B. LA COMPATIBILITÉ DU CORPS ELECTORAL RESTREINT AVEC LES ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX DE LA FRANCE

Si le Conseil d'Etat et la Cour de cassation ont refusé d'exercer un contrôle de conventionalité sur des dispositions ayant un fondement constitutionnel, le Comité des droits de l'homme des Nations Unies et la Cour européenne des droits de l'homme ont établi la compatibilité des restrictions au corps électoral avec les conventions internationales.

1. La primauté des dispositions constitutionnelles sur le droit international

Dans son arrêt Sarran , Levacher et autres du 30 octobre 1998, le Conseil d'État a rejeté un recours contre le décret du 20 août 1998 portant organisation de la consultation des populations de la Nouvelle-Calédonie prévue par l'article 76 de la Constitution 24 ( * ) . Les requérants invoquaient une atteinte aux stipulations du pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques et de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le Conseil d'État a tout d'abord considéré que, par l'effet du renvoi opéré par l'article 76 de la Constitution aux dispositions de l'article 2 de la loi du 9 novembre 1988, définissant le corps électoral appelé à se prononcer lors du scrutin d'autodétermination initialement prévu en 1998, les dispositions de cet article avaient elles-mêmes valeur constitutionnelle. Puis il a jugé que la suprématie conférée par l'article 55 de la Constitution aux engagements internationaux ne s'appliquait pas, dans l'ordre interne, aux dispositions de nature constitutionnelle.

La Cour de cassation a ensuite été amenée à se prononcer sur le pourvoi d'une personne demandant l'annulation de la décision de la commission administrative de Nouméa ayant refusé son inscription sur la liste des électeurs admis à participer à l'élection du congrès et des assemblées de province, prévue à l'article 188 de la loi organique du 19 mars 1999 25 ( * ) .

A cette occasion, elle a estimé que l'article 188 avait une valeur constitutionnelle car, « déterminant les conditions de participation à l'élection du congrès et des assemblées de province de Nouvelle-Calédonie et prévoyant la nécessité de justifier d'un domicile dans ce territoire depuis dix ans à la date du scrutin, il reprend les termes du paragraphe 2.2.1 des orientations de l'accord de Nouméa, qui a lui-même valeur constitutionnelle en vertu de l'article 77 de la Constitution ».

Considérant que « la suprématie conférée aux engagements internationaux ne s'applique [......] pas dans l'ordre interne aux dispositions de valeur constitutionnelle », elle a par conséquent refusé de contrôler la conformité des restrictions au corps électoral avec le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

* 24 Soit la consultation intervenue le 8 novembre 1998.

* 25 Arrêt Mlle Fraisse du 2 juin 2000.

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