N° 111

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2010

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2011 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 3

AGRICULTURE, PÊCHE, ALIMENTATION, FORÊT
ET AFFAIRES RURALES

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE :
DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

Rapporteur spécial : M. Joël BOURDIN

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , Serge Dassault, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, MM. Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 2824, 2857, 2859 à 2865 et T.A. 555

Sénat : 110 (2010-2011)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Doté de 3,59 milliards d'euros en AE et de 3,67 milliards d'euros en CP , le projet de budget 2011 de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » présente une certaine continuité par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2010 : les AE baissent de 1,8 % tandis que les CP progressent de 1,8 %. Les crédits pour 2011 se caractérisent par un écart notable par rapport aux plafonds définis par la précédente programmation pluriannuelle (+ 23 % en AE et + 21 % en CP) mais sont conformes au projet de programmation en cours d'examen .

2. La mission doit être replacée dans le contexte des différents concours publics à l'agriculture . Elle ne représente en effet qu' environ 20 % de ceux-ci, tandis que l'Union européenne en fournit plus de la moitié.

3. Les dépenses fiscales , concentrées sur le programme 154, ne sont toujours pas récapitulées au niveau de la mission . Leur présentation par programme est toutefois améliorée dans le projet annuel de performances. Cet effort doit être poursuivi de manière à pouvoir mieux évaluer ces dispositifs dont le coût, élevé, serait de l'ordre de 3 milliards d'euros.

4. Le ministère de l'Alimentation, de l'agriculture et de la pêche conduit des réformes importantes, dont l'impact budgétaire reste incertain , à l'image de celles liées à la mise en oeuvre de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche , de la révision générale des politiques publiques , du Grenelle de l'environnement , ou, encore, du bilan de santé de la PAC .

5. L'exécution budgétaire en 2009 et en 2010 présente, une fois de plus, un profil perturbé , résultant de la survenue de crises et de la budgétisation insuffisante de certains postes. La question des aléas climatiques, économiques et sanitaires subis par le monde agricole ne fait pas l'objet d'une prise en charge satisfaisante par les différents programmes de la mission.

6. La concentration des crédits de titre 2 de la mission au sein du programme support 206 n'est plus justifiée par les adaptations liées à la mise en oeuvre de la LOLF ou par la réorganisation en voie d'achèvement du ministère. Une ventilation des dépenses de personnel entre les différents programmes est donc toujours attendue à l'occasion du prochain projet de loi de finances.

7. Les ressources du compte spécial « Développement agricole et rural » paraissent mieux utilisées en 2011 . Cette évolution fait suite au constat d'écarts persistants entre les recettes et les dépenses du compte, toujours au profit des premières. Cependant, le transfert des actions de génétique animale au compte spécial n'obéit pas à une logique évidente : leur coût est durable tandis que ce dernier a pour particularité de connaître d'importantes variations de ses ressources. Par ailleurs, la justification des dépenses reste insuffisante pour s'assurer que les crédits ne sont pas distribués en vertu d'une logique d'abonnement des organisations par lesquelles ils transitent .

En application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent PLF, la date limite était fixée au 10 octobre 2010.

A cette date, 92 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues à votre rapporteur spécial. Ce taux de réponse représente une amélioration sensible par rapport à l'année précédente où le taux à la même date ne s'élevait qu'à 52 %. Cet effort fourni par les services du ministère de l'Alimentation, de l'agriculture et de la pêche mérite d'être salué.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA MISSION

A. 3,6 MILLIARDS D'EUROS EN 2011 : UN BUDGET D'APRÈS-CRISE POUR LE MONDE AGRICOLE

1. Des crédits dans la continuité de ceux votés en 2010...

Le présent projet de loi de finances propose de doter la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » (APAFAR), portée par le ministère de l'Alimentation, de l'agriculture et de la pêche (MAAP), de 3,588 milliards d'euros en AE et 3,674 milliards d'euros en CP pour 2011 .

Evolution 2010-2011 de la mission
« Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Programmes

LFI 2010

PLF 2011

Évolution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

154 « Economie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires »

1 898,08

1 861,29

1 974,75

2 031,38

+4,0 %

+9,1 %

149 « Forêt »

366,06

338,80

360,13

371,34

-1,6 %

+9,6 %

206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation »

540,54

561,33

505,43

510,08

-6,5 %

-9,1 %

215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture »

847,52

848,67

747,74

761,25

-11,8 %

-10,3 %

Total mission

3 652,20

3 610,08

3 587,97

3 674,05

-1,8 %

+1,8 %

dont dépenses de personnel

975,00

975,00

924,90

924,90

-5,0 %

-5,0 %

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire adressé au ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

La dotation de la mission en 2011 est caractérisée par une certaine stabilité par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale (LFI) pour 2010 : les AE sont en baisse de 1,8 % tandis que les CP progressent de 1,8 %. Une évolution en sens inverse avait été observée l'année dernière (+ 6 % en AE et - 1 % en CP).

Hors crédits de personnel, ces dotations représentent une baisse des crédits de 0,5 % en AE et une hausse de 4,3 % en CP par rapport à l'exercice précédent 1 ( * ) . Les dépenses de titre 2 s'élèvent en effet à 925 millions d'euros en AE = CP, soit une baisse de 5 % par rapport à 2010.

Derrière ces évolutions, le présent projet de loi de finances confirme l'écart pris au regard de la programmation pluriannuelle des crédits de la mission, dans le contexte de l'après-crise généralisée du monde agricole.

2. ... et qui dépassent donc les plafonds prévus par la programmation pluriannuelle

La programmation 2009-2012 de la mission telle qu'elle figure dans la loi du 9 février 2009 de programmation des finances publiques 2 ( * ) prévoyait ainsi une diminution marquée des crédits en 2010 et en 2011 .

Cet objectif n'a, bien entendu, résisté ni à la sous-budgétisation de la mission , constatée année après année, ni à la crise traversée pendant deux ans par l'ensemble des filières agricoles . Dès juin 2009, le rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques indiquait déjà que le plafond 2009 prévu par la programmation pluriannuelle devrait « être majoré de 234 millions d'euros, compte tenu de l'évolution récente des conditions économiques de l'agriculture . A ce dépassement s'ajoutent les crédits nécessaires au financement des mesures décidées suite à la tempête Klaus, qui a touché les forêts du sud-ouest de la France en janvier 2009 » 3 ( * ) . Le plan exceptionnel en faveur de l'agriculture, annoncé le 27 octobre 2009 par le Président de la République dans son discours de Poligny (Jura) a confirmé le caractère inaccessible des objectifs prévus par la programmation pluriannuelle. Outre un milliard d'euros de prêts bancaires, ce plan de soutien aux agriculteurs , d'un montant annoncé de 650 millions d'euros, a en pratique conduit à l'ouverture d'environ 110 millions d'euros en AE=CP sur l'exercice 2009 4 ( * ) et de 230 millions d'euros en AE et 160 millions d'euros en CP sur l'exercice 2010 , principalement par l'intermédiaire de prêts bonifiés, de mesures d'allègements de charges et, enfin, d'une majoration du dispositif « Agridiff » 5 ( * ) .

Outre la prise en compte de ce plan, d'autres facteurs présentés dans le paragraphe consacré à l'exécution en 2009 et 2010, conduisent le présent projet de loi de finances, hors modifications introduites par l'Assemblée nationale, à fixer un niveau de crédits fortement supérieur aux plafonds prévus par la première loi de programmation , de 23 % en AE et de 21 % en CP .

Par rapport au projet de programmation des finances publiques pour les années 2011-2013 6 ( * ) , un écart demeure mais il est ramené à 5 % en AE et en CP. La différence s'explique principalement par un mode de calcul distinct : le présent projet de loi de finances utilise le périmètre courant de la mission tandis que la programmation a recours au périmètre constant de l'exercice 2010.

Le tableau suivant permet de comparer les écarts à l'égard des deux programmations pluriannuelles, qui ont pour particularité de se chevaucher en 2011, la seconde procédant - à compter de son entrée en vigueur - à l'abrogation de la première.

Programmation 2009-2013 des crédits de la mission

(en milliards d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

Autorisations d'engagement

3,22

2,93

2,92

3,42

3,41

3,32

Crédits de paiement

3,48

3,16

3,03

3,50

3,44

3,36

Pour mémoire AE

PLF 2011 CP

3,59

3,67

Source : commission des finances d'après la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009-2011 et le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014


* 1 Soit 2,66 milliards d'euros en AE et 2,75 milliards d'euros en CP en 2011.

* 2 Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

* 3 Rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques, juin 2009, page 51.

* 4 Ce montant est à rapprocher de l'ensemble du total des ouvertures sur l'exercice 2009, 935 millions d'euros en AE et 837,71 millions d'euros en CP, soit une augmentation respective de 29 % et 24,1 % par rapport aux dotations prévues en LFI pour 2009. Cf. infra , l'analyse de l'exécution 2009.

* 5 Ce dispositif vise le soutien de la trésorerie des exploitants agricoles en difficulté, dans le cadre de l'ouverture d'une procédure de redressement, en vue du rétablissement de la viabilité de leur exploitation.

* 6 Projet de loi, modifié par le Sénat, de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (n° 13, 2010-2011).

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