l'assemblée de chaque collectivité est obligatoire dès lors que les dispositions d'extension sont assorties de mesures substantielles d'adaptation aux spécificités locales 96 ( * ) . En l'absence de telles mesures dans le présent article, l'avis des assemblées délibérantes des quatre collectivités territoriales 97 ( * ) n'est pas requis .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 6

Ratification de deux ordonnances

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de proposer la ratification de deux ordonnances portant, respectivement, sur la transposition de la directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier (ordonnance n° 2004-1201), et sur la simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers (ordonnance n° 2005-303).

I. L'ORDONNANCE N° 2004-1201 DU 12 NOVEMBRE 2004 RELATIVE À LA SURVEILLANCE COMPLÉMENTAIRE DES ÉTABLISSEMENTS DE CRÉDIT, DES ENTREPRISES D'ASSURANCE ET DES ENTREPRISES D'INVESTISSEMENT APPARTENANT À UN CONGLOMÉRAT FINANCIER

A. UNE COORDINATION ACCRUE ENTRE LES AUTORITÉS DE CONTRÔLE SUR LES CONGLOMÉRATS FINANCIERS

En application des dispositions du c du 1° du II de l'article premier de la loi n° 2004-237 du 18 mars 2004 portant habilitation du gouvernement à transposer, par ordonnance, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire, le gouvernement a été autorisé à prendre, par ordonnance, les dispositions législatives nécessaires à la transposition de la directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier et modifiant les directives 73/239/CEE, 79/267/CEE, 92/49/CEE, 92/96/CEE, 93/6/CEE et 93/22/CEE du Conseil et les directives 98/78/CE et 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil. Cette directive devait être transposée dans notre droit avant le 11 août 2004.

Sur cette base a été adoptée l'ordonnance n° 2004-1201 du 12 novembre 2004 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier. Le projet de loi n° 148 (2004-2005) ratifiant l'ordonnance du 12 novembre 2004 précitée, annexé au procès-verbal de la séance du 19 janvier 2005, a été renvoyé à votre commission des finances qui, lors de sa séance du 2 février 2005, a désigné comme rapporteur votre rapporteur général.

Dans son rapport pour avis au nom de la commission des finances 98 ( * ) , notre collègue Denis Badré avait rappelé les enjeux de cette directive pour compléter le dispositif de contrôle prudentiel sur les entités nouvellement définies que constituent les conglomérats financiers :

« Les groupes ou conglomérats financiers se définissent comme fournissant des produits ou des services relevant de différents secteurs des marchés financiers (le secteur bancaire, le secteur des assurances et celui des entreprises d'investissement).

« La notion de conglomérat financier, ainsi définie, n'existe pas en droit français : le contrôle prudentiel de ces groupes s'exerce actuellement exclusivement au niveau sectoriel, sans vision consolidée des risques et des transferts possibles de ceux-ci d'un secteur à l'autre.

« La directive introduit ainsi un troisième degré de surveillance prudentielle qui s'ajoute à la surveillance des entités réglementées et des groupes sectoriels auxquels elles appartiennent . La surveillance complémentaire s'exerce au niveau du conglomérat financier. La directive introduit par conséquent en droit français la notion de conglomérat financier, en complétant les dispositions relatives aux établissements de crédit, aux entreprises d'assurance et aux entreprises d'investissement » 99 ( * ) .

Notre collègue Denis Badré s'était félicité du franchissement d'une étape supplémentaire dans la lutte contre les risques systémiques :

« Votre rapporteur pour avis approuve pleinement la mise en place d'une coordination entre les autorités de contrôle compétentes pour les différentes catégories d'établissements financiers, dans un contexte de concentration du secteur financier donnant naissance à des conglomérats financiers. Cette évolution apparaît de nature à accroître les risques propres aux différents secteurs d'activité et les risques systémiques.

« De fait, les principaux groupes bancaires français ont créé des filiales d'assurance et les instruments manquent pour mesurer les risques au niveau des groupes financiers.

« Des recommandations sur la surveillance des conglomérats financiers ont d'ailleurs également été adoptées au niveau international, dans le cadre du Groupe des 10, sous l'égide de la Banque des règlements internationaux.

« La coordination entre autorités proposée par la directive marque une première étape pour accroître l'efficacité du contrôle prudentiel. A terme, ce processus pourrait se traduire par une coordination renforcée, voire une concentration des autorités de contrôle prudentiel et de contrôle des marchés, aux niveaux national et européen » 100 ( * ) .

B. LES DISPOSITIONS DE L'ORDONNANCE

Les dispositions de l'ordonnance transposent en droit français les règles communautaires de nature législative relatives à la surveillance des conglomérats financiers.

Le chapitre I (articles 1 à 4) modifie le code des assurances .

L'article 1 er introduit une nouvelle section dans le code des assurances relative à la surveillance complémentaire des groupes d'assurance et des conglomérats financiers et définit cette notion, ainsi que celles qui lui sont associées pour permettre la surveillance de ces groupes. La procédure de surveillance complémentaire est ensuite définie dans une nouvelle section du code des assurances.

L'article 2 est relatif à l'obligation de publier des comptes consolidés.

L'article 3 précise la procédure d'agrément pour les sociétés appartenant à un conglomérat financier dans le cadre de l'espace économique européen.

L'article 4 établit notamment la procédure de coordination entre les autorités de contrôle prudentiel au sein de l'espace économique européen.

Le chapitre II (articles 5 à 12) modifie le code monétaire et financier .

Les articles 5 et 6 introduisent dans le code monétaire et financier les définitions relatives aux conglomérats financiers et à leurs modalités de contrôle.

Les articles 7, 9, 10 et 11 opèrent des coordinations rédactionnelles.

L'article 8 définit les modalités de surveillance complémentaire des prestataires de services d'établissement par la commission bancaire.

L'article 12 décrit la procédure d'échange d'informations et de surveillance complémentaire des conglomérats financiers entre la commission bancaire, la commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP) et l'autorité des marchés financiers (AMF), le cas échéant en coordination avec les autorités réglementées des Etats membres ou des autres Etats parties à l'accord sur l'espace économique européen. Cet article prévoit la désignation d'un coordonnateur et envisage des mesures d'exécution.

Le chapitre III (articles 13 à 15) modifie le code de la mutualité .

Il opère des modifications analogues à celles opérées pour le code des assurances, s'agissant de la définition des notions de conglomérat financier et de surveillance complémentaire (article 13), de l'octroi d'agrément (article 14) et de coordination au sein de l'espace économique européen (article 15).

Le chapitre IV (articles 16 à 19) modifie le code de la sécurité sociale .

L'article 16 introduit dans le code de la sécurité sociale les définitions nécessaires à la description de la nouvelle procédure de surveillance complémentaire qu'il décrit également.

L'article 17 concerne la procédure d'agrément.

Les articles 18 et 19 opèrent des coordinations rédactionnelles. L'article 19 précise également la procédure de coordination avec les autres autorités nationales et européennes au sein de l'espace économique européen.

Le chapitre V (articles 20 et 21) comporte les dispositions finales. En application de l'article 20, les dispositions de la présente ordonnance sont applicables, pour la première fois, à la surveillance des comptes commençant le 1 er janvier 2005 ou durant cette même année.

Votre rapporteur général considère que les dispositions de cette ordonnance sont conformes à l'habilitation accordée par le Parlement dans la loi d'habilitation du 18 mars 2004 précitée, et vous propose donc sa ratification.

II. L'ORDONNANCE N° 2005-303 DU 31 MARS 2005 RELATIVE À LA SIMPLIFICATION DES RÈGLES DE TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ DES INSTRUMENTS FINANCIERS

A. UNE RÉFORME ATTENDUE ET NÉCESSAIRE

A l'initiative de votre rapporteur général, l'article 34 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour modifier les dispositions du code monétaire et financier relatives au régime de transfert de propriété des instruments financiers, « afin d'harmoniser les règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison ». L'ordonnance prévue n° 2005-303 a ainsi été publiée le 31 mars 2005 , et porte « simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison ».

Se fondant sur des travaux de place déjà très avancés, votre rapporteur général avait souligné la nécessité de procéder à une réforme du régime juridique de la propriété des instruments financiers, afin de contribuer à moderniser et à accroître l'attractivité de notre droit , comme à faciliter le développement du futur compartiment Alternext, marché non réglementé d'Euronext qui devrait être mis en place dans les prochaines semaines.

Les systèmes de règlement-livraison étant aujourd'hui similaires, que les instruments financiers soient négociés sur des marchés réglementés ou organisés, cette réforme nécessaire et très attendue des acteurs de la place a ainsi pour objet d'unifier les deux régimes juridiques actuels de transfert de propriété des instruments financiers, en modifiant la date de réalisation effective du transfert par un alignement sur les règles en vigueur sur les marchés non réglementés. Cette harmonisation des règles françaises avec les normes des autres places de marché européennes conforte, en outre, l'émergence d'un droit international des titres, qui constitue l'un des objectifs de la Commission européenne dans la continuité du Plan d'action pour les services financiers.

Ainsi que votre rapporteur général l'a précisé dans son rapport pour avis 101 ( * ) sur la loi de simplification du droit précitée, le principe de la réforme est le suivant : alors qu'aujourd'hui le transfert de propriété d'un titre est réalisé au jour de la négociation , qui est celui de l'écriture comptable valant inscription en compte, il sera à l'avenir considéré que cette écriture comptable passée en J n'est qu'une écriture d'enregistrement matérialisant la négociation. Elle n'acquerra le statut juridique d'inscription en compte valant transfert de propriété qu'à la date de dénouement réel et irrévocable de l'opération - soit en pratique en J + 3 -, dans les livres du dépositaire central ou des teneurs de compte-conservateurs intermédiaires. Pour tous les instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement-livraison, le transfert de propriété résultera donc de l'inscription au compte de l'acheteur, qui n'aura plus lieu au jour de la négociation mais au moment du dénouement de la transaction .

Ainsi seront dissociés l'enregistrement comptable consécutif à la négociation et le transfert juridique de propriété, comme c'est aujourd'hui le cas pour les marchés organisés. Cet aménagement ne requiert pas une modification des systèmes d'information actuels et ne remet pas en cause les pratiques de marché, conditions de succès d'une telle réforme.

Dans l'intervalle temporel séparant la négociation du dénouement, l'acheteur détiendra un droit de créance à l'encontre de son intermédiaire (droit de se faire livrer une chose et droit d'en recevoir la propriété) et une dette , correspondant au prix de la transaction et exigible au dénouement. Parallèlement, le vendeur aura une obligation de livraison et un droit de créance sur le prix à recevoir, ces deux obligations étant exigibles au dénouement. La nature de ces obligations permettra notamment de traiter plusieurs situations susceptibles de survenir entre J et J + 3 : une faillite du teneur de compte (de l'acheteur ou du vendeur), ou de l'acheteur ou du vendeur lui-même, la saisie réalisée par un tiers à l'encontre du vendeur ou de l'acheteur, le défaut de livraison ou l'absence de dénouement.

B. LES DISPOSITIONS DE L'ORDONNANCE

L'essentiel de la réforme proposée se traduira par un aménagement du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF), qui en prévoira les modalités d'application. Une modification de deux articles du code monétaire et financier est néanmoins apparue nécessaire, dans la mesure où son article L. 431-2 distingue nettement deux régimes de transfert de propriété. Les dispositions de l'ordonnance n° 2005-303 du 31 mars 2005 sont ainsi les suivantes :

- l'article premier propose de modifier l'article L. 431-2 du code monétaire et financier, qui prévoit les deux régimes de transfert de propriété suivants : sur les marchés réglementés, ce transfert résulte de l'inscription en compte à une date définie par les règles de place ; pour les opérations conclues hors des marchés réglementés mais dénouées dans des systèmes de règlement et de livraison, il est réalisé au moment du dénouement des opérations. La modification proposée consiste donc à unifier ces deux régimes , en précisant que pour tous les instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison - ce qui constitue désormais le critère d'application, indépendamment des marchés sur lesquels les ordres ont été exécutés -, le transfert de propriété a lieu lors de l'inscription en compte, à une date et dans des conditions définies dans le règlement général de l'AMF, qui prévoira que cette inscription a lieu au moment du dénouement de la transaction (en pratique trois jours après celle-ci).

Les règles de transfert de propriété des autres titres non cotés seront définies par un décret, pris en application de l'article L. 228-1 du code de commerce 102 ( * ) . En outre, les quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 431-2 du code monétaire et financier, qui ont trait aux transactions réalisées hors des marchés réglementées, mais dénouées via un système de règlement et de livraison 103 ( * ) , sont remplacés par un unique alinéa tendant à restreindre le champ de la dérogation aux précédents alinéas aux seuls systèmes de règlement et de livraison assurant un dénouement irrévocable des opérations « en continu » , et non en fin de journée. Dans ce cas, le transfert de propriété de ces titres négociés de gré à gré ne résulte pas de l'inscription des titres au compte de l'acheteur, qui constituerait le nouveau droit commun, mais seulement dès lors que l'acheteur a réglé le prix de la transaction. Tant que l'acheteur n'a pas réglé son intermédiaire, celui-ci est propriétaire des titres , ce qui lui permet de les placer en pension auprès de la Banque de France afin de faciliter tout au long de la journée le financement des transactions ;

- par cohérence, l'article 2 modifie l'article L. 431-3 du même code pour remplacer la référence aux « règles de la place » par une référence au règlement général de l'AMF ;

- l'article 3 prévoit l'application de cette ordonnance aux quatre collectivités territoriales d'outre mer que sont Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna ;

- enfin l'article 4 précise que l'entrée en vigueur de ces modifications aura lieu à compter de la publication au Journal officiel des dispositions du règlement général de l'AMF auxquels renvoient les deux premiers articles.

Votre rapporteur général considère que les dispositions de cette ordonnance sont conformes à l'habilitation accordée par le Parlement dans la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004, précitée, et vous propose donc sa ratification.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 avril 2005, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général , sur le projet de loi n° 267 (2004-2005) portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des marchés financiers .

M. Philippe Marini, rapporteur général , a tout d'abord indiqué que ce projet de loi était court, dans la mesure où il ne comportait que six articles tendant à la transposition de deux importants dispositifs communautaires adoptés dans le cadre du Plan d'action pour les services financiers. Il s'agissait du dispositif « abus de marché », dont le délai limite de transposition avait été fixé au 12 octobre 2004, ce qui signifiait que la France était en retard de transposition, et de la directive du 21 avril 2004 relative aux marchés d'instruments financiers (« directive MIF »), directive la plus importante du Plan d'action, qui contribuait à modifier largement l'architecture des marchés financiers et dont le délai de transposition avait été reporté au 31 octobre 2006.

Il a rappelé que le dispositif « abus de marché » comprenait une directive-cadre adoptée le 28 janvier 2003 et quatre textes d'application, dont un règlement européen et trois directives. Il a ajouté que cette démarche correspondait à la mise en oeuvre du « processus Lamfalussy », qui se traduisait par l'adoption d'une directive définissant les principes, puis par des textes techniques d'application conçus dans le cadre de la « comitologie », qui associait la Commission, le Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM) et les professionnels concernés.

Abordant le cadre juridique actuel de la prévention et de la répression de l'abus de marché, M. Philippe Marini, rapporteur général , a précisé que les justifications économiques de la répression de l'abus de marché résidaient dans l'atteinte à l'égalité d'accès des investisseurs à l'information financière et l'atteinte au fonctionnement même des marchés, ce qui justifiait, selon lui, la prévention et la répression des abus de marché pour consolider la confiance dans les marchés financiers.

Il a ensuite souligné l'originalité du système français de double répression administrative, qui comportait des sanctions disciplinaires et pécuniaires, et pénale de l'abus de marché, qui concernait trois types de délits ou manquements à savoir le délit d'initié, la manipulation de cours et la diffusion de fausses informations.

Il a rappelé que la directive originelle du 13 novembre 1989 était succincte et incomplète, en ce qu'elle ne visait que le délit d'initié, et qu'il était donc apparu nécessaire de moderniser et étoffer le dispositif, ce qui avait constitué un des objectifs du Plan d'action pour les services financiers lancé en 1999.

Il a indiqué que la directive-cadre du 28 janvier 2003 visait le délit d'initié et la manipulation de marché, et a précisé que son champ d'application couvrait les instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé ou en voie de l'être, critère juridique qui était sans préjudice du mode d'exécution des ordres, lesquels pouvaient donc transiter par un marché non réglementé.

Il a ajouté que les principales dispositions de cette directive consistaient à :

- enrichir et préciser la notion centrale d'information privilégiée, dont la détention impliquait plusieurs interdictions et abstentions de réalisation d'opérations ou de communication ;

- définir la notion de manipulation de marché, laquelle consistait à donner des indications fausses ou trompeuses, à fixer les cours à un niveau anormal ou artificiel, ou à recourir à des procédés fictifs ou à toute forme de tromperie ou d'artifice. Il a précisé toutefois qu'une exemption était prévue lorsque les opérations étaient conformes aux « pratiques de marché admises » ;

-  prévoir les modalités de gestion des informations privilégiées par les émetteurs et les intermédiaires ;

-  définir une présomption irréfragable de légitimité de certaines transactions, en particulier dans le cadre des programmes de rachats d'actions ;

-  promouvoir une autorité unique de régulation dans chaque Etat membre, investie de pouvoirs suffisants ;

- prévoir des mesures de coopération et d'échange d'informations entre autorités nationales, ainsi que des précisions sur la conduite d'enquêtes transfrontières .

M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que les quatre textes d'application comportaient les dispositions suivantes :

- la directive 2003/124/CE du 22 décembre 2003 complétait la définition de l'information privilégiée et de la manipulation de marché, et précisait notamment la notion d'« intérêts légitimes » de l'émetteur justifiant le report de l'information du public ;

- la directive 2003/125/CE du 22 décembre 2003 précisait l'impact du dispositif de prévention de l'abus de marché sur l'activité des analystes et des journalistes financiers, en édictant notamment des obligations sur la présentation équitable des recommandations et la mention des conflits d'intérêts ;

- le règlement du 22 décembre 2003 précisait le cadre des dérogations prévues pour les programmes de rachat, en particulier la double présomption irréfragable de légitimité, et des mesures de stabilisation d'un instrument financier ;

- la directive 2004/72/CE du 29 avril 2004 était, selon lui, essentielle en ce qu'elle détaillait les principales mesures de prévention des abus de marché. Ces dispositions comportaient ainsi les critères d'évaluation de l'acceptabilité des pratiques de marché et les modalités d'établissement de la liste d'initiés, de la déclaration sur les opérations suspectes et de la notification des opérations réalisées par les dirigeants et les personnes ayant un lien personnel étroit avec ces derniers sur les titres d'un émetteur.

En ce qui concernait les mesures de transposition déjà réalisées, M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que la loi de sécurité financière du 1 er août 2003 avait en partie anticipé le dispositif « abus de marché » en créant une autorité administrative unique, l'Autorité des marchés financiers (AMF), une procédure de déclaration des opérations réalisées par certaines personnes physiques sur les titres d'un émetteur, et en apportant de nouvelles garanties organisationnelles et procédurales en matière d'enquête et de sanction des manquements boursiers. Sur ce dernier point, il a souligné que l'adoption d'une procédure de transaction complèterait utilement le dispositif répressif et renforcerait l'efficacité de la régulation boursière.

Il a ajouté que le règlement général de l'AMF avait en outre transposé, en ses Livres II et VI, certaines mesures d'ordre réglementaire figurant dans le dispositif communautaire, plus particulièrement les dispositions ayant trait à la définition des pratiques de marché admises, à la définition de l'information privilégiée et aux obligations d'abstention que sa détention emportait, à la définition des manipulations de cours, à la diffusion d'une fausse information et au régime des opérations des émetteurs sur leurs propres titres. Il a déclaré que ce régime avait été complété par deux décisions récentes établissant une présomption simple de légitimité des rachats d'actions, notamment dans le cadre d'opérations de croissance externe.

Abordant ensuite les dispositions du présent projet de loi, il a précisé que celui-ci proposait d'introduire les dispositions suivantes :

- l'article 1 er créait une obligation de déclaration des transactions suspectes à l'AMF, instrument essentiel, selon lui, de la prévention de l'abus de marché, inspirée de la déclaration de soupçon existant pour le blanchiment des capitaux. Il a indiqué qu'aux termes de cet article, tout intermédiaire financier devrait faire cette déclaration, de manière écrite ou orale, dès qu'il aurait des raisons de soupçonner qu'une opération dont il avait connaissance pourrait constituer un manquement d'initié ou une manipulation de cours. Des obligations de confidentialité étaient également prévues pour les auteurs des déclarations et les services de l'AMF, ainsi que des exemptions de responsabilité civile et pénale au profit des déclarants de bonne foi, sauf cas de concertation frauduleuse avec l'auteur de l'opération notifiée. Il a estimé que ces exemptions étaient indispensables pour inciter les intermédiaires à dénoncer les opérations suspectes ;

- l'article 2 était de coordination ;

- l'article 3 étendait le champ « rationae materiae » et « rationae personae » de la procédure de déclaration des opérations réalisées par certaines personnes physiques sur les titres d'un émetteur, introduite par la loi de sécurité financière précitée, afin de transposer pleinement les dispositions communautaires. Ces personnes étaient les dirigeants sociaux, les responsables de haut niveau disposant d'un pouvoir décisionnel sur la stratégie et l'évolution de l'émetteur, et les personnes entretenant des liens personnels étroits avec les précédentes. Il a précisé que la responsabilité de la déclaration reposait sur ces personnes physiques, et non sur l'émetteur qui devrait se limiter à centraliser et communiquer l'information à l'AMF ;

- l'article 4 créait une obligation, pour les émetteurs et les tiers avec lesquels ils entretenaient des relations professionnelles, d'établir et de mettre à jour une liste des personnes ayant eu accès à des informations privilégiées. Il a indiqué qu'il s'agissait de faciliter, au cours d'une enquête, l'identification des personnes susceptibles d'avoir commis un délit d'initié, comme de faire oeuvre de pédagogie en sensibilisant ces personnes aux obligations résultant de la détention d'une information privilégiée ;

- l'article 6 étendait enfin le dispositif à quatre collectivités d'outre-mer.

Abordant le cadre de la nouvelle architecture des marchés née de la directive MIF, M. Philippe Marini, rapporteur général , a rappelé que l'organisation des marchés financiers née de la directive sur les services d'investissements de 1993 faisait prévaloir le principe de concentration des ordres boursiers sur les marchés réglementés. Il a indiqué que de nouveaux modes d'exécution des ordres étaient toutefois apparus, tels que des plates-formes multilatérales non réglementées et des systèmes internalisés bilatéraux gérés par des prestataires de services d'investissement. Il a précisé que ces modes d'exécution étaient désormais consacrés par la directive MIF du 21 avril 2004. Il a observé que la directive MIF renouvelait également le cadre juridique de l'offre de services d'investissement.

Il a déclaré que la directive était le fruit d'un délicat compromis qui devait être précisé par des mesures d'application dites de niveau 2, dans le cadre de la « comitologie », ajoutant que le nouveau cadre répondait à un objectif de concurrence entre modes d'exécution des ordres et de meilleur traitement des ordres, notamment les transactions par blocs réalisées par des investisseurs professionnels. Il a souligné que des aménagements à la transparence pré-négociation des ordres exécutés dans les systèmes internalisés étaient ainsi prévus au profit des ordres dépassant la « taille normale de marché », l'enjeu de la transparence de l'information sur les prix ayant été particulièrement discuté lors de l'adoption de la directive. Au-delà de cette controverse, M. Philippe Marini, rapporteur général , a reconnu que l'on ne pouvait éluder le fait que la nouvelle architecture des marchés financiers comportait certains risques, tels que le fractionnement de la liquidité, l'éviction des investisseurs individuels des canaux hors marchés réglementés, ou la difficulté d'apprécier et de comparer la qualité d'exécution des ordres, le principe de « meilleure exécution » se voulant néanmoins apporter une réelle garantie.

Il a indiqué que l'article 5 du présent projet de loi proposait donc de transposer cette directive, mais que, compte tenu de sa longueur, de la technicité de ses dispositions et des mesures de niveau 2 encore à venir, le gouvernement proposait néanmoins d'avoir recours à une habilitation à prendre ces mesures par ordonnance, dans un délai de 18 mois.

Cet exposé a été suivi d'un large débat.

M. Jean Arthuis, président , a remercié M. Philippe Marini, rapporteur général, pour son intervention « éclairante », et a considéré que l'Europe consacrait « l'économie sociale de marché », mais entendait également la réguler et prévenir les abus susceptibles de porter atteinte à son fonctionnement. Il a estimé que l'amendement proposé à l'article 5, par M. Philippe Marini, rapporteur général, et tendant à mieux encadrer le champ de l'habilitation, constituait un gage de sécurité pour une meilleure transposition de la directive relative aux marchés d'instruments financiers.

M. François Marc a rappelé que la loi de sécurité financière du 1 er août 2003 avait permis d'anticiper certaines dispositions du nouveau régime de l'abus de marché, ce qui contribuait à expliquer, selon lui, que le présent projet de loi comportât un faible nombre d'ajustements. Il a exprimé son accord de principe sur les mesures de transposition proposées qui étaient relatives à l'abus de marché, mais a fait part de ses réserves quant à l'habilitation prévue à l'article 5 du projet de loi, qui s'apparentait, selon lui, à un dessaisissement du Parlement, ne présentait aucun caractère d'urgence et conduisait à s'appuyer sur des mesures d'application qui n'étaient pas encore finalisées par la « comitologie ».

M. Roland du Luart s'est interrogé sur le champ de l'applicabilité aux collectivités d'outre-mer, prévue par l'article 6 du projet de loi.

M. Joël Bourdin a exprimé son attachement à la formulation de l'amendement à l'article 3 du projet de loi, proposé par M. Philippe Marini, rapporteur général, sous réserve d'une modification formelle.

Mme Nicole Bricq a déclaré partager les réserves exprimées par M. François Marc sur le principe de l'habilitation prévue à l'article 5. Elle s'est également interrogée sur la composition de la liste des personnes ayant accès à des informations privilégiées, prévue à l'article 4 du projet de loi, ainsi que sur la pertinence de l'application du dispositif communautaire relatif à l'abus de marché aux seuls instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé.

M. Jean-Jacques Jégou s'est également interrogé quant au principe même et à l'étendue de l'habilitation figurant à l'article 5.

En réponse, M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que la directive-cadre relative aux marchés d'instruments financiers était finalisée et devait, quoiqu'il arrive, être transposée dans le droit français. Il a indiqué qu'il proposerait un amendement tendant à mieux encadrer l'habilitation prévue à l'article 5, et que son rapport écrit fournirait un certain nombre de précisions sur le contenu prévisionnel de la transposition, ainsi que sur la répartition entre ses mesures de niveaux législatif et réglementaire, ce qui pouvait conduire à souscrire au principe de l'habilitation. Il a estimé que le compromis que reflétait la directive relative aux marchés d'instruments financiers n'apparaissait pas pleinement satisfaisant, dans la mesure où les représentants des professionnels des marchés d'Europe continentale s'étaient montrés divisés face aux intermédiaires financiers anglo-saxons, en particulier sur la question de l' « internalisation systématique », et avaient fait preuve d'une moindre efficacité dans la défense de leurs intérêts que lors des négociations qui avaient porté sur l'intégration de l'évaluation des instruments financiers à la juste valeur dans le dispositif des nouvelles normes comptables internationales. Il a, en outre, considéré que le gouvernement devait demeurer actif et vigilant dans le processus d'élaboration des mesures d'application par la « comitologie », s'agissant plus particulièrement de la définition des dérogations à la transparence pré-négociation.

Il a également précisé que le critère juridique de l'admission à la négociation sur un marché réglementé, auquel se référait l'ensemble de la législation communautaire, s'exerçait sans préjudice du mode d'exécution des ordres boursiers, qui pouvaient transiter sur des marchés réglementés, des marchés organisés ou des systèmes internalisés, et que le projet de loi relatif à la modernisation et au financement de l'économie proposerait, notamment, d'étendre le pouvoir de sanction de l'AMF à l'ensemble des configurations de marché. Il a enfin indiqué qu'il procéderait à une vérification du champ de l'application du présent projet de loi à quatre collectivités d'outre-mer, prévu par son article 6.

Revenant sur les dispositions de l'article 4 du projet de loi, relatif à l'établissement d'une liste des personnes ayant accès à des informations privilégiées, M. Philippe Marini, rapporteur général , a indiqué que cette liste, dont le contenu serait fixé par le règlement général de l'AMF, était susceptible d'inclure, parmi les tiers ayant accès à des informations privilégiées dans le cadre de leurs relations professionnelles avec l'émetteur, des prestataires de conseils tels que les avocats, les commissaires aux comptes et les banques d'investissement. Il a rappelé, en revanche, que les journalistes et analystes-financiers ne devaient a priori pas figurer sur cette liste, dans la mesure où ils n'étaient pas réputés avoir accès à des informations privilégiées, mais seulement à des informations publiques. Il a considéré que « l'intimité » entre les dirigeants d'un émetteur et des tiers ayant été impliqués en amont dans le montage d'une opération financière, rendait ces derniers redevables de l'obligation d'inscription sur la liste des initiés prévue par la législation communautaire.

M. Jean-Jacques Jégou a considéré qu'il n'était pas possible de définir une liste exhaustive des initiés, dans la mesure où toute personne pouvait potentiellement avoir accès à une information privilégiée.

Se référant aux dispositions de l'article 3, relatives à la déclaration des transactions effectuées par certaines personnes physiques sur les titres d'un émetteur, M. Joël Bourdin a estimé que la difficulté de définir la notion de « lien personnel étroit », qui pouvait, selon lui, être rapprochée du champ de la prise illégale d'intérêt, requérait une appréciation du juge.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a considéré que cette difficulté pouvait être tempérée par le fait que la déclaration des opérations relevait de la seule responsabilité des personnes physiques concernées, qui devaient donc prendre l'initiative de procéder à cette déclaration.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par M. Philippe Marini, rapporteur général.

A l' article premier , elle a adopté à l'unanimité deux amendements tendant, d'une part, à rendre obligatoire, et non plus facultative, la confirmation écrite auprès de l'AMF d'une déclaration d'opérations suspectes qu'un émetteur aurait préalablement transmise par voie verbale, et, d'autre part, après l'intervention de M. Joël Bourdin, à préciser les modalités de transmission par l'AMF d'informations à une autorité de tutelle d'un autre Etat-membre, lorsque les opérations ayant fait l'objet de la déclaration d'opérations suspectes relevaient de la compétence de cette autorité.

A l' article 3 , après les interventions de M. Jean Arthuis, président, de Mme Nicole Bricq, de MM. Joël Bourdin et Jean-Jacques Jégou , elle a adopté un amendement tendant à apporter diverses précisions rédactionnelles, et à faire peser sur les seules personnes physiques l'obligation de déclaration et de transmission à l'AMF des transactions qu'elles réalisaient sur les titres d'une personne faisant appel public à l'épargne à laquelle elles étaient liées.

A l' article 4 , après l'intervention de M. Jean-Claude Frécon , elle a adopté un amendement tendant à apporter une précision rédactionnelle et de mise en conformité avec la lettre du dispositif communautaire sur l'abus de marché.

A l' article 5 , après l'intervention de M. Joël Bourdin , elle a adopté un amendement tendant, d'une part, à faire figurer explicitement l'abrogation des articles du code monétaire et financier relatifs à la centralisation des ordres sur les marchés réglementés, et, d'autre part, à préciser l'encadrement de l'habilitation législative prévue par cet article.

Enfin, elle a adopté, après les interventions de MM. François Marc et Jean-Jacques Jégou , un amendement portant article additionnel après l'article 6 , tendant à ratifier deux ordonnances relatives, d'une part, à la transposition de la directive n° 2002-87-CE du 16 décembre 2002, relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédits, des entreprises d'assurances et des entreprises d'investissements appartenant à un conglomérat financier, et, d'autre part, à la simplification du régime de transfert de propriété des instruments financiers.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite évoqué devant la commission la possibilité de lui soumettre deux amendements lors de sa prochaine réunion du lundi 2 mai. Il a indiqué, en effet, en premier lieu, que la récente décision de l'AMF tendant à reconnaître, en tant que pratique de marché admise, l'acquisition par une société de ses propres actions aux fins de conservation et de remise ultérieure en paiement ou en échange dans le cadre d'opérations de croissance externe, lui apparaissait, à certains égards, trop « laxiste » et de nature à entériner les pratiques controversées de certains émetteurs. Il a précisé, dès lors, qu'il entendait proposer un amendement tendant à mieux encadrer ces pratiques de rachat d'actions en vue d'opérations de croissance externe.

Il a proposé, en second lieu, d'introduire un amendement à l'article premier du présent projet de loi tendant à rendre les obligations de secret professionnel relatives aux déclarations d'opérations suspectes plus conformes aux dispositions de la directive du 29 avril 2004.

La commission a alors donné mandat au rapporteur général pour finaliser la rédaction de deux amendements dont il venait de présenter le contenu.

La commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié .

TABLEAU COMPARATIF

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Textes en vigueur

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Texte du projet de loi

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Propositions de la Commission

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Article 1er

Article 1er

I. - A la section 4 du chapitre I er du titre II du livre VI du code monétaire et financier, la sous-section 5 devient la sous-section 6.

I.- Sans modification.

II. - Après l'article L. 621-17 du même code, il est ajouté une sous-section 5 ainsi rédigée :

Alinéa sans modification.

« Sous-section 5

Alinéa sans modification.

« Déclaration d'opérations suspectes

Alinéa sans modification.

« Art. L. 621-17-1. - Les établissements de crédit, les entreprises d'investissement et les personnes mentionnées à l'article L. 421-8 sont tenus de déclarer sans délai à l'Autorité des marchés financiers toute opération sur des instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé, effectuée pour compte propre ou pour compte de tiers, dont ils ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer une opération d'initié ou une manipulation de cours au sens des dispositions du règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

« Art. L. 621-17-1. - Sans modification.

« Art. L. 621-17-2. - Lorsque l'Autorité des marchés financiers transmet, conformément aux articles L. 621-15-1 et L. 621-20-1, certains faits ou informations au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, la déclaration prévue à l'article L. 621-17-1, dont le procureur de la République est avisé, ne figure pas au dossier de la procédure.

« Art. L. 621-17-2. - Sans modification .

« Art. L. 621-17-3. - Le règlement général de l'Autorité des marchés financiers précise les conditions dans lesquelles est faite la déclaration prévue à l'article L. 621-17-1.

Alinéa sans modification.

« La déclaration peut être écrite ou verbale. Dans ce dernier cas, l'Autorité des marchés financiers peut en demander une confirmation par écrit.

« La déclaration ...

... en demande une confirmation par écrit.

« La déclaration doit contenir :

Alinéa sans modification.

« 1° Une description des opérations, en particulier du type d'ordre et du mode de négociation utilisés ;

« 1° Sans modification

« 2° Les raisons conduisant à soupçonner que les opérations déclarées constituent une opération d'initié ou une manipulation de cours ;

« 2° Sans modification

« 3° Les moyens d'identification des personnes pour le compte de qui les opérations ont été réalisées et de toute autre personne impliquée dans ces opérations ;

« 3° Sans modification

« 4° L'indication que les opérations ont été effectuées pour compte propre ou pour compte de tiers ;

« 4° Sans modification

« 5° Toute autre information pertinente concernant les opérations déclarées.

« 5° Sans modification

« Lorsque certains de ces éléments ne sont pas disponibles au moment de la déclaration, celle-ci doit au moins indiquer les raisons mentionnées au 2°. Les informations complémentaires sont communiquées à l'Autorité des marchés financiers dès qu'elles deviennent disponibles.

« Art. L. 621-17-4 . - Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait, pour les dirigeants ou les préposés des personnes mentionnées à l'article L. 621-17-1, de porter à la connaissance des personnes ou des parties liées aux personnes pour le compte desquelles les opérations déclarées ont été effectuées, l'existence de la déclaration ou de donner des informations sur les suites réservées à celle-ci.

« Art. L. 621-17-4. - Sans modification .

« Art. L. 621-17-5 . - Sans préjudice de l'article 40 du code de procédure pénale, des articles L. 621-15-1, L. 621-17-2, L. 621-20-1 et de l'exercice de ses pouvoirs par l'Autorité des marchés financiers, il est interdit à cette dernière, ainsi qu'à chacun de ses membres, experts nommés dans les commissions consultatives mentionnées au III de l'article L. 621-2, membres de son personnel et préposés de révéler les informations recueillies en application de l'article L. 621-17-1. Si l'Autorité des marchés financiers utilise le concours des personnes mentionnées à l'article L. 621-9-2, cette interdiction s'applique également à ces personnes, ainsi qu'à leurs dirigeants et préposés.

Alinéa sans modification.

« Le fait pour un membre de l'Autorité des marchés financiers, un expert nommé dans les commissions consultatives mentionnées au III de l'article L. 621-2, un membre de son personnel ou un préposé, de révéler le contenu de la déclaration ou l'identité des personnes qu'elle concerne, est puni des peines prévues à l'article L. 642-1. Si l'Autorité des marchés financiers utilise le concours des personnes mentionnées à l'article L. 621-9-2, ces peines s'appliquent également à ces personnes, ainsi qu'à leurs dirigeants et préposés.

Alinéa sans modification.

« Lorsque des opérations ayant fait l'objet de la déclaration relèvent de la compétence d'une autorité compétente d'un autre État membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, l'Autorité des marchés financiers transmet sans délai la déclaration à cette dernière.

« Lorsque ...

... à cette dernière, ainsi que les éventuels compléments d'information fournis par le déclarant à la demande de cette autorité .

« Art. L. 621-17-6 . - Concernant les opérations ayant fait l'objet de la déclaration mentionnée à l'article L. 621-17-1, aucune poursuite fondée sur l'article 226-13 du code pénal ne peut être intentée contre les dirigeants et les préposés des personnes mentionnées à l'article L. 621-17-1 qui, de bonne foi, ont effectué cette déclaration.

« Art. L. 621-17-6. - Sans modification .

« Aucune action en responsabilité civile ne peut être intentée contre une personne mentionnée à l'article L. 621-17-1, ses dirigeants ou ses préposés qui ont effectué de bonne foi cette déclaration.

« Sauf concertation frauduleuse avec l'auteur de l'opération ayant fait l'objet de la déclaration, le déclarant est dégagé de toute responsabilité : aucune poursuite pénale ne peut être engagée contre ses dirigeants ou ses préposés par application de l'article L. 465-1 et du premier alinéa de l'article L. 465-2 du code monétaire et financier et des articles 321-1 à 321-3 du code pénal, et aucune procédure de sanction administrative ne peut être engagée à leur encontre pour des faits liés à une opération d'initié ou à une manipulation de cours.

« Les dispositions du présent article s'appliquent même si la preuve du caractère fautif ou délictueux des faits à l'origine de la déclaration n'est pas rapportée ou si ces faits font l'objet d'une décision de non-lieu ou de relaxe et n'ont donné lieu à aucune sanction de la part de l'Autorité des marchés financiers ou de l'autorité compétente mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 621-17-5. »

Code monétaire et financier

Article L. 532-18

Article 2

Article 2

Dans la limite des services qu'elle est autorisée à fournir sur le territoire de son Etat d'origine, et en fonction de l'agrément qu'elle y a reçu, toute personne morale ou physique agréée pour fournir des services d'investissement peut, sans préjudice des dispositions des articles L. 511-21 à L. 511-28, sur le territoire de la France métropolitaine et des départements d'outre-mer, établir des succursales pour fournir des services d'investissement et des services connexes, et intervenir en libre prestation de services dans des conditions fixées par le conseil des marchés financiers, notamment en ce qui concerne la protection des fonds des clients.

Sans modification

Pour l'application des articles L. 213-3, L. 322-1 à L. 322-4, L. 421-6, L. 421-7, L. 421-8 à L. 421-11, L. 432-20, L. 431-7, L. 531-10, L. 533-3, L. 533-4, L. 533-6 à L. 533-11, L. 533-13 et L. 621-18-1, les personnes mentionnées à l'alinéa précédent sont assimilées à des prestataires de services d'investissement.

Au deuxième alinéa de l'article L. 532-18 du même code, après les mots : « L. 533-13 » sont ajoutés les mots : « , L. 621-17-1 à L. 621-17-6 ».

Article 3

Article 3

Article L. 621-18-2

L'article L. 621-18-2 du même code est ainsi modifié :

Alinéa sans modification

Toute personne faisant appel public à l'épargne communique à l'Autorité des marchés financiers et rend publics dans un délai déterminé par le règlement de l'Autorité des marchés financiers les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de leurs titres ainsi que les transactions opérées sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme, réalisés par :

« 1° Au premier aliéna les mots : « sur ces titres au moyen d'instruments financiers à terme » sont remplacés par les mots : « sur des instruments financiers qui leur sont liés » ;

« Sont communiqués par les personnes mentionnées aux a à c ci-dessous à l'Autorité des marchés financiers, et rendus publics par cette dernière dans un délai déterminé par son règlement général, les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de titres d'une personne faisant appel public à l'épargne ainsi que les transactions opérées sur des instruments financiers qui leur sont liées, lorsque ces opérations sont réalisées par :

a) Les membres du conseil d'administration, du directoire, du conseil de surveillance, le directeur général, le directeur général unique, le directeur général délégué ou le gérant de cette personne ;

« 2° Au deuxième alinéa les mots : « ou le gérant de cette personne » sont remplacés par les dispositions suivantes : « , le gérant ou tout autre personne qui, dans les conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, a, d'une part, au sein de l'émetteur, le pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant son évolution et sa stratégie, et a, d'autre part, un accès régulier à des informations privilégiées concernant cet émetteur ; »

« a) Les membres du conseil d'administration, du directoire, du conseil de surveillance, le directeur général, le directeur général unique, le directeur général délégué ou le gérant de cette personne ;

« b) Toute autre personne qui, dans les conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers a, d'une part, au sein de l'émetteur, le pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant sont évolution et sa stratégie, et a, d'autre part, un accès régulier à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement cet émetteur ;

b) Des personnes ayant, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, des liens personnels étroits avec l'un de ceux qui sont mentionnés ci-dessus.

« c) Des personnes ayant, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, des liens personnels étroits avec les personnes mentionnnées aux a et b .

Les modalités et conditions de la communication et de la publication prévues ci-dessus sont fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

« 3° Le dernier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée de ces opérations.

« Les personnes mentionnées aux a et b sont tenues de communiquer à la personne mentionnée au premier alinéa les informations permettant à cette dernière de remplir les obligations de communication définies à ce même alinéa. Un décret en Conseil d'État définit les modalités de cette communication ainsi que les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée des opérations mentionnées à cet article. »

« Les personnes mentionnées aux a à c sont tenues de communiquer à l'émetteur, lors de la déclaration à l'Autorité des marchés financiers prévue au premier alinéa, une copie de cette déclaration. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités de la communication à l'Autorité des marchés financiers ainsi que les conditions dans lesquelles l'assemblée générale est informée des opérations mentionnées au présent article. »

Article 4

Article 4

Au même code, il est créé un article L. 621-18-4 ainsi rédigé :

Alinéa sans modification.

« Art. L. 621-18-4 . - Tout émetteur dont les instruments financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé établit, met à jour et tient à la disposition de l'Autorité des marchés financiers, dans les conditions prévues par le règlement général de cette dernière, une liste des personnes travaillant en son sein et ayant accès aux informations privilégiées concernant cet émetteur ainsi que des tiers ayant accès à ces informations dans le cadre de leurs relations professionnelles avec ce dernier.

« Art. L. 621-18-4 . - Tout émetteur ...

... informations privilégiées concernant directement ou indirectement cet émetteur ...

... dernier.

« Dans les mêmes conditions, ces tiers établissent, mettent à jour et tiennent à la disposition de l'Autorité des marchés financiers une liste des personnes travaillant en leur sein et ayant accès aux informations privilégiées concernant l'émetteur, ainsi que des tiers ayant accès aux mêmes informations dans le cadre de leurs relations professionnelles avec eux. »

Alinéa sans modification

Article L. 421-12

Article 5

Article 5

Les transactions sur un instrument financier admis aux négociations sur un marché réglementé, réalisées au profit d'un investisseur résidant habituellement ou établi en France, par un prestataire de services d'investissement agréé ou exerçant en France par voie de libre prestation de services ou de libre établissement, sont nulles si elles ne sont pas effectuées sur un marché réglementé d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

I. - Les articles L. 421-12 et L. 421-13 du code monétaire et financier sont abrogés.

Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les transactions qui y sont mentionnées peuvent être effectuées en dehors d'un marché réglementé si la demande en est faite par des investisseurs résidant habituellement ou établis sur le territoire français et si la transaction remplit les conditions définies par le règlement général du conseil des marchés financiers concernant son volume, le statut de l'investisseur, la nature de l'instrument financier négocié et l'information du marché réglementé sur lequel cet instrument est admis. Cette dérogation est accordée de plein droit pour toutes les transactions qui, incluses dans une convention autre qu'une vente pure et simple, en constituent un élément nécessaire.

Article L. 421-13

Les transactions sur instruments financiers faisant l'objet d'une offre publique ne peuvent être réalisées que sur un marché réglementé d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou sur un marché reconnu en application de l'article L. 423-1, sur lequel ces instruments financiers sont admis aux négociations. Sans préjudice de la sanction prévue à l'article L. 421-12, les détenteurs d'instruments financiers acquis en violation des dispositions précédentes sont privés du droit de vote pour toute assemblée d'actionnaires qui se tiendrait avant l'expiration d'un délai de deux ans suivant la date de l'acquisition.

Le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures nécessaires pour transposer la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, et notamment celles tendant à la protection des investisseurs, par le renforcement de la transparence et de l'intégrité des marchés d'instruments financiers.

II.  - Le Gouvernement ...

... marchés financiers. Dans ce cadre, il veille plus particulièrement à définir les principes et modalités garantissant la meilleure exécution possible des ordres et la fluidité de leur circulation entre les infrastructures de marché, la prévention des conflits d'intérêt au sein des prestataires de services d'investissement, et une définition équitable des dérogations accordées à la transparence des négociations.

Cette ordonnance est prise dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi. Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Alinéa sans modification.

III. - Les dispositions du I sont applicables à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance mentionnée au II.

Article 6

Article 6

La présente loi, à l'exception de son article 2, est applicable à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Article additionnel après l'article 6

I. - Est ratifiée l'ordonnance n° 2004-1201 du 12 novembre 2004 relative à la surveillance complémentaire des établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises d'investissement appartenant à un conglomérat financier, prise en application de l'article premier de la loi n° 2004-237 du 18 mars 2004 portant habilitation du gouvernement à transposer, par ordonnance, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

II. - Est ratifiée l'ordonnance n° 2005-303 du 31 mars 2005 portant simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison, prise en application de l'article 34 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit.

ANNEXE S :

TEXTES COMMUNAUTAIRES TRANSPOSÉS

1) Directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marché).

2) Règlement (CE) n° 2273/2003 de la Commission du 22 décembre 2003 portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les dérogations prévues pour les programmes de rachat et la stabilisation d'instruments financiers.

3) Directive 2003/124/CE de la Commission du 22 décembre 2003 portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la définition et la publication des informations privilégiées et la définition des manipulations de marché (texte présentant de l'intérêt pour l'EEE).

4) Directive 2003/125/CE de la Commission du 22 décembre 2003 portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la présentation équitable des recommandations d'investissement et la mention des conflits d'intérêts.

5) Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil.

6) Directive 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004 portant modalités d'application de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les pratiques de marché admises, la définition de l'information privilégiée pour les instruments dérivés sur produits de base, l'établissement de listes d'initiés, la déclaration des opérations effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et la notification des opérations suspectes.

* 1 En particulier selon la théorie d'Eugène Fama sur l'efficience des marchés, qui considère que les prix des actifs reflètent parfaitement toute l'information disponible, et suivent de ce fait une marche au hasard (« random walk »). Toute information susceptible d'affecter les cours de bourse est, dès lors, instantanément répercutée dans les cours, et les prix actuels des actifs sont l'espérance des prix futurs, sous l'hypothèse implicite d'informations identiques pour tous les agents .

* 2 Dans la mesure où le profit réalisé par un initié devient anormalement élevé au regard du risque et de la volatilité de la classe d'actif considérée.

* 3 En particulier les règlements 90-04 relatif à l'établissement des cours, 90-08 sur l'utilisation d'une information privilégiée, et 98-07 sur l'obligation d'information du public.

* 4 C'est-à-dire, aux termes de l'article L. 621-9 du code monétaire et financier, « les prestataires de services d'investissement agréés ou exerçant leur activité en libre établissement en France ; les personnes autorisées à exercer l'activité de conservation ou d'administration d'instruments financiers mentionnées à l'article L. 542-1, y compris les dépositaires d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières ; les dépositaires centraux et les gestionnaires de système de règlement et de livraison d'instruments financiers ; les membres des marchés réglementés mentionnés à l'article L. 421-8 ; les entreprises de marché ; les chambres de compensation d'instruments financiers ; les organismes de placements collectifs et leurs sociétés de gestion ; les intermédiaires en biens divers ; (...) les personnes (...) produisant et diffusant des analyses financières ».

Les personnes habilitées à procéder au démarchage et les conseillers en investissements financiers relèvent en revanche d'un régime distinct.

* 5 En application d'une jurisprudence née d'un arrêt de la Cour de cassation du 26 juin 1995, qui a consacré une conception objective de l'information privilégiée, c'est-à-dire en fonction de son seul contenu et non plus des compétences particulières des bénéficiaires.

* 6 L'article 10 prévoyait, en outre, la faculté pour les autorités nationales de ne pas donner suite à une demande d'information émanant d'une autorité d'un autre Etat membre, dans deux cas :

« a) lorsque la communication des informations risquerait de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public de l'Etat requis ;

« b) lorsqu'une procédure judiciaire est déjà engagée pour les mêmes faits et contre les mêmes personnes devant les autorités de l'État requis ou lorsque celles-ci sont déjà définitivement jugées pour les mêmes faits par les autorités compétentes de l'Etat requis. »

* 7 Directive 2001/108/CE du 21 janvier 2002 modifiant la directive 85/611/CEE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), en ce qui concerne les placements des OPCVM ; et directive 2001/107/CE du 21 janvier 2002 modifiant la directive 85/611/CEE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) en vue d'introduire une réglementation relative aux sociétés de gestion et aux prospectus simplifiés.

* 8 Ordonnance n° 2005-171 du 24 février 2005 simplifiant les procédures de constitution et de réalisation des contrats de garantie financière.

* 9 Par l'article premier de la loi n° 2004-237 du 18 mars 2004 portant habilitation du gouvernement à transposer, par ordonnance, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

* 10 Du nom du baron Alexandre Lamfalussy, président du Comité des sages qui a inventé cette méthode en 2001. La méthode fut, en premier lieu, destinée à réguler plus efficacement les valeurs mobilières sur le marché européen, puis a très vite été étendue à l'ensemble des services financiers.

* 11 Résolution du Parlement européen du 5 février 2002 sur la mise en oeuvre de la législation relative aux services financiers.

* 12 Le considérant 43 mentionne, en particulier, la nécessité d'assurer la confiance à l'égard des marchés financiers parmi les investisseurs, l'offre d'un large éventail d'instruments financiers concurrents ainsi qu'une information et une protection adaptées à la situation personnelle des investisseurs, une application cohérente de la réglementation par les autorités indépendantes de régulation, l'encouragement de l'innovation sur les marchés, la préservation de l'intégrité du marché grâce à un contrôle étroit et réactif de l'innovation financière, la promotion de la compétitivité internationale des marchés financiers de l'Union européenne, et la nécessité d'assurer l'égalité des conditions d'activité entre tous les participants au marché.

* 13 Cf. en particulier « Transposition en droit français de la directive « abus de marché » », Claude Ducouloux-Favard, Lamy droit pénal des affaires n° 34, décembre 2004.

* 14 Décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989 - Journal officiel du 1 er août 1989 (et rectificatif du 5 août 1989).

* 15 « Les agences de notation de crédit émettent des opinions sur la solvabilité d'un émetteur ou la qualité d'un instrument financier particulier à une date donnée. En tant que telles, ces opinions ne constituent pas des recommandations au sens de la présente directive. Cependant, les agences de notation de crédit devraient envisager d'adopter des politiques et procédures internes visant à garantir que les notations de crédit qu'elles publient sont présentées de manière équitable et qu'elles mentionnent de manière appropriée leurs intérêts ou conflits d'intérêts significatifs en rapport avec lesdits émetteurs ou instruments auxquels se rapportent leurs notations de crédit ».

* 16 « Les États membres devraient être en mesure de choisir la manière la plus appropriée d'établir une réglementation pour les personnes qui réalisent ou diffusent des travaux de recherche concernant des instruments financiers ou des émetteurs d'instruments financiers ou pour les personnes qui produisent ou diffusent d'autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement, y compris des mécanismes appropriés d'autorégulation, qui devraient être notifiés à la Commission ».

Le CERVM a remis un rapport le 31 mars 2005, dans lequel il recommande un principe d'autorégulation des agences de notation , plutôt que la mise en place d'une réglementation européenne spécifique.

* 17 Certaines des sociétés qui furent l'objet des récents scandales boursiers, et au premier rang desquelles l'exemple emblématique d'Enron, étaient ainsi encore recommandées à l'achat quelques jours ou semaines avant l'annonce de leur faillite. Indépendamment des facteurs psychologiques qui peuvent inciter un analyste à persister à recommander à l'achat un titre qui connaît une période prolongée de baisse, il est apparu que les départements de recherche et d'analyse de certaines banques d'investissement avaient ainsi manqué à un élémentaire devoir de prudence et d'objectivité.

Plusieurs procédures de sanction et de transaction ont ainsi été mises en oeuvre en 2003 par la Securities and Exchange Commission , l'autorité de régulation américaine.

Les critiques les plus vives ont toutefois porté sur la porosité et l'influence réciproque des activités de recherche et d'émission ou de vente de titres de plusieurs banques, en particulier anglo-saxonnes. L'absence ou la faiblesse des « murailles de Chine » était, ainsi, de nature à orienter les recommandations des analystes en fonction du portefeuille de clientèle de la banque d'investissement.

* 18 C'est-à-dire une présomption qui ne peut être renversée par une preuve contraire.

* 19 Dès 1994, dans le rapport de la commission des finances du Sénat n° 578 (1993-1994) intitulé « La mise en place du marché unique des services financiers - La transposition en droit français de la directive sur les services d'investissement », votre rapporteur général soulignait les problèmes de frontières, compétitions et surenchères nés de la juxtaposition d'une autorité publique, la COB, et des deux autorités professionnelles qui préexistaient au CMF, le Conseil des marchés à terme et le Conseil des bourses de valeurs.

A deux reprises, lors de l'examen du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques puis du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, votre rapporteur général a également pris l'initiative de proposer des dispositions tendant à réformer et unifier les autorités financières.

* 20 « La loi de sécurité financière : un an après », rapport d'information n° 431 (2003-2004).

* 21 La loi de sécurité financière a notamment tiré les conséquences de la jurisprudence de la Cour de cassation sur la COB (cf. Cass. ass. plén. 5 février 1999, affaire Oury ), qui a jugé que la présence du rapporteur lors des délibérations de la commission des sanctions n'était pas conforme à l'exigence d'impartialité.

* 22 Extraits de l'intervention de M. Philippe Marini, rapporteur du projet de loi de sécurité financière pour la commission des finances du Sénat, lors de la séance du 18 mars 2003 :

« Les délits ou manquements boursiers font actuellement l'objet d'une double répression : répression administrative d'un côté et, le cas échéant, répression pénale de l'autre. Or les incriminations sont très proches.

« Les mêmes faits peuvent être sanctionnés administrativement par l'autorité de régulation boursière et pénalement par le juge judiciaire en matière de délit ou de manquement d'initié, de délit ou de manquement de manipulation de cours, de délit ou de manquement pour diffusion de fausses informations.

« Ces incriminations sont très proches, je le répète, mais elles ne sont pas identiques pour autant. Ainsi le droit pénal veut, et c'est sa spécificité, que l'intentionnalité des faits soit établie pour aboutir à une condamnation.

« Les procédures, quant à elles, sont quelque peu concurrentes dans le droit actuel. L'action publique devant le juge pénal peut être engagée par plusieurs voies, sans que l'autorité boursière soit pour autant dessaisie de son propre pouvoir de sanction.

« Cette double répression est admise par la jurisprudence, mais il faut reconnaître qu'elle est très rare en pratique . Elle n'a jamais été condamnée jusqu'ici par le juge constitutionnel, sauf dans une décision isolée de 1996, qui d'ailleurs vise non pas la COB mais l'autorité de régulation des télécommunications, et cette décision, que l'on est fondé à estimer un peu étrange au vu de la doctrine, n'est pas nécessairement une source de droit.

« Lorsque l'autorité boursière applique une sanction pécuniaire administrative, celle-ci constitue une amende provisionnelle, c'est-à-dire qu'elle s'impute sur l'amende qui sera réclamée au terme de la procédure pénale par le juge judiciaire.

« Au cours des douze dernières années, il a été recensé seulement quatre cas de poursuites sur les mêmes fondements par la COB et par le juge pénal. Il est inutile de préciser qu'il s'agit d'affaires ayant fait du bruit, sensibles au regard de l'opinion publique.

« Sur le plan des principes, le monde juridique a fréquemment critiqué cette situation, qui constitue une entorse à un principe général du droit privé et du droit répressif, à savoir la règle non bis in idem , laquelle exclut que deux poursuites puissent être engagées pour la même infraction. Des acteurs internationaux ont pu estimer que cette spécificité franco-française était gênante !

« Que peut-on faire à l'heure où l'on réexamine le droit boursier avec la création de l'AMF ? Des solutions sont à écarter, des voies sont peut-être à explorer.

« L'une des solutions à écarter est, évidemment, la suppression de tout pouvoir de sanction de l'autorité boursière , car cette dernière doit être efficace et pouvoir agir rapidement, de façon exemplaire et pédagogique.

« A l'inverse, supprimer toute incrimination pénale boursière serait pour le moins tout aussi impensable, inconcevable, car l'ordre public peut être gravement violé par des délits boursiers.

« Tracer une répartition a priori entre les contentieux en fonction de leur « gravité », de leur « complexité » ou d'un seuil de préjudice ne paraît pas non plus envisageable . En effet, à la vérité, seul le procureur de la République peut procéder à cette répartition, et c'est au cas par cas qu'il se prononcera » .

* 23 L'article L. 621-15-1 dispose :

« Si l'un des griefs notifiés conformément au deuxième alinéa du I de l'article L. 621-15 est susceptible de constituer un des délits mentionnés aux articles L. 465-1 et L. 465-2, le collège transmet immédiatement le rapport d'enquête ou de contrôle au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

« Lorsque le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris décide de mettre en mouvement l'action publique sur les faits, objets de la transmission, il en informe sans délai l'Autorité des marchés financiers.

« Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris peut transmettre à l'Autorité des marchés financiers, d'office ou à la demande de cette dernière, la copie de toute pièce d'une procédure relative aux faits objets de la transmission.

* 24 La CONSOB, autorité de marché, aurait le pouvoir de sanctionner les infractions les moins graves (« illeciti »), tandis que la répression des manquements sérieux et délits (« reati ») reviendrait au juge judiciaire

* 25 Aux termes du I de l'article L. 621-14 du code monétaire et financier, il s'agit des pratiques qui « sont de nature à porter atteinte aux droits des épargnants ou ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché, de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l'égalité d'information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ».

* 26 - Livre Ier - L'Autorité des marchés financiers ;

- Livre II - Emetteurs et information financière ;

- Livre III - Prestataires ;

- Livre IV - Produits d'épargne collective ;

- Livre V - Infrastructures de marché ;

- Livre VI - Abus de marché : opérations d'initiés et manipulations de marché.

* 27 Cf. en particulier « Le manquement d'initié redéfini par l'AMF », M. Arthur Dethomas in Les Echos du 14 mars 2005.

* 28 En effet si la traduction française du point 1 de l'article premier de la directive-cadre du 28 janvier 2005 se réfère à la notion d' « influence sensible », la version anglaise mentionne le terme « significant », dont l'équivalent français serait « significative », tandis que le terme « erheblich », soit l'équivalent de « substantielle », figure dans la traduction allemande.

* 29 En 2004, la moitié des sociétés constituant l'indice CAC 40 d'Euronext Paris (les deux tiers en 2003) ont procédé à des rachats nets d'actions, pour un montant d'environ 9 milliards d'euros, soit 1,2 % de leur capitalisation boursière moyenne . Les sociétés Total, BNP Paribas et Société Générale ont représenté 63 % des rachats, et BNP Paribas a racheté l'équivalent de 3,6 % de sa capitalisation boursière (au 31 décembre 2004).

* 30 Ces critères, exposés supra , sont les suivants :

- le degré de transparence de la pratique concernée au regard de l'ensemble du marché ;

- le besoin de sauvegarder le libre jeu du marché et l'interaction de l'offre et de la demande ;

- l'importance des effets de la pratique de marché concernée sur la liquidité et l'efficience du marché ;

- la mesure dans laquelle la pratique concernée prend en compte les mécanismes de négociation du marché concerné et permet aux participants à ce marché de réagir de manière adéquate et rapide à la nouvelle situation de marché qu'elle a créée ;

- le risque que représente la pratique concernée pour l'intégrité des marchés qui s'y rattachent directement ou indirectement, sur lesquels se négocie le même instrument financier dans la Communauté européenne, qu'ils soient ou non réglementés ;

- les conclusions de tout contrôle ou de toute enquête sur la pratique de marché concernée réalisé par l'AMF, par toute autre autorité ou entreprise de marché avec laquelle l'AMF collabore, par tout autre autorité ou entreprise de marché qui agit par délégation de l'AMF, sous la responsabilité de celle-ci ou par les autorités judiciaires agissant sur saisine de l'AMF, en particulier lorsque la pratique concernée a enfreint des règles ou dispositions destinées à prévenir les abus de marché ou des codes de conduite, que ce soit sur le marché concerné ou sur des marchés directement ou indirectement liés au sein de la Communauté européenne ;

- les caractéristiques structurelles du marché concerné, en particulier son caractère réglementé ou non, les types d'instruments financiers négociés et les types de participants à ce marché, notamment l'importance relative de la participation des investisseurs non professionnels.

* 31 Selon les termes de l'instruction n° 2005-07 de l'AMF, « un programme de rachat est réputé être mis en oeuvre lorsque l'émetteur, conformément à l'autorisation donnée par l'assemblée générale, a débuté ses opérations de rachat et aussi longtemps qu'il n'a pas déclaré dans un communiqué rendu public qu'il n'a pas mis fin à ses opérations de rachat jusqu'à la prochaine assemblée générale ordinaire ».

* 32 Ce considérant, qui concerne tant les analystes que les journalistes financiers, dispose en effet :

« Les Etats membres devraient être en mesure de choisir la manière la plus appropriée d'établir une réglementation pour les personnes qui réalisent ou diffusent des travaux de recherche concernant des instruments financiers ou des émetteurs d'instruments financiers ou pour les personnes qui produisent ou diffusent d'autres informations recommandant ou suggérant une stratégie d'investissement, y compris des mécanismes appropriés d'auto-régulation , qui devraient être notifiés à la Commission ».

* 33 Dont le c) du point 2 de l'article premier précise que « dans le cas de journalistes agissant dans le cadre de leur profession, cette diffusion d'informations doit être évaluée (...) en tenant compte de la réglementation applicable à leur profession, à moins que ces personnes ne retirent, directement ou indirectement, un avantage ou des profits de la diffusion des informations en question ».

* 34 Votre rapporteur général avait néanmoins proposé dès juillet 1994 une transposition plus précoce , par sa proposition de loi n° 578 (1993-1994).

* 35 Dont le premier alinéa dispose que « les transactions sur un instrument financier admis aux négociations sur un marché réglementé, réalisées au profit d'un investisseur résidant habituellement ou établi en France, par un prestataire de services d'investissement agréé ou exerçant en France par voie de libre prestation de services ou de libre établissement, sont nulles si elles ne sont pas effectuées sur un marché réglementé d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ».

* 36 Le second alinéa de l'article L. 421-12 du code monétaire et financier dispose ainsi :

« Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les transactions qui y sont mentionnées peuvent être effectuées en dehors d'un marché réglementé si la demande en est faite par des investisseurs résidant habituellement ou établis sur le territoire français et si la transaction remplit les conditions définies par le règlement général du conseil des marchés financiers concernant son volume, le statut de l'investisseur, la nature de l'instrument financier négocié et l'information du marché réglementé sur lequel cet instrument est admis. Cette dérogation est accordée de plein droit pour toutes les transactions qui, incluses dans une convention autre qu'une vente pure et simple, en constituent un élément nécessaire ».

* 37 Le sixième considérant de la directive définit ce mode d'exécution internalisé comme « les systèmes bilatéraux dans le cadre desquels une entreprise d'investissement intervient, pour chaque négociation pour compte propre et non en tant qu'intermédiaire, sans assumer de risque, entre l'acheteur et le vendeur ».

* 38 Le cinquième considérant de la directive précise ainsi qu' « il est indispensable de reconnaître l'émergence, parallèlement aux marchés réglementés, d'une nouvelle génération de systèmes de négociation organisée, qui doivent être soumis à certaines obligations tendant à préserver le fonctionnement efficace et ordonné des marchés financiers ».

* 39 Ainsi les articles 27 et 28 de la directive, relatifs aux obligations de transparence des internalisateurs avant et après la négociation, précisent bien que leurs dispositions s'appliquent aux transactions portant sur des « actions admises à la négociation sur un marché réglementé ».

* 40 L'article 324-1 du code pénal définit le blanchiment comme « le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des fonds ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect. Constitue également un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion de produit indirect ou indirect d'un crime ou d'un délit ». Aux termes du même article, le blanchiment est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende.

* 41 Directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux. Une proposition de nouvelle directive relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux, y compris le financement du terrorisme, a été présentée par la Commission européenne le 30 juin 2004.

* 42 Aux termes de l'article L. 562-1 du code monétaire et financier, il s'agit de la Banque de France, des établissements de crédit, des entreprises d'assurance, des entreprises d'investissement de certains professionnels de l'immobilier, des responsables de casinos et de groupements organisant des jeux de hasard, des changeurs manuels, des commerçants d'objets précieux et d'antiquités, des experts comptables et commissaires aux comptes, et de professions réglementées telles que les huissiers, notaires, administrateurs et mandataires judiciaires, commissaires-priseurs et avocats.

* 43 Depuis la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants.

L'article L. 561-1 du code monétaire et financier dispose en outre :

« Les personnes autres que celles mentionnées à l'article L. 562-1 qui, dans l'exercice de leur profession, réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations entraînant des mouvements de capitaux , sont tenues de déclarer au procureur de la République les opérations dont elles ont connaissance et qui portent sur des sommes qu'elles savent provenir de l'une des infractions mentionnées à l'article L. 562-2.

« Lorsqu'elles ont fait de bonne foi une telle déclaration, ces personnes bénéficient des dispositions de l'article L. 562-8 (...) . Le procureur de la République informe le service mentionné à l'article L. 562-4 (la TRACFIN) qui lui fournit tous renseignements utiles ».

* 44 Depuis la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 45 Le décret du 7 février 2002 a ainsi imposé aux organismes financiers l'obligation de déclarer à TRACFIN les opérations qu'ils effectuent pour compte propre ou pour compte de tiers, d'un montant supérieur à 8.000 euros, avec des personnes domiciliées, enregistrées ou établies à Nauru . Le décret du 15 décembre 2003 impose les mêmes obligations pour les opérations avec le Myanmar .

* 46 Il s'agit des « personnes effectuant des opérations à titre professionnel ».

* 47 Aux termes de l'article L. 421-8 du code monétaire et financier, les personnes, outre les PSI, autorisées à être membres d'un marché réglementé d'instruments financiers sont :

« 1. Les personnes physiques ou morales habilitées par le conseil des marchés financiers à fournir des services mentionnés aux 2 et 3 de l'article L. 321-1 ;

« 2. Les personnes morales dont les membres ou associés sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes et engagements de celles-ci, à condition que ces membres ou associés soient habilités à fournir les services mentionnés au 2 et au 3 de l'article L. 321-1 ;

« 3. Les personnes physiques ou morales déjà habilitées au 4 juillet 1996 à fournir les services mentionnés du 2 et 3 de l'article L. 321-1 sur des bourses de valeur, en fonctionnement régulier, placées sous le contrôle du conseil des bourses de valeur ainsi que sur les marchés à terme placés sous le contrôle du conseil du marché à terme.

« L'habilitation mentionnée aux 1 et 2 ci-dessus est délivrée au vu de conditions de compétence, d'honorabilité, de solvabilité et, en tant que de besoin, de capitaux propres et de garanties, définies par le règlement général du conseil des marchés financiers ».

* 48 L'article L. 621-15-1 du code monétaire et financier, introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière, dispose :

« Si l'un des griefs notifiés conformément au deuxième alinéa du I de l'article L. 621-15 est susceptible de constituer un des délits mentionnés aux articles L. 465-1 et L. 465-2, le collège transmet immédiatement le rapport d'enquête ou de contrôle au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

« Lorsque le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris décide de mettre en mouvement l'action publique sur les faits, objets de la transmission, il en informe sans délai l'Autorité des marchés financiers.

« Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris peut transmettre à l'Autorité des marchés financiers, d'office ou à la demande de cette dernière, la copie de toute pièce d'une procédure relative aux faits objets de la transmission ».

* 49 L'article L. 621-20-1 du code monétaire et financier, introduit par la loi du 1 er août 2003 de sécurité financière, dispose :

« Si, dans le cadre de ses attributions, l'Autorité des marchés financiers acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, elle est tenue d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

« Sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 621-21, le procureur de la République peut obtenir de l'Autorité des marchés financiers la communication de tous les renseignements détenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de ses missions, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret ».

* 50 C'est-à-dire, aux termes de l'article 226-13 du code pénal, « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire ».

* 51 Il s'agit, aux termes du III de l'article L. 621-2 du code monétaire et financier, des commissions consultatives que le collège de l'AMF a la faculté de constituer, et dans lesquelles il nomme, le cas échéant, des experts pour préparer ses décisions.

* 52 Ces personnes sont visées à l'article L. 621-9-2 du code monétaire et financier, qui dispose :

« Dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat, l'Autorité des marchés financiers peut :

« 1° Déléguer aux entreprises de marché et, le cas échéant, aux chambres de compensation le contrôle de l'activité et des opérations effectuées par les membres d'un marché réglementé ainsi que par les prestataires de services d'investissement ayant transmis des ordres sur ce marché. Cette délégation fait l'objet d'un protocole d'accord. Elle peut être retirée à tout moment ;

« 2° Recourir, pour ses contrôles et enquêtes, à des corps de contrôle extérieurs, à des commissaires aux comptes, à des experts inscrits sur une liste d'experts judiciaires ou à des personnes ou autorités compétentes. Ces personnes peuvent recevoir une rémunération de l'Autorité des marchés financiers à ce titre.

« Le collège ou le secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers peuvent demander aux commissaires aux comptes des sociétés faisant appel public à l'épargne ou à un expert inscrit sur une liste d'experts judiciaires de procéder auprès des personnes ou entités faisant appel public à l'épargne et des personnes mentionnées au II de l'article L. 621-9 à toute analyse complémentaire ou vérification qui leur paraît nécessaire. Les frais et honoraires sont à la charge de l'Autorité des marchés financiers ».

* 53 L'article 40 du code de procédure pénale dispose que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ».

* 54 Cet article dispose :

« Si, dans le cadre de ses attributions, l'Autorité des marchés financiers acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, elle est tenue d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

« Sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 621-21, le procureur de la République peut obtenir de l'Autorité des marchés financiers la communication de tous les renseignements détenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de ses missions, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret ».

* 55 Cet article dispose :

« Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait, pour tout membre, tout membre du personnel ou préposé de l'Autorité des marchés financiers, ainsi que pour tout expert nommé dans une commission consultative mentionnée au III de l'article L. 621-2, de violer le secret professionnel institué par l'article L. 621-4, sous réserve des dispositions de l'article 226-14 du code pénal ».

* 56 Défini par l'article L. 465-1 comme « le fait, pour les dirigeants d'une société mentionnée à l'article L. 225-109 du code de commerce, et pour les personnes disposant, à l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leurs fonctions, d'informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de réaliser ou de permettre de réaliser, soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces informations ».

La peine encourue est de deux ans d'emprisonnement et une amende de 1,5 million d'euros, dont le montant peut être porté jusqu'au décuple du profit éventuellement réalisé, sans qu'elle puisse être inférieure à ce profit.

* 57 Défini par l'article 321-1 du code pénal comme « le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit ». Constitue également un recel « le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit ». Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende, ces peines étant doublées en cas de recel aggravé.

* 58 Ainsi que par l'ancienne recommandation 2002-01 de la Commission des opérations de bourse.

* 59 Définis par le a) de l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier.

* 60 Cf. supra .

* 61 Définis supra par le point 1 de l'article premier de la directive 2004/72/CE.

* 62 Aux termes du II de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, les instruments financiers à terme sont :

« 1. Les contrats financiers à terme sur tous effets, valeurs mobilières, indices ou devises, y compris les instruments équivalents donnant lieu à un règlement en espèces ;

« 2. Les contrats à terme sur taux d'intérêt ;

« 3. Les contrats d'échange ;

« 4. Les instruments financiers à terme sur toutes marchandises ou quotas d'émission de gaz à effet de serre, soit lorsqu'ils font l'objet, en suite de négociation, d'un enregistrement par une chambre de compensation d'instruments financiers ou d'appels de couvertures périodiques, soit lorsqu'ils offrent la possibilité que les marchandises sous-jacentes ne soient pas livrées moyennant un règlement monétaire par le vendeur ;

« 5. Les contrats d'options d'achat ou de vente d'instruments financiers ;

« 6. Tous autres instruments de marché à terme.

* 63 Le Royaume-Uni a ainsi prévu un délai de deux jours pour la déclaration, qui demeure en outre à la charge de l'émetteur.

* 64 Le point 14 de l'article 4 de la directive définit le marché réglementé comme « un système multilatéral, exploité et/ou géré par un opérateur de marché, qui assure ou facilite la rencontre - en son sein même et selon des règles non discrétionnaires - de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers, d'une manière qui aboutisse à la conclusion de contrats portant sur des instruments financiers admis à la négociation dans le cadre de ses règles et/ou de ses systèmes, et qui est agréé et fonctionne régulièrement conformément aux dispositions du titre III ».

* 65 Aux termes du point 13 de l'article 4 de la directive, un opérateur de marché est « une ou plusieurs personnes gérant et/ou exploitant l'activité d'un marché réglementé. L'opérateur de marché peut être le marché réglementé lui-même ».

* 66 Définis par le point 15 de l'article 4 comme « un système multilatéral, exploité par une entreprise d'investissement ou un opérateur de marché, qui assure la rencontre - en son sein même et selon des règles non discrétionnaires - de multiples intérêts acheteurs ou vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers, d'une manière qui aboutisse à la conclusion de contrats (...) ».

* 67 Le point 7 de l'article 4 de la directive définit l'internalisateur systématique comme « une entreprise d'investissement qui, de façon organisée, fréquente et systématique, négocie pour compte propre en exécutant les ordres des clients en dehors d'un marché réglementé ou d'un MTF ».

* 68 Cf. en particulier « Réforme de la directive sur les services d'investissement : réflexions sur la notion communautaire de marché », M. Jean-Baptiste Lenhof, Les Petites Affiches du 7 février 2005.

* 69 Aux termes de l'article 43 de la directive, il s'agit en particulier de « détecter tout manquement auxdites règles, toute condition de négociation de nature à perturber le bon ordre du marché ou tout comportement potentiellement révélateur d'un abus de marché ».

* 70 Les règles de transparence post-négociation sont en revanche apparues beaucoup moins problématiques, et sont de fait proches pour les trois infrastructures de marché.

* 71 Le concept de transparence pré-transaction est en effet difficilement transposable à des prestataires qui, à la différence de marchés dirigés par les ordres que sont les marchés réglementés et MTF, ne disposent pas d'un carnet d'ordres dont il est possible d'assurer la publication complète ou partielle.

* 72 Les défenseurs d'exigences de transparence peu élevées, en particulier les anglo-saxons attachés au marché régi par les prix, soutenaient ainsi que l'application d'exigences de transparence pré-négociation à des PSI n'agissant pas dans le cadre d'un marché stricto sensu conduirait à révéler au marché leurs positions prises face à leurs clients, et dès lors, à leur interdire de facto une telle prise de risque . Les tenants de cette transparence, aux rangs desquels figurait la France, estimaient en revanche que le fait de n'assujettir ces prestataires à aucune obligation reviendrait à leur conférer un avantage injustifié en termes d'information disponible de marché, et ce faisant, à affaiblir le processus de formation des prix .

* 73 Le premier point de l'article 27 précise ainsi que les internalisateurs systématiques qui n'effectuent que des transactions supérieures à la taille normale de marché ne sont pas soumis aux exigences de transparence pré-négociation.

* 74 Le point 4 de l'article 27 précise ainsi que « pour chaque action, l'autorité compétente du marché le plus pertinent en termes de liquidité (...) détermine, au moins annuellement sur la base de la moyenne arithmétique de la valeur des ordres exécutés sur le marché concernant cette action, la catégorie d'actions à laquelle elle appartient. Cette information est mise à la disposition de tous les participants du marché ».

* 75 A défaut de marché liquide, le point 1 de l'article 27 précise que les internalisateurs systématiques sont seulement tenus de divulguer les prix à leurs clients « sur demande ».

* 76 Il dispose ainsi que « les internalisateurs systématiques pourraient décider de donner accès à leurs prix uniquement à leurs clients de détail, ou bien uniquement à leurs clients professionnels ou aux deux. Ils ne devraient pas être autorisés à exercer une discrimination à l'intérieur de ces catégories de clients ».

* 77 Réception et transmission d'ordres portant sur un plusieurs instruments financiers, exécution d'ordres au nom du client, négociation pour compte propre, gestion de portefeuille, prise ferme d'instruments financiers et/ou placement d'instruments financiers avec engagement ferme.

* 78 Les autres activités auxiliaires, inchangées par rapport à la DSI, sont la conservation et l'administration d'instruments financiers pour le compte de clients, l'octroi d'un crédit ou d'un prêt à un investisseur

* 79 A condition, dans ce second cas, que les contrats correspondants soient négociés sur un marché réglementé et/ou un MTF.

Les contrats dérivés sur matières première qui sont réglés par livraison physique et ne sont pas destinés à des fins commerciales, doivent « présenter les caractéristiques d'autres instruments financiers dérivés en tenant compte de ce que, notamment, ils sont compensés et réglés par l'intermédiaire d'organismes de compensation reconnus et ont l'objet d'appels de marge réguliers ».

L'objectif est ainsi de réaliser le marché unique pour ce type de produits dérivés, compte tenu notamment des avancées de la législation communautaire pour libéraliser les marchés sous-jacents de ces produits, tels que celui de l'énergie.

* 80 En dépit de leur caractère apparemment anecdotique, les « dérivés climatiques » ont connu un développement soutenu au cours des dernières années.

* 81 Définis par l'article 4 de la directive comme « toute personne physique ou morale qui, sous la responsabilité entière et inconditionnelle d'une seule et unique entreprise d'investissement pour le compte de laquelle elle agit, fait la promotion auprès de clients ou de clients potentiels de services d'investissement et/ou de services auxiliaires, reçoit et transmet les instructions ou les ordres de clients concernant des instruments financiers ou des services d'investissement, place des instruments financiers et/ou fournit à des clients ou à des clients potentiels des conseils sur ces instruments ou services ».

* 82 Un total de bilan supérieur ou égal à 20 millions d'euros, un chiffre d'affaires net supérieur ou égal à 40 millions d'euros, et des capitaux propres d'au moins 2 millions d'euros.

* 83 Dans le cadre de l'évaluation des aptitudes du client demandant à être considéré comme un professionnel, au moins deux des trois critères suivants doivent être réunis :

« - le client a effectué en moyenne dix transactions d'une taille significative par trimestre au cours des quatre trimestres précédents sur le marché concerné ;

« - la valeur du portefeuille d'instruments financiers du client, défini comme comprenant les dépôts bancaires et les instruments financiers, dépasse 500.000 euros ;

« - le client occupe depuis au moins un an ou a occupé pendant au moins un an, dans le secteur financier, une position professionnelle requérant une connaissance des transactions ou des services envisagés ».

* 84 Dont les critères d'éligibilité sont prévus par l'article 24 de la directive.

* 85 Le point 2 de l'article 22 dispose ainsi :

« Les États membres exigent que, dans le cas d'un ordre à cours limité qui est passé par un client concernant des actions admises à la négociation sur un marché réglementé et qui n'est pas exécuté immédiatement dans les conditions prévalant sur le marché, les entreprises d'investissement prennent, sauf si le client donne expressément l'instruction contraire, des mesures visant à faciliter l'exécution la plus rapide possible de cet ordre , en le rendant immédiatement public sous une forme aisément accessible aux autres participants du marché. Les États membres peuvent décider que les entreprises d'investissement se conforment à cette obligation en transmettant l'ordre à cours limité passé par un client à un marché réglementé ou à un MTF. Les États membres prévoient que les autorités compétentes peuvent ne pas faire appliquer cette obligation dans le cas d'ordres à cours limité portant sur une taille inhabituellement élevée ».

* 86 L'article 11 de la directive 93/22/CEE requérait des entreprises d'investissement qu'elles « s'efforcent d'écarter les conflits d'intérêt et, lorsque ces derniers ne peuvent être évités, veillent à ce que (leurs) clients soient traités équitablement ».

* 87 Les articles 516-2 à 516-4 du règlement général précisent ainsi les conditions d'admission de l'exécution d'un ordre hors d'un marché réglementé , qui portent sur la nature de l'instrument financier concerné, le montant de la transaction et le formalisme de la demande adressée par l'investisseur au prestataire, ainsi que les modalités de publication des caractéristiques des transactions.

* 88 M. Jean-Jacques Daigre, « Les ATS (alternative trading system) » - Mélanges AEDBF III, Banque éditeur, 2001.

* 89 Le dernier alinéa de l'article 312-2 dispose :

« Exerce également une activité d'exécution d'ordres pour compte de tiers le prestataire de services d'investissement gérant un système multilatéral de négociation qui, sans avoir le statut de marché réglementé, apparie des intentions multiples d'achat et de vente portant sur des instruments financiers, conformément à des règles publiées, de telle sorte qu'il en résulte une transaction ».

* 90 L'article 4-1-1 du règlement général du Conseil des marchés financiers se limite ainsi à mentionner « les moyens financiers dont dispose l'entreprise de marché » parmi les informations à fournir dans le cadre de la procédure de reconnaissance d'un marché réglementé. Cette procédure n'a toutefois pas eu à s'appliquer en raison des clauses de droits acquis dont bénéficiaient par ailleurs les marchés existants.

* 91 L'article L. 441-1 dispose :

« Les entreprises de marché sont des sociétés commerciales qui ont pour activité principale d'assurer le fonctionnement d'un marché réglementé d'instruments financiers.

« Toute personne qui vient à posséder, directement ou indirectement, une fraction du capital ou des droits de vote d'une entreprise de marché représentant plus du dixième, du cinquième, du tiers, de la moitié ou des deux tiers est tenue d'en informer l'Autorité des marchés financiers, dans des conditions et selon des modalités prévues par décret. En cas de manquement à cette obligation déclarative et sans préjudice des dispositions de l'article L. 233-14 du code de commerce, l'Autorité des marchés financiers ou tout actionnaire peut demander au juge de suspendre, jusqu'à régularisation de la situation, l'exercice des droits de vote attachés aux actions de l'entreprise de marché qui n'ont pas été régulièrement déclarées.

« A la suite d'une prise ou d'une extension de participation, le ministre chargé de l'économie peut, dans l'intérêt du bon fonctionnement d'un marché réglementé et sans préjudice des dispositions de l'article L. 233-14 du code de commerce, demander au juge de suspendre, jusqu'à régularisation de la situation, l'exercice des droits de vote attachés aux actions de l'entreprise de marché détenues directement ou indirectement. Sur proposition de l'Autorité des marchés financiers et après avis de la Banque de France, le ministre peut également procéder à une révision de la reconnaissance du marché réglementé ou à son retrait, dans les conditions prévues à l'article L. 421-1 ».

* 92 Cf. en particulier « L'ouverture de la concurrence », Banque stratégie, février 2003.

* 93 Outre qu'elle figure parmi les principaux atouts de l'industrie financière française, ce qui justifie que l'on s'attache à renforcer sa compétitivité, la gestion collective présente l'avantage de faciliter l'appréhension de marchés financiers complexes par l'investisseur individuel, en lui permettant de mieux mutualiser les risques et d'investir dans des secteurs, des catégories de capitalisation boursière ou des zones géographiques, plutôt que sur des titres isolés. La préservation de la faculté d'investir en direct sur ces titres est néanmoins essentielle , car elle participe pleinement de la sensibilisation des particuliers au rôle de l'actionnaire et au financement de l'économie par les marchés.

* 94 L'article 73 prévoit néanmoins que les lois et règlements « peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ».

* 95 Cet article tend à assimiler à des prestataires de services d'investissement les personnes morales ou physiques agréées dans un autre Etat et qui établissent des succursales en France pour fournir des services d'investissement et des services connexes.

* 96 Telles que des appellations, taux ou barèmes.

* 97 En l'espèce, du conseil général de Mayotte (article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales), du congrès de Nouvelle-Calédonie (article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie), de l'assemblée de Polynésie (loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, dont l'article 9 dispose que l'assemblée de la Polynésie française est consultée « sur les projets de loi et propositions de loi et les projets d'ordonnance qui introduisent, modifient ou suppriment des dispositions particulières à la Polynésie française ») et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna (en vertu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel).

* 98 Sénat, rapport pour avis n° 202 (2003-2004).

* 99 Op. cit., p. 69.

* 100 Op. cit., p. 75.

* 101 Avis n° 10 (2004-2005) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, déposé le 12 octobre 2004.

* 102 Dont le dernier alinéa dispose :

« En cas de cession de valeurs mobilières admises aux négociations sur un marché réglementé ou de valeurs mobilières non admises aux négociations sur un marché réglementé mais inscrites en compte chez un intermédiaire habilité participant à un système de règlement et de livraison mentionné à l'article L. 330-1 du code monétaire et financier, le transfert de propriété s'effectue dans les conditions prévues à l'article L. 431-2 de ce code. Dans les autres cas, le transfert de propriété résulte de l'inscription des valeurs mobilières au compte de l'acheteur, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ».

* 103 Il s'agit en pratique des transactions portant sur les instruments de taux d'intérêt.

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