D. DES PRÉROGATIVES EXCESSIVES ACCORDÉES À LA COMMISSION EUROPÉENNE

Dans le jeu institutionnel communautaire, on a parfois pu constater une légère tendance de la commission européenne à excéder son champ d'action.

Or, la proposition de directive, déjà contestable à ce titre lorsqu'elle prévoit que la liste des soins pouvant être soumis à autorisation préalable sera établie par sa commission, soulève deux autres difficultés au regard de l'application du principe de subsidiarité .

La première est proposée par l'article 16 qui dispose que « la commission arrête [...] les mesures spécifiques nécessaires à l'interopérabilité des systèmes de technologies de l'information et de communication dans le domaine des soins de santé, qui sont applicables lorsque les Etats membres décident de les introduire ». Ces mesures doivent préciser notamment « les normes et la terminologie nécessaires à l'interopérabilité des systèmes de technologies de l'information et de la communication concernés, afin de garantir la sécurité, la qualité et l'efficacité de la fourniture de services de santé transfrontaliers ». Or, s'il revient bien à la commission de favoriser les échanges d'information sur les soins et la santé publique entre les Etats membres, ce rôle ne saurait la conduire à définir « la » terminologie nécessaire à l'interopérabilité des systèmes de communication des Etats membres. Ceux-ci peuvent en effet échanger toutes leurs données sans pour autant disposer de la même terminologie. Il suffit que les différentes terminologies soient compatibles entre elles, ce qui requiert simplement un travail de coordination pour la commission.

La seconde est levée par l'article 5, relatif aux responsabilités de l'Etat membre dans lequel sont dispensés les soins. Cet article reconnaît à la commission le droit d'élaborer des orientations dans le domaine de l'application des normes de qualité des soins, des procédures judiciaires relatives aux contentieux créés par la délivrance des soins et des systèmes d'assurance pour les professionnels de santé, toutes matières qui n'entrent en aucun cas dans son champ des compétences. Là encore, les prérogatives que la proposition de directive accorde à la commission sont contraires au principe de subsidiarité et dépassent largement le rôle qui doit rester le sien en matière de politique de santé dans l'Union.

E. DES INCERTITUDES JURIDIQUES SUR DES SUJETS DE SOCIÉTÉ SENSIBLES

Comme le révèlent plusieurs de ses campagnes contre les discriminations, la commission européenne a pris clairement position sur un certain nombre de sujets de société. C'est le cas, par exemple, du droit d'accès à la procréation médicalement assistée pour les couples homosexuels.

En octobre dernier, à l'occasion de l'examen d'une précédente proposition de résolution européenne, portant sur une directive communautaire relative à la lutte contre les discriminations 14 ( * ) , votre commission a solennellement affirmé que de telles questions, en raison de leur complexité et indépendamment de toute prise de position partisane, ne pouvait être tranchée que par la souveraineté nationale. En aucun cas, il n'appartient à la commission européenne et à l'Union de promouvoir ou d'interdire, qui plus est d'une manière détournée, l'accès des couples homosexuels à la procréation médicalement assistée.

Or, une fois de plus, il faut bien constater que la rédaction de la proposition de directive, si elle était adoptée en l'état, introduirait une incertitude sur le droit applicable dans ce domaine .

L'article 9, relatif aux garanties de procédure concernant le système d'autorisation préalable, dispose en effet que « l'Etat membre d'affiliation veille à ce que les procédures administratives afférentes au recours à des soins de santé dans un autre Etat membre qui concernent l'autorisation préalable [...] reposent sur des critères objectifs et non discriminatoires [...]. Or, il y a lieu de s'interroger sur la portée de ce principe de non-discrimination. Signifie-t-il qu'un Etat membre, s'il est en droit de refuser à certains couples la prise en charge, sur son territoire, d'une procréation médicalement assistée, ne pourrait refuser, sans enfreindre le principe de non-discrimination, cette prise en charge lorsque ces couples y ont recours dans un autre Etat membre ?

A tout le moins, ce point mérite d'être clarifié, et votre commission demande aux autorités françaises au Conseil de faire le nécessaire en ce sens.

*

* *

Pour ces raisons, votre commission vous propose d'adopter la proposition de résolution dans la rédaction qu'elle vous soumet.

* 14 Proposition de directive du Conseil relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d'âge ou d'orientation sexuelle, E3918 - COM (2008) 426 final.

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