3. La France, deuxième contributeur au Fonds de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme

La participation au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme (créé en janvier 2002) s'établit à 280 millions d'euros, soit une diminution de 6,7 % par rapport à 2007 85 ( * ) . Lors de la conférence qui s'est tenue à Berlin fin septembre 2007, la France s'est engagée à participer à hauteur de 900 millions d'euros à la troisième reconstitution du Fonds pour la période 2008-2010. La France est ainsi le deuxième contributeur à ce fonds, derrière les Etats-Unis.

Depuis 5 ans, le Fonds a obtenu des engagements financiers à hauteur de 7,1 milliards de dollars. Son rythme d'engagement et de décaissement se révèle plutôt rapide : il a engagé un montant total de 5,3 milliards de dollars et décaissé 3,24 milliards de dollars, appuyant 450 programmes dans 136 pays. 81 % des décaissements ont été dépensés par l'utilisateur final. Les financements du Fonds représentent 64 % de l'ensemble du financement international de la lutte contre le paludisme, 67 % du financement de la lutte contre la tuberculose et 21 %du financement de la lutte contre le sida.

Plus de 60 % des fonds approuvés lors des 6 premiers appels à projets vont à l'Afrique subsaharienne ; 56 % des sommes déjà engagées iront à la lutte contre le sida 86 ( * ) et 26 % à la lutte contre le paludisme 87 ( * ) . Alors qu'un septième appel à projets a été lancé au printemps 2006, les projets actuellement mis en oeuvre devraient notamment permettre, d'ici 5 ans, de :

- placer 1,8 million de malades sous traitement anti-retroviral (cible de 1,3 million pour 2010) ;

- proposer à 62 millions de personnes des tests et des conseils volontaires ;

- fournir 264 millions de doses supplémentaires de traitement anti-paludéens à base d'artémisine contre le paludisme résistant ;

- financer 109 millions de moustiquaires pour protéger les familles de la transmission du paludisme ;

- traiter 3 millions de tuberculeux 88 ( * ) (traitement DOTS).

4. Une augmentation sous-estimée de la contribution de la France au FED

a) Une forte hausse probable de la contribution française

La participation de la France au FED représente une part importante de l'APD puisqu'elle est évaluée à 725 millions d'euros en 2008 , soit une hausse de 4,2 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2007 (696 millions d'euros).

Les engagements au titre du IX e FED et des reliquats des FED précédents ont à nouveau progressé pour atteindre fin 2006 3,41 milliards d'euros, de même que les décaissements avec 2,83 milliards d'euros, niveau encore jamais atteint par le FED en une année . En montants cumulés, 13,8 milliards d'euros avaient été engagés au 31 décembre 2006, soit 80 % du IX e FED et des reliquats précédents, et 5,7 milliards d'euros avaient été payés (soit 33 %).

La Commission et la Banque européenne d'investissement (BEI) ont revu en hausse sensible leurs prévisions de décaissements pour 2007/2008 et ont procédé à un appel de fonds supplémentaire de 375 millions d'euros 89 ( * ) (soit un total de 3,24 milliards d'euros), poursuivant ainsi la progression du rythme d'exécution constatée depuis 2003. Cette demande a été refusée par une majorité d'Etats membres qui ont souhaité maintenir le plafond défini par le Conseil en décembre 2006. Elle aurait alourdi la contribution française de 91 millions d'euros (soit 784 millions d'euros).

Il reste que ce refus n'offre sans doute qu'un court répit avant le franchissement probable de nouveaux seuils de contribution , compte tenu de la montée en puissance du IX e FED, dont la France est de loin le premier contributeur avec une quote-part de 24,3 % et dont l'enveloppe ne devrait être épuisée qu'en 2011, et de l'entrée en vigueur au 1 er janvier 2008 du X e FED, pour lequel la clef de contribution française passera à 19,55 % (soit le deuxième contributeur derrière l'Allemagne).

Malgré cette diminution bienvenue de la clef de contribution, l'inertie des paiements sur les FED antérieurs (et donc un démarrage effectif du X e FED reporté à 2010), la juxtaposition des FED, le recours accru à l'aide budgétaire et la « clause couperet » (obligation d'engager la totalité du IX e FED avant le 31 décembre 2007) conduisent à escompter une poursuite de la hausse des contributions française jusqu'en 2010.

Dans ces conditions et bien que la fiabilité des prévisions d'appels de fonds du FED demeure aléatoire, votre rapporteur spécial craint que la dotation inscrite pour 2008 soit largement sous-budgétée au regard des estimations communiquées par le MAEE sur les versements de la France de 2008 à 2011 : 955 millions d'euros en 2008 (dont 80 millions d'euros pour les appels de fonds non couverts en 2007 90 ( * ) ), 840 millions d'euros en 2009, 865 millions d'euros en 2010 et 902 millions d'euros en 2011.

Même en considérant que ces prévisions sont « optimistes », donc a minima et sans intégrer les éventuels appels de fonds non couverts en 2007, les prévisions de décaissements du FED en 2008 telles qu'elles figurent dans le nouvel indicateur 5.3 du PAP (fondées sur les estimations de la Commission européenne et de la BEI fournies en juillet 2007), en hausse de 12,5 % par rapport à 2007 (respectivement 3,6 millions d'euros et 3,2 millions d'euros), conduisent votre rapporteur spécial à estimer la contribution française à 783 millions d'euros minimum en 2008 , soit une sous-budgétisation de 58 millions d'euros.

Caractéristiques du X e FED (2008-2013)

Pour la période 2008-2013, l'enveloppe globale du X e FED, financée hors budget communautaire, est de 22,7 milliards d'euros , dont la quasi-totalité va aux pays ACP. Ce budget comporte trois grandes rubriques :

- la coopération nationale (programmes indicatifs nationaux dits PIN, recouvrant deux enveloppes, cf. infra ) et régionale (programmes indicatifs régionaux, dits PIR) pour 19,5 milliards d'euros, dont 1,77 milliard d'euros pour les PIR ;

- la coopération intra-ACP pour 2,7 milliards d'euros, qui recoupe une multitude d'actions sectorielles et est co-gérée par la Commission et le Secrétariat des pays ACP ;

- la Facilité d'investissement gérée par la BEI, pour 1,5 milliard d'euros.

Le X e FED est doté d'une vaste gamme d'instruments : aide-projet et aide-programme (dont aides budgétaires globales et sectorielles) financées sur les enveloppes nationales « A » (aides programmables, pour 13,5 milliards d'euros) et « B » (aides imprévues non-programmables, pour 1,8 milliard d'euros) ; programmes régionaux ; programmes thématiques via un certain nombre de facilités (eau, énergie, paix, infrastructures) de la ligne intra-ACP et la participation à des fonds multilatéraux (Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme) ; prêts bonifiés de la BEI à travers la Facilité d'investissement dite de Cotonou.

Les priorités géographiques et sectorielles du FED recoupent les secteurs d'activité définis dans le consensus européen de décembre 2005 (commerce, environnement, infrastructures, développement rural, eau et énergie, gouvernance, prévention des conflits, développement humain, cohésion sociale et emploi), en mettant l'accent sur trois domaines :

- lutte contre la pauvreté (90 % des crédits du X e FED seront affectés aux pays PMA parmi les pays ACP) et Afrique subsaharienne ;

- gouvernance démocratique : création d'une tranche incitative (2,7 milliards d'euros sur l'enveloppe « A ») allouée aux pays partenaires en fonction de leurs engagements en matière de gouvernance ;

- appui à l'intégration régionale : la dotation des PIR passe de 350 millions d'euros sous le X e FED à 1,8 milliard d'euros sous le X e FED.

Concernant la programmation du X e FED, on relève deux innovations par rapport au X e FED : une programmation conjointe européenne des PIN dans une dizaine de pays et un effort de programmation des programmes horizontaux (ligne intra-ACP). La programmation pays a été achevée à l'été 2007, tandis que les programmes régionaux et thématiques devraient être prêts à la fin de l'année 2007.

Source : ministère des affaires étrangères et européennes

b) Le suivi financier du FED et le recours croissant à l'aide budgétaire

S'agissant du suivi financier , la Commission transmet sur une base trimestrielle des états budgétaires 91 ( * ) au comité du FED ou du groupe ACP du Conseil. La Commission améliore ses modes de gestion et travaille notamment sur des indicateurs qui permettent de suivre de plus près les dépenses. La revue annuelle de l'aide du FED par les délégations locales offre l'occasion d'un bilan avec les postes diplomatiques mais c'est surtout au moment de la revue à mi-parcours du FED que l'ambassade peut examiner le profil des décaissements.

Au niveau local, ainsi que votre rapporteur spécial a pu le constater lors de ses missions de contrôle, la déconcentration ne semble pas exercer pleinement ses effets et certains responsables de délégation déplorent la lourdeur des procédures et leur manque d'autonomie dans les décisions d'investissement. De même, la concertation entre Etats membres est très inégale selon les pays.

L'amélioration des décaissements du FED est en grande partie liée au recours à l'aide budgétaire 92 ( * ) et à des versements à des initiatives et fonds multilatéraux 93 ( * ) dans le cadre de la ligne intra-ACP. L'utilisation à grande échelle de l'aide budgétaire date du IX e FED (2003-2007), dont elle représente environ 30 % des crédits. Cette tendance va s'accentuer puis l'aide budgétaire globale ou sectorielle pourrait constituer plus de la moitié de l'enveloppe programmable du X e FED, et jusqu'à 80 % des versements dans certains pays (Ghana). Compte tenu des très importantes masses financières du FED, le recours à ce type d'aide, qui permet des décaissements massifs et rapides, apparaît inévitable, mais votre rapporteur spécial regrette qu'elle devienne progressivement le canal privilégié d'intervention.

Outre les conditions de recours à l'aide budgétaire et les critères d'éligibilité des pays ACP fixés par l'Accord de Cotonou 94 ( * ) , l'aide budgétaire se décompose en une tranche fixe (65 % en moyenne des crédits totaux) et une tranche variable (35 %). La tranche fixe ne peut être déboursée qu'en totalité, dès lors que sont remplies trois conditions générales : mise en oeuvre d'une politique de réduction de la pauvreté, bonne gestion des finances publiques, stabilité macro-économique. La décision de décaisser ou non la tranche variable est prise en fonction des conditions générales qui s'appliquent à la tranche fixe et d'indicateurs de performance liés aux domaines de la santé, de l'éducation et de la gestion des finances publiques.

* 85 300 millions d'euros en 2007, soit un doublement par rapport à 2005.

* 86 En 2003, près de 3 millions de personnes sont mortes du sida, dont les trois-quarts en Afrique subsaharienne ; 5 autres millions de personnes ont été infectées.

* 87 Le paludisme tue plus d'un million de personnes chaque année, 90 % des décès survenant en Afrique et principalement chez les moins de 5 ans.

* 88 Chaque année, près de 2 millions de personnes meurent de la tuberculose malgré la disponibilité de traitements peu onéreux et efficaces dans près de 95 % des cas.

* 89 Les appels de fonds de la Commission et la BEI interviennent trois fois par an sur la base d'un échéancier et d'un plafond budgétaire proposés par la Commission et adoptés par le Conseil. Ils sont obligatoires et reposent sur des prévisions de dépenses établies par la Commission en octobre de l'année n-1 et susceptibles d'être revues en cours d'année, dans la limite du plafond.

* 90 Pour 2008, la Commission et la BEI prévoyaient en juillet 2007 une forte hausse des appels de fonds à 3,6 milliards d'euros , ce qui établirait la contribution de la France pour 2008 à près de 875 millions d'euros. La Commission devrait y reporter les appels de fonds non couverts en 2007, soit environ 300 millions d'euros, portant la contribution française à plus 950 millions d'euros.

* 91 Ces états comprennent la situation des engagements et paiements par rapport à l'objectif fixé par la Commission en début d'année, par région et par pays ; les prévisions d'engagements et de paiements pour les mois et années à venir ; et l'impact à la hausse ou à la baisse des montants d'engagements et de décaissements sur les appels à contributions des Etats membres.

* 92 La Commission européenne fut l'un des premiers donateurs à définir une doctrine dans le domaine de l'aide budgétaire, en 2002. Elle a utilisé l'aide budgétaire dès le VII e FED (1990-1995), avec la création d'une facilité d'ajustement structurel, puis sous le VIII e FED (1995-2000), avec les premiers appuis budgétaires directs.

* 93 Fonds global de lutte contre le sida, Initiative « Fast track Education pour tous », soutien à l'Union africaine, Fonds PPTE et Fonds fiduciaire Infrastructures dans le cadre d'un partenariat UE-Afrique.

* 94 Qui dispose en particulier :

« L'aide budgétaire directe en appui aux réformes macroéconomiques ou sectorielles est accordée lorsque :

« a) la gestion des dépenses publiques est suffisamment transparente, fiable et efficace ;

« b) des politiques sectorielles ou macro-économiques bien définies, établies par le pays et approuvées par ses principaux bailleurs de fonds ont été mises en place ;

« c) les règles des marchés publics sont connues et transparentes ».

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