IV. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC »

Le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » est formé d'un unique programme 822 « Avances aux organismes de l'audiovisuel public ».

A. PRÉSENTATION DE LA MISSION : UNE PROGRESSION DE 3 % EN 2006 DE LA RESSOURCE PUBLIQUE ISSUE DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE

1. La redevance audiovisuelle : 74 % du budget du secteur audiovisuel public

Créé par l'article 55 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, le compte d'avances aux organismes de l'audiovisuel public (lequel devient un compte de concours financiers, en application des dispositions des articles 30 et 31 du présent projet de loi de finances) retrace les opérations de recettes et de dépenses relatives à la redevance audiovisuelle.

En recettes, outre le produit de la redevance audiovisuelle, le compte de concours financiers reçoit une dotation du budget général de l'Etat au titre du remboursement des exonérations de redevance audiovisuelle.

En dépenses, le montant des avances mensuelles effectivement mises à la disposition des organismes de l'audiovisuel public correspond aux recettes du compte, minorées des frais d'assiette et de recouvrement et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) appliquée au taux de 2,1 %.

a) Des prévisions de progression des ressources publiques liées principalement à la réforme de la redevance audiovisuelle

Compte tenu d'une modeste prévision de progression des encaissements de redevance (2,31 milliards d'euros, soit une hausse de 1,7 %) dans un contexte de maintien des taux de la redevance audiovisuelle 10 ( * ) , l'augmentation de 3,0 % des ressources du compte (à 2,72 milliards d'euros) s'explique principalement par la diminution des frais d'assiette et de recouvrement (de 65 à 24 millions d'euros). Les gains attendus proviennent de l'adossement du recouvrement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation, opérée pour la première fois en 2005 11 ( * ) .

Les contestations nées de la réforme du recouvrement sont par ailleurs présentées dans l'encadré ci-dessous.

Une mise en oeuvre contestée de la réforme de la redevance audiovisuelle

Votre rapporteur spécial se fait l'écho des réclamations - semblant devoir se chiffrer au moins en milliers - de personnes qui estiment avoir été indûment imposées à la redevance audiovisuelle, notamment après avoir déclaré sur l'honneur que leur foyer n'était pas équipé d'un poste de télévision.

Ces erreurs potentielles font suite à l'incompréhension d'une partie des contribuables sur les modalités de déclaration de la non-détention d'un poste de télévision, lors de la réception des avis d'imposition sur le revenu pour l'année 2004 au printemps 2005.

Il convenait en effet de cocher une case pour déclarer sur l'honneur ne pas habiter une résidence dotée d'un poste de télévision : une importante minorité de contribuables aurait coché cette case en croyant qu'il s'agissait de déclarer au contraire la détention d'un appareil récepteur de télévision. Pour l'avenir, votre rapporteur spécial estime que la possibilité de répondre « oui » ou « non » à cette même question devrait réduire les risques d'erreur .

Votre rapporteur spécial prend acte des informations qui lui ont été transmises par la direction de la législation fiscale du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, selon lesquelles il n'aurait été nullement procédé à des envois systématiques d'avis d'imposition. En tout état de cause, lorsque seront connues les données définitives sur le nombre de comptes de la redevance audiovisuelle en 2005, il sera difficile de distinguer la progression naturelle du parc, l'efficacité de la lutte contre la fraude (aux moyens juridiques renforcés) et l'inclusion erronée de personnes qui n'auraient pas dû être assujetties mais n'auront pas effectué de réclamation.

A plus long terme, votre rapporteur spécial observe que la définition du fait générateur de la redevance audiovisuelle n'a pas pris en compte les évolutions technologiques récentes qui permettent la réception de chaînes sans disposer d'un appareil de télévision. Compte tenu du refus d'augmenter le taux de la redevance qui reste à un des plus bas niveaux en Europe, le dynamisme de la ressource est directement affecté.

Les crédits budgétaires affectés au remboursement des exonérations s'élèvent à 440 millions d'euros , sans changement par rapport à la loi de finances initiale pour 2005.

D'ores et déjà, cette prévision n'apparaît pas sincère , compte tenu du niveau du remboursement opéré par l'Etat en 2004 (soit 489,91 millions 12 ( * ) ), très supérieur à 440 millions, et des nouvelles exonérations de redevance audiovisuelle accordées en 2005 au profit d'environ un million de contribuables (soit un manque à gagner de 116 millions d'euros) : votre rapporteur spécial estime que le remboursement par l'Etat pourrait ainsi dépasser 600 millions d'euros dès 2005 .

Enfin, selon les premières informations disponibles, les encaissements disponibles en 2005 devaient être supérieurs de 10 à 43 millions d'euros aux prévisions effectuées en loi de finances initiale. A l'instar de notre collègue député Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial du budget des médias, votre rapporteur spécial s'interroge sur l'affectation envisagée de ces éventuelles recettes supplémentaires dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2005 .

Toutefois, les informations complémentaires disponibles à la date de publication du présent rapport semblaient finalement indiquer l'absence d'excédents, compte tenu des nombreuses réclamations de contribuables estimant avoir été indûment imposés à la redevance audiovisuelle .

Votre rapporteur spécial relève enfin que l'article 7 du projet de loi de finances rectificative pour 2005 prévoit un complément de ressources de 20 millions d'euros pour les organismes de l'audiovisuel public , réparti entre France Télévisions (15 millions d'euros), Radio France (3 millions d'euros) et Arte France (2 millions d'euros) pour financer le développement et l'enrichissement des programmes de France Télévisions et Arte France, la grille de programmes de la nouvelle chaîne publique France 4 présente sur la TNT, et enfin la réhabilitation de la maison de la Radio.

b) Les autres ressources de l'audiovisuel public : des prévisions de ressources publicitaires en nette hausse

Hors redevance audiovisuelle, RFI bénéficie également d'une dotation du ministère des affaires étrangères de 72,13 millions d'euros, examinée par notre collègue Adrien Gouteyron dans son rapport spécial sur la mission « Action extérieure de l'Etat ». Les ressources publiques totales des cinq organismes de l'audiovisuel public financés par la redevance audiovisuelle s'élèvent ainsi à 2,73 milliards d'euros (après déduction de la TVA de 2,1 %), en hausse de 2,9 % par rapport à 2005.

Les organismes de l'audiovisuel public bénéficient enfin de ressources propres , correspondant principalement aux recettes de publicité et de parrainage, évaluées à 858 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances, dont la progression est une fois de plus supérieure (+ 3,9 %) à celle des ressources publiques (+ 2,9 %) en phase actuelle d'expansion du marché publicitaire.

Votre rapporteur spécial observe toutefois que la prévision de ressources propres dépasse celle prévue dans le projet de loi de finances pour 2005 (3,4 %), alors même que les objectifs initiaux de France Télévisions - qui draine l'essentiel des ressources publicitaires de l'audiovisuel public - n'étaient pas atteints à la fin du premier semestre 2005. Selon les informations fournies à votre rapporteur spécial, les moindres recettes publicitaires de France 3 doivent être compensées par des recettes publicitaires plus élevées pour France 2 et France 5 d'ici décembre 2005. En outre, il serait envisagé un contexte favorable en 2006.

Au total, le budget total du secteur audiovisuel public , détaillé dans le tableau ci-dessous, s'élève à 3,595 milliards d'euros, en hausse de 3,1 % par rapport à 2005.

Ressources du secteur audiovisuel public

(en millions d'euros)

* Les recettes publiques des entreprises audiovisuelles sont soumises à la TVA au taux de 2,1 %

Source : ministère de la culture et de la communication

2. Une progression des ressources provenant de la redevance comprise entre 2,7 % et 4,1 % selon les organismes de l'audiovisuel public

Comme le fait apparaître le tableau ci-dessous, la progression moyenne de 3,0 % des ressources issues de la redevance audiovisuelle n'est pas homogène selon les organismes de l'audiovisuel public.

Ces ressources n'incluent pas un nouveau prélèvement de 1,3 million d'euros sur le fonds de roulement d'ARTE France.

Répartition et évolution par organisme de la ressource publique
issue de la redevance audiovisuelle

(en millions d'euros)

LFI 2005

PLF 2006

Ecart PLF/LFI

En %

France Télévisions

1 781,08

1 833,68

52,60

3,0 %

Arte France

197,98

204,20

6,22

3,1 %

INA

72,74

75,75

3,01

4,1 %

Radio France

481,97

495,09

13,12

2,7 %

RFI

53,71

55,86

2,15

4,0 %

Total

2 587,48

2 664,58

77,10

3,0 %

Source : bleus budgétaires

France Télévisions bénéficie d'une progression de 3,0 %, dans le cadre notamment de la mise en place de la télévision numérique terrestre (TNT). Le groupe présidé par M. Patrick de Carolis, lequel a été auditionné par votre commission des finances et la commission des affaires culturelles le 9 novembre 2005, reçoit 68,8 % du montant des ressources publiques issues de la redevance audiovisuelle, soit 1.833,7 millions d'euros 13 ( * ) . France Télévisions a décidé d'accroître son soutien à la production de documentaires et au secteur de l'animation 14 ( * ) . Une autre priorité consiste à porter à 50 % en 2006 la part des programmes sous-titrés, conformément à la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Votre rapporteur spécial se félicite que le prochain contrat d'objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, qui doit couvrir la période 2006-2010, conforte la relocalisation des tournages en France ( cf. annexe sur les COM dans l'audiovisuel public ).

La dotation d' ARTE France (204,2 millions d'euros) augmente de 3,1 % 15 ( * ) , dans un contexte d'élargissement de l'offre de programmes suite au déploiement de la TNT 16 ( * ) .

Radio France (495,1 millions d'euros ; + 2,7 %) poursuit son plan de numérisation et continue d'étendre sa couverture en stations locales conformément au « Plan bleu ». Les principaux travaux de financement de la nouvelle maison de la Radio commenceront en 2007 17 ( * ) , selon un cadre budgétaire restant à définir lors de la négociation avec l'Etat du futur contrat d'objectifs et de moyens. Le coût total du projet d'investissement s'élève à 210 millions d'euros sur la période 2004-2012.

L'augmentation de 4,1 % de la dotation de l' Institut national de l'audiovisuel (INA), à 75,8 millions d'euros, traduit la volonté de poursuivre le plan de sauvegarde et de numérisation de notre patrimoine audiovisuel et radiophonique 18 ( * ) .

Radio France Internationale (RFI) doit disposer de 55,9 millions d'euros (+ 4,0 %) au titre de la redevance audiovisuelle et de 72,1 millions d'euros (+ 0,0 %) provenant du budget du ministère des affaires étrangères. La chaîne internationale doit continuer la numérisation de sa production et poursuivre sa réflexion en termes d'implantation géographique.

Votre rapporteur spécial déplore le lent désengagement continu du ministère des affaires étrangères du budget de RFI : la dotation du Quai d'Orsay progresse une fois de plus moins rapidement que celle provenant de la redevance audiovisuelle.

* 10 Le taux de la redevance s'élève à 116 euros par foyer équipé d'un poste de télévision en France métropolitaine, et à 74 euros dans les départements et territoires d'outre-mer. La progression attendue résulte d'une augmentation du taux d'équipement et d'une diminution du taux de fraude, compte tenu notamment de la possibilité nouvelle pour l'administration d'interroger les établissements diffusant ou distribuant des services payants de télévision.

* 11 Cette économie de gestion a conduit au reclassement de 964 agents du service de la redevance (sur un effectif global de 1.400 agents), dont 465 agents dans un autre service du réseau du Trésor public et 499 agents dans de nouvelles activités créées sur les sites où était implanté le service de la redevance audiovisuelle. Votre rapporteur spécial juge regrettable que, a contrario , il n'ait manifestement pas été pris en compte le coût des actions de communication sur la réforme de la redevance audiovisuelle.

* 12 Ce montant s'élève à 437,44 millions au titre du remboursement des exonérations, auxquels s'ajoutent 52,47 millions concernant le remboursement des aides gracieuses.

* 13 Cette dotation est répartie comme suit entre les différentes chaînes du groupe France Télévisions : France 2, 631,1 millions d'euros ; France 3, 815,4 millions d'euros ; France 4, 17,7 millions d'euros ; France 5, 149,5 millions d'euros ; Réseau France Outre-Mer (RFO), 220,0 millions d'euros.

* 14 France Télévisions a signé, le 2 novembre 2004, un accord pluriannuel avec l'Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA) et le Syndicat des producteurs indépendants (SPI), aux termes duquel le groupe s'engage à poursuivre une programmation diversifiée en matière de documentaires de création et à améliorer le financement horaire de ce genre spécifique, à hauteur de 10 millions d'euros par an entre 2005 et 2007. Cet accord vise expressément l'amélioration des conditions d'emploi et de respect du code du travail. De même, afin d'assurer de bonnes conditions de financement du secteur de l'animation, France Télévisions a signé un accord en avril 2005 avec le syndicat des professionnels français de l'animation (SPFA) : le groupe public s'engage à maintenir le volume de diffusion d'oeuvres d'animation sur une période de six ans à raison d'un minimum de 2.100 heures par an.

* 15 Votre rapporteur spécial rappelle que ARTE France et ARTE Deutschland financent paritairement le budget d'ARTE GEIE (Groupement Européen d'Intérêt Economique).

* 16 Votre rapporteur spécial rappelle que, suite au démarrage de la TNT le 31 mars 2005, 50 % de la population française a accès à la TNT depuis octobre 2005. Cette proportion doit atteindre 85 % d'ici le printemps 2007 puis 100 % (grâce à une couverture satellitaire pour les 15 % de la population habitant dans les zones d'ombre). Les articles 9 et 11 du projet de loi de finances rectificative pour 2005 prévoient à cet effet un abondement des dotations de l'Agence nationale des fréquences (ANF) à hauteur de 19 millions d'euros sur le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Ces crédits doivent permettre de financer (pour 15 millions d'euros) un Fonds d'accompagnement du numérique (FAN) pour assurer le déploiement de la TNT dans les zones frontalières, ainsi que le réaménagement des fréquences (pour 4 millions d'euros) suite à la mise en place de la TNT.

* 17 Le besoin de financement en investissements est évalué à 21,2 millions d'euros en 2006, réparti entre une redevance d'investissement (5,8 millions d'euros), des redéploiements de crédits (7,2 millions d'euros) et des reports de crédits de l'exercice 2005 (8,2 millions d'euros).

* 18 L'INA estime à 176 millions d'euros le besoin de financement sur la période 2005-2015 pour sauvegarder l'intégralité du fonds de l'INA, dont elle escompte que 83 millions d'euros soient pris en charge par l'Etat. L'objectif d'une conservation intégrale du patrimoine audiovisuel de l'INA est au coeur du contrat d'objectifs et de moyens (COM) signé entre l'INA et l'Etat le 18 novembre 2005, lequel prévoit une augmentation des dotations de l'INA de 22,6 % sur la période 2005-2009 (soit une hausse moyenne annuelle de 4,5 % par an au cours du COM). L'ensemble du patrimoine vidéo devra être sauvegardé d'ici 2009, et le patrimoine audiovisuel et radiophonique d'ici 2015.

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