III. LES CONDITIONS STRUCTURELLES DE L'INDÉPENDANCE ÉCONOMIQUE

Votre rapporteur général voudrait insister, pour conclure cette présentation, sur deux points :

- les meilleures protections dont peut disposer une entreprise cotée sont celles issues de bonnes performances de gestion et de l'augmentation de sa valeur ;

- la meilleure défense d'une économie contre la prise de contrôle étrangère des ses grandes entreprises passe par le renforcement de l'attractivité de son territoire , notamment sur le plan fiscal, qui est un facteur déterminant de la localisation des centres de décision.

La bataille pour le contrôle de nos grandes entreprises d'envergure internationale se joue en amont. Celui-ci dépend moins de l'accumulation de barrières juridiques ou institutionnelles que de la capacité de notre pays à orienter son épargne vers les entreprises françaises.

Nul doute que la France serait mieux protégée des raids hostiles et mieux à même de prendre en compte ses intérêts nationaux si la part des épargnants français - particuliers ou institutionnels - dans le capital des grandes entreprises du CAC 40 était plus importante. C'est donc au niveau de la politique de l'épargne qu'il convient d'agir dans le long terme en privilégiant le risque par rapport à la sécurité, la durée par rapport à la volatilité et, peut-être, en faisant une plus large place à l'investissement direct dans lequel l'épargnant s'approprie l'entreprise elle-même.

Mais à court terme, il est important de favoriser une prise de conscience par l'opinion des enjeux des grandes manoeuvres boursières et, en particulier, des facteurs structurels qui les conditionnent au travers de l'attractivité du territoire national.

Un bon exemple peut en être donné avec l'éventualité d'une fusion des plateformes boursières d'Euronext et de Deutsche Börse . Si celle-ci devait intervenir, en particulier sous la pression de fonds d'arbitrage anglo-saxons, avec le choix de Francfort pour nouveau siège et du système allemand pour la définition des règles du jeu, nul doute que cela aurait des répercussions importantes sur l'ensemble des activités de services financiers et juridiques de la place de Paris, mais également sur les conditions dans lesquelles s'effectueraient les opérations de capital des grands groupes français.

Le sentiment de votre rapporteur général est que, de ce point de vue, il s'agit là d'opérations dont le principal enjeu est la localisation en France des centres de décision économique . Plus généralement, il faut être attentifs à cette question car les arbitrages des grands groupes multinationaux diffèrent sensiblement selon le lieu d'implantation de leurs états-majors.

Face à un tel enjeu, une prise de conscience est indispensable. Il faut éviter deux écueils : une abstention affichée des pouvoirs publics, qui ne peut susciter que des réactions d'incompréhension de l'opinion, et des gesticulations, qui pourraient être pires que le mal en renforçant dans la population le sentiment de l'impuissance du politique.

Bien que discuté à certains égards « à chaud », le présent projet de loi a le mérite de déboucher sur des solutions juridiques pragmatiques et de nous inciter à poser la question des conditions économiques de nature à préserver le bon équilibre entre indépendance nationale et mondialisation des forces productives, entre une passivité dommageable et un activisme virtuel.

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