Article 21 (art. L. 134-1, L. 134-4, L. 134-5-1, L. 612-1, L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale, art. L. 731-2 du code rural et de la pêche maritime, art. 61 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005) Suppression de la compensation généralisée maladie

Objet : Cet article vise à supprimer le mécanisme de compensation généralisée entre régimes obligatoires de sécurité sociale au titre de la maladie, tout en en neutralisant l'impact financier.

I - Le dispositif proposé

• Les mécanismes de compensation

Depuis la fin des années 50, plusieurs compensations ont été créées pour assurer une certaine solidarité financière entre les régimes d'assurance maladie et pour tenir compte des différences qu'ils présentent en termes de nombre de cotisants et bénéficiaires et en termes de prestations.

Les compensations bilatérales concernent d'une part, le régime général, d'autre part, les régimes spéciaux de salariés (SNCF, RATP, militaires, mines, gens de mer, Banque de France et clercs de notaire). Le régime général prend ainsi à sa charge, en ce qui concerne les prestations en nature, le déficit que le régime spécial aurait constaté s'il avait appliqué les règles d'indemnisation du régime général.

Transferts de compensation bilatérale maladie en millions d'euros en 2008

Lecture : le régime général est débiteur de 1,7 milliard d'euros, celui des mines est créditeur de 1 milliard.

Source : commission de compensation, cité dans le rapport annuel de la Cour des comptes, septembre 2010

Il existe en outre d'autres transferts : intégration financière des régimes maladie agricoles - salariés et non salariés - dans les comptes du régime général et transfert d'équilibre versé par la Cnam au régime des marins (Enim) et à la caisse nationale militaire.

La compensation démographique généralisée a été créée en 1974 et est inscrite à l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale. Elle touche les régimes obligatoires comportant un effectif minimum 33 ( * ) . Elle tend à remédier aux inégalités provenant des déséquilibres démographiques et, lorsque les capacités contributives de l'ensemble des non-salariés pourront être définies dans les mêmes conditions que celles des salariés, elle tendra également à remédier aux disparités de capacités contributives entre les régimes.

Elle est calculée sur la base 34 ( * ) :

- d'une prestation de référence, qui est la prestation la plus basse parmi l'ensemble des régimes concernés - en l'espèce, celle du régime social des indépendants - ;

- d'une cotisation moyenne, qui est la cotisation théorique qui devrait être versée par chaque cotisant actif pour financer cette prestation de référence.

Transferts de compensation généralisée maladie en millions d'euros en 2008

Source : commission de compensation, cité dans rapport annuel de la Cour des comptes, septembre 2010

Les transferts de compensation généralisée se résument principalement à une contribution du RSI au profit du régime des non salariés agricoles. Depuis 2008, on constate une augmentation de la contribution du RSI, en raison de nouveaux besoins de la part des régimes salariés, qui deviennent d'ailleurs débiteurs, et malgré une diminution du solde déficitaire de la MSA des exploitants.

• Les modifications proposées

Cet article vise à supprimer la compensation démographique généralisée, en éliminant les flux croisés et en en neutralisant l'impact financier pour les différents régimes concernés.

Le du paragraphe I supprime, dans l'article L. 134-1, le principe même d'une compensation au titre de l'assurance maladie et maternité en ce qui concerne les prestations en nature. En revanche, cette compensation persistera pour le risque vieillesse.

De ce fait, le supprime des recettes du RSI le versement éventuel au titre de la compensation généralisée.

Le paragraphe II opère la même suppression pour le régime des non salariés agricoles et substitue à cette recette une fraction égale à 30,89 % du produit de la contribution sociale de solidarité (C3S), instituée par l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale.

L'article L. 651-2-1 fixe quant à lui la répartition du produit de la C3S, qui sert en priorité au comblement du déficit comptable du RSI, puis au financement du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de réserve des retraites (FRR) en cas de reliquat.

Le et le du paragraphe I réorganise ces modalités d'affectation de la C3S :

- pour tirer les conséquences des choix de financement de la dette sociale inscrits dans le présent projet de loi de financement et dans le projet de loi de finances pour 2011, le FRR, qui est rapproché de la Cades, ne sera plus attributaire de la C3S ;

- le produit de la cotisation sera d'abord affecté au régime des non salariés agricoles, à hauteur de 30,89 % comme fixé au paragraphe II de cet article, puis au RSI et, enfin, au FSV.

Pour 2011, le besoin du régime des non salariés agricoles est estimé à 966 millions d'euros, celui des régimes salariés à 348 millions, si bien que la contribution totale du RSI aurait dû s'élever au total à 1,3 milliard.

Plutôt que de répartir au prorata le produit nécessaire de C3S entre le régime des non salariés agricoles et les régimes salariés, le Gouvernement a fait le choix de ne pas affecter de C3S à ces derniers, estimant de manière lapidaire que cette contribution « a vocation à financer les régimes des non salariés ». On notera toutefois qu'elle alimente également le FSV et, avant modification, le FRR.

Cette décision implique de procéder à une nouvelle répartition des droits sur le tabac, afin de neutraliser l'impact financier de la réaffectation de la C3S, impact qui serait positif pour le régime agricole et négatif pour les régimes salariés. Le paragraphe III prévoit ainsi qu'à compter de 2011, la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) sera attributaire de 15,44 % des droits de consommation sur les tabacs, au lieu de 18,68 %, la Cnam en recevant 42,05 % au lieu de 38,81 %.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a supprimé, dans les sections II et III du chapitre IV du titre III du livre premier du code de la sécurité sociale, les références aux compensations bilatérales entre le régime général, d'une part, le régime des marins et gens de mer et celui des employés de la Banque de France, d'autre part.

La référence à ces flux de compensations est en effet devenue inutile depuis l'intégration financière de ces deux régimes à la Cnam :

- l'article 57 de la loi de finances pour 2006 prévoit que le régime des marins bénéficie d'une contribution d'équilibre de la Cnam ;

- les risques maladie et maternité du régime de la Banque de France relèvent du régime général depuis le décret n° 2007-406 du 23 mars 2007.

III - La position de la commission

Le rapport annuel de la Cour des comptes sur la sécurité sociale, publié en septembre 2010, réserve un chapitre aux compensations inter-régimes, maladie et vieillesse.

En ce qui concerne la compensation généralisée, elle critique l'exclusion des effectifs des départements d'outre-mer dans le calcul et l'absence de prise en compte des capacités contributives des cotisants.

En ce qui concerne les compensations bilatérales, elle constate que les calculs de transferts ne sont pas réalisés selon les dispositions réglementaires, ce qui fait supporter à la Cnam une charge injustifiée s'élevant en 2008 à 471 millions d'euros, soit 28 % de sa contribution .

La Cour conclut : « les transferts de compensation démographique, notamment ceux découlant des compensations bilatérales, ne sont plus adaptés. Compte tenu de la diversité des mécanismes de transferts, une mise à plat est nécessaire pour simplifier et améliorer l'équité et la transparence dans les relations entre les régimes. Le régime général ne doit pas compenser les efforts contributifs insuffisants d'autres régimes ».

Dans ces conditions, supprimer la compensation démographique généralisée est une décision positive, d'autant qu'il était devenu paradoxal d'affecter spécialement une contribution sociale à l'équilibre d'un régime alors que, du fait de mécanismes de compensations, celui-ci était devenu le contributeur principal, voire unique, à l'équilibre d'autres régimes.

Au final, votre commission salue cet effort de simplification, qui va dans le sens d'une recommandation de la Cour des comptes, mais souhaite que le mouvement se poursuive pour réviser en profondeur les mécanismes de compensation bilatérale.

Elle a adopté un amendement qui, outre une précision rédactionnelle, rétablit la possibilité de versement d'acomptes provisionnels de la C3S comme cela est aujourd'hui prévu.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.


* 33 L'article L. 134-9 du code de la sécurité sociale précise qu'il s'agit des régimes dont l'effectif des actifs cotisants et des retraités titulaires de droits propres âgés de soixante-cinq ans ou plus dépasse au total 20 000 personnes au 1 er juillet de l'année considérée.

* 34 Article D. 134-3 du code de la sécurité sociale.

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