III. LES ASPECTS SOCIAUX, ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS DES RAPPORTS ENTRE LA FRANCE ET MONACO

En dehors de l'aspect strictement fiscal, qui a fait l'objet d'une discussion au Sénat 1 ( * ) , relative au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation d'un avenant à la convention du 18 mai 1963, il convient d'étudier l'évolution de trois domaines :

? Les possibilités d'emplois publics offerts réciproquement par les deux Etats

Dans l'esprit d'adaptation aux réalités présentes qui a mené à la négociation du traité de 2002, la France et Monaco ont réfléchi à la rédaction d'une convention sur la coopération administrative qui se substituerait à la Convention du 28 juillet 1930 relative au détachement de fonctionnaires français en Principauté et de fonctionnaires monégasques en France.

Les Monégasques souhaitaient que le principe de libre accès des ressortissants monégasques aux emplois publics soit admis tout en souhaitant continuer de faire appel, en priorité sur toute autre nationalité, à des ressortissants français, voire à des fonctionnaires français en détachement, pour tout un ensemble d'emplois et de fonctions auxquels l'étroitesse de la population monégasque ne permet pas de répondre. Les autorités françaises rejoignaient cette préoccupation conforme en particulier aux conventions internationales, dont celles du Conseil de l'Europe qui prévoient explicitement le droit des citoyens d'un État à accéder à tous les emplois publics de cet Etat.

La négociation a donc porté sur la manière dont serait conciliée cette préoccupation partagée et la nécessité de s'assurer que les titulaires de certaines fonctions ou emplois « sensibles », parce qu'ils mettent en cause les intérêts fondamentaux des deux États, jouissent de la confiance respective des deux États. Il a donc été prévu que ces emplois pourraient continuer d'être exercés par des fonctionnaires français, en priorité par rapport aux ressortissants de tout autre pays. Par ailleurs, les modalités d'application de cette convention seront mises en oeuvre par la future Commission de coopération franco-monégasque, instituée par le traité de 2002.

Les Monégasques souhaitaient par ailleurs pouvoir, de manière plus effective, accéder à la Fonction publique française, les mécanismes de la Convention de 1930 et de ses textes d'application s'étant révélés plutôt dissuasifs. La France a accepté, à l'instar de ce qui prévaut pour les ressortissants andorrans, l'accès des Monégasques à notre Fonction publique dans les mêmes conditions que les ressortissants des pays membres de l'Union européenne.

Le texte d'une future convention a été arrêté. Il prévoit l'approfondissement de la coopération administrative entre les deux États sous le contrôle de la Commission de coopération franco-monégasque.

Ce texte sera soumis ultérieurement au Parlement au titre de l'article 53 de la Constitution puisqu'il porte sur l'accès à la fonction publique française, mais il n'entrera en vigueur que lorsque sera conclu l'ensemble des négociations en cours (questions financières et entraide judiciaire).

? La nécessaire amélioration dans le domaine des assurances sociales.

Pour ce qui concerne la protection sociale, le texte de base est la convention de sécurité sociale du 28 février 1952, qui avait pour but de permettre aux salariés français travaillant à Monaco et affiliés, de ce fait, à la sécurité sociale monégasque, de bénéficier du régime des prestations françaises, plus favorables. Cette convention a notamment été modifiée par un avenant du 20 juillet 1998, afin de tenir compte des changements intervenus dans les systèmes de soins et de remboursement des deux pays.

Désormais, toutes les branches d'assurance de la sécurité sociale (maladie-maternité, accidents du travail et maladies professionnelles, invalidité et vieillesse) font l'objet d'une coordination.

Toutefois, pour ce qui concerne l'assurance-vieillesse, il est possible de faire appel, en cas de nécessité, aux périodes d'assurance accomplies sur le territoire de l'autre État (totalisation), chaque État rémunérant les périodes d'assurance accomplies sous sa législation en vertu de la proratisation. En outre, les pensions sont exportables ; nos compatriotes ayant cotisé auprès de la Caisse de compensation monégasque peuvent donc percevoir leurs arrérages, même s'ils ne résident pas à Monaco.

Cependant, un problème n'est pas résolu : en vertu de l'avenant n° 5 du 20 juillet 1998 à la convention bilatérale de sécurité sociale du 28 février 1952, les retraités français ayant exercé leur activité professionnelle en Principauté ont l'obligation, s'ils résident en France, de s'affilier au régime français de sécurité sociale lors de l'ouverture de leurs droits à la retraite. Or, dans cette situation, ces retraités perdent le niveau de prestations servi par la caisse de compensation des services sociaux monégasques à laquelle ils ont cotisé tout ou partie de leur vie professionnelle. Ils doivent en outre contribuer au titre de la CSG et de la CRDS.

La prise en charge moins favorable par la France ne satisfait pas les frontaliers et nécessiterait une modification de la réglementation. C'est pourquoi il serait nécessaire que le Gouvernement français engage une renégociation de la convention sur la sécurité sociale, afin que ces personnes puissent continuer à percevoir les prestations sociales de la Caisse de compensation des services sociaux de Monaco, au prorata des années travaillées dans la Principauté.

? Les conditions de logement des Français à Monaco.

Le problème évoqué ci-dessus est d'autant plus préoccupant qu'il se conjugue à un autre. En effet, les retraités français n'ont généralement pas la possibilité de résider dans la Principauté.

De façon générale, les retraités mais aussi les actifs français ne peuvent quasiment plus habiter à Monaco compte tenu des prix très élevés de l'immobilier. La présence française à Monaco est d'ailleurs appelée à diminuer de façon drastique en raison de l'application de la loi n° 1 235 relative aux habitations construites avant le 1 er septembre 1947 et dont les articles 13, 14, 15 et 18 vont justifier l'expulsion de très nombreux Français, quels que soient leur âge et leur durée de résidence, lorsque leurs baux, signés en 2001, viendront à expiration en 2006.

Le gouvernement français devra veiller attentivement à ce que l'application de la loi monégasque du 10 décembre 2004, qui réglemente le secteur des loyers protégés avec notamment une plus grande protection des locataires et une limitation des hausses de loyers, permette de ne pas voir se dégrader les possibilités offertes aux Français qui y travaillent de résider à Monaco.

Par ailleurs, le relogement dans des logements sociaux de Français ayant résidé longtemps à Monaco serait un élément appréciable d'amélioration de la qualité des relations franco-monégasques.

* 1 Loi 2005-227 du 14 mars 2005.

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