IV. EXAMEN EN COMMISSION

M. Charles Revet, rapporteur, a estimé que le Sénat se devait d'apporter son soutien au processus de constitution d'un marché ferroviaire intégré au sein de l'Union européenne, afin d'améliorer l'efficacité et la qualité des services ferroviaires dans un cadre garantissant un niveau optimal de sécurité.

Il a jugé que ni le principe de l'ouverture du marché à la concurrence ni la notion de « contrat de service public » ne constituaient des fins en soi.

La préoccupation première, a-t-il souligné, doit être l'intérêt de l'usager qui commande de trouver des solutions rendant compatible l'ouverture des services ferroviaires à la concurrence avec les « contrats de service public » pouvant comporter des droits exclusifs pour la réalisation de certains services ferroviaires.

En effet, a-t-il relevé, la collectivité publique, autorité organisatrice de transport, doit pouvoir, dans l'intérêt de l'usager, exercer un droit d'option entre l'attribution directe d'une délégation de service public à un opérateur compétent et efficace et l'appel d'offres pour une mise en concurrence, si elle le juge utile.

Le rapporteur a considéré que l'ouverture du marché ferroviaire à la concurrence ne devait pas aboutir à l'écrémage des lignes les plus rentables, par une pluralité d'opérateurs, obligeant les collectivités publiques à prendre en charge seules les lignes d'aménagement du territoire.

Il a jugé indispensable que le principe du libre accès aux infrastructures soit accompagné, le moment venu, d'un mécanisme de péréquation à l'échelon national ou européen entre lignes rentables et lignes d'aménagement du territoire.

Il a souhaité que l'examen de la proposition de directive soit aussi l'occasion d'une réflexion sur le développement nécessaire des services de transport collectif périurbain et interurbain comme les services tram-train.

M. Charles Revet, rapporteur, a proposé à la commission de soutenir la proposition de directive sur la certification des conducteurs de train et d'aborder favorablement le débat sur la proposition de règlement relative aux droits et obligations des voyageurs ferroviaires internationaux qui comporte notamment des éléments innovants en ce qui concerne les droits des personnes à mobilité réduite.

En revanche, il lui est apparu que les dispositions prévues par la proposition de règlement concernant les compensations dans le domaine du fret ferroviaire relevaient des relations contractuelles entre les entreprises ferroviaires et leurs clients. Il a donc estimé que le Gouvernement devrait s'opposer à l'adoption de ladite proposition.

M. Charles Revet, rapporteur, a enfin déclaré que la proposition de résolution qu'il soumettait à la réflexion de la commission tenait compte de toutes ces observations.

M. Daniel Reiner a salué l'initiative de M. Pierre Billout et de ses collègues sur un sujet d'une extrême actualité. Il s'est déclaré tout à fait favorable à la proposition de directive sur la certification des conducteurs de trains en appelant, toutefois, de ses voeux, l'extension de la licence européenne à l'ensemble des personnels roulants. S'agissant de la proposition de directive sur les exigences de qualité en matière de fret ferroviaire, il s'est déclaré en accord avec le rapporteur sur le fait que les conventions domestiques actuelles étaient suffisantes.

M. Daniel Reiner a jugé, par ailleurs, normal qu'une proposition de directive traite des droits et obligations des voyageurs dans le domaine ferroviaire comme dans le domaine aérien. Il a, toutefois, rappelé qu'il existait déjà des chartes de qualité et que la proposition de directive concernée devait être souple et mise en place progressivement.

En ce qui concerne la proposition de directive ouvrant à la concurrence, au 1er janvier 2010, le transport de voyageurs internationaux, il s'est déclaré extrêmement prudent en soulignant les risques que le cabotage pourrait faire courir aux lignes actuellement en service. Il a jugé que les orientations proposées ne présentaient aucune urgence et qu'il aurait mieux valu commencer par évaluer les conséquences de l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire décidée en 2003. Il a plaidé pour la mise en place d'un réseau ferroviaire trans-européen de qualité avant d'émettre des doutes sur l'impact de l'ouverture à la concurrence quant au renforcement du mode ferroviaire face au mode routier.

M. Michel Billout a souligné que la proposition de résolution déposée par lui même et par les membres du groupe communiste républicain et citoyen avait demandé un examen séparé des différents textes constitutifs du « troisième paquet ferroviaire ». Il a insisté sur la nécessité d'une évaluation des conséquences des deux précédents paquets ferroviaires et, en particulier, de l'ouverture du fret ferroviaire à la concurrence.

Il a rappelé que le Parlement européen avait souhaité anticiper, dès le 1er janvier 2008, l'ouverture à la concurrence du marché ferroviaire des passagers internationaux.

Evoquant, enfin, une étude remise à la Commission européenne en 2004 sur le transport de passagers, M. Michel Billout a exprimé la crainte que la nécessité affichée de réduire les coûts de production dans le secteur ferroviaire n'aboutisse à une remise en cause de la sécurité.

Après avoir rappelé les grands objectifs de la loi de 1997 créant Réseau ferré de France, M. François Gerbaud a souligné la nécessité absolue pour l'Etat de conserver ses responsabilités dans le domaine ferroviaire face à la concurrence de la route. Il a exprimé des craintes sur les conséquences des prochains mouvements de grève à la SNCF notamment sur le fret.

Appuyé par M. Daniel Reiner il s'est enfin inquiété de la disposition du projet de loi de finances pour 2006 concernant la gestion par l'Etat du patrimoine privé de Réseau ferré de France.

En réponse aux orateurs, M. Charles Revet, rapporteur a indiqué que la certification des conducteurs de trains, proposée par une des directives, serait progressivement étendue à l'ensemble des personnels roulants. Il a souhaité que s'engage un débat sur la responsabilité des entreprises ferroviaires dans les retards constatés avant de rappeler que ses propositions concernant la proposition de résolution comportaient une clause d'encadrement du cabotage. Il s'est encore déclaré favorable au service public ainsi qu'à la péréquation entre les lignes rentables et les autres, dès lors qu'il s'agit de faire prévaloir l'intérêt de l'usager et les objectifs d'aménagement du territoire. Le rapporteur a encore estimé que l'Etat avait, en effet, pour mission de conforter le secteur ferroviaire face à la concurrence de la route.

M. Rémy Pointereau s'est demandé si l'ouverture du marché ferroviaire à la concurrence n'allait pas être préjudiciable aux lignes d'aménagement du territoire.

M. Michel Bécot s'est inquiété des conséquences d'une nouvelle taxation des entreprises ferroviaires avant de regretter les insuffisances des services de fret ferroviaire, notamment pour l'acheminement domestique du fret aérien. Il a rappelé que des obligations de service public très strictes pouvaient être imposées par la puissance publique à des opérateurs privés et s'est déclaré très favorable au service public en estimant que s'il ne devenait pas synonyme d'efficacité, il risquait d'être très sérieusement menacé.

En conclusion, M. Charles Revet s'est déclaré en parfait accord avec les orateurs, notamment sur la nécessité de garantir les lignes d'aménagement du territoire ainsi que d'évaluer les conséquences des mesures préconisées par les autorités européennes. Il a estimé que l'exemple allemand avait montré que l'ouverture à la concurrence avait permis de stabiliser voire de renforcer les parts de marché détenues par les entreprises ferroviaires de fret.

Puis sur proposition de M. Jean-Paul Emorine, président, la commission a adopté la proposition de résolution présentée par le rapporteur, le groupe socialiste s'abstenant et le groupe communiste républicain et citoyen votant contre.

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