CHAPITRE V LE NOUVEAU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS »

Le présent compte d'affectation spéciale (CAS), équilibré et doté de 210 millions d'euros en recettes comme en dépenses, constitue une innovation budgétaire et est le « pendant » de l'article 33 du présent projet de loi de finances, au commentaire duquel il convient également de se référer.

I. UN COMPTE D'EXTERNALISATION DU DISPOSITIF DE PÉRÉQUATION DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

A. LE DÉFICIT STRUCTUREL DES LIGNES D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE IMPLIQUE UNE PÉRÉQUATION

Les lignes exploitées par les branches d'activité « SNCF Proximités » (trains Corail Intercités) et « SNCF Voyages » (trains Corail Téoz, Lunéa et autres trains de nuit), dénommées de manière générique « Corail », sont structurellement déficitaires. Quarante lignes sont ainsi concernées , représentant chaque jour environ 340 trains qui transportent 100 000 voyageurs. Selon la SNCF, seules quatre lignes seraient rentables : Paris-Clermont, Paris-Limoges-Toulouse, Paris-Rouen-Le Havre et Paris-Caen-Cherbourg.

Dans le cadre d'un audit conduit en collaboration avec la société KPMG, le déficit d'exploitation actuel de ces lignes a été évalué par la SNCF et l'Etat à 190 millions d'euros pour l'exercice 2009, hors rémunération de l'exploitant. La SNCF estime par ailleurs que les besoins d'investissements nécessaires à l'entretien, la modernisation et au renouvellement du matériel roulant s'élèveraient à 1,5 à 2 milliards d'euros au cours des quinze prochaines années .

L'équilibre financier de ces lignes dites « d'équilibre » ou « d'aménagement du territoire » repose aujourd'hui sur l'existence d'une péréquation interne à la SNCF entre les produits et les charges de l'ensemble des lignes exploitées, en particulier des lignes à grande vitesse (LGV), globalement excédentaires mais dont les marges d'exploitation se réduisent, vers les lignes Corail.

B. DE NOUVELLES CONTRAINTES ÉCONOMIQUES ET EUROPÉENNES

Il n'existe actuellement aucun dispositif juridique prévoyant ou encadrant le financement des obligations de service public de la SNCF en matière d'équilibre du territoire. Or le règlement européen n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, dit « règlement OSP », (obligations de service public), entré en vigueur le 3 décembre 2009, conduit à assimiler les lignes d'équilibre du territoire à une obligation de service public, susceptible d'être compensée par l'Etat . Le financement de la compensation de cette obligation et le monopole dont dispose actuellement la SNCF sur ces lignes impliquent la mise en place d'une contractualisation .

En outre, l'ouverture à la concurrence , depuis le 13 décembre 2009, des services de transport ferroviaire internationaux de voyageurs, qui préfigure celle des services de transport ferroviaire nationaux de voyageurs à une date non encore déterminée 75 ( * ) , devrait remettre en question à moyen terme la viabilité du mécanisme de péréquation interne à la SNCF , en réduisant la profitabilité des LGV les plus rentables, et en limitant ainsi la capacité de la SNCF à financer les pertes de l'activité Corail.

Compte tenu de ces évolutions juridiques et économiques, le financement des lignes d'équilibre du territoire ne peut plus prendre la forme d'une péréquation interne à la SNCF. Le principe même d'une péréquation n'est pas remis en cause, mais il apparaît nécessaire de repenser son fonctionnement, en particulier pour que l'ensemble des entreprises ferroviaires positionnées sur les services nationaux de voyageurs en France puissent à terme contribuer au financement de l'exploitation des lignes d'équilibres du territoire. Les nouvelles modalités de financement doivent donc couvrir l'entretien et la rénovation du matériel roulant nécessaire à l'exploitation des lignes d'équilibre du territoire, la SNCF étant globalement en perte sur les lignes Corail.

Afin de ne pas laisser la charge au seul mode ferroviaire du financement de ces lignes déficitaires, il est enfin apparu pertinent de faire financer par le mode routier une part modeste du déficit au titre de l'effort d'aménagement du territoire, du report modal prévu par le Grenelle de l'environnement et de la possibilité pour les compagnies ferroviaires de recourir à l'avenir à des bus longue distance.


* 75 Selon le projet de Livre blanc de la Commission européenne sur les transports ferroviaires, une proposition législative devrait être présentée d'ici fin 2012.

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