IV. QUELLE ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES ?

A. UNE RÉPARTITION ENTRE LOI DE FINANCES ET LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE QUI FRACTIONNE LES DÉBATS ET COMPARTIMENTE LES ENJEUX

Dans leur note du 17 mai 2010 à M. Michel Camdessus, le président et le rapporteur général de votre commission des finances préconisent la fusion des parties « recettes » des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Le rapport du « groupe Camdessus » envisage quant à lui le « regroupement partiel ou total des dispositions » de ces deux textes.

1. Les prélèvements obligatoires des administrations de sécurité sociale sont presque deux fois supérieurs à ceux de l'Etat

Les administrations de la sécurité sociale représentent plus de la moitié des prélèvements obligatoires, comme le montre le graphique ci-après.

Les prélèvements obligatoires perçus par les différentes catégories d'administrations publiques (2009)

(en milliards d'euros)

Total : 793,0 milliards d'euros.

Source : Insee

Certes, les administrations de sécurité sociale ne sont que partiellement prises en compte par la loi de financement de la sécurité sociale. En effet, alors qu'en 2009 leurs recettes totales ont été de 470,1 milliards d'euros (au sens de la comptabilité nationale), celles des régimes obligatoires de base (au sens de la comptabilité publique) ont été de « seulement » 405,6 milliards d'euros. L'écart provient, outre des différences entre les concepts utilisés (comptabilité nationale ou comptabilité publique), de l'assurance chômage (recettes de 30,4 milliards d'euros en 2009) et des régimes complémentaires, qui sont des administrations de sécurité sociale n'entrant pas dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale.

Les recettes des régimes obligatoires de base (405,6 milliards d'euros en 2009) n'en sont pas moins nettement supérieures à celles de l'Etat (233,7 milliards d'euros en 2009, année marquée par la crise, et une prévision de 273,3 milliards d'euros en 2010).

2. Des mesures nouvelles pour 2011 artificiellement éclatées entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale

Le présent projet de loi prévoit, on l'a vu, des mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires de 10 milliards d'euros en 2011 et 3 milliards d'euros en 2012. En réalité, comme cela a été indiqué, les mesures résultant des projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 sont de 10,9 milliards d'euros en 2011 et 2,6 milliards d'euros en 2012, soit 13,5 milliards d'euros au total.

Ces 13,5 milliards d'euros se répartissent entre respectivement 10,4 et 2,7 milliards d'euros entre ces deux textes (auxquels il faut ajouter 0,4 milliard d'euros de hausse réglementaire des cotisations ATMP), comme le montre le tableau ci-après.

La répartition des mesures nouvelles entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011

(en milliards d'euros)

2011

2012

Cumul

Total

PLF

PLFSS

Domaine réglementaire

Sous total réforme des retraites

3

0,2

3,2

1

2,2

Mesures portant sur les stock-options et les retraites chapeau

0,2

0

0,2

0,2

Imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières au 1er euro

0

0,2

0,2

0,2

Annualisation des allégements généraux de cotisations sociales

2

0

2

2

Suppression du crédit d'impôt sur les dividendes

0,6

0

0,6

0,6

Suppression du plafonnement de la quote-part pour frais et charges sur les dividendes

0,2

0

0,2

0,2

Sous total financement de la dette sociale

3,8

-0,2

3,6

3,6

0

Taxation des sommes placées dans la réserve de capitalisation par les sociétés d'assurance*

1,1

0

1,1

1,1

Imposition aux contributions sociales des compartiments euros des contrats d'assurance vie multisupport au fil de l'eau

1,6

-0,2

1,4

1,4

Imposition à la TSCA à taux réduit des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables

1,1

0

1,1

1,1

Sous total autres mesures niches PLF 2011

2,2

2

4,2

4,1

0

Suppression du taux réduit de TVA sur les offres composites triple play

1,1

0

1,1

1,1

Aménagement des dispositifs d'aide à l'investissement dans des équipements photovoltaïques

0

0,7

0,8

0,8

Révision des modalités de déclarations de revenus (mariage, PACS, divorce)

0

0,5

0,5

0,5

Recentrage des dispositifs d'aide à l'investissement dans les PME

0

0,1

0,1

0,1

Application de la taxe sur le véhicule de tourisme de société aux véhicules immatriculés N1

0,9

0

0

0

Suppression ou réduction d'exonérations de cotisations employeurs

0

0,3

1,2

1,2

Réductions de 10 % d'un ensemble de crédits et réductions d'impôt sur le revenu

0

0,4

0,4

0,4

Sous total autres mesures niches PLFSS 2011

0,4

0

0,4

0

0,5

Hausse du forfait social

0,4

0

0,4

0,4

Limitation du champ de la déduction de 3 % de CSG pour frais professionnels

0

0

0

0

Assujettissement aux cotisations sociales des rémunérations versées par des tiers

0,1

0

0,1

0,1

TOTAL NICHES FISCALES ET SOCIALES

9,4

2

11,4

8,7

2,7

Contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus et sur les revenus du capital**

0,5

0

0,5

0,5

Hausse du taux de cotisations ATMP**

0,4

0

0,4

0,4

Taxe systémique sur les banques

0,5

0,1

0,6

0,6

Réforme de l'accession à la propriété

0

0,6

0,6

0,6

TOTAL RECETTES NOUVELLES

10,9

2,6

13,5

10,4

2,7

0,4

(*) La mesure comporte deux volets : taxation du stock des sommes mise en réserve (affectée à la CADES) et taxation des flux futurs (affectés au budget général).

(**) Affectée au financement de la réforme des retraites.

Sources : rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, commission des finances

Sur les 3,7 milliards d'euros de recettes supplémentaires (hors hausse du taux de cotisations ATMP) destinés à financer la réforme des retraites, 1,5 milliard d'euros (1 milliard d'euros de réductions de niches et 0,5 milliard d'euros pour la contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus et sur les revenus du capital) proviennent du projet de loi de finances pour 2011 et 2,2 milliards d'euros du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Cet éclatement complexifie bien entendu la discussion du volet financier de la réforme des retraites.

L'examen du volet financier de la réforme du financement de la dette sociale peut paraître ne pas poser de problème dans la mesure où ce volet a été intégralement inscrit dans le projet de loi de finances pour 2011. Or dès lors que le choix des mesures destinées au refinancement de la dette sociale ou le principe de l'affectation de ces dernières à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) commence à être remis en cause, les conséquences doivent en être tirées aussi bien dans le PLF que dans le PLFSS, suscitant d'ailleurs l'inscription dans l'un de ces textes de dispositions qui auraient eu vocation à relever de l'autre.

Ainsi, l'Assemblée nationale a choisi, dans le cadre de son examen des articles 7, 8 et 9 du projet de loi de finances, d'affecter le panier de recettes initialement affecté à la CADES à la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), et par conséquent, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de proposer, via sa commission des finances, l'affectation à la CADES d'une fraction de la CSG actuellement versée à la CNAF, choix que le Sénat devra apprécier.

Il en résulte un brouillage des domaines respectifs des deux lois financières.

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