C. LE PROGRAMME 135 « DÉVELOPPEMENT ET AMÉLIORATION DE L'OFFRE DE LOGEMENT »

Le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » est sous la responsabilité du directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature. Il regroupe les interventions de l'Etat pour la construction de nouveaux logements et l'amélioration du parc existant , c'est-à-dire, pour l'essentiel, les aides à la pierre , certaines dépenses de soutien pour les programmes « logement » de la mission « Ville et logement » et le financement du droit au logement opposable (Dalo) .

1. Une restructuration du programme qui reste inachevée

La présentation par actions du programme 135 connaît depuis plusieurs lois de finances des ajustements successifs.

Une éphémère sixième action intitulée « Délégués du préfet dans les quartiers » avait été créée pour le budget 2009.

En loi de finances 2010, les crédits de titre 2 correspondant aux moyens en personnel des programmes « logement » de la mission « Ville et logement » ont été transférés de l'action 5 « Soutien » au programme 217 de la mission « Ecologie, développement et aménagements durables », alors que les moyens en personnel du secrétariat général du comité interministériel des villes et les délégués du préfet l'étaient vers le programme 124 de la mission « Solidarité et insertion ».

Le projet de budget pour 2011 voit la création d'une nouvelle action : 7 « Garantie des risques locatifs » regroupant les crédits budgétaires ouverts pour permettre le remboursement par l'Etat à Action Logement, chargé de la gestion du fonds GRL, des frais occasionnés par les publics dont la charge lui revient, dans le cadre de la nouvelle version de ce dispositif mis en place en décembre 2009. Une dotation de 16 millions d'euros en AE=CP est prévue à ce titre.

La garantie des risques locatifs (GRL)

Ce dispositif est destiné à faciliter l'accès à un logement locatif d'un plus grand nombre de locataires. Il est basé sur la souscription facultative par les bailleurs d'un contrat d'assurance garantissant le risque d'impayés de loyers et les dégradations locatives auprès de l'un des assureurs adhérents au dispositif.

Est éligible à la GRL tout locataire dont le taux d'effort (rapport entre le montant des ressources - qui incluent, le cas échéant, les aides personnelles au logement perçues par le locataire - et le montant du loyer et des charges et taxes locatives) est inférieur ou égal à 50 %, indépendamment de la nature de son contrat de travail et de la stabilité de son revenu.

La répartition des publics entre Action logement et l'Etat répond aux règles suivantes :

Locataires non précaires

Locataires précaires*

Taux d'effort

Salariés secteur Action Logement

Autres

Salariés secteur privé non agricole**

Autres

0 à 28 %

Autres ménages éligibles

Eligibles Action Logement

Eligibles Etat

28 à 50 %

Eligibles
Action Logement

Eligibles Etat

> 50 %

Non éligibles au contrat GRL

* Définition : l'une des personnes du ménage est en contrat de travail non CDI après période d'essai, bénéficiaire d'un minima social, demandeur d'emploi indemnisé ou étudiant non salarié.

** Ainsi que les jeunes de moins de 30 ans en situation ou recherche d'emploi ou les étudiants boursiers.

Source : réponses au questionnaire budgétaire 2011

Votre rapporteur spécial observe que le schéma de financement de la GRL, qui repose sur un système très complexe de compensations financières versées aux assureurs , destiné à couvrir l'éventuelle sur-sinistralité liée à l'ouverture très large des critères d'éligibilité, ne permet pas de maîtriser a priori l'évolution de la charge financière qui pourrait incomber à l'Etat. Il conviendra donc d'être extrêmement vigilant pour éviter toute dérive financière du dispositif de la GRL .

Les premières estimations envisagent une montée en puissance rapide du dispositif :

Estimation du coût de la GRL sur la période 2010-2012

(en nombre de logements et millions d'euros)

2010

2011

2012

Nombre de logements couverts

320 000

430 000

500 000

Locataires éligibles Action logement

43 520

102 340

166 600

Locataires éligibles Etat

20 480

48 160

78 400

Compensations versées par l'UESL

43 M€

101 M€

164 M€

Compensations versées par l'Etat

16 M€

37 M€

Source : réponses au questionnaire budgétaire 2011

Outre la nouvelle action créée pour 2011, le programme 135 est découpé en cinq actions :

L'action 1 « Construction locative et amélioration du parc » regroupe les subventions pour le financement du logement locatif social et les aides à la réalisation d'aires d'accueil des gens du voyage.

L'action 2 « Soutien à l'accession à la propriété » comprend les commissions versées au titre des frais de gestion du dispositif de garantie de l'accession sociale à la propriété, de la gestion des prêts à 0 % et des éco prêts à taux zéro.

L'action 3 « lutte contre l'habitat indigne » ne comporte comme en 2010 aucun crédit, le financement de l'ANAH reposant désormais sur des ressources extra-budgétaires.

L'action 4 « Réglementation de l'habitat, politique technique et qualité de la construction » regroupe les financements destinés aux études liées à la qualité de la construction et aux frais de contentieux, consécutifs en particulier à la mise en oeuvre du Dalo.

L'action 5 « Soutien » regroupe des crédits d'études, de communication et autres crédits supports résiduels ainsi que les crédits de fonctionnement liés à l'instruction des dossiers du Dalo.

Compte tenu de la similitude des objets visés par ces deux dernières actions, votre rapporteur spécial suggère leur fusion dans le cadre de la prochaine loi de finances.

2. Le difficile équilibre budgétaire du programme

Le programme 135 avait enregistré en 2010 une forte baisse des autorisations d'engagement et une nette progression des crédits de paiement. Celle-ci avait permis d'envisager la poursuite de l'effort d'apurement des dettes constituée à l'égard des organismes de logement social, amorcé sur l'exercice 2009. Le montant total des inscriptions de charges à payer était ainsi passé de 72 millions d'euros fin 2008 à 59,9 millions d'euros fin 2009.

Le projet de budget pour 2011 qui prévoit une augmentation sensible des autorisations d'engagement et une réduction importante des crédits de paiement est construit a priori sur un déséquilibre inverse, avec un écart de 40 millions d'euros sur l'action portant les aides au logement locatif social.

Ce déficit de crédits de paiement est, toutefois, plus que compensé par le biais contestable d'un apport de fonds de concours dont le montant estimé atteint au total 13,130 millions d'euros en autorisations de programme et 93,130 millions d'euros en crédits de paiement pour l'ensemble du programme 15 ( * ) .

Ces fonds de concours permettent ainsi :

- d'annuler l'écart entre AE et CP sur la « ligne fongible » par un apport de 80 millions d'euros en CP ;

- de pallier l'absence de crédits budgétaires sur la lutte contre l'habitat indigne, dont l'ANAH pourrait encore cette année se révéler dans l'incapacité d'assurer la charge à la place de l'Etat (10 millions d'euros en AE et CP) ;

- d'atténuer les effets de la nécessaire revalorisation du coût du contentieux lié au Dalo sur les dépenses de fonctionnement de l'administration centrale du logement (3,130 millions d'euros en AE et CP).

Les fonds de concours sont donc la clé de l'équilibre du financement du programme 135 pour 2011 . Leur origine et leur objet sont divers.

Les 80 millions d'euros affectés à l'action « Construction locative et amélioration du parc » sont une partie du produit de la nouvelle contribution à laquelle l'article 99 du projet de loi de finances assujettit les organismes HLM . Ils compensent la diminution des crédits budgétaires de l'Etat.

Les 10 millions d'euros destinés à la lutte contre l'habitat indigne devraient provenir de l' ANAH qui reversera ainsi à l'Etat les moyens d'exercer une compétence que celui-ci lui a pourtant transférée par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, qui a fait de l'Agence l'opérateur unique en matière de lutte contre l'habitat indigne.

Les fonds de concours rattachés à l' action 5 « Soutien » comprennent pour 130 000 euros les contributions habituelles de collectivités territoriales aux études locales sur le logement et pour un montant estimé de 3 millions d'euros des ressources nouvelles que le projet annuel de performances décrit comme « versées par différents partenaires de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) concourant à des projets ( campagnes de communication notamment), réalisés en collaboration pour la mise en oeuvre de la politique du logement ». Ce fonds de concours représente ainsi plus de 25 % de l'action concernée

Dans chacune de ces circonstances, votre rapporteur spécial considère que le passage par voie de fonds de concours ne constitue pas une nécessité mais une facilité permettant d'échapper aux règles budgétaires classiques et sans doute plus contraignantes.

Il s'interroge notamment sur le bien-fondé, au regard de la loi organique sur les lois de finances , de verser une partie du produit d'un impôt direct perçu au profit de l'Etat à un fonds ad hoc , qui en reversera une fraction au budget de l'Etat, sous forme de fonds de concours.

Evolution des crédits du programme 135 DAOL hors fonds de concours

(en euros)

Actions

AE

CP

LFI 2010

PLF 2011

LFI 2010

PLF 2011

1 Construction locative et amélioration du parc

485 506 253

509 000 000

+ 5%

604 325 020

469 000 000

- 22%

2 Soutien à l'accession à la propriété

4 700 000

4 700 000

0 %

4 700 000

4 700 000

0%

3 Lutte contre l'habitat indigne

0

0

0

0

4 Réglementation de l'habitat, politique technique et qualité de la construction

7 700 000

16 820 984

+ 118 %

7 700 000

16 820 984

+ 118%

5 Soutien

12 910 000

11 879 016

- 8%

12 910 000

11 879 016

- 8%

6 Garantie des risques locatifs

0

16 000 000

16 000 000

Total

510 816 253

558 400 000

+ 9 %

629 635 020

518 400 000

- 18 %

Source : projet annuel de performances « Ville et logement » annexé au projet de loi de finances 2011

Sous le bénéfice de ces apports complémentaires, le programme 135 devrait disposer des moyens suffisants pour financer un objectif de production de 120 000 logements locatifs sociaux nouveaux , se décomposant en 55 500 prêts locatifs à usage social (PLUS), 22 500 prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) et 42 000 prêts locatifs sociaux (PLS) agréés dont 1 000 réalisés par l'Association foncière logement (AFL).

3. La très forte revalorisation des conséquences financières du DALO

A la fin juin 2010, on comptait sur l'ensemble du territoire national, 165.548 dossiers déposés en vue de l'attribution d'un logement et 16 534 dossiers pour un hébergement, dans le cadre de la procédure du droit au logement opposable institué par la loi du 5 mars 2007. 37 % des dossiers « logement » avaient reçu une réponse positive des commissions de médiation, déclenchant l'obligation pour les préfectures de proposer au bénéficiaire un logement adapté à ses besoins dans un délai de trois ou six mois.

A l'issue de ce délai le demandeur peut engager une procédure contentieuse à l'issue de laquelle le juge peut enjoindre le relogement en accompagnant sa décision d'une astreinte.

Dans les deux premières années de son entrée en vigueur, la loi Dalo a eu des conséquences budgétaires du fait de la nécessité de financer le fonctionnement des commissions de médiation et d'assurer l' instruction des dossiers .

Les montants budgétés à ce titre, inscrits au programme 135, sont restés globalement stables et s'élèvent, pour le projet de budget 2011, à 4 692 717 euros en application de la règle d'une diminution de 10 % sur trois ans, dont 5 % dès 2011, des crédits de fonctionnement.

Votre rapporteur spécial observe que pour 2011 , la stabilité des dépenses de fonctionnement des commissions sera obtenue grâce au maintien à six mois du délai dérogatoire d'instruction des dossiers dans les grandes agglomérations. Pour 2012 , compte tenu de l'ouverture du Dalo à l'ensemble des demandeurs de logements sociaux non satisfaits dans les délais dits « normalement longs », il ne sera pas réaliste d'envisager une stabilisation des moyens des commissions de médiation et, a fortiori , une baisse.

L'application du Dalo entraine également des dépenses liées à son contentieux (paiement des astreintes, frais de justice, condamnations pour engagement de la responsabilité de l'Etat).

Votre rapporteur spécial s'était préoccupé en 2010 de l'absence de prise en compte des risques propres au droit au logement opposable et du maintien de la dotation pour frais de contentieux à un niveau de 700 000 euros.

Les bilans les plus récents font état d'une progression très rapide du montant des condamnations prononcées contre l'Etat.

Alors qu'à la fin de l'année 2009, le montant des astreintes liquidées s'élevait à 72 860 euros, il atteint 6,731 millions d'euros au 30 septembre 2010 et devrait dépasser 10 millions d'euros en année pleine.

Une inscription budgétaire spécifique au contentieux Dalo, à hauteur de 9,30 millions d'euros en AE=CP a donc été introduite par le projet de budget pour 2011 et vient s'ajouter à la dotation de 700 000 euros prévue pour les autres contentieux de l'habitat.


* 15 A titre de comparaison, le montant total des fonds de concours sur le programme 147 pour le budget 2010 s'élevait à 130 000 euros, identique au montant 2009.

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