TITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES :
ARTICLE 32 - Equilibre général du budget, trésorerie et plafond d'autorisation d'emplois

Commentaire : le présent article a connu, avec l'entrée en vigueur de la loi organique modifiée n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), une importante modification dans sa structure : il ne se contente plus de déterminer l'équilibre général du budget en évaluant les recettes et en fixant un plafond de dépenses autorisées pour en déduire le solde budgétaire dans le cadre d'un tableau d'équilibre ; il comporte également un tableau de financement et un plafond pour la variation nette en fin d'année de la dette négociable de l'Etat de plus d'un an, ainsi qu'un plafond des emplois rémunérés par l'Etat. En dernier lieu, cet article prévoit l'affectation des éventuels surplus de recettes en application du 10° du I de l'article 34 de la LOLF modifiée par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005.

Comme il est de coutume, les grandes lignes de l'équilibre général proposé par le gouvernement sont analysées dans le tome I du présent rapport.

Cette année l'examen de cet article, qui a été modifié à la marge par l'Assemblée nationale, présente désormais un relief tout particulier par suite des changements importants de structure intervenus en application de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

A l'issue des votes des députés, le solde déficitaire du budget s'est établi à - 41,7 milliards d'euros, contre - 41,6 milliards d'euros dans le projet de loi initial, étant noté que cette variation tient pour une part à une question d'arrondis.

Le déficit du budget de l'Etat de 1990 à 2007

(en milliards d'euros)

Le vote de l'article d'équilibre n'est plus une simple formalité, substantielle, certes d'un point de vue juridique eu égard à la priorité du vote des recettes sur les dépenses mais constitue un acte majeur par lequel la représentation nationale se prononce sur les variables clés de la politique économique et financière de l'Etat.

L'article d'équilibre possède désormais une portée plus économique en ce qu'il reprend les éléments essentiels qui caractérisent le projet de loi de finances tant du point de vue budgétaire que financier. Il comporte, avec le plafond autorisé des emplois rémunérés par l'Etat évalué en termes d'équivalents temps plein travaillé (ETPT), la mention d'une variable « physique », dont la présence en première partie ne se justifie que dans la mesure où elle conditionne l'équilibre du budget .

Loin de constituer une simple récapitulation comptable assurant la cohérence entre première et seconde partie de la loi de finances, l'article d'équilibre devient la clef de voûte du texte en faisant la synthèse des éléments de « l'équilibre économique défini », selon les termes mêmes de l'article premier de la LOLF, susceptibles d'affecter le consentement du législateur.

I. LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DE L'ARTICLE D'ÉQUILIBRE

Ils résultent de l'article 34 de la loi modifiée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances qui définit le contenu de la loi de finances de l'année.

On note que, si l'article 34 de la LOLF énumère les différents éléments devant figurer en première partie de loi de finances et notamment en application de son I- 7° « les données générales de l'équilibre budgétaires, présentées dans un tableau d'équilibre » ou de son I- 8° les « ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l'équilibre financier, présentées dans un tableau de financemen t », une lecture littérale de l'article n'imposait pas de les regrouper dans un seul et même article.

A. LE TABLEAU D'ÉQUILIBRE

L'article d'équilibre tel qu'il résulte de l'article 34 de la LOLF, reprend un certain nombre d'éléments :

- une évaluation de « chacune des recettes budgétaires » et de « chacun des prélèvements » sur recettes. L'on note que la mention explicite des prélèvements sur recettes, -qui ne sont apparues de facto explicitement dans le tableau d'équilibre qu'à partir de 2003- tire les conséquences de l'article 6 de la LOLF qui précise qu'ils sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ;

- la fixation de plafonds de dépenses et de charges, non seulement pour le budget général mais aussi pour « chaque budget annexe » et « chaque catégorie de comptes spéciaux », conformément à la présentation actuellement en vigueur. Désormais les plafonds sont détaillés en seconde partie pour chacune des missions du budget général, chaque budget annexe et pour chaque compte spécial.

Ces plafonds de dépenses comprennent désormais le montant des crédits susceptibles d'être ouverts par voie de fonds de concours en application de l'article 17 de la LOLF 188 ( * ) . L'on relève que la LOLF ne fait plus de distinction suivant le caractère définitif ou temporaire des charges.

Les votes des recettes, des ressources et des charges de trésorerie, des dépenses et des plafonds des autorisations d'emplois sont régis par l'article 43 de la LOLF.

B. LES AUTORISATIONS RELATIVES AUX EMPRUNTS ET À LA TRÉSORERIE DE L'ETAT

L'article 31 de l'ordonnance de 1959 prévoyait que le projet de loi de finances « évalue le montant des ressources d'emprunt et de trésorerie » mais cette disposition n'avait jamais été appliquée ni sanctionnée par le Conseil constitutionnel dans la mesure où celui-ci a considéré « que le Parlement a disposé, lors de l'examen du projet de loi de finances, des informations auxquelles il a droit sur le sujet » 189 ( * ) .

Le présent article énonce désormais les autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l'État, évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l'équilibre financier, présentées dans un tableau de financement, et fixe le plafond de la variation nette, appréciée en fin d'année, de la dette négociable de l'État d'une durée supérieure à un an.

Par ailleurs, il prévoit une autorisation relative aux instruments à terme destinée à permettre la réalisation des opérations de couverture financière des variations de change ou de coûts de matières premières .

En ce qui concerne le tableau de financement tel qu'il résulte du projet de loi de finances initiale pour 2008, le besoin de financement de l'Etat se compose des amortissements de dette à moyen (BTAN) et long terme (OAT), pour un montant prévisionnel de 102,8 milliards d'euros et du déficit pour un montant prévisionnel de 41,6 milliards d'euros.

Les ressources proviennent des émissions nouvelles de dette à moyen et long terme (119,5 milliards d'euros), des annulations de titres opérées par rachats de la Caisse de la dette publique (3,7 milliards d'euros), ainsi que de la variation des bons du Trésor à taux fixe (22,3 milliards d'euros), des dépôts des correspondants (- 2,7 milliards d'euros) et du compte de Trésor (augmentation de 2,1 milliards d'euros).

Tableau de financement 2008

(en milliards d'euros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à long terme

41,3

Amortissement de la dette à moyen terme

61,5

Engagements de l'Etat

0,4

Déficit budgétaire

41,7

Total

144,9

Ressources de financement

Emissions à moyen et long terme, nettes des rachats effectués par l'Etat et la caisse de la dette publique

119,5

Annulation de titres de l'Etat par la caisse de la dette publique

3,7

Variation nette des bons du trésor à taux fixe (emprunts court terme)

22,3

Variation des dépôts des correspondants

-2,7

Variation du compte du Trésor et divers

2,1

Total

144,9

Source : projet de loi de finances initiale pour 2008

Par ailleurs, le plafond de la variation nette de la dette négociable entre le 1 er janvier de l'année 2007 et le 31 décembre de l'année 2008 de la somme des encours de la dette de moyen et long terme (OAT et BTAN nets des amortissements et rachats) s'établirait à 16,7 milliards d'euros contre 33,7 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2007.

Ce moindre recours à l'endettement à plus d'un an n'est guère rassurant. Il traduit la nécessité dans laquelle se trouve l'Etat de se refinancer à court terme et pose la question du respect par le présent article, sinon de la lettre, du moins de l'esprit de l'article 34 de la LOLF , qui voulait organiser un lien « organique » entre le montant du déficit et la variation de la dette.

Vont arriver à échéance en 2008, des emprunts importants contractés entre 2002 et 2004 pour faire face au creusement des déficits de la période. Or, un appel massif au marché financier pourrait dégrader les conditions de refinancement de l'Etat. D'où le recours à des émissions à court terme qui offre une forte sensibilité à l'évolution du taux.

Cette précarité financière ne laisse pas d'inquiéter face à l'augmentation du spread existant entre les taux payés par l'Allemagne et par la France pour le financement de leur dette publique. Ainsi, dans le cas où ce différentiel, certes encore modeste, s'accentuerait, le marché pourrait-il , plus encore que les remontrances des pairs dans le cadre des conseils européens, assurer la sanction d'une gestion insuffisamment rigoureuse de nos finances publiques .

Ecart de financement entre pays de la zone euro

(en %)

C. LE PLAFOND AUTORISÉ DES EMPLOIS RÉMUNÉRÉS PAR L'ETAT

La loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) offre de nouveaux moyens de suivi technique et politique des dépenses de personnel, qui représentent, ainsi qu'on l'a vu, plus de 40 % des dépenses de l'Etat.

Le regroupement au titre 2 des crédits de personnel constitue un facteur de clarification . Dans certains ministères, comme au ministère des affaires étrangères, il permet un arbitrage enfin pertinent dans les choix de recrutement de personnel. La notion « d'emploi budgétaire » était de nature, dans certains ministères à encourager artificiellement le recrutement de personnel au titre 3 (cas des recrutés de droit local), sans prise en compte d'un bilan financier coût/avantages pertinent.

De la même manière, le plafond d'emploi exprimé en équivalent temps plein travaillé paraît plus sincère que l'évaluation des emplois sous l'empire de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Toutefois, certains personnels restent hors plafond, comme ceux des centres culturels français à l'étranger ou certains emplois déconcentrés du ministère de l'éducation nationale.

En 2008, le plafond global des autorisations d'emplois de l'ensemble des ministères et des budgets annexes s'établit à 2.219.035 équivalents temps plein travaillé (ETPT), contre 2.283.159 ETPT en 2007.

Par rapport à 2007, ce plafond est réduit de 17.977 ETPT correspondant au non-remplacement en moyenne d'un départ à la retraite sur trois (soit le départ de 22.921 équivalents temps plein (ETP)) 190 ( * ) , 10.440 ETPT correspondant à un ajustement technique des plafonds d'autorisations d'emplois de 2007 et 35.708 ETPT liés à des mesures d'ordre et de décentralisation correspondant pour l'essentiel à la décentralisation des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) vers les collectivités territoriales.

D. L'UTILISATION DES ÉVENTUELS SURPLUS DE RECETTES

1. L'affectation des éventuels surplus au désendettement

Comme l'année dernière le IV du présent article précise les modalités d'utilisation des éventuels surplus de recettes constatés en exécution en application du 10° du I de l'article 34 de la LOLF modifiée par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005. En l'occurrence le présent projet de loi de finances prévoit que les éventuels surplus seront utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire.

Le texte dispose « qu'il y a constatation de tels surplus si, pour l'année 2008, le produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat net des remboursements et dégrèvements d'impôts, révisé dans la dernière loi de finances rectificative de l'année 2008 ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2009, est, à législation constante, supérieur à l'évaluation figurant dans l'état A mentionné au I du présent article ».

2. Un dispositif de portée plus politique que juridique

Votre rapporteur général rappelle qu'il y a là une contrainte de nature plus politique que juridique.

D'abord parce que la règle du comportement pourra être modifiée en cours d'année, notamment dans le cadre de loi de finances rectificative ; ensuite par ce que la probabilité des surplus dépendra de la façon plus ou moins volontariste dont aura été établie la prévision de recettes. Comme le rappelle notre collègue Jean Arthuis, président de votre commission des finances, dans son rapport sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances 191 ( * ) « le choix de la prévision des recettes fiscales détermine pour partie l'ampleur des éventuels surplus de recettes fiscales. Selon que l'on aura été optimiste, voire volontariste ou prudent dans le choix d'un taux de croissance de référence indépendamment des questions plus techniques liées aux hypothèses d'élasticité, l'on se retrouvera avec un surplus plus ou moins substantiel.

[...] Le gouvernement, s'il tient compte des prévisions de croissance du « consensus des économistes », a aujourd'hui une latitude complète pour estimer le taux de croissance de référence, et donc, pour favoriser l'apparition d'un éventuel surplus ou l'éviter. Seule la fixation d'une règle objective de détermination de ce taux de croissance, par exemple en le faisant relever d'un collège d'économistes ad hoc, ou en le fixant au niveau de celui du consensus à la fin du premier semestre de l'année N-1, permettrait d'éviter cet arbitraire et d'éliminer toute possibilité de manipulation . »

En tout état de cause pour votre rapporteur général, il ne saurait être question de porter atteinte à la liberté d'appréciation du pouvoir exécutif dans l'exécution budgétaire et c'est pourquoi il est essentiel de préserver une capacité de pilotage « manuel » du solde budgétaire.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE DÉLIBÉRATION

Au total, à l'issue des débats à l'Assemblée nationale de première partie, l'on note que, pour le budget général, les recettes nettes ont diminué de 66 millions d'euros pour s'établir à 230,489 milliards d'euros. Au total le solde déficitaire est en augmentation du même montant de 66 millions d'euros, ce qui le porte à 41,787 milliards d'euros contre 41,721 millions d'euros dans le projet de loi de finances initiale.

En ce qui concerne le tableau de financement, cette légère augmentation du déficit a pour conséquence un ajustement du poste variation des bons du Trésor à taux fixe qui s'établit à 22,4 milliards d'euros, soit 100 millions d'euros de plus que dans le projet de loi de finances initiale.

Enfin, on relève que dans le texte transmis par l'Assemblée nationale, le plafond global des autorisations d'emplois de l'ensemble des ministères et des budgets annexes reste inchangé à 2.219.035 équivalents temps plein travaillé (ETPT) .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Soucieuse, comme les deux dernières années, de mettre en valeur l'importance donnée à l'article d'équilibre, la Conférence des présidents, à l'initiative de votre commission des finances, a prévu la tenue de deux débats ad hoc sur la dette et sur les effectifs de la fonction publique .

Par cette initiative, elle entend, dans un but pédagogique faire de l' article d'équilibre le lieu des choix fondamentaux de politique économique du gouvernement .

Cette année, ce débat permettra de dresser un premier bilan de l'application de l'article 34 de la LOLF relatif au plafond de variation annuelle de la dette de plus d'un an. Il doit aussi permettre d'éclairer les choix du gouvernement en ce qui concerne les reprises de dette.

Au moment où notre pays manifeste, avec l'alourdissement des besoins de refinancement, une évidente vulnérabilité financière et où il se prépare à entreprendre de profondes réformes de structures dans le cadre de la revue générale des politiques publiques, ces deux débats sont fondamentaux et doivent être l'occasion de mettre les pouvoirs publics face à leurs responsabilités.

Décision de la commission : sous le bénéfice des observations ci-dessus, votre commission vous propose d'adopter cet article et l'état A qui lui est annexé, compte tenu des modifications qu'elle a apportées aux articles de la première partie.

* 188 « Les recettes des fonds de concours sont prévues et évaluées par la loi de finances. Les plafonds de dépenses et de charges prévus au 6o du I de l'article 34 incluent le montant des crédits susceptibles d'être ouverts par voie de fonds de concours ».

* 189 Décision n° 2000-442 D C du 28 décembre 2000 qui considère : « qu'il ressort du contenu des rapports parlementaires, [que] le Parlement a disposé, lors de l'examen du projet de loi de finances, des informations auxquelles il a droit sur le montant des ressources d'emprunt et de trésorerie destinées au financement du solde général ; que l'état A annexé à l'article critiqué présente, par ligne de recettes, les voies et moyens assurant l'équilibre financier ».

* 190 45.000 ETP devraient être recrutés en 2008.

* 191 Rapport n° 106 (2004-2005).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page