B. UNE DYNAMIQUE INTERNATIONALE NOUVELLE MAIS QUI NE DOIT PAS S'ESSOUFFLER

1. Le volontarisme international : un élan difficile à maintenir dans un contexte de nouvelles incertitudes

Après la gestion de l'urgence fin 2008, l'année 2009 a été marquée par une forte mobilisation internationale dans le cadre d'une nouvelle enceinte, le G 20 15 ( * ) , et par une volonté assez inédite de réforme extensive et de convergence entre grands Etats , nonobstant les critiques que l'on peut formuler sur la portée des déclarations. Des principes clairs ont ainsi été posés dans la quasi-totalité des domaines importants de la régulation bancaire, comptable et financière. Outre des engagements financiers du FMI à hauteur de 1 100 milliards de dollars pour relancer l'économie mondiale, le sommet de Londres du 2 avril 2009 a ainsi notamment porté sur le renforcement de la supervision multilatérale (avec la consécration du Conseil de la stabilité financière), la révision des normes comptables internationales et le comblement de certaines failles de la régulation (juridictions non coopératives, paradis fiscaux et fonds spéculatifs - « hedge funds » - en particulier).

Le sommet de Pittsburgh des 24 et 25 septembre 2009, qui a également traité des conditions macro-économiques de la reprise et de l'amélioration de la représentation des pays émergents au FMI, a établi un premier bilan des mesures prises, précisé les principes d'encadrement des « bonus » des opérateurs de marché, et réaffirmé ses engagements sur les paradis fiscaux, le renforcement des fonds propres des banques, et l'encadrement des hedge funds ou des agences de notation.

L'année 2010 paraît être davantage de transition : les résultats du sommet du G20, qui s'est tenu à Toronto les 26 et 27 juin, se sont révélés décevants (notamment sur la question de la mise en place d'une taxation des établissements financiers), et de nouveaux enjeux monétaires et macro-économiques sont apparus, en particulier suite à la crise de la dette en Europe. L'enthousiasme coopératif s'est émoussé avec les premiers signes de reprise et la dynamique de la réforme financière semble s'essouffler.

De fait, le contexte actuel post-crise comporte de nombreuses incertitudes qui peuvent enrayer l'effort de consensus international :

- le prix du soutien public à l'économie et aux établissements financiers est lourd et se traduit dans des déficits publics « historiques » , qui minent la crédibilité européenne ;

- la Fed et la Banque centrale européenne (BCE) ont accentué leur rôle de « bad bank » et vu la qualité de leur bilan se dégrader. La BCE a ainsi prolongé ses programmes non conventionnels d'offre illimitée de liquidités à taux fixe (1 %) et s'est positionnée comme acheteur en dernier ressort de la dette européenne ;

- les banques retrouvent une profitabilité élevée 16 ( * ) , voient leur coût du risque diminuer, renouent - pour certaines d'entre elles - avec des pratiques de rémunération disproportionnée des traders , et se sont attachées à atténuer le renforcement annoncé des contraintes prudentielles. Les banques devront néanmoins effectuer d'importantes levées de fonds dans les prochaines années pour respecter les futures normes de « Bâle III », nonobstant un taux plus élevé d'incorporation des bénéfices au capital ;

- la crédibilité de la méthodologie et des hypothèses des tests de résistance des banques européennes, dont les résultats ont été publiés le 23 juillet 2010 par le Comité européen des superviseurs bancaires, a été contestée ;

- un risque de bulle spéculative sur les obligations d'Etat est évoqué, dans la mesure où la demande demeure abondante, ce qui contribue à prolonger la baisse des taux d'intérêt, alors que les conditions de la soutenabilité budgétaire ne sont pas réunies. L'inversion de la tendance, qui se produira nécessairement, risque d'en être d'autant plus violente ;

- le risque de « double dip » , c'est-à-dire de rechute des économies européennes et américaine, et de déflation durable n'est pas écarté du fait du « découplage » de la reprise entre pays émergents et pays industrialisés. Si la relance budgétaire était à l'ordre du jour dans tous les pays industrialisés en période de crise, la sortie de crise implique des approches différenciées qui se révèlent plus difficiles à coordonner .


* 15 La pérennisation du G20 pose toutefois des difficultés puisque cette enceinte n'est pas assortie d'un mécanisme de représentation. Il regroupe 19 pays (Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, Etats-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie et Turquie) ainsi que l'Union européenne (UE), qui est représentée à la fois par le président du Conseil et celui de la Banque centrale européenne.

* 16 A titre d'exemple, les bénéfices enregistrés au premier semestre de 2010 ont atteint 6,8 milliards de dollars pour HSBC, 4,4 milliards d'euros pour BNP Paribas, 3,2 milliards d'euros pour Santander, 3 milliards d'euros pour Deutsche Bank et 2,15 milliards d'euros pour la Société Générale.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page